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Návrh uznesenia - B8-1354/2016Návrh uznesenia
B8-1354/2016
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PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur la situation des Rohingyas au Myanmar

13.12.2016 - (2016/3027(RSP))

déposée avec demande d'inscription à l'ordre du jour d'un débat sur des cas de violation des droits de l'homme, de la démocratie et de l'état de droit
conformément à l'article 135 du règlement

Marie-Christine Vergiat, Younous Omarjee, Merja Kyllönen, Barbara Spinelli, Lola Sánchez Caldentey, Tania González Peñas, Estefanía Torres Martínez, Xabier Benito Ziluaga, Miguel Urbán Crespo, Dimitrios Papadimoulis, Kostadinka Kuneva, Kostas Chrysogonos, Stelios Kouloglou au nom du groupe GUE/NGL

Voir aussi la proposition de résolution commune RC-B8-1345/2016

Postup : 2016/3027(RSP)
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B8-1354/2016
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B8-1354/2016
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B8‑1354/2016

Résolution du Parlement européen sur la situation des Rohingyas au Myanmar

(2016/3027(RSP))

Le Parlement européen,

– vu ses précédentes résolutions sur le Myanmar et sur les Rohingyas, y compris celles du 7 juillet 2016  et du 21 mai 2015 sur les charniers découverts en Thaïlande

– vu la Déclaration universelle des droits de l'Homme,

–  vu les Pactes international relatif aux droits civils et politiques et aux droits économiques, sociaux et culturels de 1966,

–  vu la convention des Nations unies relative au statut des réfugiés de 1951 et son protocole de 1967 et la Convention de New York relative au statut des apatrides, 

–  vu la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

–  vu la Convention de New York relative au statut des apatrides,

–  vu la Convention relative aux droits de l’enfant,

–  vu la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée ;

–   vu la Convention sur 1’é1imination de toutes les formes de discrimination à 1’égard des femmes,

– vu la résolution 1325 du Conseil de sécurité de l’ONU sur les femmes, la paix et la sécurité,

– vu les résolutions du Conseil des droits de l'homme des Nations unies et notamment celle du 23 mars 2016 et le rapport  « Situation des droits de l’homme au Myanmar » adopté à la 32ème session du Conseil des droits de l’Homme de l’ONU,

–  vu les conclusions du Conseil du 20 juin 2016 sur la stratégie de l'Union européenne pour le Myanmar / la Birmanie

– vu le communiqué conjoint de Mme Federica Mogherini, Haute représentante de l'Union et vice-présidente de la Commission et du Conseil, "Elements for an EU strategy vis-à-vis Myanmar/Burma: a special partnership for democracy, peace and prosperity" du 20 juin 2016 ;

– vu l’accord sur la protection des investissements UE-Myanmar en cours de négociation,

– vu les rapports récurrents des ONG sur la situation des droits de l’Homme au Myanmar et en particulier sur les Rohingyas,

–    vu l'article 135, de son règlement,

 

A. considérant que plus d’un an après la nette victoire du parti et de la LND (Ligue nationale pour la démocratie) et d’Aung San Suu Kyi, Prix Nobel de la paix, la persécution, les violences et discriminations contre les minorités et en particulier contre les Rohingyas persistent en Birmanie et dans la région tout particulièrement dans l’Etat du Rakhine ;

B. considérant que qu’à la suite d’une attaque de postes de police à la frontière avec le Bangladesh par des groupes armés le 9 octobre dernier, le gouvernement birman a lancé une vaste opération militaire dans le Nord-Ouest de la Birmanie ; considérant également la reprise des combats avec des groupes armés dans d’autres zones frontalières du pays ; considérant que des soldats, des policiers, mais également des civils sont morts ; considérant que des milliers de personnes fuient leurs villages ;

C. considérant que selon l’ONU, pas moins de 30 000 personnes ont été déplacées depuis le lancement des opérations dans le Rakhine ; considérant que selon le Haut-Commissariat pour les réfugiés des Nations unies (HCR), la Birmanie se livre à un "nettoyage ethnique" ;

D. considérant que les Rohingyas sont victimes de viols en réunion, tortures, meurtres et massacres qui seraient également perpétués par l’armée et la police des frontières dans ces opérations ; considérant que des centaines de foyers ont été brûlés ou détruits ; considérant que les autorités birmanes nient toute implication dans ces violations des droits de l’Homme et ces actes de violences ;

E. considérant que le HCR presse le gouvernement birman de permettre immédiatement l’accès humanitaire et l’aide aux Rohingyas conformément à ses obligations internationales ; considérant également que les restrictions d’accès à l’État du Rakhine pour la presse indépendante imposées depuis le 9 octobre ne sont toujours pas levées dans les faits ;  

F. considérant que dans l’Etat de Rakhine, un des plus pauvres de Birmanie, les Rohingyas constituent environ 35 % de la population ; considérant qu’ils sont privés des droits les plus fondamentaux tant culturels, économiques que sociaux ; considérant que les Rohingyas sont souvent privés d’une réelle liberté de circulation et ne peuvent même plus, dans certains endroits accéder à la forêt et à la rivière qui leur permettaient auparavant de s’approvisionner en eau et en nourriture et que 140 000 d’entre eux s’entassent depuis dans des camps de déplacés où les conditions sont catastrophiques y compris pour l’accès à des services de base les laissant en proie à la malnutrition et aux risques de maladies contagieuses et d’épidémie ;

G. considérant que la reprise des affrontements met à mal les efforts de paix, de prospérité et d’unité du pays déployés depuis l’arrivée au pouvoir de Aung San Suu Kyi en particulier à l’occasion de la Conférence du XXIème siècle de Panglong du 31 août 2016 et menace directement la deuxième série de pourparlers de paix prévus pour février 2017 alors que la Conseillère spéciale était parvenue à rassembler de nombreuses composantes du peuple birman, dont huit signataires et sept non-signataires de l'Accord national de cessez-le-feu ;

H. considérant que dans ses récentes allocutions, la Conseillère spéciale reconnaît l’urgence d’un retour à la stabilité et à la réconciliation nationale dans son pays mais sans jamais cibler directement la situation critique des Rohingyas; considérant qu’elle a demandé l’appui de l’ex-secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan qui a mis en place une commission de travail dans le cadre de sa fondation sur les enjeux de développement dans l’Etat du Rakhine, composée de représentants des autorités birmanes en charge des droits de l’Homme et de la société civile birmane ainsi que d’experts auprès d’agences de l’ONU ; considérant que les résultats des travaux de cette commission ne seront pas rendus avant un an ;

I. considérant que les mouvements anti-Rohingyas, tels que l'Association pour la protection de la race et de la religion, mouvement Ma Ba Tha, fer de lance d’un bouddhisme radical, profitent de ces actes de violence pour exacerber les tensions, inciter à la haine  et chasser les Rohingyas notamment vers le Bangladesh voisin ; considérant que des Rohingyas fuient également vers la Malaisie, l’Indonésie ou encore la Thaïlande ;

J. considérant que le Bangladesh procède à des arrestations et à des expulsions des réfugiés rohingyas ; considérant que le HCR demande au Bangladesh d’ouvrir ses frontières aux civils birmans fuyant les violences ; considérant qu’entre le 9 octobre et le 2 décembre environ 21 000 Rohingyas seraient arrivés dans le district de Cox's Bazar au Bangladesh, selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) ; considérant que des milliers de Rohingyas, dont des femmes et des enfants, seraient piégées sur une île au milieu de la rivière Naf ; considérant que le pays accueille déjà quelques 230 000 Rohingyas, « legs » de vagues de violences successives antérieures mais que seulement 30 000 d’entre eux sont officiellement enregistrés comme réfugiés ; considérant que les autres se refusent à tenter toute procédure de reconnaissance de leur statut de réfugiés de peur de se voir renvoyés en Birmanie ; considérant que notamment dans le camp de Teknaf, les Rohingyas survivent dans des conditions indignes ;

K. considérant que les Rohingyas n’ont pas non plus d’accès légal au travail et à l’éducation en Malaisie ; considérant qu’ils travaillent clandestinement, payés en moyenne 250 dollars par mois ; considérant que la Birmanie a cessé d'émettre des permis pour autoriser ses citoyens à travailler en Malaisie, en guise de représailles à la demande du ministre malaisien de revoir l'adhésion de la Birmanie à l'Association des Nations d'Asie du Sud-Est (Asean) ;

L. considérant que les Rohingyas fuient toujours par la mer afin d'échapper aux persécutions, périssent lors du naufrage de leur embarcation ou sont victimes de trafics d’êtres humains ; considérant que les Rohingyas sont considérés comme des "immigrants illégaux" notamment en Thaïlande où des charniers humains sont régulièrement retrouvés ;

M. considérant que l’architecture juridique birmane institutionnalise la discrimination des minorités et fait notamment des Rohingyas des apatrides, leur carte d’identité temporaire (white card) ayant été déclarées expirées en mars 2015 et leurs enfants étant privés de certificats de naissance depuis 2012 ;

N. considérant que l'armée birmane détient toujours un pouvoir disproportionné sur les affaires du pays qui freinent les changements constitutionnels et législatifs nécessaires à garantir l’État de droit en Birmanie ; considérant que certains articles de la Constitution consacrent l’impunité des chefs militaires et civils ; considérant notamment que son article 432 prévoit qu’aucune action en justice ne peut être intentée contre les membres des organes administratifs, civils et militaires pour des actes accomplis dans le but de « restaurer rapidement la sécurité, la stabilité, la paix et la tranquillité de la communauté et la prévalence de la loi et de l’ordre » ;

O. considérant que le refus réitéré d’accorder la nationalité et les droits connexes tel que le droit de vote au million de Rohingyas et à d’autres minorités reste très préoccupant ; considérant en outre que la liberté de pensée de conscience et de religion est mise en cause par l’obligation de certificat de conversion délivré par les autorités locales ;

P. considérant que des pans entiers de la législation birmane et de son application violent toujours des droits internationalement protégés y compris en matière de libertés d'expression et de réunion, de liberté de pensée, de conscience et de religion ainsi que les droit des femmes ; considérant que les incitations à la haine contre les minorités religieuses, restent systématiquement impunis ;

Q. considérant que nombre d’enfants rohingyas ne reçoivent pas de certificat de naissance depuis les années 1990, ce qui compromet leur inscription dans les écoles publiques et l’obtention de documents d’identité; considérant que la malnutrition des jeunes enfants auprès de ces populations vulnérables demeurent un enjeu préoccupant ;

 

 

1. condamne les violences et violations graves et systématiques des droits de l’Homme en Birmanie à l’endroit des minorités birmanes, en particulier des Rohingyas ; souligne la situation critique et extrêmement vulnérable des réfugiés Rohingyas en Asie du Sud-Est ;

2. condamne tout particulièrement la flambée de violences depuis le lancement des opérations militaires dans le Nord-Ouest de la Birmanie; soutient la Conseillère spéciale dans son engagement pour un processus de paix inclusif en vue des pourparlers de paix de février prochain ;

3. demande instamment aux autorités birmanes d'enquêter de manière impartiale et transparente sur tous les cas présumés de viols en réunion, tortures, meurtres et massacres et autres violations des droits de l’Homme perpétrés par l’armée, la police et les forces paramilitaires ; note la nécessité de revoir les articles de la Constitution consacrant l’impunité des chefs militaires et civils ; déplore que le pays reste sous une mainmise militaire particulièrement préoccupante et handicapante pour son avenir ; reconnaît le défi majeur que représente la transition à un pouvoir pleinement civil ;

4. invite de nouveau le gouvernement du Myanmar à accorder aux agences des Nations unies et aux ONG humanitaires, ainsi qu'aux journalistes et aux diplomates, un accès sans entrave à toutes les régions du pays, y compris à l'État de Rakhine, et à permettre à l'aide humanitaire d'atteindre sans restriction toutes les communautés victimes de violence ; encourage les autorités birmanes à poursuivre les efforts de retour et réinstallation des populations déplacées en vue de solutions durables, en conformité avec les principes internationaux ;

5. attire l’attention sur les discriminations notamment institutionnelles à l’encontre les Rohingyas qui mettent à mal y compris la paix et la prospérité régionale ; prie à cet égard le gouvernement du Myanmar d’engager une procédure régulière et transparente en vue d’accorder une pleine nationalité à l’ensemble des birmans et notamment aux Rohingyas, en révisant la loi de 1982 relative à la nationalité, conformément aux normes internationales ; demande d’abroger plus généralement toute disposition discriminatoire sur la base de l’ethnicité et de la religion ;

6. se déclare préoccupé par l’influence croissante de mouvements intégristes et notamment des ultranationalistes bouddhistes qui alimentent des sentiments discriminatoires et réclament l’adoption de politiques ou de lois discriminatoires ; rappelle que la Constitution de 2008 proscrit l’instrumentalisation de la religion à des fins politiques ; appelle les autorités à condamner publiquement toute déclaration raciste ; encourage le gouvernement birman à donner la priorité aux mesures préventives contre les discriminations, notamment par des campagnes d’éducation et d’information, la formation des juges et des agents chargés du maintien de l’ordre et le dialogue culturel et social ;

7. rappelle que les gouvernements et les autorités concernées de tous les pays de la région doivent respecter pleinement le principe du non-refoulement vis-à-vis des réfugiés rohingyas et les protéger, en conformité avec leurs obligations internationales et avec les normes internationales en matière de droits de l'Homme, notamment en signant la Convention relative au statut des réfugiés, dite Convention de Genève, et son protocole de 1967 et la Convention de New York relative au statut des apatrides, à ouvrir leurs frontières aux demandeurs d'asile notamment rohingyas et à leur fournir au moins une protection temporaire ;

8. prie instamment le gouvernement du Bangladesh de permette aux Rohingyas de passer la frontière pour venir chercher asile, au moins jusqu'à ce que la situation dans l’Etat du Rakhine se stabilise ; demande aux Nations unies, à l'Union européenne et aux autres bailleurs de fonds des projets de secours aux migrants et aux réfugiés à Cox's Bazar d'envoyer un soutien supplémentaire au Bangladesh pour s'occuper dignement du récent afflux de réfugiés du Myanmar ;

9. souligne la nécessité de s'attaquer aux racines des discriminations qui frappent de longue date la population rohingya ; demande de consacrer, défendre et garantir l'accès aux droits économiques et sociaux fondamentaux, notamment l’amélioration des possibilités d’éducation et de l’accès aux soins de santé pour toutes et tous, particulièrement dans l’Etat de Rakhine et pour les jeunes déplacés et les enfants vivant dans les camps ; rappelle, à ce titre, les conclusions du Conseil du 20 juin 2016 sur les efforts supplémentaires à déployer en termes de santé et d’éducation;

10. prend note de la mise en place d’une commission de travail par la Fondation Kofi Annan à la demande de Aung San Suu Kyi sur les enjeux de développement dans l’Etat du Rakhine ; invite les experts à se pencher également sur les violations des droits de l’Homme contre les Rohingyas ; souligne parallèlement que les demandes de visite de la rapporteuse spéciale sur les droits des peuples autochtones et du Représentant du Secrétaire général pour les personnes déplacées dans leur propre pays du Conseil des droits de l'homme sont pour le moment restées sans réponse de la part du gouvernement birman ;

11. rappelle plus largement ses inquiétudes sur certains pans de la législation qui enfreignent les conventions internationales sur les droits de l'Homme, en particulier dans la loi sur les rassemblements et les manifestations pacifiques et les quatre projets de lois sur « la protection des races et des religions » adoptées en septembre 2015 : la loi sur la monogamie, la loi limitant la conversion, la loi contrôlant le mariage des femmes bouddhistes et la loi restreignant les naissances dans certaines régions ;

12. souligne tout particulièrement que les femmes Rohingyas sont victimes de discriminations multiples, y compris d’abus sexuels et de stérilisations forcées ;

13. demande de garantir le plein respect des droits à la liberté d’expression, de réunion, d’association et de la presse, de cesser les arrestations et détentions arbitraires et de renoncer à imposer des condamnations disproportionnées à ceux qui exercent ces droits, notamment les acteurs de la société civile, figures politiques et journalistes qui s’efforcent de protéger les droits des populations;

14. est gravement préoccupé par la situation des personnes LGBTI au Myanmar, qui sont toujours criminalisées en vertu de l'article 377 du Code pénal et continuent d'être soumises à des arrestations arbitraires, des actes d'intimidation, des agressions physiques et sexuelles et des refus d’accès aux services de santé; encourage les autorités à modifier l'article 377 pour qu'il ne s'applique qu'aux cas de rapports sexuels non consentis;

15. appelle le Myanmar à ratifier cinq des huit Conventions internationales clés qu’il a déjà signées et notamment la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et les Pactes internationaux de 1966 ;

16. souligne que le système de préférences généralisées (SPG) européen est subordonné au respect des libertés fondamentales et des droits de l’Homme ; rappelle que l’accord de protection des investissements UE-Myanmar en cours de négociation doit respecter et promouvoir les droits de l’Homme et les normes internationales les plus hautes y compris en matière sociale, notamment la Convention 87 de l’OIT et que son chapitre « développement » doit veiller à ne pas exempter les entreprises européennes de ce respect ;

17. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, à la haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, aux gouvernements et aux parlements des États membres, aux gouvernements du Myanmar ainsi que de Malaisie et Thaïlande, au Secrétaire général des Nations unies, à l'Assemblée générale des Nations unies.