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 Texte intégral 
Compte rendu in extenso des débats
Jeudi 5 octobre 2017 - Strasbourg Edition révisée

Systèmes pénitentiaires et conditions dans les prisons (débat)
MPphoto
 

  Joëlle Bergeron, rapporteure. – Monsieur le Président, chers collègues, je vous remercie de me donner la parole pour vous présenter ce rapport d’initiative traitant des systèmes pénitentiaires et des conditions de vie dans les prisons en Europe.

Comme certains d’entre vous, j’avais des idées préconçues sur les prisons, la population carcérale et le personnel pénitentiaire. C’est pourquoi je suis allée voir concrètement ce qui se passe sur le terrain, en France et dans d’autres États membres, afin de prendre en compte l’avis de tous les intervenants: détenus, personnel, administration pénitentiaire, services d’insertion et de probation, responsables ministériels.

Je tiens d’ailleurs tout particulièrement à remercier Mme Chinnici et Mme Hautala qui m’ont permis de visiter des établissements dans leur pays respectif, c’est-à-dire l’Italie et la Finlande.

J’ai moi-même effectué un grand nombre de visites en France. Les intervenants du monde carcéral nous ont accordé beaucoup de temps afin de nous faire comprendre leur situation, les difficultés qui se posent à eux, et ils nous ont démontré qu’il y avait d’autres voies que le «tout carcéral».

La situation et les conditions de vie des personnes incarcérées sont un vrai problème humain. Je voudrais vous rappeler quelques chiffres: en 2014, selon les chiffres du Conseil de l’Europe, il y avait un peu plus de 1,6 millions de détenus en Europe. Ce chiffre inclut les personnes emprisonnées après condamnation, mais aussi celles qui sont en détention provisoire.

Toujours selon le Conseil de l’Europe, le taux de population pénitentiaire aurait diminué de 7 % entre 2013 et 2014. Cependant, la surpopulation n'en demeure pas moins une question centrale des systèmes pénitentiaires puisque, si le taux d’occupation carcérale est de 117 % en Europe, il est de plus de 200 % dans les maisons d’arrêts, et je vous rappelle que ces établissements mélangent les condamnés et les personnes en attente de condamnation.

La surpopulation carcérale entraîne des conditions de vie déplorables qui relèvent d’un traitement inhumain et dégradant au sens de l’article 3 de la convention européenne des droits de l’homme. C’est sur la base de ce texte et de ses recommandations que ce rapport a été élaboré.

À la surpopulation s’ajoutent tous les problèmes liés à la vétusté des structures pénitentiaires, au manque de soins et de suivi médical, à la violence entre détenus, mais aussi entre détenus et personnel pénitentiaire.

Ce personnel que j’ai rencontré, bien qu’il soit souvent en sous-effectif et se sente mal considéré, effectue sa mission avec un professionnalisme et une humanité impressionnants.

Cette prise de contact directe avec les gens de terrain, mais aussi avec des experts juristes et des associations qui suivent ces problématiques carcérales, m’a permis de réaliser la complexité de ce sujet et la nécessité d’aborder toutes les facettes de la vie carcérale, à savoir notamment: les conditions de vie et les soins des détenus; la protection des plus vulnérables (malades, femmes et mineurs); le maintien des liens familiaux des détenus; l’éducation, l’instruction et la réinsertion; la prévention, l’identification et le traitement de la radicalisation; la formation et les conditions de travail du personnel pénitentiaire.

Toutes ces problématiques sont liées les unes aux autres, et il en va du devoir des États membres de développer des politiques pénitentiaires respectueuses de la dignité de chacun sans négliger un traitement efficace et adapté de la délinquance.

Les faits sont têtus et prouvent que le système du «tout carcéral» peut ne pas être le plus efficace, voire, dans certains cas, être contre-productif. C’est pourquoi il me semble nécessaire d’encourager les bonnes pratiques existantes dans certains États membres, et notamment dans les pays scandinaves, qui privilégient la prévention, les peines alternatives, la prise en charge médico-sociale des détenus et la préparation à la réinsertion via des systèmes de prisons ouvertes.

Lorsque l’incarcération est indispensable, nous devons garder à l’esprit que la mission de la prison est aussi la préparation à la réinsertion des détenus pour éviter une récidive qui, dans certains cas, peut atteindre plus de 50 % dans les cinq ans qui suivent la sortie. Une réinsertion sociale réussie réduit la récidive.

Le fait que je ne sois pas partisane du tout carcéral ne veut pas dire pour autant que je sois naïve ou laxiste. Ma conception vise à donner un réel sens à l’incarcération. Il faut protéger les détenus vulnérables des détenus les plus dangereux si nous voulons éviter les risques de radicalisation et la chute dans le grand banditisme. Les mesures alternatives permettent d’éviter les contacts entre les petits délinquants et les détenus les plus dangereux.

En conclusion, je vous dirai que je suis consciente que tous les esprits ne sont pas encore formés à cette conception plus humaniste de l’univers carcéral. J’espère que le temps vous permettra d’évoluer sur la question. Il faut que les mentalités changent, que les volontés politiques s’affirment sans démagogie électorale.

Ce sujet nous concerne tous. La prison reflète l’état social et moral de notre société, mais également notre conception des droits fondamentaux de la personne.

 
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