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Compte rendu in extenso des débats
Jeudi 25 février 2010 - Bruxelles Edition JO

5. Sécurité ferroviaire, dont le système européen de signalisation (débat)
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Procès-verbal
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  Le Président. – L’ordre du jour appelle la déclaration de la Commission sur la sécurité ferroviaire, dont le système européen de signalisation.

 
  
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  Siim Kallas, vice-président de la Commission.(EN) Monsieur le Président, l’accident de train qui s’est produit à Buizingen le lundi 15 février 2010 a été une terrible tragédie. Je comprends qu’à la suite de ce grave accident plusieurs questions d’ordres technique et politique concernant la sécurité ferroviaire puissent être posées.

Avant tout, mes pensées vont aux victimes de cette tragédie et à leurs proches. Il est toujours difficile de trouver des mots de réconfort en ces tristes occasions, et le silence est parfois plus éloquent. Les causes de l’accident ne sont pas encore totalement établies, et une enquête technique a été lancée conformément aux dispositions de la directive de l’UE sur la sécurité.

La responsabilité de cette investigation incombe à l’organisme d’enquête belge. Cette investigation devra être accomplie indépendamment de toute enquête judiciaire. L’objectif de l’enquête technique n’est pas de condamner qui que ce soit, ni de trouver les responsables, mais bien d’identifier les causes de l’accident dans le but d’améliorer la sécurité ferroviaire et d’éviter d’autres accidents.

L’organisme d’enquête belge a demandé le soutien de l’Agence ferroviaire européenne pour ses investigations. Deux enquêteurs de l’agence se sont joints à l’équipe belge chargée de l’enquête quelques heures à peine après l’accident.

Je tiens à souligner que, dans la mesure où les causes de l’accident n’ont pas encore été déterminées, il ne nous appartient pas de tirer des conclusions. Je suis bien entendu disposé à clarifier certains points soulevés à la suite de cette tragédie et je partagerai avec vous mon point de vue sur la situation.

Comme c’est trop souvent le cas lorsqu’un accident ferroviaire se produit, d’aucuns insinuent qu’un lien existe entre les règles ou règlements européens et l’accident. Je souhaiterais d’abord être bien clair sur l’ouverture du marché. Parallèlement à l’ouverture à la concurrence du secteur du fret ferroviaire et à la mise en place d’exigences concernant la séparation des activités des gestionnaires de l’infrastructure et des sociétés d’exploitation des chemins de fer, un cadre réglementaire strict régissant la sécurité ferroviaire et l’interopérabilité a été mis en place. Nous voulons nous assurer qu’un niveau élevé de sécurité ferroviaire sera maintenu, tout en reconnaissant les procédures et les méthodes spécifiques à chaque État membre dans ce domaine.

L’Agence ferroviaire européenne remet à intervalles réguliers des rapports sur la sécurité du réseau européen , et suit l’évolution de la situation dans les États membres.

Les indicateurs montrent que l’ouverture du secteur ferroviaire à la concurrence n’a eu aucun effet négatif sur la sécurité ferroviaire. Permettez-moi d’affirmer très clairement que toute proposition associant les niveaux de sécurité ferroviaire à l’ouverture du marché ferroviaire n’est, à mon sens, qu’un prétexte visant à éloigner le débat des véritables causes de l’accident.

La question de la coexistence de systèmes de contrôle ferroviaire nationaux et européens peut être envisagée en ces termes: plus de 20 systèmes nationaux différents sont utilisés en Europe à l’heure actuelle pour garantir la sécurité de la circulation ferroviaire. Ces systèmes mis au point au niveau national comportent une composante sur les voies et d’une composante en cabine. La composante sur les voies transmet des informations à l’ordinateur du train, et cet ordinateur applique les freins lorsqu’une situation dangereuse est détectée.

Pour que les systèmes fonctionnent, les trains et les lignes doivent par conséquent être équipés de systèmes compatibles. Or, les niveaux de sécurité et les performances des divers systèmes automatiques nationaux de protection des trains divergent dans ces systèmes nationaux, de même que les règles relatives à l’équipement des lignes et des locomotives.

L’incompatibilité des différents systèmes nationaux pose un problème majeur pour les trains internationaux car : ou bien il faut changer de locomotive à chaque frontière, ou bien il faut les doter d’autant de systèmes embarqués qu’il y a de systèmes sur les voies qu’elles empruntent. Il y a même des cas où différents systèmes nationaux coexistent dans un seul et même pays. Le Thalys, par exemple, doit être équipé de sept systèmes nationaux différents pour rouler dans quatre pays.

Pour cette raison, un système unique à usage européen a été conçu et développé, et son installation est en cours sur les principaux trains et lignes internationaux en Europe. Ce système européen de gestion du trafic ferroviaire s’appelle l’ERTMS – European Rail Traffic Management System.

En ce qui concerne la chronologie, nous pouvons dire que la plupart des systèmes nationaux ont été mis au point au début des années 1980, mais leur déploiement demande du temps et de l’argent. Dans la plupart des pays, seules quelques parties de réseaux nationaux et quelques locomotives sont actuellement équipées et cet aménagement partiel a pris environ 20 ans.

Les spécifications de l’ERTMS sont disponibles depuis 2000. Quelques projets pilotes ont été réalisés entre 2000 et 2005. Depuis 2005, plusieurs lignes équipées de l’ERTMS ont été mises en service. Actuellement, 10 États membres disposent de lignes équipées de l’ERTMS et des projets sont en cours dans presque tous les États membres. En Belgique, par exemple, la ligne qui relie Aix-la-Chapelle à Liège en est équipée, et les trains ICT qui circulent sur cette ligne en sont également équipés.

L’ERTMS a été créé essentiellement dans le but de promouvoir l’interopérabilité. Cela signifie la possibilité pour les locomotives de franchir les frontières, mais ce système est également reconnu pour offrir une sécurité accrue. Il est aujourd’hui entièrement opérationnel mais, en raison du long délai nécessaire à l’installation à bord des trains et de la longueur des lignes, les systèmes nationaux existants continueront à coexister avec l’ERTMS sur ces lignes.

Des pays tiers comme Taiwan, pour ne citer qu’un exemple, ont eux aussi opté pour l’ERTMS, et pas seulement pour des raisons d’opérabilité: Taiwan a investi dans l’ERTMS simplement parce que le système est le meilleur actuellement disponible sur le marché.

Plusieurs questions posées portaient sur une comparaison de la situation entre États membres. Il est assez complexe et pas vraiment utile d’établir un classement des États membres et de faire des comparaisons significatives. Tout dépend du choix des indicateurs, de la période de référence, et de la qualité des données présentées. Un ou deux accidents graves peuvent également avoir une incidence considérable sur le type de classement choisi.

Les données générales montrent que les performances belges sont moyennes. Il est vrai, cependant, que la Belgique affiche un retard sur la moyenne européenne en termes de voies équipées d’un système automatique de protection des trains, qu’il soit national ou européen.

 
  
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  Mathieu Grosch, au nom du groupe PPE.(DE) Monsieur le Président, Monsieur Kallas, je souhaiterais vous remercier pour vos explications. Dans le contexte de l’accident de Buizingen, il est bien sûr important pour nous tous de respecter les victimes et l’enquête. Pour cette raison, nous ne devons pas tirer de conclusions hâtives au sujet de l’accident et, plus important encore, nous ne devons pas commencer à porter des accusations.

Il m’a semblé que la Commission avait bien fait de rejeter catégoriquement l’accusation portée par la société nationale des chemins de fer belges, selon laquelle le développement du système européen de gestion du trafic ferroviaire aurait pris trop de temps. Nous savons que la sécurité reste une priorité nationale et que cela continuera d’être le cas. Au niveau européen - et cela inclut aussi bien la Commission que le Parlement -, nous avons toujours regretté que les sociétés de chemins de fer n’accordent pas une priorité plus grande à la sécurité et à l’interopérabilité entre les différents systèmes en Europe.

Lorsque des accidents se produisent, de nouvelles propositions sont souvent faites dans un contexte politique. Je dois dire que, dans ce cas-ci tout était en place, tant au niveau de la législation que de la technologie. La seule chose qui manquait peut-être était la volonté d’accorder une haute priorité à la technologie. Depuis le milieu des années 1990, la technologie est disponible pour assurer une transition sûre entre le système européen et le système belge avancé, également appelé système TBL 1+. Il n’y a eu ni manque de temps ni manque d’installations techniques.

C’est l’avenir qui m’importe et je souhaiterais insister sur les points suivants :

Premièrement, nous ne devons en aucune circonstance réduire la formation dans le secteur ferroviaire. Cela n’est pas et ne sera pas une des obligations de l’UE. Les chemins de fer disposent d’un personnel hautement qualifié et cela doit rester ainsi à l’avenir.

Deuxièmement, il nous faut obtenir des plans de conversion fermes et contraignants de la part des sociétés de chemins de fer et des pays. Il ne suffit plus de tout laisser à la bonne volonté de chacun. Nous avons besoin d’un calendrier précis et nous aurons bientôt l’occasion, au Parlement, de fixer des objectifs spécifiques.

Ma troisième proposition est que les voyageurs devraient avoir le droit de savoir si la portion de voie et le matériel roulant qu’ils empruntent pour voyager répondent aux normes de sécurité les plus strictes. C’est le niveau minimum d’informations qui doivent être mises à la disposition des voyageurs à l’avenir. Nous devons également examiner les moyens d’en faire une exigence contraignante.

 
  
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  Saïd El Khadraoui, au nom du groupe S&D.(NL) Pour commencer, je souhaiterais, moi aussi, au nom du Groupe de l’alliance progressiste des socialistes et démocrates au Parlement européen, exprimer mes sincères condoléances aux victimes de la catastrophe ferroviaire de Buizingen et à leurs familles et amis.

Il nous faut effectivement attendre les résultats de l’enquête avant de tirer des conclusions concrètes et détaillées, bien sûr, mais cela ne change rien au fait que la sécurité ferroviaire doive continuer à faire l’objet d’une attention permanente à tous les niveaux, y compris au niveau européen, et nous devons par conséquent régulièrement évaluer, améliorer, compléter et ajuster la politique de sécurité. Je souhaiterais me joindre à mon collègue ainsi qu’à vous, Monsieur le Commissaire, pour déplorer que plusieurs personnes disposant d’importantes responsabilités en Belgique aient tenté de rejeter la responsabilité de l’accident sur l’Europe, ou aient tout au moins donné cette impression. Le retard de développement du système européen de gestion du trafic ferroviaire (ERTMS) a été invoqué, entre autres, pour expliquer qu’en Belgique aujourd’hui, en 2010, seules quelques locomotives sont équipées d’un système automatique de freinage.

D’autre part, Mesdames et Messieurs, soyons bien clairs sur un point et soyons francs: le développement de cette bonne idée - un système de signalisation unique destiné à remplacer les 20 systèmes distincts - a pris plus de temps qu’on ne l’avait espéré ou prévu. Cela est, bien sûr, imputable à sa complexité technique et au fait que de très nombreux pays, c’est-à-dire 27, ou un peu moins à l’époque, ont dû s’accorder sur une norme à appliquer, ,. Cela a aussi, bien sûr, des conséquences budgétaires. Pourtant, comme vous l’avez dit à juste titre, cela n’a pas empêché un seul État membre de mettre au point son propre système ou de commencer à utiliser une sorte de version embryonnaire de l’ERTMS.

J’estime que nous devons maintenant porter nos regards vers l’avenir et nous demander comment contribuer à améliorer la sécurité des chemins de fer. Je crois que nous pouvons aussi apporter notre contribution sur plusieurs fronts au niveau européen. Nous pouvons le faire, premièrement, en poursuivant le développement de l’ERTMS. Un plan de développement existe. En 2009, nous avons réservé 240 millions d’euros, sur le budget destiné aux réseaux transeuropéens de transport (TEN-T), en vue d’aider les États membres dans ce domaine.

Deuxièmement toutefois, et je pense que ceci est une tâche importante qui incombe à la Commission et à l’Agence ferroviaire européenne, nous devons également veiller à ce que la législation européenne existant en matière de sécurité soit appliquée sur le terrain. Je citerai l’exemple de la directive 2004/49/CE concernant la sécurité des chemins de fer communautaires. Celle-ci prévoit, entre autres, la création, dans chaque État membre, d’une autorité de sécurité, indépendante des entreprises ferroviaires et des gestionnaires de l’infrastructure, dont la tâche est de vérifier, promouvoir, faire appliquer, et d’instaurer un cadre réglementaire en matière de sécurité. J’ai l’impression, Mesdames et Messieurs, que cela ne fonctionne pas particulièrement bien en Belgique, et je pense qu’il faudrait organiser une sorte d’audit afin d’examiner si les États membres ont bien la capacité de garantir cette sécurité de manière proactive dans leurs systèmes ferroviaires nationaux. C’est une mission que je souhaiterais vous voir confiée.

 
  
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  Dirk Sterckx, au nom du groupe ALDE.(NL) Je tiens, moi aussi, à présenter mes condoléances aux victimes de la part de mon groupe et je tiens moi aussi, bien sûr, à attendre les résultats de l’enquête. J’espère qu’elle sera réalisée dans les meilleurs délais, mais de la manière la plus approfondie possible.

Dans mon pays, plusieurs questions ont été soulevées sur la nature de l’approche européenne concernant les chemins de fer. Je dois être honnête avec vous: je suis scandalisé que certaines personnes nous aient accusés de négliger la sécurité. J’étais le rapporteur du Parlement sur la directive concernant la sécurité des chemins de fer à laquelle M. El Khadraoui vient de faire référence, et je suis fier du travail que nous avons accompli à l’époque. Nous nous étions dit que nous devions nous montrer très exigeants sur la sécurité dans tous les États membres et que nous devions mettre en place un cadre européen pour cela et pour fixer des exigences. Nous avons eu la plus grande difficulté à la faire adopter par les États membres. Je constate - comme M. El Khadraoui l’a mentionné à juste titre - que dans certains pays, dont le mien hélas, la mise en application de cette directive au niveau national est en fait mal organisée. J’espère que vous examinerez à nouveau cela attentivement, Monsieur le Commissaire. Peut-être cette Assemblée devrait-elle, elle aussi, réexaminer cette directive et resserrer le cadre, comme l’a dit M. Grosch. Il est donc faux de dire que nous négligeons la sécurité, bien au contraire.

Deuxièmement, le règlement sur les droits des passagers contient un paragraphe dont nous espérions qu’il ne serait jamais nécessaire: il concerne les versements d’avances pour les personnes tuées ou blessées dans des accidents ferroviaires. Je me réjouis de l’annonce faite par la Société nationale des chemins de fer belges (SNCB) qu’elle utilisera ce système et procèdera à des versements d’avances. En effet, il fut un temps où cela n’aurait pas été le cas.

Certains affirment que l’ouverture du marché a rendu les chemins de fer dangereux. Je tiens à m’inscrire en faux contre de tels propos. Ce n’est pas vrai, comme le confirmeront les données les plus récentes, c’est-à-dire depuis 2008, de l’Agence ferroviaire européenne. Les pays les plus performants en 2008 étaient le Royaume-Uni et les Pays-Bas, deux pays qui ont ouvert leurs marchés.

J’estime également qu’il convient de tenir compte du personnel, des travailleurs sur le terrain: les conducteurs de train, le personnel de gare, les gestionnaires. Nous devrions réexaminer leur situation et faire en sorte que la sécurité soit la première de nos préoccupations, non seulement au niveau de leur formation, mais aussi de l’organisation de leur travail et de la culture d’entreprise dans son ensemble. En conclusion, Monsieur le Président, je dis que nous ne devons pas perdre de vue le fait que les chemins de fer comptent toujours parmi les moyens de transport les plus sûrs.

 
  
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  Isabelle Durant, au nom du groupe Verts/ALE. – Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, pour moi aussi le tragique accident de la semaine dernière est la pire catastrophe ferroviaire que la Belgique ait connue depuis 2001, époque d'ailleurs où j'occupais personnellement la fonction de ministre de la mobilité et des transports. Mes pensées vont une nouvelle fois, évidemment, à notre collègue, Claudia Candeago, mais aussi à toutes les autres victimes de ce drame, à leurs proches, ainsi qu'à tous les cheminots endeuillés.

Pas plus que ceux qui ont parlé avant moi je ne tirerai de conclusions. L'enquête est en cours et nous n'anticiperons pas sur ses résultats. Toutefois, il est clair que, au niveau belge, on peut regretter que les chemins de fer aient mis autant de temps à se doter d'un système automatique de protection des trains. Et certains l'ont dit avant moi. Quand j'ai entendu, au lendemain de la catastrophe, alors qu'on ne pouvait pas évoquer de raisons budgétaires, la mise en cause du trop lent développement des standards d'interopérabilité européens pour expliquer cet accident, j'ai trouvé cela inacceptable et, d'emblée, j'ai considéré qu'il s'agissait là d'un mauvais procès qu'on faisait à l'Europe.

L'ERTMS (European Railways Traffic Management System) offre au contraire aux compagnies une chance d'investir dans la sécurité de façon coordonnée et interopérable. Il faut se débarrasser des innombrables normes nationales qui freinent le développement et la compétitivité, alors que l'ETCS (European Train Control System) évolue. Évidemment qu'il évolue, et il évoluera encore. C'est la condition pour conserver un très haut niveau technologique. Et je ne doute pas que dans les cinq ou dix années à venir, beaucoup d'évolutions se produiront encore.

De tels accidents, si exceptionnels soient-ils, est-il besoin de le dire, nous rappellent tout de même qu'on peut toujours faire mieux en matière de sécurité, et je voudrais avancer quelques propositions à cet égard.

D'abord, vous le savez, Monsieur le Commissaire, nous discutons pour le moment des réseaux transeuropéens de transport, de leurs conditions et de leurs critères. Je pense que, justement, le déploiement de l'ERTMS à travers toute l'Europe pourrait, s'agissant des réseaux européens, devenir une priorité. Je pense aussi que dans ce cadre, on devrait arrêter des dates butoirs concernant, notamment, les moyens dont l'ensemble des pays et des réseaux devront être obligatoirement équipés.

Je pense enfin qu'il faut donner la priorité à la sécurité par rapport à l'ouverture des marchés en exigeant des nouveaux opérateurs qui exploitent des trains sur différents réseaux nationaux qu'ils s'adaptent pendant quelque temps encore au système automatique de protection existant sur ces réseaux et qu'ils équipent, par conséquent, leurs locomotives des récepteurs et des équipements de cabine correspondants.

Enfin, je crois que l'Agence européenne des chemins de fer pourrait, elle aussi, apporter un précieux concours pour une meilleure intégration des autorités nationales de sécurité qui permette, par exemple, de contribuer à l'homologation des matériels.

(Le président retire la parole à l'oratrice)

 
  
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  Derk Jan Eppink, au nom du groupe ECR .(NL) L’enquête sur les causes de l’accident ferroviaire de Buizingen n’est pas encore achevée et je ne ferai pas de commentaire à ce sujet, mais je suis arrivé à la conclusion suivante: Lorsqu’il y a un accident de train au Royaume-Uni, les gens s’empressent de l’attribuer à la privatisation des chemins de fer. Les chemins de fer belges (SNCB) reçoivent, comparativement, les subventions les plus élevées de toute l’Union européenne. La Belgique accorde 32 centimes d’euro par voyageur/kilomètre à ses chemins de fer. La France arrive en deuxième position avec 24 centimes d’euro. Les Pays-Bas accordent 15 centimes d’euro, et le Royaume-Uni 4 centimes d’euro. Malgré toutes ces subventions, la SNCB enregistre toujours un déficit de 10 milliards d’euros. Où va donc l’argent?

Lorsque je vois l’infrastructure de la SNCB, le manque d’entretien m’apparaît frappant. Tout est vieux et délabré. Se pourrait-il que le système de sécurité soit lui aussi négligé de temps à autre? Peut-être que, à cause de la puissance des syndicats, trop d’argent est alloué à la rémunération du personnel? En Belgique, les chemins de fer sont un fief socialiste et sont mal gérés. Voilà effectivement des questions qu’il convient de poser, et auxquelles la SNCB ne pourrait pas répondre en invoquant l’excuse du manque de moyens financiers!

 
  
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  Jacky Hénin, au nom du groupe GUE/NGL. – Monsieur le Président, lorsqu'en novembre dernier, l'honorable député Simpson avait déclaré dans cette enceinte: «Bien que le système ferroviaire communautaire soit très sûr et que des progrès aient été enregistrés ces dernières années grâce à la libéralisation du marché», j'avais failli m'étrangler. Il avait toutefois poursuivi par: «de récents accidents mortels ont soulevé des questions quant à la sécurité».

Depuis l'accident de Buizingen, son bilan terrible en pertes humaines et les lourdes souffrances physiques et psychologiques qu'il entraîne sont venus nous rappeler avec force qu'il est grand temps d'ouvrir sérieusement le débat sur la sécurité ferroviaire. Tordons tout de suite le cou à l'idée que tout accident est, par nature, imprévisible. Le premier facteur d'insécurité sur l'ensemble des réseaux ferroviaires européens est une conséquence directe de la séparation entre la gestion des infrastructures ferroviaires et la gestion du matériel roulant. Cette séparation – il faut le rappeler ici avec force – a été imposée contre le plus élémentaire bon sens cheminot par la Commission pour permettre l'ouverture à la concurrence du rail. Elle est hautement accidentogène. À cause de cette séparation, au nom de la rentabilité la plus élevée, l'entretien du réseau ferré européen est sacrifié. Vous pouvez essayer de gagner du temps avec la mise en avant, comme seule perspective de résolution des problèmes, de l'utilisation des meilleures techniques du moment. Sur le fond, c'est d'une autre politique ferroviaire dont nous avons besoin en Europe. Si, chaque année, il y a moins de cheminots, moins d'entretien, moins d'investissement, moins de formation, nous devrons inévitablement à nouveau parler d'accidents et rendre des hommages attristés. La vraie sécurité ferroviaire impose à l'Union de tourner la page de la concurrence pour ouvrir celle de la coopération.

En conclusion, mes chers collègues, au sortir de ce débat, nul ne pourra plus ignorer quelles sont ses responsabilités. Pour ce qui me concerne, je refuse d'être complice de malveillance. Sans changement …

(Le président retire la parole à l'orateur)

 
  
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  Philip Claeys (NI).(NL) Je souhaiterais commencer par le simple constat que les charges fiscales belges comptent parmi les plus lourdes au monde et, malgré tout, dans ce pays ingouvernable, les contribuables - surtout en Flandre - en ont très peu pour leur argent. Le système ferroviaire est une illustration parfaite de cela. Il est complètement dépassé et caractérisé par de longs et fréquents retards, et par des wagons bondés aux heures de pointe.

La direction des chemins de fer belges (SNCB) est extrêmement politisée et inefficace, et il y a une chose qui caractérise la politique belge, c’est que, quand quelque chose va mal, personne n’est responsable de rien. En 2001, un accident de train similaire à celui de la semaine dernière à Buizingen s’est produit à Pécrot. Il y a neuf ans, tout le monde croyait que des mesures sérieuses seraient prises pour améliorer le système de sécurité; mais cela n’a pas été le cas. Dans l’attente de la mise en place de l’ETCS (European Train Control System), la Belgique a mis au point son propre système, mais il est arrivé bien trop tard et il s’est révélé extrêmement inadapté.

La leçon que nous devons tirer est qu’il faut investir davantage dans la sécurité, et que les divers systèmes existants doivent être mieux harmonisés. S’il se révèle alors impossible de parvenir à une interopérabilité efficace, il faudra alors encourager au maximum le passage à l’ETCS européen, car il n’est pas bon qu’un train Thalys circulant entre Paris et Amsterdam, par exemple, soit doté de pas moins de sept systèmes de sécurité différents.

 
  
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  Werner Kuhn (PPE).(DE) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, la collision entre deux trains de banlieue à Bruxelles, donnant lieu à ce terrible accident, nous a tous profondément attristés. Nos pensées vont vers les familles et les amis des victimes.

Après des catastrophes de ce type, la première réaction consiste souvent à trouver quelqu’un à blâmer. Cependant, l’Union européenne, la Commission et les dispositions relatives à la sécurité que nous avons introduites dans la directive 2004/49 ne doivent pas servir de boucs émissaires dans cette affaire. Par ailleurs, il importe, bien sûr, de savoir si nous devrions renforcer les dispositions relatives à la sécurité. Les enquêtes sur cet accident n’étant pas encore achevées, nous ne pouvons encore espérer des résultats parlants. La question essentielle que nous devons nous poser revient à savoir si cet accident aurait pu être évité. Nous ne pouvons pas exclure l’erreur humaine ou les défaillances techniques, et ces deux éléments jouent un rôle dans la sécurité ferroviaire. Tous les exploitants ferroviaires, aussi bien publics que privés, ont l’obligation d’apporter le niveau nécessaire de sécurité. Les sociétés de chemins de fer nationales doivent faire en sorte de respecter les normes appropriées en matière de sécurité.

Je n’ai pas de leçons à donner en évoquant la situation allemande. Je veux simplement dire que, en Allemagne, nous avons tenté de mettre en application la directive dans sa totalité. Là où existe la possibilité d’une erreur humaine, des systèmes techniques doivent être en mesure d’intervenir. Je me souviens de la manette «homme mort» qui actionnait automatiquement les freins lorsqu’elle n’avait pas été serrée pendant une minute. Si un train franchit un signal d’arrêt au rouge, les freins sont eux aussi automatiquement actionnés. Nous devons nous doter de systèmes de ce type. Le système européen de contrôle des trains doit être mis en place de manière à pouvoir agir sur des éléments extérieurs.

Les membres de la Commission des transports et du tourisme œuvreront ensemble pour procéder aux évaluations nécessaires et pour tirer les conclusions nécessaires en ce qui concerne les dispositions relatives à la sécurité.

 
  
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  Marc Tarabella (S&D). - Monsieur le Président, la catastrophe ferroviaire de Buizingen, près de Bruxelles, a fait 18 victimes et plus de 160 blessés. Évidemment, nos premières pensées vont aux familles. On ne connaît pas encore les causes de l'accident – une enquête est en cours – et il faut s'interroger sur l'évaluation de la sécurité ferroviaire en Europe, État membre par État membre.

Cette évaluation doit, bien entendu, porter sur les systèmes de sécurité, sur l'état de leur mise en œuvre, sur leur interopérabilité et sur leur efficacité. Mais cette évaluation du niveau de sécurité des réseaux ferroviaires européens doit se comprendre au sens large et, en particulier, intégrer une évaluation des conditions de travail des cheminots, étant donné que le meilleur garant de la sécurité, c'est d'abord le cheminot.

Je demande donc à la Commission de mettre en œuvre une évaluation de la sécurité des réseaux ferroviaires européens au travers d'une approche globale qui parte du lancement du processus de libéralisation du rail. C'est clair: l'heure est venue d'évaluer sans tabous les résultats concrets de ces politiques de libéralisation et de démantèlement des services publics. Quelle en a été la valeur ajoutée? Qui en a bénéficié? Et qui en a souffert?

L'objectif consiste à comparer la mise en œuvre des normes européennes de sécurité et de signalisation avec les conditions de travail, depuis que cette libéralisation du rail au sein de chaque État membre est devenue réalité. La Commission doit donc mener une réflexion plus générale sur le rôle des services publics. Le PS – le parti auquel j'appartiens – demande depuis longtemps une action positive de l'Union européenne pour protéger et développer les services publics. C'est l'idée d'une directive-cadre sur les services d'intérêt général qui donnerait aux services publics la garantie d'un cadre législatif stable, d'un financement adéquat, dans le respect des principes d'universalité et d'égalité d'accès.

 
  
  

PRÉSIDENCE DE M. STAVROS LAMBRINIDIS
Vice-Président

 
  
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  Derk Jan Eppink (ECR).(NL) Je souhaiterais poser une question à M. Tarabella, que je tiens par ailleurs en haute estime. Il ne peut tout de même pas nier que les chemins de fer belges (SNCB) reçoivent les subventions les plus élevées d’Europe? Il ne peut pas tenir la libéralisation pour responsable, puisque le transport des voyageurs n’a pas été libéralisé, et il ne peut pas non plus invoquer d’autres prétextes.

Je signale également qu’il parle au nom du parti socialiste francophone belge (PS), le parti qui contrôle en grande partie la SCNB par le biais des syndicats. Si ce système ferroviaire politisé gérait mieux les chemins de fer, ce genre de choses ne se produirait pas.

 
  
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  Marc Tarabella (S&D). - Monsieur le Président, je répondrai simplement à M. Eppink qu'ici, nous ne sommes pas à une tribune électorale. Une catastrophe est survenue et a fait des victimes – d'autres se sont produites dans le passé – et il est normal que l'on s'interroge sur ses causes. Les enquêtes sont en cours, il faut les laisser se dérouler.

Un facteur ne doit toutefois jamais être ignoré, c'est le facteur humain. Dans toute libéralisation – je sais que vous défendez les libéralisations, moi je les défends beaucoup moins, et pas du tout dans les services publics –, un facteur humain est négligé. Une pression terrible s'exerce sur le personnel, qui fait des heures «à n'en plus finir», en tout cas de manière plus longue et sans temps de repos. Quand on est conducteur de locomotive, on engage la sécurité des passagers. Il me paraît dès lors important que l'on se pose la question de savoir quelles sont les conditions de travail et leur évolution. Cela me paraît être un élément important.

 
  
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  Joe Higgins (GUE/NGL).(EN) Monsieur le Président, l’épouvantable accident de train qui s’est produit près de Halle a été une affreuse tragédie pour les victimes, leurs familles, collègues de travail et amis. L’important, aujourd’hui, est de tirer les leçons de ce drame, pour éviter que d’autres accidents ne se produisent à l’avenir. Pour ce faire, il est crucial d’entendre distinctement la voix des cheminots et d’en tenir compte pour renforcer la sécurité du rail aussi bien pour les travailleurs que pour les passagers.

Il est effectivement scandaleux d’entendre un conservateur britannique, un député de ce Parlement, calomnier et dire du mal des travailleurs belges du rail au cours de son intervention, alors qu’il est tout à fait clair que les politiques de néolibéralisation et de dérégulation ont causé d’énormes dommages à notre système ferroviaire public. On constate, en fait, une énorme frustration parmi les travailleurs belges du rail. C’est ce qui est apparu clairement des grèves qui se sont produites spontanément dans les jours qui ont suivi le drame, en réaction à l’accident. C’est le troisième incident grave en Belgique en neuf mois.

À la suite du drame survenu précédemment en Belgique, en 2001, de grandes mesures de sécurité ont été promises mais n’ont jamais été mises en application. La réalité est que les travailleurs des chemins de fer belges sont soumis à une pression continue pour travailler plus longtemps, leurs trajets étant rallongés et leurs pauses réduites en nombre, ce qui implique une diminution de la sécurité. La politique perfide de libéralisation et de privatisation suivie par la Commission européenne menace, bien sûr, davantage encore la sécurité. Elle implique la prédominance des profits des principales sociétés de transport sur le reste. Il est clair que, pour garantir la sécurité, la meilleure structure consiste à maintenir l’infrastructure ferroviaire au sein du secteur public, avec un contrôle démocratique et d’indispensables investissements.

 
  
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  Georges Bach (PPE).(DE) Monsieur le Président, je voudrais moi aussi présenter mes condoléances aux familles concernées. Ce sera toutefois un bien maigre réconfort pour les personnes impliquées - les familles en deuil et les blessés graves - de nous entendre marteler que le rail est le mode de transport le plus sûr et que le nombre d’accidents est très faible par rapport aux accidents de la route.

Bien entendu, la question des circonstances se pose. Comment une catastrophe de cette ampleur a-t-elle pu se produire? Toutefois, comme cela l’a déjà été dit, il revient aux experts techniques et, plus tard aux tribunaux, d’y apporter une réponse. La question à laquelle nous devons répondre est la suivante: qu’est-ce qui a échoué dans le processus de création d’un marché commun des chemins de fer européens? Et, deuxièmement: comment peut-on éviter d’autres accidents en utilisant les moyens à notre disposition? Tout accident est un de trop.

En tant qu’ancien employé des chemins de fer, j’ai moi-même été confronté à ces changements. Je voudrais mentionner certains des problèmes qui, dans une certaine mesure, ont un impact sur la sécurité. Au début des années 1990, au lieu d’ouvrir le secteur du rail à la concurrence, nous aurions d’abord dû initier un processus d’harmonisation technique. Nous aurions alors surmonté dans les années 1990 tous les obstacles mentionnés par M. Kallas. Nous aurions dû ouvrir le marché à la concurrence à la condition exclusive d’une harmonisation technique. La fragmentation des entreprises a eu pour résultat que de nombreux acteurs ont été impliqués dans le système ferroviaire, or c’est un système qui ne fonctionne correctement que lorsqu’il est exploité en tant qu’entité unique. À mon sens, les États membres, les entreprises ferroviaires, les opérateurs d’infrastructure et la Commission qui a, comme cela l’a déjà été dit, introduit des directives et des règlements sans effectuer d’évaluation intermédiaire, partagent donc la responsabilité des accidents les plus récents. L’évaluation n’a été achevée que tout récemment. Les entreprises ferroviaires ont fait l’erreur d’opter pour la mauvaise stratégie et d’attendre trop longtemps un système européen. Elles n’ont eu de cesse d’essayer de réduire les coûts, d’employer du personnel ne disposant pas du niveau de compétences nécessaire, comme cela a déjà été mentionné, et elles ont trop peu investi.

Ce sont trois points sur lesquels je souhaite insister. Le financement doit être augmenté sans délai afin d’accélérer le programme de modernisation prévu.

(Le président retire la parole à l'orateur)

 
  
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  Silvia-Adriana Ţicău (S&D).(RO) Le transport ferroviaire est en général plus sûr, plus rapide et moins polluant que le transport routier. Toutefois, en 2007, environ 2 600 personnes ont été victimes d’accidents de train, et l’an dernier de nouveaux d’accidents ferroviaires se sont produits, impliquant des trains de voyageurs et de marchandises.

Le récent accident ferroviaire qui s’est produit en Belgique et qui a fait 20 morts et plus de 120 blessés a rappelé à notre attention, de la plus triste des manières, l’importance de la sécurité dans les transports ferroviaires. Malheureusement, la crise économique et financière a intensifié les difficultés financières auxquels sont confrontés les exploitants et les gestionnaires impliqués dans l’infrastructure ferroviaire. Il y a lieu de s’inquiéter vivement du fait que le manque de personnel spécialisé et de ressources financières pour la mise en application de l’ERTMS puisse être l’une des causes possibles de l’accident, à l’heure où des milliers de travailleurs du rail perdent leur emploi. J’invite les États membres et la Commission à prendre les mesures nécessaires en vue:

1. de moderniser l’infrastructure ferroviaire et le matériel roulant existant afin de garantir un transport ferroviaire sûr et efficace,

2. d’accorder la priorité aux investissements nécessaires pour la sûreté et la sécurité du transport ferroviaire, et

3. de développer de nouvelles infrastructures de transport ferroviaire et de mettre en place l’ERTMS.

 
  
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  Antonio Cancian (PPE).(IT) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, les récentes catastrophes ferroviaires qui ont ébranlé l’Europe - en Belgique aujourd’hui, en Italie hier - nous obligent à examiner les défauts du système et les mesures nécessaires à une amélioration des services en termes de sécurité.

Il est ahurissant, par exemple, de penser que l’Union européenne a lancé un système adéquat de contrôle du trafic ferroviaire - l’ERTMS - en l’an 2000 et que, malgré tout, 10 ans plus tard, ce système n’a été adopté que par quelques rares États membres.

Aujourd’hui encore, il existe plus de 20 systèmes différents de sécurité ferroviaire sur le territoire de l’UE, et il est évident que cela peut causer des problèmes, notamment sur les parcours internationaux.

Il est vrai que l’adaptation de l’infrastructure ferroviaire et du matériel roulant au système européen implique des évaluations et des missions techniques et économiques qui devront inévitablement être prises en charge par les entreprises du secteur. Nous ne pouvons cependant pas manquer d’observer que la législation européenne ne fixe pas de date butoir pour l’adaptation des lignes nationales à l’ERTMS et qu’elle donne aux États membres le pouvoir de déterminer les besoins de leur matériel roulant en termes d’équipement.

Il vaudrait mieux imposer et fixer des dates, inciter à agir au moyen d’investissements ou, mieux encore, supprimer les investissements là où ils ne sont pas adaptés aux projets d’infrastructure ou ont servi à acheter du matériel roulant dépourvu de ces systèmes.

L’autre argument est que l’interopérabilité et l’achèvement du marché intérieur ne devraient pas être ralentis. Aujourd’hui, nous avons une agence nationale de sécurité indépendante, qui devrait vérifier l’adoption de systèmes de sécurité appropriés. Il faudrait donc stipuler que les certificats de sécurité doivent être obtenus avant l’octroi des licences d’exploitation.

Par ailleurs, je souligne que, dans la perspective d’un marché ferroviaire libre commun, les pouvoirs d’inspection de l’Agence ferroviaire européenne devraient être renforcés au niveau central.

 
  
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  Debora Serracchiani (S&D).(IT) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, à la suite du récent accident ferroviaire de Bruxelles, auquel de nombreux députés ont fait allusion, les feux de l’actualité sont à nouveau braqués sur la sécurité des chemins de fer.

La directive 2004/49/CE concernant la sécurité des chemins de fer en général prévoit que les entreprises ferroviaires et les gestionnaires de l’infrastructure devraient, chacun pour sa propre partie, être entièrement responsables de la sécurité du système.

Dans le cas précis de l’accident qui s’est produit en Belgique, une erreur humaine semble être mise en cause. Nous devons, bien entendu, attendre les résultats de l’enquête. Il semblerait toutefois que le train n’était pas doté d’un système de freinage automatique.

La Commission a-t-elle connaissance des réseaux et trains, au sein des États membres, qui ne sont pas dotés de ce dispositif de sécurité? Par ailleurs, a-t-elle l’intention de rédiger une proposition législative visant à garantir que l’ensemble du réseau de l’Union soit doté de ce système?

 
  
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  Sławomir Witold Nitras (PPE).(PL) Monsieur le Président, je souhaiterais tout d’abord présenter mes condoléances aux familles des victimes. Je souhaiterais parler de quelque chose qui me semble très important et qui n’a pas encore été évoqué ici. Le débat que nous menons ici est légitime à bien des égards,. J’ai, moi aussi, une opinion bien tranchée sur le sujet. Je pense qu’un marché dérégulé vaut bien mieux qu’un marché dominé par des entreprises publiques, mais je voudrais parler de quelque chose d’important dans le contexte de ce débat.

L’objet du débat ne porte pas seulement sur la question de savoir si une entreprise est publique ou privée; il porte également sur la question de savoir si le marché est un marché libre ou un marché restreint et régulé, ce qui signifie souvent, en fait, que dans de nombreux États membres un monopole est détenu par une seule entreprise publique. Il existe de nombreux systèmes ferroviaires, et ils ne diffèrent pas seulement d’un État membre à l’autre mais, dans bien des cas, divers systèmes ont cours au sein d’un seul et même État membre; or les systèmes dont nous parlons constituent souvent une barrière administrative protectionniste érigée dans le seul but de protéger l’entreprise détentrice du monopole sur le marché national. Dans bien des cas, certains équipements et locomotives ne sont pas autorisés, simplement pour limiter l’éventualité qu’un concurrent d’un autre pays ou qu’un concurrent privé ne pénètre sur le marché. Cela a pour conséquence la création d’autant de systèmes différents et l’émergence de problèmes de sécurité.

Si l’on examinait l’allocation de fonds structurels pour les projets d’infrastructure dans les nouveaux États membres, on remarquerait que dans ces pays, il n’y a pratiquement pas de moyens disponibles pour l’infrastructure ferroviaire. Les administrateurs censés déposer les demandes de fonds ne sont pas le moins du monde intéressés. Nous avons affaire à un modèle dans lequel bon nombre d’États membres ne veulent pas changer quoi que ce soit à leurs chemins de fer, afin de ne pas favoriser la concurrence issue d’autres pays ou du secteur privé, par exemple. C’est la sécurité et la compétitivité qui en pâtissent.

 
  
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  Ivo Belet (PPE).(NL) Le tragique accident de Buizingen nous oblige tous - Europe incluse - à ouvrir une enquête. Cette tragédie a coûté la vie à 18 personnes et nous leur devons de tirer à court terme les leçons de la catastrophe et de veiller à ce que la sécurité soit garantie sur les lignes de chemins de fer belges et européennes.

Comme nous le savons, et vous l’avez déjà dit, ce n’est pas la faute de l’Europe si le système automatique de freinage n’a pas encore été mis en place en Belgique. Cela ne veut pas dire pour autant que l’Europe n’est pas tenue d’agir maintenant, bien au contraire. Nous invitons expressément la Commission européenne à aussi procéder maintenant à une évaluation afin d’apporter des réponses à plusieurs questions bien précises. Comme vous le savez,, nous avons par exemple obligé les entreprises de chemins de fer - y compris les entreprises privées - à entièrement équiper leurs trains du nouveau système européen de contrôle des trains (ETCS) à compter de 2013; or, nous savons déjà que les lignes de chemins de fer européennes ne seront pas dotées de ce système à cette date.

Je voudrais citer deux chiffres. À l’heure actuelle, Monsieur le Commissaire, seulement 2 800 kilomètres de chemins de fer dans l’Europe entière sont dotés de ce nouveau système européen de sécurité. C’est un chiffre que le réseau ferroviaire belge, avec ses 3 400 kilomètres, dépasse à lui seul. Il est par conséquent clair que nous ne sommes pas prêts, en Europe, et que nos trains ne seront pas, ou pas suffisamment, en mesure de communiquer avec ces nouvelles installations de signalisation. Cela requiert une évolution en profondeur.

Monsieur le Commissaire, nous devons également oser examiner si la future concurrence entre les entreprises de chemins de fer augmentera la pression sur le personnel. Devrions-nous éventuellement envisager d’introduire des temps de conduite et de repos pour les conducteurs de trains au niveau européen, comme nous l’avons fait pour les camionneurs? En bref, cet accident oblige l’Union européenne à faire un examen de conscience et à procéder à une évaluation; il faut également qu’il y ait une envie et une volonté politique d’apporter des modifications si nécessaires.

 
  
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  Michael Cramer (Verts/ALE).(DE) Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, deux locomotives exploitées par la SNCB, les chemins de fer belges, sur un réseau ferroviaire public ont été impliquées dans ce terrible accident. Il n’y a pas de concurrence sur le marché du transport ferroviaire des voyageurs en Belgique. Cela n’a donc rien à voir avec la concurrence ou avec l’ouverture du marché. Cela a tout à voir en revanche avec des normes de sécurité peu satisfaisantes. M. Grosch a déjà fait remarquer que la technologie consistant à faire freiner automatiquement un train lorsqu’il franchit un signal au rouge existe depuis plus de 20 ans. La question est donc: pourquoi n’a-t-elle pas été installée?

Cela n’a rien à voir non plus avec le système européen de gestion du trafic ferroviaire (ERTMS). J’ai été le rapporteur chargé de l’ERTMS. Ce système représente une vision d’avenir, mais il ne décharge pas les États membres de la responsabilité de mettre en place les mesures de sécurité déjà disponibles au niveau national. C’est la mission de chaque pays.

Nous devons par conséquent nous demander pourquoi la Belgique n’a pas investi dans ce système de sécurité au cours des 20 dernières années. S’il avait été décidé de construire une autoroute plus courte d’un ou deux kilomètres, il y aurait eu deux ou trois fois les fonds nécessaires pour installer ces systèmes de sécurité et éviter des accidents comme celui-ci. Ce n’était pas la première fois qu’un train franchissait un feu au rouge. C’est simplement la première fois que cela a causé un si terrible accident.

 
  
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  Siim Kallas, vice-président de la Commission.(EN) Monsieur le Président, cette discussion soulevée par le tragique accident en Belgique fera bien sûr partie de notre discussion globale sur la sécurité ferroviaire et le développement des transports en Europe. La Commission prépare un livre blanc sur l’avenir des transports, qui prend sérieusement en considération tous les aspects relatifs à la sûreté et à la sécurité de tous les modes de transport, y compris le rail - qui est toujours, comme cela a été mentionné à plusieurs reprises, l’un des modes de transport les plus sûrs.

Il est également important que nous débattions maintenant du paquet ferroviaire - la «première refonte» du paquet ferroviaire - et nous y travaillerons certainement et en tiendrons compte.

Mais je souhaiterais faire quelques remarques factuelles. Le système européen de gestion du trafic ferroviaire (ERTMS) a été conçu dans le but de permettre l’interopérabilité des chemins de fer. C’est de toute évidence un bon système, qui présente de très sérieux éléments de sécurité. La sécurité reste toutefois la responsabilité des États membres, quel que soit le système utilisé. Mais l’ERTMS progresse très bien.

Réseau de transport TEN-T: nous en discuterons bientôt. Ce projet particulier porte sur le déploiement du système de gestion du trafic. D’ici 2020, 20 000 kilomètres de rails utiliseront ce système en Europe, et notamment en Belgique.

Tout cela est en cours; mais dans les chemins de fer, les choses demandent du temps, les investissements sont importants, et 85 % des fonds du réseau TEN-T servent notamment à améliorer les chemins de fer, dont l’ERTMS. Je serais bien entendu très heureux si, avec le soutien du Parlement européen, nous pouvions augmenter le financement des investissements dédiés aux réseaux de transport. Ce sera très important.

Mais, je le répète, le facteur humain intervient bien sûr toujours. Et puisque nous abordons le sujet des normes de sécurité, il en existe une - à savoir le feu rouge - qui suppose que l’on s’arrête. Cette norme existe depuis le XIXe siècle. Il serait erroné d’affirmer qu’un système de freinage sûr à 100 % pourra éviter les erreurs humaines. Il y aura toujours l’infime éventualité d’une erreur humaine. Et la responsabilité humaine est très importante.

Je souhaiterais faire une dernière remarque à propos de la libéralisation et des services publics: ce sont deux choses différentes. Personne n’empêche les États de proposer de bons services publics, même dans le cadre de la libéralisation. Les lois européennes autorisent d’apporter un soutien - les États l’autorisent - et cette libéralisation n’exclut pas de bons services publics.

 
  
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  Le Président. – Le débat est clos.

Déclarations écrites (article 149)

 
  
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  Herbert Dorfmann (PPE), par écrit.(DE) Le dramatique accident de train en Belgique a attiré l’attention du public sur la sécurité des chemins de fer. La sécurité du matériel roulant doit être améliorée, ainsi que la sécurité des systèmes de signalisation. De nombreux wagons de marchandises totalement dépassés circulent sur les voies ferroviaires européennes. L’accident qui s’est produit l’année dernière en Italie a montré quelles pouvaient en être les conséquences. Malheureusement, l’UE a très peu fait jusqu’à présent pour obliger les exploitants de fret à amener leur matériel roulant à un niveau de sécurité acceptable. Il est important de rappeler que les marchandises dangereuses sont transportées par voie ferroviaire aussi, ce qui peut avoir des conséquences désastreuses en cas d’accident. Dans ce contexte, je réclame des normes de sécurité plus élevées sur le rail.

 
  
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  Bruno Gollnisch (NI), par écrit. – Le drame qui endeuille aujourd'hui la Belgique a sans doute des causes dues aux spécificités de ce pays, comme l'ont souligné aujourd'hui beaucoup de collègues flamands. Ce sera à l'enquête de déterminer dans quelles mesures.

Mais il a surtout une cause fondamentale: c'est la libéralisation du transport ferroviaire et la séparation de la gestion du réseau de celle du transport lui-même. De ce fait, le réseau, sa qualité, sa sécurité ont été sacrifiés à la logique du profit du transporteur, qui trouve les péages qui lui sont imposés trop élevés, comme est sacrifié le renouvellement et la modernisation des rames. Les horaires et cadencements répondent aujourd'hui à la logique de profit, et non plus aux besoins des usagers. Des lignes sont supprimées, bien que fréquentées, car elles ne rapportent pas assez. D'autres sont desservies en dépit du sens commun. Les retards se systématisent, y compris pour le TGV.

Dans votre système libéral, le citoyen qui prend le train n'est pas devenu le client-roi: il est resté l'usager-contribuable, que l'on peut traiter comme du bétail. Comme dans toutes les activités que vous avez libéralisées, nous payons aujourd'hui toujours plus cher un service de plus en plus dégradé, quand il n'est pas, hélas, devenu dangereux.

 
  
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  Marian-Jean Marinescu (PPE), par écrit.(RO) Étant donné l’accident tragique de Bruxelles, nous sommes une fois de plus confrontés à la question du manque d’harmonisation des systèmes de sécurité ferroviaire entre les États membres, bien que la directive 2004/49/CE fixe clairement des indicateurs de sécurité établis sur la base de normes communes et réponde totalement aux exigences générales de sécurité, notamment pour l’infrastructure et la gestion du trafic. Le problème majeur est en fait d’ordre strictement financier: la durée de vie des infrastructures ferroviaires et du matériel roulant, y compris des systèmes de signalisation, est extrêmement longue. Dans ces circonstances, il est souhaitable que les États membres voient au-delà de ce problème financier, malgré la crise, envisagent d’accélérer la mise en œuvre des systèmes d’interopérabilité, et investissent davantage dans les infrastructures ferroviaires et les systèmes de signalisation destinés autant aux infrastructures qu’au matériel roulant.

Les économies réalisées en différant le réaménagement et la modernisation du matériel roulant et des infrastructures ferroviaires peuvent, hélas, être à l’origine de tragiques accidents, comme dans le cas présent, entraînant non seulement de lourdes pertes économiques et financières, mais aussi la perte de vies humaines, ce qui est inacceptable. Je souhaiterais transmettre toutes mes condoléances aux familles concernées en ce moment difficile, et j’espère que ce genre de drame ne se reproduira plus.

 
  
  

(La séance, suspendue à 11 h 25, est reprise à 11 h 30)

 
  
  

PRÉSIDENCE DE M. STAVROS LAMBRINIDIS
Vice-Président

 
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