Proposition de résolution - B7-0261/2011Proposition de résolution
B7-0261/2011

PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur la Côte d'Ivoire

4.4.2011

déposée à la suite d'une déclaration de la vice-présidente de la Commission / haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité
conformément à l'article 110, paragraphe 2, du règlement

Marie-Christine Vergiat, Jacky Henin, Patrick Le Hyaric, Elie Hoarau, Sabine Lösing, Gabriele Zimmer, Joao Ferreira, Willy Meyer au nom du groupe GUE/NGL

Procédure : 2011/2656(RSP)
Cycle de vie en séance
Cycle relatif au document :  
B7-0261/2011
Textes déposés :
B7-0261/2011
Textes adoptés :

B7‑0261/2011

Résolution du Parlement européen sur la Côte d'Ivoire

Le Parlement européen,

–   vu ses précédentes résolutions sur la Côte d'Ivoire, en particulier celle de décembre 2010,

–   vu la Déclaration de Bamako sur la démocratie, les droits et les libertés, en date du 3 novembre 2000,

–   vu la résolution 1975 des Nations unies,

–   vu l'article 110, paragraphe 2, de son règlement,

A. considérant la grave crise politique et institutionnelle qui sévit en Côte d'Ivoire depuis le deuxième tour de l'élection présidentielle du 28 novembre 2010; considérant que cette crise a déjà fait au moins plusieurs centaines de morts et plus d'un million de déplacés,

B.  considérant que depuis quelques jours, l'offensive armée conduite par les forces pro‑Ouattara confirme le basculement de la Côte d'Ivoire dans la guerre civile; considérant que l'escalade militaire entre les deux camps rivaux fait craindre de plus en plus de victimes civiles,

C. considérant que ces derniers jours, les combats sont particulièrement violents à Abidjan; considérant que dans la région de Duékoué, plusieurs organisations internationales de protection des droits de l'homme dénoncent que "toutes les parties en conflit ont commis de graves violations et atteintes aux droits humains, notamment des exécutions illégales, ainsi que des viols et violences sexuelles à l'encontre des femmes"; considérant que plusieurs centaines de personnes ont péri lors de la prise de Duékoué,

D. considérant que selon le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme, les forces pro-Ouattara auraient perpétré "des pillages et de grave violations des droits de l'homme, tels que des enlèvements, des arrestations arbitraires et des mauvais traitements sur les civils",

E.  considérant que la crise que connaît la Côte d'Ivoire a des bases anciennes, telles que définies par la déclaration de Bamako de novembre 2000 qui notait déjà, en plus des "acquis indéniables" de l'instauration de la démocratie libérale, "des insuffisances et des échecs: récurrence de conflits, interruption de processus démocratiques, génocide et massacres, violations graves des droits de l’homme, persistance de comportements freinant le développement d’une culture démocratique, manque d’indépendance de certaines institutions et contraintes de nature économique, financière et sociale, suscitant la désaffection du citoyen à l’égard du fait démocratique"; considérant que les plans d'ajustements structurels imposés depuis des années par le FMI ont contribué à l'érosion de ce système,

F.  considérant que la "médiation" de la communauté internationale n'a fait qu'accentuer le climat de division au sein du pays; considérant que les volontés bellicistes de certaines puissances, en particulier de la France, ne peuvent qu'entraîner une escalade supplémentaire de la violence,

G. considérant que la France, présente militairement de façon permanente en Côte d'Ivoire, a vu ses effectifs militaires passer ces derniers jours de 900 à 1 400 hommes; considérant que deux compagnies supplémentaires, soit près de 300 hommes, ont été déployées à Abidjan; considérant que le 3 avril, la force française Licorne a pris le contrôle de l'aéroport Félix Houphouët Boigny en dehors de tout mandat international,

H. considérant qu'à la crise politique et institutionnelle s'ajoute aujourd'hui la crise économique, sociale et humanitaire; considérant que les sanctions européennes ont entraîné une hausse exponentielle du chômage, une pénurie de carburant, une inflation et une raréfaction des produits de base; considérant que les Ivoiriens sont les premières victimes de cette situation,

1.  se déclare très préoccupé par la situation de guerre civile en Côte d'Ivoire et par les exactions commises par les deux camps; condamne le choix d’un recours à la force pour résoudre la crise politique en Côte d'Ivoire au lieu de résoudre le conflit de manière diplomatique;

2.  condamne la violation de la résolution 1975 des Nations unies par les forces de Ouattara; appelle l’ensemble des forces combattantes à instaurer un cessez-le-feu, à respecter le droit international humanitaire et les droits de l’homme, à faire cesser les pillages et les assassinats, et à garantir la liberté d’expression et la liberté de la presse;

3.  condamne les récents pillages et attaques contre le Conseil des droits de l'homme des Nations unies en Côte d'Ivoire;

4.  demande à la communauté internationale d'instaurer un fonds d'urgence humanitaire permettant de répondre aux problèmes économiques et sociaux générés par la crise, et de garantir l'accueil des réfugiés;

5.  déplore le fait que la communauté internationale ait attisé le climat de division dans le pays; estime que toutes les forces en présence doivent œuvrer à une sortie pacifique et politique de la crise; s'oppose par conséquent à toute intervention militaire telle que promue par le France car elle n'entraînerait que des massacres supplémentaires;

6.  condamne par conséquent l'offensive armée menée par la France en dépit du droit international depuis quelques jours; soutient l'Union africaine dans sa demande de retrait immédiat des troupes françaises;

7.  note l'importance de trouver une solution face aux insuffisances et échecs du système économique, social, politique et institutionnel, tel que prévu par la déclaration de Bamako, pour permettre une résolution sur le long terme de la crise actuelle;

8.  déplore l'échec des tentatives de médiation promues par l'Union africaine et le président d'Afrique du Sud Jacob Zuma;

9.  demande en conséquence à toutes les parties "d’approfondir les possibilités de solution politique d’ensemble de l’Union africaine", notamment, comme le suggère la décision prise le 10 mars dernier lors du sommet du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine, par la nomination d’un haut-représentant chargé de la mise en œuvre de la solution politique d’ensemble;

10. demande que les responsables des exactions commises ces dernières semaines soient traduits en justice devant un tribunal international: tribunal de La Haye ou CPI;

11. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, aux Nations unies, à l'Union africaine, à la CEDEAO, ainsi qu'aux autorités ivoiriennes.