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Proposition de résolution - B6-0063/2007Proposition de résolution
B6-0063/2007

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

13.2.2007

déposée avec demande d'inscription à l'ordre du jour du débat sur des cas de violation des droits de l'homme, de la démocratie et de l'État de droit
conformément à l'article 115 du règlement
par Pasqualina Napoletano, Harlem Désir, Marie-Arlette Carlotti, Pierre Moscovici, Catherine Trautmann, Alain Hutchinson,
au nom du groupe PSE
sur la situation politique et des droits humains en Guinée

Procédure : 2007/2520(RSP)
Cycle de vie en séance
Cycle relatif au document :  
B6-0063/2007
Textes déposés :
B6-0063/2007
Textes adoptés :

B6‑0063/07

Résolution du Parlement européen sur la situation politique et des droits humains en Guinée

Le Parlement européen,

-  vu ses résolutions antérieures sur la situation en Guinée,

- vu l'article 115 de son Règlement,

A.  Considérant la grave crise politique, économique et sociale que traverse la Guinée ;

B.  Considérant que le Président Conté, arrivé au pouvoir en 1984 par un coup d'Etat, a reconnu la détérioration très sérieuse de son état de santé et n'est plus aujourd'hui lucide que quelques heures par jour;

C.  Considérant que le pays n'avait plus de Premier ministre depuis avril 2006 ;

D.  Considérant que selon l'article 39 de la Constitution, le Premier ministre n'est ni chef du gouvernement, ni responsable devant l'Assemblée nationale ;

E.   Considérant que le Président Conté s'est rendu lui même à la prison pour libérer le président du patronat guinéen, Mamadou Sylla, accusé par la justice d'avoir détourné deux millions d'euros de la Banque centrale, et son complice le ministre de la jeunesse et des sports Fodé Soumah, en déclarant à cette occasion :"la justice, c'est moi !" ;

F.   Considérant que l'association des magistrats a dénoncé cette "immixtion intempestive" de l'exécutif dans les affaires judiciaires ;

G.   Considérant le mot d'ordre, très suivi, de grève générale illimitée lancé par les organisations syndicales pour protester contre la vie chère mais également contre l'ingérence du Chef de l'Etat dans les affaires judiciaires, notamment celles ayant trait à la corruption, grève générale suspendue après l'accord du 27 janvier et reprise le samedi 10 février en raison du non respect de cet accord ;

H.   Considérant que la répression violente de manifestations pacifiques, dans la capitale et en province, par les forces spéciales de l'armée, en particulier la "Compagnie mobile d'intervention et de sécurité" et le "Bataillon autonome de la sécurité présidentielle", commandé par le capitaine Ousmane Conté, fils du Président, a provoqué plus de 80 morts (dont 44 à Conakry pour la seule journée du lundi 22 janvier) et plus de 150 blessés, en tirant dans la foule des manifestants ;

I.   Considérant que les grèves de février et juin 2006 avaient déjà fait, chacune, une dizaine de victimes ;

J.   Considérant que le Président de la Commission de l'Union africaine, Alpha Oumar Konaré, a condamné "la répression des manifestations" et demandé une "enquête indépendante" ;

K.   Considérant que le Président Conté s'est engagé par écrit à renoncer à une grande partie de ses prérogatives au profit d'un Premier ministre de consensus dirigeant un gouvernement d'union nationale ;

L.   Considérant que la publication du décret présidentiel portant attributions et missions du futur Premier ministre était un premier pas pour répondre à cette attente ;

M.   Considérant les risques de coup d'Etat militaire ;

N.   Considérant que la crise politique guinéenne est de nature à déstabiliser l'ensemble de la sous-région, alors que le Président Conté refuse de s'entretenir avec ses homologues de la CEDEAO ;

O.   Considérant que la Guinée est le premier exportateur mondial de bauxite, possédant l1/3 des réserves mondiales connues ;

P.   Considérant que, selon la Banque mondiale, un Guinéen sur deux vit avec l'équivalent de 1 $ par jour, et que le revenu par habitant n'a cessé de baisser depuis 1995 ;

Q.   Considérant que la Guinée est considérée comme un des pays les plus corrompus d'Afrique ;

1.  Déplore la perte de nombreuses vies humaines et condamne la répression violente des manifestations pacifiques ; demande que les auteurs de ces crimes soient traduits en justice et que les familles des victimes soient indemnisées ;

2.  Exprime sa compassion aux familles des victimes et sa solidarité avec le peuple de Guinée qui manifeste son désir de changement démocratique et d'amélioration de ses conditions de vie

3.   Appelle au respect et au rétablissement des libertés individuelles et syndicales et à la fin des dérives autoritaires qui ont marqué le régime du Président Conté depuis 23 ans; appelle à l'ouverture de négociations avec les organisations de la société civile et les syndicats en vue d'un règlement négocié des revendications ;

4.   Soutien la proposition d'une commission d'enquête indépendante internationale, conduite par l'Union africaine, afin de situer les responsabilités et sanctionner les auteurs des violences ;

5.  Exhorte les autorités au strict respect des normes internationales de protection et de défense des Droits de l'Homme ratifiées par la Guinée ;

6.  Demande que les personnes arrêtées dans le cadre des manifestations de janvier et février 2007 soient jugées de façon libre, impartiale et équitable et relâchées immédiatement si des preuves tangibles ne sont pas retenues contre elles ;

7.   Appelle à la nomination immédiate d'un gouvernement d'union nationale de transition conduit par un chef de gouvernement de consensus, conformément aux engagements pris dans l'accord signé le 27 janvier entre le Président, l'opposition et les organisations syndicales ;

8.  Appelle à une transition démocratique vers un régime correspondant aux aspirations du peuple guinéen pouvant exprimer librement ses choix par la mise en œuvre des réformes politiques démocratiques indispensables, en particulier par des réformes constitutionnelles et la tenue d'élections libres dans un avenir proche ;

9.  Demande à la Commission européenne d'envisager le dialogue politique prévu par l'article 96 de l'Accord de Cotonou au cas où le pouvoir exécutif ne tiendrait pas ses promesses ;

10.  Attend qu’avec le retour au calme soit soutenu un développement du pays tirant mieux parti des importantes ressources minières et hydrauliques;

11.  Charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil de l'UE, au gouvernement de la Guinée, à la CEDEAO, à l'Union Africaine et à la Commission Européenne.