Proposition de résolution - B6-0133/2008Proposition de résolution
B6-0133/2008

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

2.4.2008

déposée à la suite de déclarations du Conseil et de la Commission
conformément à l'article 103, paragraphe 2, du règlement
par Daniel Cohn-Bendit, Monica Frassoni, Hélène Flautre, Eva Lichtenberger, Milan Horáček, Raül Romeva i Rueda, Mikel Irujo Amezaga, Helga Trüpel, Bart Staes et Marie Anne Isler Béguin
au nom du groupe Verts/ALE
sur la situation au Tibet

Procédure : 2008/2557(RSP)
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B6-0133/2008
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B6-0133/2008
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B6‑0133/2008

Résolution du Parlement européen sur la situation au Tibet

Le Parlement européen,

–  vu ses précédentes résolutions sur le Tibet, et, en particulier, celle du 15 février 2007 sur le dialogue entre le gouvernement chinois et les envoyés du Dalaï-lama,

–  vu sa résolution du 13 décembre 2007 sur les relations UE-Chine et sur le dialogue UE-Chine concernant les droits de l'homme,

–  vu sa résolution du 7 septembre 2006 sur les relations UE-Chine,

–  vu sa résolution du 6 septembre 2007 sur le fonctionnement des dialogues et des consultations sur les droits de l'homme avec les pays tiers,

–  vu l'article 103, paragraphe 2, de son règlement,

A.  considérant qu'au Tibet, à partir du 10 mars 2008, 49e anniversaire du soulèvement national tibétain contre le pouvoir chinois, des manifestations ont éclaté dans trois monastères, les moines tibétains protestant contre l'occupation chinoise, l'assimilation forcée et une répression politique, sociale et culturelle brutale; que Sa Sainteté le Dalaï-lama a qualifié la politique actuelle de la Chine de "génocide culturel"; que plus de 60 moines ont été arrêtés, les autres étant astreints à demeurer dans leurs monastères,

B.  considérant que, le 14 mars, dans la vieille ville de Lhassa, des manifestations ont dégénéré en émeutes, au cours desquelles des affrontements ont eu lieu entre Tibétains et Chinois hans, des commerçants ont été agressés et des petits commerces ont été incendiés et pillés,

C.  considérant que le Dalaï-lama a exhorté les manifestants à protester de façon pacifique et non violente et a lancé un nouvel appel à la reprise des négociations avec Pékin, dont l'objectif serait de permettre au Tibet d'acquérir, au sein de la Chine, une autonomie politique, culturelle et spirituelle, entière et réelle,

D.  considérant que, dans les 24 heures, les forces de police et de sécurité ont mené des opérations de répression contre les manifestants, prenant progressivement le contrôle des zones d'émeutes, et que, les jours suivants, elles ont entrepris de fouiller les quartiers tibétains, pour emmener de force et incarcérer les suspects,

E.  considérant que, selon les autorités chinoises, 20 personnes sont mortes, dont un agent de police; considérant que, selon des sources indépendantes, les heurts ont fait plus de 140 victimes et se sont propagés aux régions voisines à population tibétaine et que des milliers de personnes ont été arrêtées,

F.  considérant que le gouvernement chinois a déclaré l'état d'urgence, que les magasins et les temples ont été fermés à Lhassa, ainsi que dans d'autres villes, et que des forces paramilitaires et militaires ont convergé par centaines du reste de la Chine vers le Tibet,

G.  considérant que les journalistes étrangers se sont vu interdire l'accès au Tibet ainsi qu'aux régions limitrophes à forte population tibétaine; considérant que les journalistes étrangers qui ont réussi à entrer au Tibet après les émeutes ont été invités par la force à en partir, en contradiction avec la promesse faite par le gouvernement chinois de garantir aux journalistes la liberté de circuler dans l'ensemble de la Chine et d'accroître la liberté de la presse dans la période préolympique,

H.  considérant que, selon toute vraisemblance, le gouvernement chinois bloque l'accès aux sites Internet étrangers sur le territoire chinois et censure les émissions des télévisions étrangères sur la situation au Tibet; considérant que les autorités chinoises ont accusé les médias étrangers de déformer les événements, se bornant à diffuser des images de prétendues agressions de Hans par des Tibétains, et ont lancé une campagne nationaliste anti-tibétaine,

I.  considérant que le bouddhisme tibétain et d'autres religions sont l'objet de restrictions et d'un contrôle étroit de l'État; considérant que les autorités chinoises ne cessent de s'ingérer dans les affaires internes de la hiérarchie religieuse tibétaine, en particulier sur la question de la succession du Panchen-lama,

J.  considérant que le Comité international olympique (CIO) espérait que l'attribution de l'organisation des Jeux olympiques de 2008 à la Chine permettrait d'ouvrir le pays et d'améliorer la situation des droits de l'homme; que la Chine a commencé à enquêter sur les opinions politiques des athlètes olympiques,

K.  considérant que tout doit être mis en œuvre pour mettre à profit l'occasion exceptionnelle constituée par les Jeux Olympiques de Pékin de déclencher les réformes démocratiques en Chine et de réaliser des progrès significatifs sur la question du Tibet,

L.  considérant que le CIO est considéré comme une organisation de la société civile à l'action mondiale, porteuse de responsabilités sportives, mais aussi sociales; considérant que le CIO a pris une initiative louable lors des Jeux olympiques de Sidney en 2000, en confiant à l'athlète aborigène Cathy Freeman le soin d'allumer la vasque olympique au cours de la cérémonie d'ouverture,

M.  considérant que la situation des droits de l'homme en Chine n'offre aucun signe d'amélioration, ainsi que l'illustre la peine de cinq ans de prison infligée le 24 mars au militant des droits de l'homme, Yang Chunlin, qui était accusé de subversion du pouvoir de l'État pour avoir diffusé une lettre ouverte intitulée "Nous voulons les droits de l'homme, pas les Jeux olympiques",

N.  considérant que le dialogue UE-Chine sur les droits de l'homme institué en 2000 ne s'est traduit pour l'instant par aucun résultat tangible; considérant que ces piètres résultats sont notamment la conséquence de l'absence de coordination et d'efficacité de la politique étrangère commune de l'Union européenne à l'égard de la Chine,

O.  considérant que les vingt-sept ministres des affaires étrangères de l'Union européenne, lors de leur réunion informelle (Gymnich) du 29 mars 2008 à Brdo, ont débattu de la situation au Tibet sans adopter de mesure significative ni importante concernant la répression menée actuellement par la Chine contre la population tibétaine,

1.  condamne vigoureusement tous les actes de violence qui ont eu lieu dans les rues de Lhassa et au Tibet, et exprime ses sincères condoléances aux familles des victimes;

2.  condamne fermement la répression brutale des manifestants tibétains par les forces de sécurité chinoises et se dit extrêmement préoccupé par la politique d'assimilation du Tibet et d'autres minorités, telles que les Ouïghours, menée par la République populaire de Chine;

3.  appelle de ses vœux une enquête internationale indépendante sur ces événements tragiques et invite instamment les autorités chinoises à assurer aux journalistes internationaux un accès sans restriction au Tibet et aux régions limitrophes, pour leur permettre de faire librement leur travail;

4.  est vivement préoccupé par la vague d'arrestations qui a suivi les manifestations, 400 personnes ayant été emprisonnées à Lhassa, et demande la libération immédiate de tous ceux qui ont manifesté pacifiquement et qui, en cela, n'ont fait qu'exercer leur droit légitime à la liberté d'expression;

5.  regrette que les six séances de négociations entre les autorités de Pékin et les représentants du Dalaï-lama aient abouti à une impasse, et s'associe à l'appel du Dalaï-lama en faveur d'une reprise des négociations entre les deux parties; espère que les négociations pourront reprendre sous de bons auspices avant les Jeux olympiques et prie les autorités chinoises d'inviter le Dalaï-lama à la cérémonie d'ouverture des Jeux, en signe de leur bonne volonté; invite les responsables de l'Union européenne à ne pas participer à la cérémonie si aucun progrès n'a été réalisé d'ici là sur la question tibétaine;

6.  à cet égard, invite une nouvelle fois le Conseil à nommer un envoyé spécial pour les question tibétaines chargé de favoriser le dialogue entre les parties et de suivre attentivement les négociations, une fois reprises;

7.  demande à la Chine de respecter ses engagements en matière de droits de l'homme et des minorités et d'État de droit; invite instamment la Chine à ne pas exploiter la tenue des Jeux olympiques 2008 de façon abusive en procédant à des arrestations de dissidents, de journalistes et de militants des droits de l'homme dans le but d'empêcher des manifestations et des reportages jugés embarrassants;

8.  demande à la République populaire de Chine d'autoriser les Tibétains blessés à recevoir les soins médicaux dont ils ont besoin et ceux qui ont été arrêtés à bénéficier d'une assistance juridique;

9.  demande à la Chine d'autoriser une entité indépendante à rencontrer Gedhun Choekyi Nyima, Panchen-lama du Tibet, et ses parents, ainsi que l'a demandé la commission des droits de l'enfant des Nations unies, et de ne plus intervenir dans les affaires religieuses;

10.  déplore que, faisant fi des attentes du CIO et de la communauté internationale, la République populaire de Chine continue de commettre de graves violations des droits de l'homme et des minorités;

11.  demande aux autorités chinoises d'adresser une invitation permanente à se rendre au Tibet au Haut commissaire aux droits de l'homme des Nations unies et aux mécanismes des Nations unies; invite instamment le Conseil des droits de l'homme des Nations unies réuni à Genève (du 3 au 28 mars 2008) à condamner les violations des droits de l'homme commises en République populaire de Chine;

12.  prie la République populaire de Chine, dans le cadre de son dialogue avec l'Union européenne sur les droits de l'homme, à autoriser les observateurs de l'Union européenne à se rendre au Tibet pour qu'ils puissent se faire une image objective de la situation; demande instamment à la Commission de prendre l'initiative à cet égard;

13.  prie instamment la République populaire de Chine de ne plus contrôler, ni juger les athlètes olympiques du point de vue de leurs opinions politiques et de ne plus envisager de les exclure des Jeux olympiques pour le cas où ils s'écarteraient de la position officielle du gouvernement chinois;

14.  regrette l'absence d'une politique européenne coordonnée et cohérente à l'égard de la Chine et le fait que la politique de l'Union européenne ait été marquée par une compétition effrénée des dirigeants européens, uniquement préoccupés de signer des contrats lucratifs avec les autorités chinoises au détriment des droits de l'homme; regrette que le respect des droits de l'homme ne soit pas un critère de détermination du lieu des Jeux olympiques;

15.  invite, dès lors, l'Union européenne et les États membres à envisager sérieusement des initiatives communes à l'égard de la République populaire de Chine si la situation ne s'améliore pas, dont un boycott complet des Jeux, et de réexaminer le partenariat stratégique avec la Chine;

16.  prie instamment la Chine de ratifier sans plus attendre, et, en tout cas, avant les Jeux olympiques, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques;

17.  charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, aux parlements des États membres, au Président et au Premier ministre de la République populaire de Chine et au Comité international olympique.