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Procédure : 2007/2255(INI)
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Cycle relatif au document : A6-0080/2008

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A6-0080/2008

Débats :

PV 22/04/2008 - 16
CRE 22/04/2008 - 16

Votes :

PV 23/04/2008 - 4.10
CRE 23/04/2008 - 4.10
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P6_TA(2008)0173

Compte rendu in extenso des débats
Mardi 22 avril 2008 - Strasbourg Edition JO

16. La politique chinoise et ses effets sur l’Afrique (débat)
Procès-verbal
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  Le Président. − Le point suivant est le rapport (A6-0080/2008) d’Ana Maria Gomes, au nom de la commission du développement, sur la politique chinoise et ses effets sur l’Afrique (2007/2255(INI)).

 
  
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  Ana Maria Gomes, rapporteur. − (PT) Monsieur le Président, la quête effrénée de pétrole, de ressources naturelles et de nouveaux marchés de la Chine en Afrique suscite des craintes au sujet des conséquences de la présence grandissante de Beijing sur ce continent et des incidences respectives pour les politiques européennes. L’Europe ne peut pas se mettre à pointer la Chine du doigt sous l’effet de la peur, tout comme elle ne peut pas se permettre de prendre part à une concurrence sans scrupules en évitant des méthodes et des critères qui sont dans l’intérêt même de Beijing. L’Europe comme la Chine sont obligées de contribuer à la réalisation des objectifs du millénaire pour le développement: réduction de la pauvreté et résolution des conflits en Afrique. Les deux régions doivent reconnaître que la promotion du développement durable et de la bonne gouvernance est le seul moyen d’assurer la durabilité de leurs intérêts et de leurs investissements et de faire en sorte qu’ils soient considérés comme légitimes en Afrique.

Dans le rapport, nous avons essayé d’analyser la présence de la Chine en Afrique de façon objective, en tenant compte à la fois des impacts positifs et négatifs. Sur la base de différentes recommandations d’action spécifiques, il contient deux messages politiques essentiels: premièrement, l’UE doit donner une réponse coordonnée aux défis soulevés par la politique soi-disant «inconditionnelle» de la Chine. Cette réponse ne peut abandonner les principes européens. L’UE ne doit pas dévier de sa politique de coopération au développement, en particulier en ce qui concerne la conditionnalité relative aux droits de l’homme. Il ne peut en effet y avoir de bonne gouvernance en l’absence de respect des droits de l’homme, et sans bonne gouvernance, et l’État de droit que cela implique, il n’y aura pas de développement durable en Afrique ni dans aucune autre région du monde. Deuxièmement, l’Europe doit associer la Chine dans les discussions sur leurs politiques africaines respectives, mais cette coopération ne peut bien évidemment pas se faire sans consulter les Africains. Cette participation trilatérale exige que l’on soutienne comme il se doit le rôle que doivent jouer les institutions africaines, comme l’Union africaine, le NEPAD, les autres institutions régionales et les gouvernements de même que les parlements nationaux. L’Europe doit par conséquent accroître son aide en faveur du renforcement de la société civile africaine afin d’obliger les gouvernements respectifs à rendre compte de leur action.

Dans ce rapport, nous recommandons à l’UE de ne pas laisser passer les occasions de parler franchement avec la Chine, ou de la Chine en Afrique, surtout lorsque ces discussions contiennent des critiques faites en privé ou en public. La Chine veut être considérée comme un acteur responsable en Afrique. Pourtant, elle invoque souvent le discours de la non-ingérence pour tenter de justifier des actes inacceptables, comme son laxisme persistant à l’égard du gouvernement soudanais, qui a bloqué l’envoi d’une force hybride ONU-Afrique – qui aurait dû être au Darfour depuis bien longtemps – ou l’envoi plus récent et dégoûtant d’armes au régime de Mugabe à bord d’un navire que les pays voisins du Zimbabwe empêchent – à juste titre – de déposer son chargement. En réalité, tout ce que fait la Chine en Afrique a un impact politique, qu’il soit positif ou négatif.

En outre, la Chine montre qu’elle est une puissance pragmatique qui apprend vite. Il est par conséquent vital que l’Europe ne cesse pas d’essayer de faire comprendre à Beijing que ce que l’on attend d’un membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, comme la Chine, est en réalité de contribuer à promouvoir les principes et les objectifs de l’ONU.

Dans ce rapport, nous proposons que l’UE encourage la Chine à accroître sa participation à des réunions bilatérales entre bailleurs de fonds et à adopter des critères et des lignes directrices spécifiques acceptés au niveau international concernant la transparence de l’aide, les industries extractives, la bonne gouvernance, la protection de l’environnement, les droits des travailleurs, etc., afin de s’assurer qu’elle contribue vraiment à la réduction de la pauvreté, aux objectifs du millénaire pour le développement et à la promotion de la paix et de la sécurité en Afrique.

L’Europe doit néanmoins aussi se regarder dans le miroir et tirer des leçons de ses propres erreurs en ce qui concerne l’Afrique. Les États membres doivent tenir leurs promesses officielles en matière d’aide au développement et le fait de réduire l’aide et les objectifs à atteindre ne fera que contribuer à souligner les mérites de la Chine en ce qui concerne l’offre de financements rapides à l’Afrique. L’Europe doit améliorer l’efficacité de son aide et veiller à la cohérence entre ses différentes politiques. Pour ce faire, elle ne peut plus fermer les yeux sur les crimes commis par certains régimes oppressifs africains avec lesquels elle continue de traiter, comme d’habitude, en désaccord flagrant avec ses critères et principes proclamés.

Pour conclure, Monsieur le Président, j’aimerais remercier les rapporteurs fictifs et mes autres collègues pour leur excellente coopération. Leurs amendements ont fortement contribué à enrichir ce rapport. J’espère que nous pourrons poursuivre demain dans un tel consensus général, d’autant plus qu’il n’y a que quelques amendements à adopter. J’en ai moi-même déposé trois: deux concernent des corrections mineures et le troisième vise à réaffirmer la position du Parlement européen, qui demande que le Code de conduite européen en matière d’exportation d’armes devienne juridiquement contraignant. Cela permettrait d’éviter de répéter l’appel contenu au paragraphe 66 au paragraphe 62.

 
  
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  Louis Michel, membre de la Commission. − (FR) Monsieur le Président, Madame le rapporteur, Mesdames, Messieurs, Honorables membres, je voudrais, tout d'abord, vous féliciter, Madame Gomez, pour cet excellent travail sur un sujet pourtant délicat, difficile, voire controversé, et c'est bien normal.

Cependant, je souscris à de très nombreuses recommandations que vous faites sur la politique que l'Union européenne devra adopter face à la montée en puissance de la Chine en Afrique. L'Union européenne et la Chine ont en fait un certain nombre de points communs fondamentaux dans leurs relations à l'Afrique. Ce sont deux acteurs, d'abord, qui ont compris peut-être plus ou, en tout cas, plus tôt que les autres, le grand potentiel de l'Afrique.

L'Union européenne et la Chine sont également parmi les plus grands partenaires commerciaux investissant en Afrique, respectivement au premier et au troisième rang mondial. Cette réalité justifie naturellement beaucoup plus de coopération, de concertation et peut-être de stratégies communes entre la Chine et l'Europe à propos de l'Afrique, mais avec l'Afrique. Vous l'avez dit, je partage ce point de vue.

Je voudrais donc vous parler aujourd'hui des points que je considère prometteurs afin d'engager la Chine et nos partenaires africains dans une coopération trilatérale. Je voudrais aussi partager avec vous mes doutes et mes interrogations sur d'autres points et, enfin, vous informer sur la suite que j'entends donner à votre rapport.

D'abord, l'Afrique vit à l'heure de l'économie mondiale et de la globalisation. Elle affirme de plus en plus sa dimension d'acteur international et global, elle se mobilise sur les grands thèmes globaux. Elle a tissé un vaste réseau de partenariats à travers le monde avec la volonté ferme de refonder ses relations. À dire la vérité, elle met maintenant, parfois maladroitement, d'ailleurs, mais elle a raison de le faire, elle met maintenant les partenaires en concurrence. C'est une réalité, et je dirais même que c'est juste et que c'est légitime, et ceci implique que ses partenaires adoptent enfin, une attitude moderne, confiante et loyale.

Cette nouvelle approche, je crois que l'Union européenne et la Chine sont sans doute prêtes à la mettre en œuvre et désireuses de le faire, peut-être pour des raisons différentes, mais clairement, elles sont prêtes à la mettre en œuvre. Nous sommes tous deux des partenaires majeurs de l'Afrique. Notre politique africaine est, certes, différente sur le plan des principes et des valeurs mais, sur le terrain, il est possible d'identifier un grand nombre d'intérêts partagés et de points de convergence. Par exemple, nous avons déjà commencé un dialogue sur la paix, la stabilité et le développement durable en Afrique. Mais nous devons, évidemment, aller plus loin avec le soutien important de nos amis africains, qui doivent jouer un rôle moteur dans ce dialogue. Ceci explique la démarche trilatérale que j'ai proposée l'année dernière et que vous semblez, d'ailleurs, largement partager, notamment lorsque vous proposez l'établissement d'une plateforme permanente.

Dans ce cadre, vous soulignez, à juste titre, l'importance de l'égalité et du respect mutuel qui doit être à la base de ce partenariat trilatéral. Et là, au risque évidemment d'ouvrir une controverse, là l'Europe doit comprendre qu'il n'est pas nécessairement très efficace, au stade actuel, et face à un partenaire comme la Chine, de s'ériger en maître en prétendant dicter unilatéralement nos conditions. Nous devons donc éviter toutes les généralisations pour créer une dynamique de dialogue et je pense qu'une fois qu'on aura ouvert ou qu'on aura réussi à ouvrir la dynamique de dialogue avec la Chine, nous pourrons, au travers de ce dialogue, aborder les questions d'état de droit, de démocratie, de gouvernance, c'est-à-dire tout ce qui fonde, en quelque sorte, les valeurs de l'Europe et toutes les sources d'inspiration de nos politiques.

Je suis d'accord avec vous, il faut surtout que nous passions par une politique européenne, aussi, plus efficace et peut-être surtout plus rapide, car c'est là le grand avantage des Chinois sur nous. Plus attrayante aussi, plus en phase avec les priorités réelles de nos partenaires africains. Je n'en veux qu'un exemple; nous sommes littéralement impuissants, en tant qu'institutions européennes, à mettre en œuvre des programmes ou des aides, ou des interventions dans toutes les situations de post-conflit. Nous avons eu le cas, par exemple, du Liberia, je vous donne ce cas-là, où nous avons un gouvernement issu d'élections légitimes, avec une Présidente qui a un véritable programme et qui veut le changement. Où en sommes-nous dans l'efficacité qu'il faudra apporter à ce pays pour montrer qu'il y a des dividendes de la paix, de la stabilisation et de la démocratie? Nulle part! Je le dis parce que j'en souffre quotidiennement.

Cette modernisation de la politique européenne envers l'Afrique a été ma priorité depuis le début de mon mandat et je crois pouvoir affirmer que nous avons fait déjà beaucoup de progrès, notamment avec l'établissement des partenariats stratégiques issus du Sommet de Lisbonne mais il reste, évidemment, encore énormément de choses à faire. La réduction de la pauvreté reste l'objectif principal de notre politique de développement, qui doit passer par la création de richesses et la croissance économique. Cette croissance économique, la Chine la vit au quotidien et cette expérience peut, évidemment, être profitable aux pays africains.

Mais, bien sûr, une croissance économique, quelle qu'elle soit, doit s'accompagner d'une politique active de redistribution si elle veut être efficace dans la lutte contre la pauvreté. J'ai eu l'occasion de le dire souvent, la croissance ne garantit pas le développement. Il faut la redistribution, et la redistribution, il faut un État solide pour cela. Il faut aussi une société vigilante, il faut une presse libre, il faut tout cela. Je pense que, dans ce domaine, l'Union européenne et la Chine ont un véritable rôle à jouer mais c'est un processus qui va prendre du temps et qui demande beaucoup d'efforts des uns et des autres.

C'est là que je voudrais vous faire part de certaines interrogations que moi, j'ai. Est-il, par exemple, vraiment réaliste, je n'en sais rien, est-il constructif, est-il utile, est-il peut-être même désirable, de commencer cette coopération en demandant fermement à la Chine d'adopter les orientations et les normes fixées par le CAP? J'en doute. Si ça marche tant mieux, mais j'en doute.

Les Africains ne me semblent, en tout cas, pas désireux outre mesure de voir la Chine s'engager dans cette voie précisément parce qu'ils cherchent des alternatives à la façon de faire de l'aide au développement en Europe. L'aide chinoise est appréciée justement parce qu'elle est plus rapide que l'aide européenne, qu'elle n'impose pas autant de contraintes qui finalement réduisent l'espace politique des Africains parce que, dans le fond, il y a quand même quelque chose. Il y a un malentendu quelque part. Très souvent on dit, "Vous Européens, vous imposez des conditions!" Ce n'est pas vrai. Notre coopération, les moyens que l'on débourse, ne sont pas liés à des conditions politiques. La nature, la modalisation de notre aide, oui. Pour de l'aide budgétaire, par exemple, s'il n'y a pas de bonne gouvernance, on ne fera pas d'aide budgétaire; dans un pays en conflit, on ne fera pas d'aide budgétaire. Mais ça ne nous empêche pas, même quand on n'est pas d'accord avec le pouvoir en place ou avec le régime, de faire de l'aide au développement ou de faire de l'aide humanitaire.

Ce qui est foncièrement différent, il y a une confusion-là, c'est que, avec les Chinois, la réactivité, le "disbursement" va beaucoup plus vite que nous, avec nos procédures, qui me rendent la vie quasiment impossible depuis presque 4 ans. C'est ça la réalité, c'est là que se trouvent la confusion et le malentendu, et je crois que cela aussi doit être dit.

Je partage bien sûr votre analyse. Il est important de voir l'aide chinoise s'aligner progressivement sur les priorités nationales africaines, sur leurs systèmes nationaux, en se coordonnant de préférence avec les autres partenaires sur place.

Il n'en reste pas moins qu'aujourd'hui, il est prématuré, peut-être même contre-productif, de vouloir forcer le cours des choses dans ce sens, et surtout, de vouloir le faire unilatéralement. Il s'agit d'un objectif de long terme mais, dans l'immédiat, je ne vois que trois domaines où notre coopération et notre dialogue pourraient se concentrer.

Un, l'établissement d'un dialogue ouvert et constructif entre nous, donateurs de longue date et la Chine, sur l'Afrique. Deux, nous pouvons échanger les expériences chinoises et africaines de développement avec les nôtres pour progresser ensemble dans l'agenda du développement. Un exemple concret: la Chine a développé un tas de programmes qui utilisent le photovoltaïque, par exemple. Il est clair que, sur un continent comme l'Afrique, il y là un espace de coopération trilatérale extraordinaire, voilà un exemple. J'en ai parlé au ministre du commerce que j'avais rencontré à une réunion à Tonga, et il est très ouvert là-dessus. Nous allons reparler de cela à Pékin puisque, quand je vous quitte, je pars à Pékin; donc nous allons reparler de ces questions-là.

Troisièmement, respecter scrupuleusement nos engagements quant à l'agenda de Paris. C'est toute la question de l'harmonisation de nos règles, et c'est toute la question de la division du travail et là j'appelle, j'exhorte le Parlement à nous aider, à pousser nos États membres à mettre en accord leurs actions avec leurs discours. Absolument tous les ministres du développement, tous les premiers ministres européens, tous, sans exception, sont d'accord pour dire "il vaut mieux diviser le travail, il faut faire plus de coordination pour être cohérents, etc.". Oui, mais quand on leur propose de véritables stratégies de division du travail, ils sont aux abonnés absents. Cela aussi, moi j'entends qu'on le dise parce que c'est une réalité. Vous l'aurez compris, mon objectif ne se limite pas à mener la Chine au sein du CAP, je vais bien au-delà en cherchant à trouver d'abord un terrain d'entente avec les multiples acteurs chinois en Afrique, y compris le gouvernement, afin de promouvoir le développement de l'Afrique.

Nous devons, Européens et Chinois, partir, évidemment, de l'agenda africain et apporter nos contributions, nos avantages respectifs, sans pour autant devoir déroger de notre part aux valeurs et principes qui ont assuré la stabilité, la paix et la prospérité à l'Europe pendant les derniers 50 ans. Cela ne fait pas de moi un rêveur ou un naïf, bien au contraire, il est important de reconnaître, comme vous le faites, que l'engagement de la Chine soulève des questions et parfois des inquiétudes en Afrique même. Moi aussi, je suis parfois inquiet évidemment, de la manière dont se développe la nature de la coopération avec la Chine, mais bon, c'est justement pour cela que je plaide pour un dialogue. Il est évident que la Chine poursuit en Afrique ses intérêts économiques, diplomatiques et stratégiques. L'Europe, trop souvent, a le grand tort de ne pas admettre qu'elle est tentée par la même chose et, plutôt que de se cacher et de se camoufler derrière des discours, parfois très hypocrites d'ailleurs, il vaudrait beaucoup mieux affirmer que l'Afrique est un continent qui a du potentiel, que c'est un continent privilégié dans ses relations avec l'Europe et que nous avons des intérêts communs à découvrir, à générer et à forger. Et je crois que ce serait la stratégie gagnant-gagnant parce que ce n'est que comme cela qu'on sortira de la relation pour moi, très négative, de bénéficiaire à donateur, parce qu'elle est toujours empreinte d'humiliation, de mépris, et qu'elle est toujours empreinte d'un sentiment de dépendance de l'un vis-à-vis de l'autre, c'est-à-dire du plus faible vis-à-vis du plus fort.

Donc, je l'ai dit, après-demain, je serai à Pékin et je vais essayer, Madame Gomez, de déjà donner corps, timidement, à un début d'interprétation positive de votre très très bon rapport.

 
  
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  Bastiaan Belder, rapporteur de l’avis de la commission des affaires étrangères. − (NL) Monsieur le Président, en ma qualité de rapporteur de l’avis de la commission des affaires étrangères relatif à l’excellent rapport de Madame Gomes, j’aimerais souligner les idées suivantes mentionnées dans cet avis.

Les autorités chinoises doivent respecter les principes de démocratie, de bonne gouvernance et les droits de l’homme dans leurs relations avec l’Afrique. La commission des affaires étrangères déplore par conséquent la coopération purement pragmatique de la Chine avec les régimes répressifs en Afrique.

La présence commerciale de la République populaire sur le territoire africain a des conséquences écologiques auxquelles la Chine doit faire face de façon responsable. La presse occidentale publie en effet des rapports franchement alarmants sur l’exploitation de l’environnement naturel, en particulier dans la région du delta du Congo. Cela va de l’exploitation pétrolière et de la surpêche à la déforestation dans une réserve naturelle officielle.

La commission des affaires étrangères déplore tout autant le fait que Beijing exclut un certain nombre d’États africains du partenariat stratégique entre la Chine et l’Afrique en raison tout simplement de leurs contacts diplomatiques avec Taïwan. Cette attitude de la part des Chinois est non seulement contraire à son propre principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des pays tiers, mais elle ne cadre pas non plus avec l’actuel rapprochement entre Taïwan et Beijing.

 
  
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  Gay Mitchell, au nom du groupe PPE-DE. – Monsieur le Président, la Chine a commencé à avoir des activités commerciales et à évoluer dans les années 1980 et elle a sorti 400 millions de ses citoyens de la pauvreté, comme l’indique l’excellent rapport de Madame Gomes. Quelle autre région du monde a sorti 400 millions de personnes de la pauvreté sur un laps de temps similaire? Nous devons être réalistes sur cette question. C’est là l’une des questions dont nous devons discuter ce soir.

Bon nombre d’autres régions du monde profité des flammes du dragon chinois. La reprise économique de beaucoup de pays d’Amérique latine et d’Afrique est en grande partie due à l’ascension économique de la Chine. Les activités chinoises, qu’elles concernent l’investissement, le commerce ou l’aide en Afrique, se sont développées à un rythme fascinant au cours de ces dernières années. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. La valeur des échanges chinois avec l’Afrique est passée de 2 milliards USD en 1999 à près de 40 milliards en 2005. Comme l’a indiqué la Commission, la Chine est à présent le troisième partenaire commercial de l’Afrique.

L’implication de la Chine en Afrique ouvre de nombreuses possibilités. Il convient toutefois de considérer les conséquences de son développement d’un œil critique. Le potentiel de développement et les conditions de développement représentent deux facettes d’un même problème. L’un n’est pas possible sans l’autre. Il est vrai que le potentiel de développement est énorme dans bon nombre de pays d’Afrique, mais pendant des décennies, les gouvernements africains corrompus ont fait preuve de mépris pour leurs populations et les ont empêchées de se développer. Ce sont les autorités politiques africaines qui décideront si la participation de la Chine doit être considérée comme une bonne chose ou comme une malédiction pour l’Africain moyen.

Le Congo est un parfait exemple de région au potentiel de développement énorme. La production par habitant s’élève à USD 714 par an. Les Congolais ont énormément souffert. La Chine a conclu un accord avec le Congo afin de construire huit hôpitaux, des milliers de kilomètres de routes et des stations ferroviaires et en retour, les Chinois vont recevoir les minéraux dont ils ont tant besoin. Mais si l’on veut que cela fonctionne, il ne peut s’agir simplement d’une situation «win-win». On peut en faire une situation «win-win-win» car cela peut faire progresser la cause des objectifs du millénaire pour le développement. Pouvons-nous, en Europe, collaborer avec la Chine afin d’essayer de parfaire ce qui se passe actuellement, d’améliorer la situation plutôt que de se contenter de décrier ce que fait la Chine ou les défaillances que ce pays présente? Si nous parvenons à collaborer avec la Chine et l’Afrique afin d’améliorer la bonne gouvernance, alors je pense que nous pouvons offrir de l’aide et des échanges ainsi que des améliorations.

Je pense que le Commissaire avait raison: si l’on veut que la Chine nous écoute, la diplomatie du haut-parleur ne fonctionnera pas. L’une des grandes caractéristiques chinoises est qu’ils ne veulent pas perdre la face. Nous avons plus de chances d’obtenir ce que nous voulons en ayant recours à la diplomatie – la diplomatie discrète. Je pense que l’Europe doit collaborer avec la Chine afin d’encourager les meilleures pratiques dans ce qui pourrait être la première véritable occasion de faire quelque chose pour l’Afrique après des années de palabres à ce sujet sans jamais agir. Tant mieux si la Chine nous oblige à rivaliser avec elle pour réaliser les objectifs du millénaire pour le développement. Nous avons besoin de cette concurrence; nous avons besoin de cette pression.

 
  
  

PrÉsidence de Mme KRATSA-TSAGAROPOULOU
Vice-présidente

 
  
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  Józef Pinior, au nom du groupe PSE. – Madame la Présidente, j’aimerais tout d’abord féliciter Madame Gomes pour ce rapport sérieux et très important sur le plan politique.

La Chine est un acteur mondial dans le monde contemporain, et nous aimerions la considérer comme un réel partenaire de l’Union européenne dans le processus de mondialisation. La Chine devrait jouer un rôle important dans le nouvel ordre mondial et nous saluons le rôle pacifique joué par ce pays en Afrique.

Parallèlement à cela, la Chine doit prendre ses responsabilités dans le domaine des droits de l’homme et du développement. Plus précisément, elle doit user de son influence pour contenir ses amis les plus dangereux, comme le gouvernement soudanais. Heureusement, la Chine a cessé de résister au déploiement des forces de maintien de la paix des Nations unies au Darfour et envoie même ses propres ingénieurs militaires pour rejoindre les forces.

Sur le plan négatif, la Chine a tout de même envoyé des armes à des régimes dictatoriaux d’Afrique. Pas plus tard que cette semaine, la Zambie, le Mozambique, l’Afrique du Sud et la Tanzanie ont bloqué un navire chinois qui tentait de livrer une importante cargaison de munitions, de mortiers et d’autres armes meurtrières au Président Mugabe au Zimbabwe. Ces armes pourraient jouer un rôle antidémocratique, voire mortel, entre les mains du régime Mugabe.

Dans ce rapport, le Parlement européen invite la Chine à être du côté des sociétés africaines, de la démocratie et des droits de l’homme en Afrique.

 
  
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  Fiona Hall, au nom du groupe ALDE. – Madame la Présidente, j’aimerais remercier Madame Gomes pour l’énorme quantité de travail qu’elle a fourni dans le cadre de ce rapport et pour son étroite collaboration avec les collègues.

Le rapport étant très vaste, je m’intéresserai à quelques questions seulement. Plus particulièrement, je salue l’appel lancé à la Commission afin de présenter le plus rapidement possible des propositions visant à proscrire du marché de l’UE toutes les importations de bois et de produits dérivés du bois d’origine illégale. Cette mesure est essentielle pour mettre fin au commerce irrégulier de meubles chinois fabriqués à partir de bois africain exploité illégalement. Ce commerce représente non seulement un danger pour les forêts tropicales africaines, mais il prive également les pays d’Afrique des recettes fiscales dont ils ont pourtant grand besoin. La Banque mondiale estime à 15 milliards USD par an le manque à gagner pour les pays en développement causé par l’exploitation illégale des forêts.

Deuxièmement, je rejoins totalement le rapporteur lorsqu’elle invite l’UE à adopter un instrument juridiquement contraignant en matière de contrôle des exportations d’armes et à maintenir son embargo sur les ventes d’armes à la Chine. Depuis la rédaction du rapport, nous avons eu des preuves graphiques, comme l’ont indiqué plusieurs collègues, que la Chine exporte toujours des armes vers des pays tels que le Zimbabwe, qui commettent des violations flagrantes des droits de l’homme.

S’agissant des questions commerciales plus générales, je suis personnellement favorable à la mention des accords de partenariat économique (APE) dans le rapport. Les APE ne sont pas dépourvus de pertinence car s’ils étaient plus flexibles et plus clairement propices au développement, ils pourraient servir de modèle pour les échanges entre la Chine et l’Afrique. Dans l’état actuel des choses, la Chine risque de renvoyer l’Afrique dans le piège des matières premières.

Pour terminer, j’applaudis l’appel lancé dans le rapport en faveur d’un dialogue multilatéral entre l’UE, l’Afrique et la Chine. C’est particulièrement important en ce qui concerne les changements climatiques.

Le commissaire a mentionné l’exemple du photovoltaïque. Aucun continent n’est plus exposé au réchauffement climatique que l’Afrique, et l’avenir de millions d’Africains pourrait bien dépendre de la capacité de l’UE à rallier la Chine à l’accord post-Kyoto et à partager avec elle la technologie relative aux énergies renouvelables.

 
  
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  Konrad Szymański, au nom du groupe UEN. – (PL) Madame la Présidente, le rapport de Madame Gomes présente tous les aspects les plus importants de la présence chinoise en Afrique. Il ne contient qu’une erreur: la présence chinoise en Afrique n’a rien à voir avec une politique de développement quelconque, et encore moins avec une politique d’aide. La politique de développement dans cette région n’est rien de plus qu’un moyen de mettre en œuvre les deux objectifs stratégiques généraux de la Chine.

Le premier objectif est d’assurer l’approvisionnement en matières premières au moyen d’une diplomatie relativement violente dans le domaine des matières premières. C’est l’augmentation de la demande chinoise de matières premières naturelles et productrices d’énergie qui explique l’importance acquise par le Soudan, l’Angola et les pays d’Afrique subsaharienne.

Le second objectif du gouvernement chinois, tout aussi important, est de consolider le pôle autoritaire du monde afin de faire contrepoids aux modèles libéraux-démocratiques occidentaux. D’où la violation d’un embargo de l’ONU sur le commerce des armes avec le Darfour, le Liberia et le Congo. D’où les liens politiques entre Beijing et le Soudan, le Tchad, le Zimbabwe et la Somalie.

L’exclusion de la coopération au développement des pays qui reconnaissent Taïwan est un autre signe de la primauté d’une stratégie particulariste en matière de politique de développement.

Nous devons aujourd’hui concéder que l’Europe est impuissante dans cette situation. On peut bien évidemment donner suite aux propositions du Commissaire et mettre à la poubelle les principes de l’OCDE en ce qui concerne la corruption et les finances publiques, et on peut ensuite en faire de même avec d’autres ententes internationales. Et enfin, on peut même mettre à la poubelle la Charte des Nations unies, mais dans ce cas, on ne saura plus sur quoi repose notre rôle dans la politique mondiale et en quoi nous nous distinguons des autres acteurs dans ce domaine.

 
  
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  Margrete Auken, au nom du groupe des Verts/ALE. (DA) Madame la Présidente, j’aimerais remercier Madame Gomes pour son rapport excellent et nuancé et pour son excellente coopération. Dans l’UE, nous sommes habitués à jouer un rôle prépondérant en Afrique en termes de commerce et de développement. Cependant, les choses pourraient rapidement évoluer face à l’augmentation des investissements chinois. La présence de l’UE en Afrique n’est pas sans problèmes; la présence de la Chine menace toutefois de se développer dans un sens très fâcheux. L’énorme demande chinoise de matières premières et d’énergie conditionne les investissements et ce sans tenir compte du développement responsable de la société. La Chine devrait plutôt s’intéresser à des questions comme la création d’emplois au moyen d’investissements appropriés; elle devrait arrêter d’importer sa propre main-d’œuvre et en revanche, développer le secteur de la production et du traitement in situ, c’est-à-dire en Afrique. La bonne gouvernance doit toutefois aussi être intégrée dans la politique d’investissement. Jusqu’ici, la Chine a refusé d’adopter cette approche et ne s’est jamais préoccupée de la question de savoir si elle soutenait des régimes corrompus et violents ou si elle contribuait à la suppression de la population civile. La Chine doit suivre les règles démocratiques du jeu et respecter les droits de l’homme plutôt que de simplement se proposer comme une alternative bon marché.

Après tout, les Chinois pourraient faire tellement pour les Africains. Permettez-moi de souligner l’un des problèmes les plus importants pour l’Afrique, que l’on a déjà évoqué, à savoir la croissance de la population. La Chine possède des connaissances et une expérience hors du commun dans ce domaine, qui pourraient être d’une grande aide. Imaginez par ailleurs, mesdames et messieurs, si la Chine se met aujourd’hui à acheter des armes, comme l’ont indiqué plusieurs personnes aujourd’hui, des armes qui ont été envoyées au Zimbabwe et auxquelles on refuse à présent l’accès à bon nombre de ports dans des pays tels que le Mozambique et l’Afrique du Sud. La Chine se présenterait alors comme une superpuissance qui écoute les autres et qui assume la responsabilité qui découle du fait qu’elle siège au Conseil de sécurité de l’ONU. C’est sans aucun doute ce que le rapport encourage: qu’un dialogue de qualité soit établi entre l’UE, la Chine et l’Afrique dans l’intérêt de toutes les parties.

 
  
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  Paul Marie Coûteaux, au nom du groupe IND/DEM. − (FR) Madame la Présidente, bravo à Mme Gomes, mais je voudrais poser une question générale. Je voudrais vous demander de qui se moque le gouvernement de la République populaire de Chine? Et je proposerai même une réponse. Je crois qu'il se moque du monde. Il s'est moqué de la Commission européenne, elle-même, il faut le dire, bien naïve ou consentante dans l'épisode des contingents textiles. Il se moque des règles du commerce international – s'il y a encore des règles d'ailleurs – en ne vérifiant jamais que la fabrication des produits exportés satisfait aux règles de qualité et de sécurité exigées des pays importateurs, notamment quant aux jouets, montrant d'ailleurs ainsi l'absurdité du libre-échangisme généralisé.

Il se moque de la France en organisant des manifestations anti-françaises dans les rues de Paris parce qu'il est incommodé par les protestations dont la France s'honore d'être le fer de lance, contre le mauvais traitement imposé au peuple du Tibet, qu'il tient sous sa botte.

En réalité, il se moque du monde parce qu'il sait que le monde convoite son extraordinaire marché et que le monde, hélas, hélas, trois fois hélas, n'est plus mené aujourd'hui que par le marché justement. Alors il en prend à son aise et sa domination sera d'autant plus contraignante que, par une habile politique, beaucoup plus habile que notre politique, Monsieur Michel, le gouvernement chinois parvient à circonvenir l'Europe en s'imposant en Afrique, contrôlant ainsi nos matières premières les plus essentielles. Ici, ne le blâmons pas, il ne fait que se nourrir de nos faiblesses, en particulier du stupide et dangereux désengagement de l'Europe, et en particulier de la France, d'un continent qui, pourtant, sera pour nous de plus en plus essentiel au 21e siècle.

 
  
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  Andreas Mölzer (NI). – (DE) Madame la Présidente, il devient évident dans l’exemple africain que la coopération au développement tant vantée ne produit généralement pas vraiment l’effet escompté comme on aimerait le croire. Elle sert trop souvent à promouvoir les exportations de pays donateurs et parfois à soutenir des dictateurs, voire simplement à créer de nouvelles colonies par le biais de la politique de gestion de la dette.

Dans ce contexte, les dernières ambitions de la Chine et de l’Inde sur le continent africain devraient être traitées d’un point de vue européen avec le plus grand scepticisme. Les pays à bas salaires, qui nuisent gravement à l’économie européenne, recherchent apparemment en Afrique des sources de matières premières bon marché et tentent d’ouvrir de nouveaux marchés. Ce type de néo-colonialisme persistant – comme je me plais à l’appeler – en Afrique par la Chine et l’Inde annulerait en une fois les efforts de la politique occidentale à ce jour. On ne peut laisser Beijing ou New Delhi inciter des pays dont on a récemment annulé la dette à emprunter et créer de nouvelles colonies dans le simple but d’assurer leur approvisionnement en matières premières. De même, on ne peut laisser les pays d’Afrique se porter candidats avec enthousiasme pour recevoir de l’aide au développement alors qu’ils ne sont pas même disposés à reprendre leurs propres citoyens arrêtés en tant qu’immigrants clandestins par Frontex au large des côtes européennes.

Sur la base de l’équilibre des pouvoirs global, nous aurons cependant l’air extrêmement ridicule en tant qu’Européens si nous tentons de faire pression sur la Chine. La Chine n’hésite pas non plus à faire des affaires avec des gouvernements qui sont mis au pilori au niveau international, comme le Soudan par exemple. Elle n’hésite pas non plus à fournir des armes au Zimbabwe. Pour un pays qui continue à accorder si peu d’importance au droits de l’homme et à la démocratie, à la protection de l’environnement et à la durabilité, cette approche n’est probablement pas totalement illogique non plus.

En ce qui concerne l’Afrique, nous avons donc besoin d’une politique qui exige de la stabilité, le respect de la démocratie et des droits de l’homme et, et c’est là l’idée la plus importante, qui tienne compte des intérêts européens. L’Union européenne ne peut distribuer de l’argent en Afrique indéfiniment sans lier ces fonds à des objectifs en termes de contenu et de politique. L’approche appliquée jusqu’à présent a jeté un vide sur nous, ce qui s’est traduit par des vagues de migration, des violations des droits de l’homme et une grande pauvreté. Les ambitions de la Chine et de l’Inde vont probablement encore renforcer ce phénomène si nous ne faisons pas machine arrière. Nous ne pouvons, en tant qu’Européens, continuer à nous contenter de financer des projets humanitaires et laisser les autres puissances, comme la Chine et l’Inde en l’occurrence, poursuivre leurs vastes opérations commerciales.

 
  
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  Daniel Caspary (PPE-DE). – (DE) Madame la Présidente, mesdames et messieurs, lorsque je songe à l’Afrique, je me pose très souvent la question suivante: l’Afrique est-elle un continent oublié en quelque sorte de notre point de vue européen ou voyons-nous, en tant qu’Européens, des opportunités sur ce continent?

J’ai souvent l’impression que nous autres, Européens, voyons encore trop souvent l’Afrique comme un problème et que nous ne sommes pas conscients des possibilités qu’offre ce continent. L’approche chinoise en Afrique est très différente. Pour les Chinois, l’Afrique est avant tout une opportunité et ils se concentrent sur les moyens de tirer parti de cette opportunité. Ils le font sans se faire remarquer depuis quelques années. On ne s’en est aperçu qu’il y a quelques mois, et ils poursuivent par conséquent une politique purement fondée sur des intérêts économiques.

Des questions telles que les droits de l’homme, l’État de droit et la bonne gouvernance, évoquées aujourd’hui par certains de nos collègues, n’ont aucune emprise pour l’instant sur les Chinois en Afrique. Leur seul souci concerne les investissements dans l’infrastructure en Afrique afin d’obtenir un accès illimité aux marchés des matières premières. Le but est de répondre au besoin grandissant de la Chine en termes de matières premières, et en aucun cas d’aider les nations et populations d’Afrique à évoluer vers un développement économique véritablement durable.

Je suis fermement convaincu que nous devons davantage mettre l’accent sur l’intégration des pays d’Afrique dans l’économie mondiale afin de leur permettre de tirer parti de la mondialisation sur les marchés internationaux grâce à leurs matières premières, leurs ressources, à tout ce qu’ils ont à offrir, et de ne pas devenir tributaires unilatéralement de monopoles chinois. Nous devons entamer un dialogue avec les pays d’Afrique qui soit plus efficace que ce que nous avons connu jusqu’à présent. Nous devons aussi assimiler la concurrence avec les Chinois de façon plus intensive que par le passé et vraiment tout mettre en œuvre pour persuader les Africains de l’intérêt de la bonne gouvernance et des marchés libres.

Ce n’est qu’alors que nous parviendrons à promouvoir l’État de droit, la démocratie et les droits de l’homme en Afrique et que nous réussirons ensuite à ne pas laisser les pays d’Afrique dériver dans la direction de la Chine, car l’Afrique n’apprendra certainement rien de la Chine – nous l’avons appris à nos dépens au cours de ces dernières semaines – à propos de la façon dont fonctionnent la démocratie et l’économie de marché social.

 
  
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  Alessandro Battilocchio (PSE). – (IT) Madame la Présidente, mesdames et messieurs, j’aimerais tout d’abord féliciter le rapporteur, Ana Gomes, pour son excellent travail. Le développement de la présence chinoise en Afrique nous oblige à adopter une ligne d’action européenne afin de faire face au mieux aux opportunités et aux nouveaux défis qui se présentent.

La contribution chinoise en Afrique en tant que bailleur de fonds est une bonne chose, mais j’aimerais m’arrêter un instant pour souligner deux aspects: pour nous, Européens – et notamment sur la base des principes et des engagements inscrits dans l’accord de Cotonou et plus généralement du cadre global de notre politique de développement -, il est inquiétant de constater que la Chine est malheureusement en train d’exporter, à côté de l’aide, un certain nombre de pratiques intérieures lamentables, comme la corruption, les prêts irrécouvrables, l’absence de respect pour les droits des travailleurs et le manque de considération pour les questions environnementales.

Une autre question qui doit être surveillée de près concerne le lien étroit entre Beijing et certains régimes totalitaires et répressifs en Afrique, comme le Soudan et le Zimbabwe. Dans ce contexte, la Chine doit endosser toutes les responsabilités qu’implique son rôle de membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies.

 
  
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  Danutė Budreikaitė (ALDE). (LT) Madame la Présidente, mesdames et messieurs, la politique chinoise en Afrique représente une menace pour le développement harmonieux des pays d’Afrique. Les conditions de travail dans les entreprises chinoises actives en Afrique sont équivalentes à celles de l’esclavage. La Chine continue à offrir à des dictateurs africains une aide politique et financière et elle intensifie sa coopération militaire avec des régimes africains. Le Soudan et le Zimbabwe sont les principaux importateurs d’armes en provenance de Chine. La Chine offre aux pays d’Afrique des prêts énormes sans aucune condition de transparence, ce qui encourage la corruption déjà répandue au sein des groupes au pouvoir dans les pays d’Afrique. L’exportation illégale de bois et d’ivoire africains par la Chine a des conséquences désastreuses sur l’environnement africain. Dans une telle situation, impossible pour la politique de coopération au développement d’atteindre ses objectifs. J’aimerais par conséquent inviter l’UE à veiller à ce que la Chine tienne bien compte des droits de l’homme et de la bonne administration dans le cadre de la mise en œuvre des investissements et à ce qu’il soit mis fin au commerce d’armes avec des pays d’Afrique où une guerre ou un conflit militaire ont lieu ou sont imminents. Tant que la Chine ne sera pas disposée à mettre un terme à la vente d’armes, l’UE devrait imposer au pays un embargo sur les armes. Il me reste une chose à souligner, à savoir que compte tenu de la politique chinoise en Afrique, les différents États membres de l’UE devraient venir à bout de leurs désaccords. Un réexamen de la politique communautaire permettrait à l’Afrique d’utiliser ses ressources naturelles et humaines de façon mutuellement profitable et de continuer à développer son indépendance économique et politique.

 
  
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  Wiesław Stefan Kuc (UEN). – (PL) Madame la Présidente, Monsieur le Commissaire, le rapport de Madame Gomes est en réalité un exposé détaillé sur le thème des liens trilatéraux extrêmement complexes entre les États d’Afrique et la Chine compte tenu intérêts de l’UE. Il examine en outre le rôle joué dans le développement de l’Afrique par d’autres organisations, comme la Banque mondiale.

Il ne fait aucun doute que le rôle joué par la Chine dans le développement des États africains, qui se renforce un peu plus chaque année, doit être considéré d’un point de vue positif en dépit des réserves concernant la priorité des actions. Nous devons nous demander si les investissements commerciaux sont plus importants que l’aide humanitaire. Pour les États africains pauvres, toute aide est importante, au même titre que l’eau, ainsi que la lutte contre les maladies, l’éducation, la construction d’infrastructures et la paix. Il n’y a qu’une conclusion possible: nous devons œuvrer ensemble pour développer les meilleures méthodes en vue d’un développement durable, mais accéléré, de ces États.

 
  
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  Bastiaan Belder (IND/DEM). (NL) Madame la Présidente, à l’article 65 de son vaste rapport, Madame Gomes invite l’Union européenne et la Chine à suspendre tout accord commercial dans le secteur des armes avec les gouvernements d’Afrique qui sont coupables de violations de droits de l’homme et qui sont engagés dans des conflits ou en passe de faire la guerre. Je suis totalement d’accord avec le rapporteur sur cette question. Il en va de même pour les exemples concrets qu’elle donne et dans la liste des États africains, le Zimbabwe de Mugabe se détache nettement ces temps-ci.

En fin de semaine dernière, la presse occidentale faisait état d’une importante livraison d’armes au régime de Mugabe par la Chine par l’intermédiaire de l’Afrique du Sud, comme si les tensions internes au Zimbabwe n’avaient pas suffisamment augmenté à la suite de toutes les manœuvres observées lors du scrutin présidentiel. «Pour le Zimbabwe, aller en Chine, c’est comme aller dans notre résidence secondaire» déclarait le Président Mugabe lors de sa dernière visite à Beijing, il y a un an et demi environ. Quand les autorités chinoises vont-elles vraiment se désolidariser de ce pays et d’autres «amis» africains? Monsieur le Commissaire, j’espère que vous poserez cette question urgente à Beijing. Le rapport de Madame Gomes donne aussi matière à cela.

 
  
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  Zbigniew Zaleski (PPE-DE). (FR) Monsieur le Commissaire, après tout ce que vous avez dit, une petite réflexion sur la présence des Chinois en Afrique. Je vais pour cela passer au polonais.

(PL) Madame la Présidente, Monsieur le Commissaire, au début du siècle dernier, les ressortissants chinois étaient accueillis dans les foyers anglais et français à la recherche de domestiques exotiques. Dans les années 50 et 60, nous avions des produits chinois: des stylos et différentes fournitures scolaires; et aujourd’hui, les Chinois apparaissent comme une puissante force économique et politique.

Comme vous dites, tout le monde a le droit d’agir sur la scène économique et politique et personne ne les empêchera de le faire, mais les Chinois ont rassemblé leurs efforts et ils progressent vers leurs objectifs en suivant une ligne de conduite bien précise; mais quels sont ces objectifs? Libres de toute tache ou étiquette de colonialisme, ils peuvent exploiter les ressources naturelles en Afrique, et ils le feront. Je le dis sans ménagements: exploiter. En outre, et c’est pire, ils peuvent exporter leur modèle sociopolitique totalitaire, et ils le font déjà, et l’Afrique doit se protéger de cela. L’Afrique doit échapper à cela.

L’Europe a des liens traditionnels qui datent de l’époque coloniale dans le cadre de ce que l’on appelle subtilement la «coopération». Tant d’un point de vue humaniste que compte tenu du sentiment de culpabilité, nous devons faire œuvre utile en Afrique dans tous les domaines. C’est ce que nous faisons, mais les Chinois sont en train de nous évincer. L’UE doit elle aussi, à côté de cette superpuissance, gagner la confiance de l’Afrique tout en se montrant disposée à contribuer au développement de ce vaste continent, qui est si proche de nous.

Monsieur le Commissaire, nous sommes confrontés à un énorme défi.

 
  
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  Vural Öger (PSE). – (DE) Madame la Présidente, le regain d’intérêt pour l’Afrique dans le monde entier s’accompagne d’un changement de perspective. Aujourd’hui, l’Afrique n’est pas qu’un simple continent marqué par la pauvreté. Certains pays d’Afrique affichent des taux de croissance pouvant aller jusqu’à 10 %.

Passons à présent au cœur de la question: que recherche la Chine en Afrique? La principale motivation de son engagement sur ce continent n’est autre que les ressources énergétiques. Dans la lutte pour l’accès aux matières premières, cependant, la politique occidentale fondée sur la valeur tire de plus en plus souvent le mauvais numéro. La principale motivation de l’Europe est le développement durable de l’Afrique.

Un programme conjoint UE-Chine pour l’Afrique serait idéal en théorie. Nous ne devons pas prétendre être les gentils sur ce continent, car les pays d’Afrique se méfient tout autant de l’UE que de la Chine. L’UE ne peut apporter des solutions à la Chine ou à l’Afrique. Quoi qu’il arrive, l’UE doit continuer à lier son engagement à des conditions. Parallèlement à cela, elle doit promouvoir davantage les gouvernements, les institutions et la société civile qu’elle ne l’a fait jusqu’à présent. Un dialogue avec l’Afrique s’impose, mais celui-ci ne doit pas négliger les sujets de mécontentement. Sur ce point, je ne peux que me rallier au rapport de Madame Gomes.

 
  
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  Renate Weber (ALDE). – Madame la Présidente, je félicite ma collègue, Madame Ana Gomes, pour son travail et ses appréciations exhaustives et réalistes. Comme l’indique le rapport, la Chine est déjà un important partenaire économique et politique pour l’Afrique. En ce qui concerne le développement de l’Afrique, je pense qu’il y a énormément de travail à faire et que la participation de la Chine est une bonne chose.

Cependant, ce que je redoute, c’est qu’au lieu d’acheminer son aide dans le cadre d’efforts constructifs (santé, éducation, réduction de la pauvreté et infrastructures), la Chine continue à prendre part aux actions qui alimentent les tragédies du continent et le fasse par le biais de trafics d’armes et en sapant les différentes démarches des pays d’Afrique en faveur de la démocratie, de la bonne gouvernance et du respect des droits de l’homme. Le navire chinois chargé d’acheminer des armes au Zimbabwe remet encore une fois en question la volonté réelle de la Chine de contribuer à la paix et à la sécurité en Afrique.

Bon nombre de pays d’Afrique se réjouissent de leur coopération avec la Chine étant donné que les avantages économiques ne sont liés à aucune conditionnalité politique, mais l’UE doit continuer à plaider avec force pour le renforcement des institutions, le respect des droits de l’homme et la transparence des règles en ce qui concerne l’exploitation des ressources naturelles, auprès de la Chine mais aussi des pays d’Afrique. Les récents développements ont montré que même dans les cas où les gouvernements ont commencé depuis quelques années à faire preuve d’une plus grande transparence sur la façon dont les fonds et les ressources publics sont dépensés, ils sont revenus à une administration moins transparente. L’UE a le devoir d’aider la Chine à devenir un partenaire de confiance dans la coopération au développement.

 
  
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  Jan Tadeusz Masiel (UEN). – (PL) Madame la Présidente, Monsieur le Commissaire, malgré les nombreux échanges entre la Chine et les pays d’Afrique, et même malgré le fait que la Chine soit récemment devenue un donateur net à l’égard de l’Afrique, c’est toujours l’Europe, et non la Chine, que les émigrants africains choisissent, en dépit de notre passé colonial. C’est là la meilleure preuve de la préférence des Africains pour nos valeurs, comme le respect des droits de l’homme et le souci du développement durable, garantie d’un avenir meilleur.

Cela donne à l’Union européenne un droit, mais aussi un devoir, moral, d’examiner la politique chinoise à l’égard de l’Afrique étant donné, comme le souligne à juste titre le rapporteur, que la Chine pourrait considérablement accélérer le processus de développement durable en Afrique, mais qu’elle pourrait aussi lui être dommageable. Face à cela, l’idée d’organiser des négociations trilatérales entre l’Union européenne, les États membres de l’Union africaine et la Chine vaut vraiment la peine d’être défendue.

 
  
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  Zuzana Roithová (PPE-DE). – (CS) La parade nuptiale chinoise en Afrique ne porte pas uniquement sur la coopération militaire, les matières premières stratégiquement importantes, les investissements à grande échelle et la création d’un énorme marché pour les produits chinois; elle porte aussi sur la construction d’infrastructures. Le volume des échanges a quintuplé depuis 2000 et il atteindra bientôt les 100 milliards USD, même si les échanges occidentaux représentent toujours pour l’instant jusqu’à deux tiers des recettes commerciales africaines. La politique chinoise repose sur les notions de «non ingérence» et d’avantage économique comparatif. Cela veut dire exporter des produits rentables et des armes en échange de matières premières. Les investissements et les contrats à long terme représentent des éléments d’une stratégie chinoise à long terme préméditée qui n’a aucune compassion pour l’Afrique.

L’influence de la Chine sur les pays africains est un dangereux exemple de modèle totalitaire, un modèle de marché corrompu, dépourvu de respect pour les individus ou les droits de l’homme, ou de respect pour l’environnement. La soif chinoise de matières premières en échange de livraisons d’armes inconditionnelles en Afrique devient un obstacle de plus en plus grand à la réalisation des objectifs du millénaire pour le développement. Nous devons obliger la Chine à accepter sa part de responsabilité dans la politique de développement, de réduction de la pauvreté et de croissance durable. Après tout, la Chine est un membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU et est par conséquent aussi responsable du développement en Afrique.

Je condamne le soutien chinois au régime soudanais. Je suis favorable à un dialogue avec la Chine sur l’harmonisation des politiques en Afrique afin de réduire la pauvreté, mais je n’y compte pas trop. Nous ne devons cependant pas abandonner. Nous devons mettre fin au pillage de matières premières et aider l’Afrique à devenir économiquement indépendante. Nous devons rester fidèles à notre stratégie, composée de politiques commerciales fondées sur le respect des droits de l’homme et la protection de l’environnement. Je prie le Ciel pour que nous y parvenions.

 
  
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  Katrin Saks (PSE). – (ET) J’aimerais avant toute chose remercier Ana Gomes pour ce rapport. Selon moi, son principal message concerne non seulement l’attitude de la Chine, mais aussi les défaillances constantes contenues dans la politique étrangère commune de l’Union européenne. Nous sommes manifestement tous d’accord sur le fait qu’une position commune de l’UE sur cette question serait la bienvenue.

Je m’intéresserai essentiellement à quelques points. À commencer par l’approche globale: nous devons envisager la coopération entre la Chine et l’Afrique d’un point de vue global, et non du point de vue selon lequel l’Afrique est traditionnellement une région d’influence exclusivement européenne. Deuxièmement, nous devons mettre en avant les responsabilités: la Chine doit reconnaître la responsabilité renforcée qui découle d’un partenariat stratégique de ce type.

Une dernière remarque, pour terminer: le point 13 des suggestions de l’AFET.

«Considère que la participation chinoise en Afrique, d’une part, et que le partenariat stratégique récemment lancé entre l’UE et l’Afrique, d’autre part, doivent être compatibles;»

Premièrement, je ne pense pas que notre politique doive s’aligner avec celle de la République populaire de Chine, et je suis encore moins convaincue que les Chinois vont un jour tenir compte de nos recommandations de style narratif.

 
  
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  Cristian Silviu Buşoi (ALDE). – (RO) La valeur des échanges entre la Chine et l’Afrique est passée de 2 milliards d’euros en 1999 à environ 39,7 milliards en 2005, la Chine étant le troisième partenaire de l’Afrique à l’heure actuelle sur le plan de l’importance des échanges.

Cela démontre très clairement l’importance de l’intérêt que présente l’Afrique pour les intérêts globaux de la Chine.

La résolution contient quelques conclusions très importantes, qu’il convient de souligner encore une fois. Nous devons communiquer très clairement l’idée que ce que nous attendons, c’est que les activités de la Chine en Afrique ne concernent pas uniquement les pays qui présentent de l’intérêt du point de vue de la politique énergétique.

Nous devons également encourager la Chine à offrir une assistance inconditionnelle aux partenaires africains et les conditions économiques associées aux subventions ou aux prêts internationaux ne doivent pas avoir de conséquences sur l’objectif de développement durable.

Il est plus important pour nous de voir ce que nous ferons et ce que fera l’Union européenne dans cette situation. Je suis d’accord avec le commissaire Louis Michel lorsqu’il dit que malheureusement, l’Union européenne ne profite pas de sa position particulière vis-à-vis de l’Afrique.

L’Union européenne doit consacrer une plus grande part de son budget annuel à l’assistance financière des projets d’infrastructure capables d’attirer les investissements étrangers directs.

Pour terminer, le renforcement de la présence européenne en Afrique doit passer du discours à la réalité.

 
  
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  Colm Burke (PPE-DE). – Madame la Présidente, la Chine a commencé à renforcer considérablement ses liens diplomatiques et économiques avec l’Afrique au cours de la dernière décennie, en grande partie en raison de la demande de matières premières. Les échanges entre la Chine et ce continent ont quadruplé depuis 2001, et la ruée pour les ressources a également des conséquences négatives et perpétue la corruption et l’oppression chez les élites en Afrique. Parmi les exemples de régimes répressifs de ce type, citons le Soudan, où CNPC, une compagnie pétrolière chinoise publique, contrôle, selon les estimations, entre 60 et 70 % de la production pétrolière soudanaise, tandis que le Soudan est un important acheteur d’armes chinoises.

Les transactions chinoises en Afrique sont très souvent dépourvues de conditions politiques en matière de respect de la gouvernance, de la démocratie et des droits de l’homme. La Chine a elle-même de sérieux problèmes chez elle en ce qui concerne la bonne gouvernance, le respect des droits de l’homme et les normes fondamentales du travail. Ce pays n’est manifestement pas en mesure de conditionner son aide à des améliorations dans les normes africaines dans le domaine des droits de l’homme, dans la mesure où il ne respecte pas lui-même ces mêmes normes. Il n’en reste pas moins que la politique chinoise de non ingérence dans les affaires intérieures de ses partenaires économiques est aujourd’hui une excuse trop facile, qui donne à la Chine carte blanche pour poursuivre ses contrats quelquefois irresponsables, en particulier sur le continent africain.

Cette politique de non ingérence, de même que les attitudes clémentes de la Chine vis-à-vis de régimes douteux, comme le régime soudanais, est un problème constant qui doit être résolu. Malheureusement, étant donné que l’approche essentiellement bilatérale de la Chine en ce qui concerne l’Afrique est contraire à l’approche de l’UE, avant tout multilatérale, l’UE reste en quelque sorte sur le carreau. Les dirigeants africains corrompus préfèrent signer des contrats lucratifs dépourvus d’exigences particulières et l’UE en subit les conséquences.

L’UE doit néanmoins maintenir sa politique traditionnelle de conditionnalité positive visant à favoriser le développement durable et elle ne doit pas être tentée de nuancer son approche vis-à-vis de l’Afrique au simple motif que la Chine décroche plus de contrats. L’UE doit au contraire faire pression sur la Chine pour qu’elle intègre davantage de critères en faveur du développement dans ses relations avec l’Afrique. La Chine est une grande puissance, un membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU et elle a par conséquent des responsabilités en Afrique et partout dans le monde.

 
  
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  Nirj Deva (PPE-DE). – Madame la Présidente, je félicite ma collègue, Madame Gomes, pour cet excellent rapport. Ce rapport renforce notre relation avec la Chine, un élément nécessaire pour l’économie mondiale. Jusqu’il y a peu, et pendant des milliers d’années, la Chine n’a exercé qu’un pouvoir discret, comme nous le faisons aujourd’hui dans l’UE, mais la Chine évolue. C’est une superpuissance, sur les plans économique et militaire, et le pays est en transition.

Notre relation avec la Chine doit se fonder sur le respect. Il ne peut s’agir d’une relation dans laquelle l’une des parties estime avoir le droit de sermonner ou de harceler l’autre. Nous avons mis fin à la Guerre froide en nouant le dialogue avec l’Union soviétique et nous avons amené la paix en Europe. Dans le même ordre d’idées, nous devons nouer le dialogue avec la Chine à tous les niveaux. Nous devons protéger les institutions sur lesquelles reposent notre économie libérale mondiale basée sur des règles ainsi que nos valeurs, sans quoi nous sommes condamnés.

Cela signifie que la Chine doit jouer un rôle à part entière et actif dans toutes les institutions de Bretton Woods d’après-guerre que nous avons mis tant de soin à construire. Cela signifie aussi que nous devons collaborer avec la Chine pour renforcer les règles de l’ordre international afin de servir notre intérêt et le sien. D’ici à 2020, l’économie chinoise sera la première économie mondiale. Nous avons le choix aujourd’hui. Soit nous donnons à la Chine les moyens de jouer un rôle à part entière et actif dans les institutions multilatérales basées sur des règles, ouvertes à tous et libérales mises en place après Bretton Woods – et cela comprend l’UE, le Groupe ACP, Rio, Bali, à côté de l’ONU, l’OMC, le FMI et la Banque mondiale -, soit nous obligeons la Chine, dans le cadre de notre politique à court terme, à se retirer et inévitablement, avec le temps, à détruire ces institutions pour construire les siennes, adaptées à ses superpouvoirs.

Voilà pourquoi ce rapport est tellement d’actualité. Voilà aussi pourquoi – et je sais que je ne fais pas l’unanimité sur ce point – les Jeux Olympiques sont si importants, parce que c’est la première fois dans l’Histoire que la Chine noue le dialogue avec le monde entier. Voilà pourquoi l’événement doit être couronné de succès, non seulement pour la Chine, mais pour tous les pays qui y prennent part.

Notre mission, en ce début de XXIe siècle, est de taille. Cela n’a encore jamais été fait dans notre Histoire humaine commune, mais cela doit être fait. Cette mission consiste à faire de la nation la plus ancienne et la plus grande du monde notre partenaire dans toutes les affaires de la planète Terre.

 
  
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  Zita Pleštinská (PPE-DE). – (SK) Mesdames et messieurs, ma visite en Chine en mars dernier m’a convaincue de l’actualité de ce débat. Je pense qu’en ce qui concerne l’Union européenne, la Chine est non seulement un important partenaire commercial, mais aussi un sérieux concurrent. Le rapport de Madame Gomes corrobore mon expérience personnelle.

J’ai eu l’occasion d’observer l’assiduité stupéfiante de la main-d’œuvre bon marché. Même si la Chine doit faire face à d’énormes inégalités sociales et économiques ainsi qu’à un environnement dont l’état se dégrade de façon alarmante, et même si les droits politiques et les libertés fondamentales sont encore très limités, elle possède une grande expérience, qui peut s’avérer bénéfique pour les pays d’Afrique. L’Afrique lutte contre la pauvreté mais le continent est riche en matières premières. Grâce à la demande de la Chine et d’autres régions, les pays d’Afrique peuvent plus facilement prendre pied sur les marchés.

À l’heure actuelle, l’UE est le premier donateur d’aide en faveur de l’Afrique et son partenaire commercial le plus important. L’ambition de la Chine est de devenir le premier partenaire commercial de l’Afrique d’ici à 2010; ses activités sur ce continent représentent par conséquent un sérieux défi pour l’UE.

 
  
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  Czesław Adam Siekierski (PPE-DE). – (PL) Madame la Présidente, l’intérêt de la Chine pour le pétrole, les métaux précieux et le gaz africains commence à faire penser un peu aux anciennes politiques coloniales de certaines puissances européennes. La Chine se fait passer pour un ami et un partenaire commercial de l’Afrique; elle tente de convaincre les Africains qu’elle veut les aider à échapper à la pauvreté et à rattraper leur retard, et qu’elle va favoriser leur développement économique.

Espérons que leurs intentions soient sincères, mais en affaires comme en politique, la fin justifie souvent les moyens. Les Chinois construisent des ponts, des routes, des stades, des hôpitaux, ils fournissent des armes à l’Afrique, ils accordent des prêts financiers. Ce faisant, ils s’offrent un nouveau marché tout en faisant croire qu’ils se soucient de l’avenir de l’Afrique.

L’UE doit s’impliquer nettement plus dans le développement de l’Afrique. Nous ne pouvons pas rester les bras croisés et agir comme un observateur neutre face à la progression de cette nouvelle domination chinoise.

 
  
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  José Ribeiro e Castro (PPE-DE). (PT) Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, mesdames et messieurs, j’aimerais tout d’abord féliciter Madame Gomes pour l’excellent rapport qu’elle a produit, mais j’aimerais profiter du temps limité qui m’est imparti pour attirer l’attention du commissaire, ainsi que celle de mes collègues, sur un exemple concret de cette relation, qui se déroule juste devant nos yeux. Cet exemple concret, c’est le Zimbabwe. Les journaux parlent d’un navire qui vient d’où? De Chine. Qui transporte quoi? Des armes, des armes destinées au Zimbabwe, des armes légères, des grenades et des mortiers. Le navire n’a pas pu débarquer sa cargaison à Durban mais d’après certaines sources, il se dirigerait vers l’Angola pour livrer ces armes, qui seront utilisées contre la population du Zimbabwe.

Nous devons adopter une position diplomatique solide au sujet de la Chine, mais aussi au sujet des pays voisins du Zimbabwe, afin de faire avorter ce type de relation perverse, meurtrière, et de veiller à ce que les résultats des élections soient respectés. Je suis convaincu que dans le cadre de notre relation avec la Chine, nous devons attirer l’attention de la Chine, en tant que grande puissance et pays énorme, sur ses responsabilités sur la scène internationale et dans le cadre du maintien de la paix et du respect des droits des populations.

 
  
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  Zbigniew Krzysztof Kuźmiuk (UEN). – (PL) Madame la Présidente, Monsieur le Commissaire, au cours de ces dix à quinze dernières années, la Chine est devenue l’économie en développement à la croissance la plus rapide dans le monde, comme en témoigne la croissance de plus de 10 % de ses revenus annuels. Cette évolution a amené le pays à devenir la quatrième économie au monde, avec les réserves de devises étrangères les plus importantes de la planète.

Compte tenu de cette évolution rapide de son potentiel économique, la Chine devient à présent l’un des premiers partenaires commerciaux à l’échelle mondiale. En 15 ans, la valeur des échanges entre la Chine et l’Afrique s’est multipliée de plus de 20 fois. Il semble que l’Union européenne ne soit pas en mesure de contrer cette expansion. Nous devons par conséquent encourager la Chine à veiller à ce que ses activités économiques en Afrique intègrent un aspect social et environnemental et prévoient le maintien des normes démocratiques.

L’Union européenne doit garder un œil sur l’expansion de la Chine en Afrique. Après tout, nous sommes toujours le premier bailleur de fonds sur ce continent. Nous devons donc nous assurer que l’assistance offerte à ces pays est liée à un développement significatif des relations commerciales avec l’Afrique.

 
  
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  Paul Rübig (PPE-DE). – (DE) Madame la Présidente, j’aimerais moi aussi féliciter Madame Gomes pour son rapport. Il démontre très clairement que la Chine peut aussi être un exemple. Le développement en Chine, et notamment le développement économique, peut être un exemple pour l’Afrique. Les relations commerciales et la croissance réalisées sont remarquables.

La Chine est également notre partenaire à l’OMC. On constate en effet que lorsque les négociations au sein de l’OMC sur les salaires standard et la réduction des quotas aboutissent, cela peut entraîner une situation «win-win» pour les deux camps. L’Afrique et la Chine ont besoin de l’Europe. L’Europe est actuellement le plus puissant acheteur au monde. Je peux aisément imaginer le développement d’un partenariat de qualité.

 
  
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  Louis Michel, membre de la Commission. − (FR) C'est évidemment extrêmement frustrant, comme pour les parlementaires, pour un débat aussi important que celui-là et pour un rapport aussi excellent, d'être limité dans le temps.

Moi je voudrais simplement prendre acte du fait que j'ai entendu deux grands courants dans votre Parlement. Il y a ceux – et je ne fais pas de critique là-dessus, je dis simplement que c'est ce que j'observe – il y a les intervenants qui croient que le pessimisme de la peur, c'est ça qui va faire sortir les Chinois d'Afrique. Forget it, ce n'est évidemment pas ça. Moi, je crois dur comme fer que c'est plutôt l'optimisme de la modernité et de l'ouverture.

J'ai entendu d'autres choses ici et je crois qu'il va quand même falloir que, petit à petit, on devienne conscient que ce type de relation-là avec l'Afrique, c'est justement ce qui fait que l'Afrique croit de moins en moins en l'Europe. Il faut arrêter quand même de tenir des propos du style "nous avons le droit moral en Afrique". Nous n'avons, en Afrique, aucun droit, aucun, pas le moindre, ni moral, ni autre. Et notre passé ne nous l'autorise certainement pas et je voudrais rappeler cela.

De la même manière que j'ai entendu – je m'excuse, je ne sais pas si M. Coûteaux est toujours là, je suppose que c'est un lapsus – reprocher aux Chinois de prendre nos ressources naturelles, en Afrique! Comme si nous étions propriétaires des ressources naturelles de l'Afrique! Je dois quand même vous dire que c'est assez surprenant. Je ne vous cache pas que je suis parfois assez surpris de ce type de propos.

Donc je dois vous dire que le danger que je vois – il faut en débattre avec les Africains – le seul danger que je vois à la présence chinoise, à l'investissement chinois en Afrique, c'est la malédiction des ressources pour les Africains. Ce qu'on appelle la malédiction des ressources ou l'économie des rentes. Ça, c'est un sujet qui doit être posé sur la table du dialogue dans nos relations avec les Africains. Mais pour le reste, je dois vous dire que je crois beaucoup plus dans le dialogue, dans le partenariat tripartite, dans l'écoute aussi, et dans la compréhension mutuelle des problèmes, dans la recherche de cas concrets de coopération, que dans tous les autres discours incantatoires qui consistent à dire "Nous, les Européens, nous devons donner des leçons pour protéger ces malheureux Africains des Chinois." Je dois vous dire que des discours comme ceux-là, moi, tous les jours, absolument tous les jours, dans mes relations bilatérales, j'en mesure les limites et donc, je ne les pratique pas, je les pratiquerai pas et je n'engage personne à les pratiquer.

Dans le rapport de Mme Gomes, toutes les pistes utiles se retrouvent. Moi, je peux les retrouver à peu près dans tout ce qui est dit là dedans. Vous savez, je vais en Chine dans quelques heures. Je vais rencontrer le ministre du commerce. On va rencontrer le Premier ministre avec le Président Barroso. Vous pensez qu'on ne va pas parler des droits de l'homme, du Tibet, de la démocratie, de l'Afrique? Évidemment qu'on va en parler! Dans le colloque singulier de la diplomatie classique. Mais la diplomatie du mégaphone, dans le cas de figure qui nous occupe, ça c'est totalement contreproductif. Plus vous allez dire aux Africains, plus vous allez leur dire qu'ils doivent se méfier des Chinois, qu'ils sont occupés à les recoloniser, que c'est la malédiction des ressources, plus vous allez dire cela, moins ils vont vous entendre, et moins ils vont vous écouter.

L'Europe a les moyens de son ambition. Ils sont de deux ordres. Premièrement, nous avons notre modèle et nous devons défendre notre modèle et nous devons être différents des autres parce que notre modèle est différent des autres. Il est fondé sur des valeurs partagées, il est fondé sur la tolérance, il est fondé sur l'ouverture, il est fondé sur le dialogue, il est fondé sur l'écoute, il est fondé sur le respect mutuel. C'est ça l'Europe, et l'Europe n'a pas à changer tout ça. L'Europe n'a pas à devenir autre chose ou à courir après des modèles qui ne sont pas les siens. Ça, c'est la première chose que je voulais dire.

La deuxième chose, je l'ai déjà dite tout à l'heure. Si nous avions un tout petit peu de courage – et notamment, le Parlement européen peut nous aider grandement et l'a déjà fait d'ailleurs – pour convaincre nos États membres de faire une meilleure division du travail, de modifier un petit peu les règles de procédure qui engagent la mise en œuvre du Fonds européen de développement, si on donnait un petit peu aux institutions européennes – le Parlement européen, en faisant une budgétisation du FED qui, d'ailleurs, serait beaucoup plus efficace politiquement –, si vous donniez un petit peu plus de moyens aux commissaires pour faire de la politique basée sur nos valeurs, avec les moyens du FED, je vous assure que l'Europe n'aurait pas à craindre la compétition avec la Chine. Ça, c'est la réalité.

Parce qu'il y a quand même un élément: nous avons un avantage formidable. Quel est l'avantage que nous avons? Nous, ce ne sont pas des prêts, ce sont des dons. Alors, moi, je ne m'explique quand même pas bien. Les Africains aujourd'hui se tournent vers les Chinois en nous reprochant de ne pas être assez réactifs alors que nous donnons des dons, c'est-à-dire de l'argent qu'ils ne doivent pas rembourser, alors que, de l'autre côté, on fait des prêts concessionnels qui, il faut quand même bien le dire, absorbent des ressources naturelles. Si ces prêts vont à des infrastructures, vont à du développement durable, qui peut contester que c'est utile pour l'Afrique? Vous savez, les infrastructures en Afrique, pas l'Europe, pas l'Europe et la Chine, pas l'Europe, la Chine et les États-Unis, pas l'Europe, la Chine, le Japon et les États-Unis, je dirai même que le reste du monde peut apporter autant de moyens qu'il veut, il faudra encore des années avant qu'il y ait suffisamment de structures et d'infrastructures en Afrique pour soutenir un véritable développement.

Donc, tout l'argent qui peut venir, les investissements qui peuvent venir, ce n'est pas nécessairement mauvais. Toute la question est de savoir comment tout ça est exploité, comment tout ça est encadré. Je sais bien que je ne peux pas mettre tout le monde d'accord, mais c'est ça aussi la beauté de la démocratie. Je crois très sincèrement que c'est dans l'ouverture, dans le dialogue, dans la recherche d'un partenariat triangulaire, en l'occurrence, que nous allons faire la différence. L'Europe restera, à mon avis, pour toujours, un partenaire particulier de l'Afrique, pour des raisons historiques, pour des raisons de proximité, pour des raisons de modèle. Je n'ai pas peur de cela et je crois que, si nous voulons vraiment être présents en Afrique – quelqu'un l'a dit, c'est très important – nous devons faire ce que je suggère de faire et il faut y ajouter, à mon avis, un élément. Il faut arrêter de laisser croire que notre intérêt pour l'Afrique serait un intérêt fondé uniquement sur la générosité, sur notre bon cœur, sur l'humanisme, sur tout ça...

Évidemment que c'est aussi notre devoir, mais il faut accepter que la relation avec l'Afrique, c'est aussi un formidable potentiel de win-win entre l'Europe et l'Afrique. Que c'est un formidable potentiel de développement économique réciproque et qu'il n'y a absolument rien de mal ou d'immoral à placer notre relation aussi dans cette dimension-là, parce qu'au moins les Chinois ont une grande qualité: ils ne cachent pas leur plan. Je n'ai jamais vu les Chinois dire qu'ils allaient en Afrique pour aider les Africains ou pour faire le développement en Afrique. Non, ils acceptent. Les règles de leur jeu, c'est le développement économique et c'est d'abord leur intérêt. Moi, je crois que, quand on respecte un partenaire, on doit accepter cela aussi. On ne doit pas rejeter cette dimension-là. Il n'y a pas de miracle. Si l'Afrique ne se développe pas économiquement, elle ne se développera pas tout court et ce ne sont pas nos politiques caritatives qui vont faire la différence.

Voilà ce que je voulais dire. Je m'excuse, Madame, j'ai été un peu long mais j'ai exprimé ici une conviction qui me vient aussi de l'expérience que j'ai tous les jours avec ces pays.

Enfin, un dernier élément, ça ne vaut que ce que ça vaut. Le bateau chinois, il est occupé à retourner vers la Chine pour le moment. Et on dit toujours que l'Europe est peu influente politiquement. Je reviens du sommet de la SADEC. J'ai parlé avec tous les chefs d'État. Le Zimbabwe était évidemment à l'ordre du jour. J'ai parlé avec tous les chefs d'État: l'Angola, le Mozambique, tous. J'ai épinglé cette question du bateau chinois. Il y a eu les dockers qui ont réagi, mais il y a eu aussi les différents pays qui ont refusé d'accueillir le bateau. Et le bateau, selon les dernières informations que j'ai, est renvoyé en Chine. Ça ne vaut que ce que ça vaut, la petite Europe a juste essayé de faire son petit devoir d'Européen avec de la soft diplomacy et avec les dockers, évidemment, avec la voix du peuple. Tout ça a été utile mais je voulais le dire parce que ça prouve aussi, quand même, que les Africains ne sont pas prêts à accepter n'importe quoi en matière de diplomatie et en matière de politique non plus.

 
  
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  Ana Maria Gomes, rapporteur. − Madame la Présidente, j’aimerais rappeler que notre collègue Erika Mann, le rapporteur pour avis de la commission du commerce international, n’a pas pu être présente parmi nous. Elle m’a demandé de souligner le point suivant, qui est abordé dans le rapport: il s’agit de l’importance pour l’Afrique du développement de sa propre stratégie à l’égard de la Chine, à savoir que cette stratégie peut renforcer la nature réciproque des relations commerciales entre la Chine et l’Afrique si elle privilégie une plus grande participation des travailleurs africains dans les projets chinois en Afrique, une plus grande disposition de la part de la Chine à transférer la technologie et un meilleur accès aux marchés chinois pour les exportations africaines.

rapporteur. − (FR) Permettez-moi maintenant de dire merci au Commissaire Michel et aux autres collègues pour leurs commentaires et les bonnes questions qu'ils ont posées.

Je peux comprendre le commissaire quand il observe que l'Europe ne peut pas dicter unilatéralement des conditions à l'Afrique, surtout quand la Chine ne les applique pas. Mais c'est justement la raison pour laquelle nous, Européens, devons investir plus pour renforcer les sociétés civiles africaines, les institutions telles que les parlements, les médias libres, les universités, etc. pour que les Africains eux-mêmes demandent et imposent des conditions telles qu'elles résultent des OMD et qu'ils veillent à leur respect.

Je suis tout à fait d'accord avec le commissaire, d'ailleurs cela se voit dans le rapport, quand il observe que la rapidité dans le déboursement de l'aide ou des financements européens est capitale pour l'Afrique et que l'action coordonnée et le partage de tâches entre les États membres et la Commission sont essentielles pour faire face en ce moment à cette aisance avec laquelle la Chine débourse en Afrique sans bien en peser les conséquences, mis à part son intérêt propre.

En ce qui concerne les critères du cadre de l'OCDE, bien sûr que c'est à la Chine de décider de son intérêt de les adopter, mais je crois que c'est notre rôle, d'après, d'ailleurs, nos expériences positives et négatives en Afrique, d'inciter la Chine à comprendre que son intérêt à long terme est d'assurer que les ressources naturelles africaines sont durablement exploitées et non pas ravagées et que, sans bonne gouvernance, rien n'est garanti, même pas à la Chine.

Finalement, peut-être qu'une des conséquences positives de la présence croissante de la Chine en Afrique, c'est déjà ce débat et le rapport que nous allons adopter demain. La Chine nous a quand même aidés à comprendre en Europe qu'il y a un grand potentiel en Afrique et qu'il y a des success stories en Afrique. Et j'espère bien que votre voyage, Monsieur le Commissaire, cette semaine en Chine, vous permettra de contribuer à encourager l'engagement constructif, qui est proposé dans ce rapport, à la Chine et aux Africains, et de rappeler en fait à la Chine, comme vous l'avez dit, en ce qui concerne non seulement le Tibet, non seulement le Myanmar, mais, aussi en ce qui concerne l'Afrique, en particulier le Zimbabwe et le Darfour, ses responsabilités en tant que membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies. Félicitations, Monsieur le Commissaire; si, en fait, votre action a contribué à faire renvoyer ce bateau en Chine. C'est très positif.

 
  
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  La Présidente. – Le débat est clos.

Le vote aura lieu mercredi à 11 h 30.

Déclarations écrites (article 142)

 
  
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  Filip Kaczmarek (PPE-DE), par écrit. – (PL) Le rapport de Madame Gomes est indubitablement une analyse détaillée et intéressante de la présence de la République populaire de Chine en Afrique. Je ne peux cependant pas m’empêcher de penser qu’entre le commerce, les investissements, l’infrastructure, l’énergie et les autres questions importantes, on a perdu de vue, dans ce rapport, une question d’une importance fondamentale du point de vue non seulement de l’institution que nous représentons – le Parlement européen -, mais aussi de la commission du développement, qui est responsable de ce rapport. La protection des droits de l’homme à l’échelle du monde est une priorité absolue du Parlement européen – on le constate sur la page d’accueil de son site internet. Si l’on croit vraiment dans ce slogan, on ne peut se limiter dans la partie consacrée à la gouvernance et aux droits de l’homme à:

- un résumé superficiel des activités chinoises (situées dans un contexte le plus positif possible) au Darfour, alors que nous savons tous parfaitement bien que la situation ne s’est en rien améliorée dans la région;

- une seule phrase pour relater la violation de l’embargo de l’ONU sur la vente d’armes à l’Afrique par la République populaire de Chine – qui, ne l’oublions pas, est un membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies;

- ou au bref commentaire sur la question de la coopération chinoise avec des gouvernements responsables de violations des droits de l’homme, comme le Zimbabwe.

«L’UE ne devrait pas sous-estimer le pouvoir de critiquer la Chine publiquement ou en privé», comme l’écrit Madame Gomes dans la justification de son rapport. C’est dommage que nous ne l’ayons pas fait dans ce rapport. Merci pour votre attention.

 
  
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  Eija-Riitta Korhola (PPE-DE), par écrit. – (FI) Le rapport de Madame Gomes enrichit grandement le débat sur ce défi majeur pour la coopération internationale. Encore une fois, je la remercie pour sa clairvoyance.

D’une part, il semblerait que l’Afrique ait tiré parti de ses relations économiquement étroites avec la Chine. L’impulsion économique dont elle bénéficie grâce à son principal partenaire commercial, Europe mise à part, a réduit la pauvreté. La Chine voit dans l’Afrique non pas un fardeau, mais une opportunité au potentiel économique énorme.

D’autre part, on constate que la position de la Chine en Afrique comporte des aspects très préoccupants. L’exportation d’armes, les investissements irresponsables, l’exploitation de matières premières – l’Europe ne reconnaît que trop bien les signes du néocolonialisme au milieu de toute cette ferveur. Il faut se demander si le pouvoir économique doit servir à encourager une obsession à devenir une superpuissance. C’est ce qu’on observe, par exemple, au Darfour.

Une autre question concerne la façon dont l’UE doit réagir. À de nombreux égards, la Chine est le rival de l’Europe en Afrique, et plusieurs personnes dans cet hémicycle ont indiqué qu’il ne sert à rien de sermonner une superpuissance en développement qui se respecte. Le rapport opte avec sagesse pour une approche constructive. Dans ce contexte, nous devons définir notre rôle: rappeler à la Chine les obligations qui vont de pair avec les partenariats. Nous devons unir nos forces pour atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement, prévenir les conflits et garantir un développement durable.

La coopération est essentielle dans la lutte contre les changements climatiques. Bali a fait naître l’espoir que la Chine, en tant que grand pollueur, et l’Afrique, en tant que victime innocente, y participeront.

Pour terminer, nous devons tenir compte du fait que la Chine ne partage pas les notions européennes de respect des droits de l’homme. C’est pourquoi nous devons faire davantage pour assurer la démocratie durable, l’État de droit et la bonne gouvernance en Afrique. La solution ultime au défi chinois ne se trouve pas en Chine, mais en Afrique même.

 
  
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  Bogusław Rogalski (UEN), par écrit. – (PL) La nouvelle puissance qu’est la Chine a une influence énorme sur le processus de développement durable en Afrique, mais il ne faut pas oublier que les pays d’Afrique sont responsables des conséquences globales de la présence d’étrangers et d’organisations ou de gouvernements étrangers sur leur territoire.

L’UE comme la Chine s’efforcent de promouvoir la sécurité, la paix et le développement durable en Afrique, mais l’UE est le premier bailleur de fonds et le principal partenaire commercial de l’Afrique en l’état actuel des choses. Même si la Chine a acquis une grande expérience en sortant 400 millions de ses citoyens de l’extrême pauvreté au cours des 25 dernières années, nous ne devons pas oublier les énormes inégalités sociales et économiques, ainsi que la dégradation alarmante de l’environnement naturel, la restriction des libertés fondamentales et les normes du travail insuffisantes.

Nous devons surveiller l’exploitation des ressources naturelles africaines car cela peut entraîner leur épuisement total et la généralisation de la corruption, ainsi qu’un renforcement de l’inégalité sociale et la naissance de conflits, des phénomènes qui auront une influence négative sur le développement des pays d’Afrique. Ce sont précisément le commerce et la consommation occidentaux qui sont à l’origine de l’accroissement de la demande chinoise de ressources naturelles africaines, ce qui se traduit par une augmentation des émissions de CO2 dans les pays en développement. Un élément non moins important est le fait que l’adhésion à l’OMC comporte une série d’obligations que la Chine n’honore pas comme il se doit. L’UE devrait soulever la question de la justice en ce qui concerne le commerce, le climat et d’autres problèmes dans le cadre d’une coopération trilatérale avec la Chine et l’Afrique.

 
  
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  Toomas Savi (ALDE), par écrit. – Monsieur le Président, le fait le plus inquiétant en ce qui concerne la politique de la Chine en Afrique est qu’elle lui offre une aide et des investissements inconditionnels. L’aide au développement offerte par l’Union européenne a toujours été liée à des conditions strictes concernant les progrès démocratiques, la reconnaissance de l’État de droit et la bonne gouvernance, ainsi que le respect des droits de l’homme.

La coopération «inconditionnelle» et pragmatique de la Chine avec des régimes répressifs en Afrique sape les efforts réalisés par l’Union européenne pour encourager le renforcement de la démocratie en Afrique et nous incite à mettre en place de nouvelles politiques plus flexibles en ce qui concerne ce continent. L’aide conditionnelle, même si elle est parfois extrêmement efficace, peut aussi être perçue comme une façon de traiter l’autre avec condescendance et la Chine, désireuse de satisfaire ses besoins grandissants en ressources, évite d’y recourir.

L’intérêt et les activités grandissants de la Chine en Afrique menacent les intérêts européens sur ce continent et si nous voulons éviter de perdre du terrain en Afrique, nous devons proposer des moyens nouveaux et plus séduisants d’encourager la transition démocratique dans les pays d’Afrique. D’autre part, cependant, nous ne devons pas répugner à entamer un dialogue constructif entre l’Union européenne et la Chine ainsi que d’autres parties prenantes importantes, susceptibles d’être intéressées par la formation d’une stratégie multilatérale cohérente en ce qui concerne l’Afrique.

 
  
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  Bernard Wojciechowski (IND/DEM), par écrit. – Napoléon disait qu’il fallait laisser la Chine dormir car le jour où elle se réveillerait, elle ferait trembler le monde. Mauvaise nouvelle: la Chine s’est levée mais nous nous sommes endormis. Nous faisons encore face aux séquelles du règne colonial, dans les États colonisés comme dans les États colonisateurs, mais nous avons fermé les yeux sur la possibilité que cette tragédie se reproduise. L’accusation selon laquelle la Chine exerce une forme de néocolonialisme n’est en rien injustifiée. La Chine a les mêmes intérêts dans l’exploitation des pays d’Afrique que ceux qu’on eu certains de nos pays européens au fil des siècles. Nous avons tiré des leçons à grands frais, mais la Chine doit encore apprendre à appliquer les droits de l’homme chez elle tandis qu’elle forme son expérience dans le règne colonial. Nous nous trouvons sur une pente dangereuse avec la soif de pétrole et de ressources africaines de part de la Chine. Nous devons envoyer un signal clair à Beijing: s’occuper d’abord des problèmes intérieurs dans le domaine des droits de l’homme, puis montrer au monde qu’il souhaite véritablement se vouer aux objectifs de développement en Afrique et pas simplement s’en servir pour parvenir à ses fins.

 
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