RAPPORT sur l'illettrisme et l'exclusion sociale
(2001/2340(INI))

15 janvier 2002

Commission de l'emploi et des affaires sociales
Rapporteur: Marie-Thérèse Hermange

Procédure : 2001/2340(INI)
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Cycle relatif au document :  
A5-0009/2002
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A5-0009/2002
Débats :
Votes :
Textes adoptés :

PAGE RÉGLEMENTAIRE

Au cours de la séance du 28 février 2001, la Présidente du Parlement a annoncé que la commission de l'emploi et des affaires sociales avait été autorisée à élaborer un rapport d'initiative, conformément à l'article 163 du règlement, sur l'illettrisme et exclusion sociale et que la commission de la culture, de la jeunesse, de l'éducation, des médias et des sports avait été saisie pour avis.

Au cours de sa réunion du 15 février 2001, la commission de l'emploi et des affaires sociales avait nommé Marie-Thérèse Hermange rapporteur.

Au cours de ses réunions des 9 juillet , 8 octobre, 19 novembre 2001 et 7/8 janvier 2002, elle a examiné le projet de rapport.

Au cours de la dernière de ces réunions, elle a adopté la proposition de résolution à l'unanimité.

Étaient présents au moment du vote Michel Rocard (président), Winfried Menrad (vice-président), Marie-Thérèse Hermange (rapporteur), Jan Andersson, Elspeth Attwooll (suppléant Luciano Caveri), Regina Bastos, André Brie (suppléant Sylviane H. Ainardi), Hans Udo Bullmann (suppléant Ieke van den Burg), Philip Bushill-Matthews, Alejandro Cercas, Luigi Cocilovo, Elisa Maria Damião, Proinsias De Rossa, Den Dover, Harald Ettl, Jillian Evans, Carlo Fatuzzo, Ilda Figueiredo, Hélène Flautre, Marie-Hélène Gillig, Anne-Karin Glase, Roger Helmer, Richard Howitt (suppléant Fiorella Ghilardotti), Stephen Hughes, Anne Elisabet Jensen (suppléant Daniel Ducarme), Ioannis Koukiadis, Elizabeth Lynne, Thomas Mann, Mario Mantovani, Paolo Pastorelli, Manuel Pérez Álvarez, Bartho Pronk, Herman Schmid, Helle Thorning-Schmidt, Anne E.M. Van Lancker, Barbara Weiler et Sabine Zissener.

L'avis de la commission de la culture, de la jeunesse, de l'éducation, des médias et des sports est joint au présent rapport

Le rapport a été déposé le 15 janvier 2002.

Le délai de dépôt des amendements sera indiqué dans le projet d'ordre du jour de la période de session au cours de laquelle le rapport sera examiné.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Résolution du Parlement européen sur l'illettrisme et exclusion sociale (2001/2340(INI))

Le Parlement européen,

–   vu l'article 22 de la Déclaration universelle des droits de l'homme,

–   vu le traité instituant la Communauté européenne et notamment ses articles 2, 3, 136 et 137,

–   vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, plus particulièrement son article 14, paragraphe 1, premier tiret: "toute personne a droit à l'éducation…",

–   vu les décisions du Conseil européen extraordinaire réuni à Lisbonne les 23 et 24 mars 2000,

–   vu les décisions du Conseil européen extraordinaire réuni à Nice entre le 7 et le 10 décembre 2000,

–   vu sa résolution du 12 octobre 2000 sur l'Agenda pour la politique sociale: suite des Conseils européens de Lisbonne et de Feira, Conseil de Nice décembre 2000[1],

–   vu la communication de la Commission intitulée "Construire une Europe de l'inclusion" (COM(2000) 79),

–   vu la proposition de décision du Parlement européen et du Conseil du 16 juin 2000[2] établissant un programme d'action communautaire pour encourager la coopération entre les États membres visant à lutter contre l'exclusion sociale (COM(2000) 368) et sa résolution du 17 mai 2001 sur le programme d'action pour lutter contre l'exclusion sociale[3],

–   vu le Livre blanc de la Commission intitulé "L'éducation et la formation. Enseigner et apprendre. Vers la société cognitive" (COM(1995) 590) et ses résolutions du 18 février 1997[4] et du 11 octobre 2000[5] sur "Enseigner et apprendre "),

–   vu la Décision du Conseil du 19 janvier 2001 sur les lignes directrices pour les politiques de l'emploi des États membres en 2001 (2001/63/CE[6]) et sa résolution du 12 octobre 2000 sur les lignes directrices pour les politiques d'emploi des États Membres en 2001[7],

–   vu la Recommandation du Conseil du 19 janvier 2001 concernant la mise en œuvre des politiques de l'emploi des États membres (2001/64/CE[8]),

–   vu le document de travail des services de la Commission intitulé "Mémorandum sur l'éducation et la formation tout au long de la vie" (SEC(2000)1832 – C5-0192/2001),

–   vu sa résolution du 21 avril 1992 sur l'éradication de l'analphabétisme dans les États membres de la Communauté européenne[9]),

–   vu l'article 163 de son règlement,

–   vu le rapport de la commission de l'emploi et des affaires sociales et l'avis de la commission de la culture, de la jeunesse, de l'éducation, des médias et des sports (A5‑0009/2002),

A.   considérant qu'il est un droit fondamental de savoir lire et écrire,

B.   considérant que la possibilité d'apprendre à lire et à écrire devrait être offerte à tous en tant que droit fondamental, et que professeurs et parents devraient reconnaître leur obligation de veiller à ce que cette chance soit saisie par tous,

C.   considérant que la lutte contre l'illettrisme est incontournable parce qu'elle réalise et renforce la liberté individuelle et permet l'accès égal de tous aux droits fondamentaux,

D.   considérant que la lutte contre l'analphabétisme non seulement incombe aux pédagogues et aux enseignants, mais doit également être un engagement de toute la société dans son ensemble et de toutes les administrations publiques en particulier, et rappelant aux États membres les responsabilités que les traités leur confient en ce qui concerne le contenu et l'organisation du système éducatif,

E.   considérant que l'Union doit soutenir la coopération entre les États membres et promouvoir les échanges de meilleures pratiques, d'approches novatrices et évaluer les résultats avec les acteurs et les personnes concernées,

F.   considérant que le Conseil de Lisbonne a décidé qu'en matière de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale doit être appliquée une "méthode ouverte de coordination",

G.   considérant que, selon les données disponibles, les personnes incapables de comprendre et d'utiliser les imprimés et les écrits nécessaires pour fonctionner dans la société, atteindre ses objectifs, parfaire ses connaissances et accroître son potentiel, représenteraient entre 10 et 20% de la population de l'Union et jusqu'à 30 % de la population des pays candidats et que l'ampleur de ce problème augmenterait si l'on considère également les flux de population provenant des pays tiers,

H.   considérant que les statistiques et données détaillées concernant l'illettrisme au niveau européen ne sont toujours pas disponibles, notamment en ce qui concerne la définition du phénomène, les indicateurs, les initiatives et les meilleures pratiques existantes dans les États membres,

I.   considérant que l'engagement au niveau européen en matière de lutte contre l'illettrisme n'a pas été, jusqu'à présent, cohérent et continuel; que les personnes à faibles compétences de base ne sont pas suffisamment prises en considération dans la conception des programmes communautaires,

J.   considérant que dans le cadre du respect de la dignité humaine et de la lutte contre la marginalisation sociale, il convient également de combattre l'analphabétisme récurrent qui affecte surtout les personnes âgées qui, en perdant la capacité de se suffire à elles-mêmes, sont contraintes de recourir à des structures d'accueil en abandonnant définitivement leurs milieux familial et socio-structurel,

K.   considérant que la participation à la société de la connaissance et l’inclusion sociale se fondent principalement sur la capacité de lire et écrire, et que l’illettrisme limite l’accès au marché du travail, les possibilités d’emploi et la capacité d’adaptation à une société et à une économie en changement,

L.   considérant que l'illettrisme et la faiblesse des compétences de base de nombreux travailleurs ont pour incidence d'accroître les risques d'accidents du travail, d'une part, et de rendre plus difficile leur capacité de requalification (ou reconversion), d'autre part,

M.   estimant qu'il faut améliorer l'alphabétisation des Européens pour atteindre l'objectif défini à Lisbonne de faire de l'Europe "l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d'une croissance économique durable accompagnée d'une amélioration quantitative et qualitative de l'emploi et d'une plus grande cohésion sociale", dans laquelle soient promues une participation plus consciente des citoyens à la vie politique, une meilleure connaissance de leurs droits et leur aptitude à les faire valoir;

N.   estimant qu'il convient de tenir compte des orientations approuvées par le Conseil européen de Nice en ce qui concerne les objectifs communs relatifs à la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, et de promouvoir la participation au monde du travail et l'accès de tous aux ressources, aux droits, aux biens et aux services, évitant ainsi les risques de marginalisation au bénéfice des catégories plus menacées;

1.   demande à la Commission d'établir, dans le cadre des lignes directrices pour l'emploi et des méthodes de coordination ouvertes visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion ainsi que dans le cadre de l'enseignement et de la formation, des indicateurs et des repères concrets dans le domaine de l'analphabétisme, et ce en étroite collaboration avec les acteurs sociaux, notamment ceux qui donnent la parole aux populations les plus défavorisées;

2.   demande à la Commission de soumettre au Parlement et au Conseil dans les meilleurs délais un Livre Vert sur l'illettrisme et l'exclusion sociale, assorti d'un calendrier de réalisations concrètes à l'image de l'agenda social, qui définit de manière précise les mesures à prendre au niveau européen;

3.   demande à la Commission de soumettre au Parlement un Livre Vert et un plan d’action sur la base des articles 137 et 150 du traité, incluant au minimum les éléments suivants

  • a)la définition commune des différentes formes d'illettrisme en se fondant sur des indicateurs compatibles et cohérents entre les États membres de manière à évaluer ultérieurement la situation effective des personnes illettrées et l'évolution à moyen terme découlant des mutations dans tous les aspects de la vie socio-économique et familiale;
  • b)la coordination ouverte des politiques de lutte contre l'illettrisme avec celles en matière de l'accès égal de tous aux droits fondamentaux, de l'emploi et de la protection sociale, de la non-discrimination et de l'égalité des chances, de l'éducation et de la formation tout au long de la vie ainsi que de la recherche ;
  • c)l'évaluation annuelle de l'impact des politiques communautaires et nationales en matière de l'illettrisme et de la politique sociale avec les personnes concernées;
  • d) une participation active aux politiques communautaires de lutte contre l'illettrisme de tous les acteurs sociaux concernés, en particulier les personnes les plus démunies elles-mêmes;
  • e)la création d'un réseau d’échange de meilleures pratiques, accessible à tous les acteurs concernés et la mise en place d'une base de données statistique sur l'illettrisme dans l'Union et dans les pays candidats;
  • f)une aide spécifique aux régions de l'Union européenne les plus touchées par cette forme d'exclusion sociale ainsi qu'aux pays candidats en vue de l'élaboration de programmes d'alphabétisation coordonnés avec une formation débouchant sur une qualification;
  • g)l'assistance aux pays candidats pour l'analyse des besoins et la réalisation de programmes d'alphabétisation;
  • h)la révision des directives ou règlements actuels afin d'inclure dans les politiques de l'Union l'objectif de lutte contre l'illettrisme et l'exclusion sociale;
  • i)intégration de l'égalité des chances dans la lutte contre l'analphabétisme comme source d'exclusion sociale dans les domaines de compétence de l'Union;

4.   demande à la Commission de soumettre au Parlement européen et au Conseil dans les meilleurs délais une proposition de recommandation aux États membres, qui inclut, entre autres, les éléments suivants :

  • a)le développement de modules d'alphabétisation dans tous les programmes et actions de formation professionnelle pour adultes, prenant notamment en compte les besoins des travailleurs migrants, et la mise à disposition d'un soutien financier et matériel pour toute action d'alphabétisation mise en place sur le lieu de travail (incluant la possibilité d'appliquer l'accord sur les congés payés de formation);
  • b)la définition de critères de priorité garantissant l'accès aux programmes de formation et d'épanouissement personnel aux adultes qui ne possèdent que de faibles compétences de base; ainsi que de méthodes adaptées à leurs besoins;
  • c)la promotion au niveau local, régional et national des initiatives telles que les "bibliothèques de rue" et le soutien scolaire, et de toutes initiatives qui favoriseraient l'alphabétisation des personnes qui le nécessitent, indépendamment de la situation de salariés, et visant spécialement l'insertion sociale;
  • d)la consultation et la participation active des acteurs sociaux concernés à la définition et la mise en œuvre des programmes à chaque niveau décisionnel en matière de lutte contre l'illettrisme;
  • e)la coordination étroite entre les services compétents, aux niveaux national, régional et local, chargés de la mise en œuvre des actions au titre des Fonds structurels, ceux qui sont responsables des politiques de lutte contre l'exclusion sociale ainsi que de l'insertion professionnelle et ceux qui sont responsables des politiques de lutte contre l'illettrisme;
  • f)la reconnaissance que l'illettrisme numérique peut également conduire à l'exclusion sociale, aussi est-il nécessaire de s'attaquer à ce problème;

5.   demande à la Commission et au Conseil de mettre en place un Observatoire européen de l'illettrisme chargé de créer des cursus et des diplômes de formation au niveau européen;

6.   demande à la Commission de soumettre chaque année au Parlement un bilan écrit et chiffré de réalisation des objectifs de lutte contre l'illettrisme et l'exclusion sociale, en étroite collaboration avec les personnes illettrées ayant participé aux programmes de formation;

7.   se félicite du rapport de la Commission sur les objectifs concrets futurs des systèmes d'éducation; est d'avis que les institutions de l'Union ont un rôle utile à jouer pour permettre aux États membres de réaliser le programme d'action à long terme destiné à améliorer le niveau de l'éducation et de la formation en Europe en renforçant la qualité de la formation des enseignants et des formateurs et en consacrant un effort particulier à l'aptitude à lire, à écrire et à calculer;

8.   invite la Commission à soutenir le développement et le maintien de l'alphabétisation grâce à des programmes tels que SOCRATES, LEONARDO et YOUTH ainsi qu'à des projets soutenus par les Fonds structurels;

9.   invite la Commission à prévoir des programmes en matière d'alphabétisation dans le contexte d'une éventuelle Année du livre ou de la lecture;

10.   charge sa Présidente de transmettre la présente résolution à la Commission et au Conseil, au Comité économique et social, ainsi qu'aux plates-formes européennes d'organisations non gouvernementales travaillant avec les personnes défavorisées.

  • [1] JO C197 du 12.7.2001, p. 8.
  • [2] JO C337 du 28.11.2000, p. 130-135.
  • [3] Textes adoptés, point 9.
  • [4] JO C115 du 14.4.1997, p. 4.
  • [5] JO C223 du 8.8.2001, p. 4.
  • [6] JO L022 du 24.1.2001, p. 18 à 26
  • [7] JO C197 du 12.7.2001, p. 9.
  • [8] JO L022 du 24.1.2001, p. 27-28.
  • [9] JO C150 du 31.5.1993, p.61.

Exposé des motifs

La plus grande souffrance des très pauvres est de ne pas être acceptés comme citoyens à part entière, et d’être considérés comme inutiles et insignifiants. La grande pauvreté et l'exclusion sociale doivent donc être considérées comme atteinte aux droits de l'homme.

La lutte contre l'illettrisme n'est pas seulement un défi aux pédagogues ou aux instituteurs, ce défi est adressé à tous les citoyens. En se révélant incapable de permettre à tous les citoyens de réussir à l'école, d’apprendre un métier et de participer activement aux formations aux nouvelles technologies, notre société se prive elle-même d’un potentiel humain important.

Si le non-accès aux apprentissages fondamentaux et l'illettrisme constituent des atteintes intolérables aux droits de l'homme, ce n'est pas seulement parce qu'ils privent une part des citoyens de l'outil de la lecture et de l'écriture indispensable dans une société en mutation, mais aussi parce qu'ils les réduisent au silence, à la non-communication, à l'inutilité forcée et donc à une exclusion sociale et à une non-citoyenneté de fait.

C'est là que se situe le véritable enjeu de la lutte contre l'illettrisme. Ne pas disposer du pouvoir linguistique apparaît ainsi comme une cause profonde de souffrance. Ceux qui en souffrent déclarent "Savoir lire et écrire, c'est se libérer de la honte"[1].

Le présent rapport d'initiative vise à obtenir au niveau européen des actions conjointes pour que la lutte contre l'illettrisme fasse partie intégrante des programmes transversaux de lutte contre l'exclusion sociale et soit prise en compte horizontalement dans toutes les politiques communautaires.

Les définitions d'exclusion sociale et d'illettrisme

Le rapporteur retiendra volontiers la définition proposée en 1987 par le Comité économique et social français, suite au rapport de M. Joseph Wresinski: "La précarité est l'absence d'une ou plusieurs des sécurités, notamment celle de l'emploi, permettant aux personnes et familles d'assumer leurs obligations professionnelles, familiales et sociales, et de jouir de leurs droits fondamentaux. L'insécurité qui en résulte peut être plus ou moins étendue et avoir des conséquences plus ou moins graves et définitives. Elle conduit à la grande pauvreté quand elle affecte plusieurs domaines de l'existence, qu'elle devient persistante, qu'elle compromet les chances de réassumer ses responsabilités et de reconquérir ses droits par soi-même, dans un avenir prévisible."[2].

Bien que l'Europe soit un continent prospère, nombre de nos concitoyens vivent dans la grande pauvreté et l'exclusion sociale. En effet, selon les dernières données d'Eurostat, environ 18% de la population de l'Union européenne vivent avec moins de 60% du revenu médian national (le seuil de bas revenus retenu pour mesurer la pauvreté relative).

L'Enquête internationale sur l'alphabétisation des adultes (EIAA) - organisée, en 1994, par l'OCDE, visait à évaluer et à comparer les savoirs des adultes dans certains pays industrialisés - définit la littératie comme les capacités de lecture et d'écriture que les adultes utilisent dans leur vie quotidienne, au travail ou dans la collectivité.[3]

L'illettrisme en Europe

L'ampleur du problème au niveau communautaire n'est pas à sous-évaluer: selon l'OCDE, les personnes incapables de comprendre et d'utiliser des imprimés et des écrits nécessaires pour fonctionner dans la vie de tous les jours représentent une partie considérable de la population entre 15 et 65 ans de l'Union.

Selon cette même analyse, le problème de l'illettrisme touche aussi gravement les pays candidats à l'élargissement : 42,2% de la population entre 16 et 65 ans serait illettrée en Slovénie, 33,8% en Hongrie, 42,6% en Pologne, 20,3% en Roumanie, 29,5% en Bulgarie, 25,9% en Lituanie, 23,3% en Estonie, 20,3% en Lettonie.

Ainsi, si l'analphabétisme, qui concerne les personnes n'ayant aucune maîtrise de l'écriture et de la lecture, est aujourd'hui presque complètement éradiqué en Europe, le phénomène de l'illettrisme tend à s'aggraver.

L'illettrisme opère un clivage croissant entre ceux qui sont privilégiés et en relative sécurité et ceux qui sont défavorisés et marginalisés, qui n'ont pas d'accès à l'emploi, et qui subissent insécurité financière, isolement, non-participation à la vie sociale.

D'un point de vue économique, l'illettrisme a des coûts pour les entreprises et leur modernisation: surcharges liées à des taux d'accidents importants, sursalaires afin de suppléer aux carences de tel ou tel, surtemps en raison d'un encadrement personnel supplémentaire, auquel il faut ajouter les effets de la non-production de richesses, liée à l'absence de qualification optimale.[4]

Le déficit d'employabilité n'est pas sans conséquences pour les travailleurs eux-mêmes. Outre les accidents de travail qu'il provoque, l'illettrisme est source d'absentéisme et de démotivation.

Encore, la société de l'information risque d'aggraver l'exclusion des illettrés et de créer un nouveau type d'analphabétisme "technologique" lié à la difficulté d'interagir avec les nouveaux systèmes de technologie de l'information.

Le Conseil européen de Lisbonne, à ce propos, a affirmé que l'éducation et la formation tout au long de la vie ainsi que la lutte contre l'exclusion sociale doivent accompagner une transition réussie vers une économie et une société fondées sur la connaissance, pour éviter que le passage à la société de l'information soit cause d'exclusion et laisse sur le bord de la route les personnes les plus fragiles. [5]

L'action de l'Union européenne et les obstacles à la lutte contre l'illettrisme

Au niveau communautaire, l'illettrisme des adultes n'a pas encore fait l’objet d'une politique cohérente, même si le problème a été plus d'une fois évoqué dans les documents communautaires (rapport sur l'emploi 2000, lignes directrices pour l'emploi 2001, mémorandum sur la formation tout au long de la vie). Les dernières actions communautaires spécifiques au problème de l'illettrisme fonctionnel remontent au programme du Conseil visant à intensifier la lutte contre l'analphabétisme, approuvé en 1987, qui permit à la Commission de soutenir, à partir de 1988, un réseau de 17 projets pilotes sur les mesures préventives les plus efficaces en matière de lutte contre l'analphabétisme et aboutit en 1990 à la publication d'un manuel intitulé "Prévention et traitement de l'illettrisme dans la CE: recueil de stratégies et de pratiques".

La première résolution du Parlement européen sur la lutte contre l’analphabétisme a été adoptée le 13 mai 1982. Dix ans plus tard, le Parlement européen a approuvé une résolution sur l'éradication de l'analphabétisme dans les États membres de la Communauté européenne (A3-400/92), qui invitait les institutions communautaires, nationales, régionales et locales à utiliser leurs ressources humaines et financières pour assurer à leurs populations l'exercice du droit fondamental à l'éducation et à un minimum de connaissances.

Les problèmes majeurs qui se sont opposés à une action efficace dans ce domaine sont d'ordres différents:

-   la carence de données fiables et comparables sur l'illettrisme. Il n'existe actuellement aucun indicateur international commun. Les organismes nationaux et internationaux fondent leurs évaluations sur des critères qui leur sont propres. Chaque État membre utilise des définitions et des indicateurs différents;

-   les programmes proposés aux personnes en difficulté pour lire, écrire et calculer sont mal adaptés aux besoins réels du public ciblé. Les interventions traditionnelles, à l'intérieur ou parallèles au système éducatif, sont peu adaptées aux besoins, aux horaires, aux méthodes d'apprentissage des adultes qui vivent une situation d'exclusion sociale. Les actions plus spécifiques de formation, à l'intérieur du lieu de travail ou en vue de l'insertion professionnelle exigent souvent, parmi les conditions d'accès, un certain niveau de préparation;

-   la nécessité d'affronter le problème à travers des politiques intégrées associant à des objectifs culturels et éducatifs des objectifs sociaux et d'insertion dans le marché du travail liées à une politique d'inclusion sociale.

La compétence de l'Union et les propositions en matière de lutte contre l'illettrisme

La politique de lutte contre l'illettrisme et l'exclusion sociale relève principalement, à l'heure actuelle, de la compétence des États membres. Cependant, la Communauté a pour rôle d'appuyer les initiatives nationales et la coopération transnationales. La lutte contre l'illettrisme et l'exclusion sociale doit devenir une des priorités de l'Union et des États membres, en mobilisant toutes les politiques concernées dans le cadre d'une stratégie globale et intégrée.

Votre rapporteur propose donc d'envisager la mise en place d'une "méthode ouverte de coordination" en matière de lutte contre l'illettrisme entre les États membres, qui pourra être joint aux Plans nationaux pour l'emploi et aux Plans nationaux pour l'inclusion sociale.

A.   LA PARTICIPATION DES PERSONNES CONCERNÉES

Le point de départ de toute stratégie commune en matière de lutte contre l'exclusion sociale et l'illettrisme doit désormais se faire en étroite et constante collaboration avec les ONG qui soutiennent durablement les efforts des familles les plus démunies dans leur combat quotidien contre l'exclusion sociale.

B.   L'ACTION DES ÉTATS MEMBRES

Au niveau des États Membres, votre rapporteur propose, en particulier, de veiller à promouvoir:

1.   le développement de modules d'alphabétisation dans toutes les actions de formation pour adultes et la fixation de critères de priorité qui garantissent l'accès aux programmes de formation aux illettrés. En particulier, doivent être soutenues toutes les actions d'alphabétisation qui peuvent être mises en place sur le lieu de travail ou en collaboration avec des employeurs potentiels;

2.   l'élaboration d'instruments et méthodes didactiques ciblés sur l'alphabétisation des adultes, grâce aussi aux nouvelles technologies;

3.   les initiatives de base telles les "bibliothèques de rue" et de soutien scolaire proposées par les associations, au niveau local;

4.   la participation à la définition des stratégies nationales en matière de lutte contre l'illettrisme de tous les acteurs sociaux concernés;

5.   la coordination étroite entre les services nationaux chargés de la mise en œuvre des actions au titre des Fonds structurels et ceux qui sont responsables des politiques de lutte contre l'exclusion sociale et l'illettrisme.

C.   INITIATIVE DE L'UNION EUROPÉENNE

Les actions des États membres seront accompagnées d'une initiative de la Commission européenne visant à:

1.   définir des indicateurs communs, et mettre en place une base de données, relatifs à:

-   compétences de base indispensables;

-   critères et méthodes d'identification des personnes et des groupes à risque;

-   objectifs qualitatifs et quantitatifs des actions dans le domaine de l'illettrisme;

-   identification des meilleures pratiques;

-   évaluation des coûts de l'illettrisme;

2.   mettre en place un système d'évaluation périodique tant de l'impact des politiques communautaires et nationales sur l'illettrisme, que des résultats obtenus des politiques de lutte contre l'illettrisme;

3.   prendre en compte la lutte contre l'illettrisme, en tant que politique horizontale (mainstreaming), dans toutes les politiques de l'Union et définir des mécanismes appropriés permettant de la coordonner avec les autres politiques communautaires

4.   garantir la participation de tous les acteurs sociaux concernés à la définition des actions et créer un réseau d'échanges d'informations et de meilleures pratiques;

5.   assurer, dès maintenant et de toute urgence, l'assistance aux pays candidats pour la réalisation de programmes d'alphabétisation.

D.   INSTRUMENTS JURIDIQUES

La stratégie européenne de lutte contre l'illettrisme doit être assortie d'un calendrier de réalisations concrètes, dont la première étape sera l'élaboration d'un Livre Vert qui définirait les mesures à prendre au niveau européen:

-   initiative législative;

-   recommandation à l'intention des États membres;

-   révision des directives ou règlements actuels afin d'inclure dans les politiques de l'Union l'objectif de lutte contre l'illettrisme et l'exclusion sociale.

Chaque année, la Commission soumettra au Parlement européen un bilan écrit et chiffré de réalisation des objectifs de lutte contre l'illettrisme et l'exclusion sociale.

  • [1] Tous, nous sommes acteurs des droits de l'homme. Actes de la 6e Session européenne des Universités populaires Quart Monde au Comité économique et social, sous la direction d'Olivier GERHARD, Bruxelles 1999
  • [2] Grande pauvreté et précarité économique et sociale. Rapport au Conseil économique et social, Paris 1987. Rapporteur: M. Joseph WRESINSKI.
  • [3] Rapport OCDE, Littératie, Économie et Société, 1995
  • [4] Hugues LENOIR, Entreprise et illettrisme : ne pas renoncer !, in : Informations Sociales n°59.
  • [5] "Favoriser l'intégration sociale" (§ 32 et 33 des Conclusions)

AVIS DE LA COMMISSION DE LA CULTURE, DE LA JEUNESSE, DE L'EDUCATION, DES MEDIAS ET DES SPORTS

18 septembre 2001

à l'intention de la commission de l'emploi et des affaires sociales

sur l'illettrisme et l'exclusion sociale

(2001/2340 (INI))

Rapporteur pour avis: Eurig Wyn

PROCÉDURE

Au cours de sa réunion du 6 mars 2001, la commission de la culture, de la jeunesse, de l'éducation, des médias et des sports a nommé Eurig Wyn rapporteur pour avis.

Au cours de ses réunions des 4 et 18 septembre 2001, elle a examiné le projet d'avis.

Au cours de la dernière de ces réunions, elle a adopté les conclusions suivantes à l'unanimité.

Étaient présents au moment du vote Giuseppe Gargani, président; Eurig Wyn, rapporteur pour avis; Pedro Aparicio Sánchez, Marielle de Sarnez, Robert J.E. Evans (suppléant Lissy Gröner), Cristina Gutiérrez Cortines (suppléant Christopher Heaton-Harris), Thomas Mann (Ruth Hieronymi, conformément à l'article 153, paragraphe 2), Maria Martens, Pietro-Paolo Mennea, Barbara O'Toole, Doris Pack, Roy Perry, Mónica Ridruejo, The Earl of Stockton (suppléant Theresa Zabell), Kathleen Van Brempt, Luckas Vander Taelen et Sabine Zissener.

JUSTIFICATION SUCCINCTE

1.   Dans le "meilleur des mondes" de "l'économie de la connaissance", savoir lire et compter constitue un atout. À l'inverse, dans les sociétés développées, l'illettrisme est étroitement lié à l'exclusion sociale, à la honte, à la pauvreté et à l'immobilité sociale. Les illettrés sont condamnés aux emplois subalternes. Par ailleurs, ils connaissent la prison plus fréquemment que les personnes qui savent lire et écrire. Que peut et doit faire l'Union européenne pour tenter de lutter contre l'illettrisme en Europe?

2.   Position du problème

Jusqu'à une époque récente, on pensait généralement que les pays industrialisés ne connaissaient pas le problème de l'illettrisme étant donné qu'ils mènent de longue date une politique d'éducation générale et obligatoire. Cette idée était inexacte. Si les taux d'illettrisme total sont faibles en Europe, un pourcentage dangereusement élevé de la population de certains des pays les plus riches du monde se caractérise par un niveau d'alphabétisation peu élevé – on parle d'"illettrisme fonctionnel". À cela s'ajoute un nouveau problème: de nombreux migrants et demandeurs d'asile, qui savent lire et écrire dans leur langue maternelle, sont généralement des illettrés fonctionnels dans la langue principale de leur pays d'accueil. Tout cela est préoccupant parce que le niveau d'alphabétisation affecte le profil de qualification et la flexibilité de la main‑d'œuvre d'un pays, de même que le niveau de l'emploi, les possibilités de formation et les revenus. Ces éléments ont aussi une incidence, évidemment, sur la mesure dans laquelle les citoyens participent à la vie culturelle, civique et politique des sociétés dans lesquelles ils vivent. Pour les citoyens, il y a corrélation entre le niveau d'alphabétisation et la participation au marché du travail, le risque de chômage, la possibilité d'obtenir un emploi hautement qualifié. L'alphabétisation est aussi liée à la santé et à l'espérance de vie.

3.   Ampleur du problème

Un rapport publié en juin 2000 par l'OCDE – "Literacy in the Information Age" (L'alphabétisation à l'ère de l'information) – tentait de mesurer le niveau d'alphabétisation parmi les adultes de vingt pays. Basé sur des travaux de recherche comparative effectués entre 1994 et 1999, ce rapport reprenait des entretiens avec des personnes âgées de 16 à 65 ans. L'alphabétisation se définit comme suit: la faculté de comprendre et d'employer l'information écrite dans les activités quotidiennes, à domicile, sur le lieu de travail et dans la société à l'effet d'atteindre des objectifs personnels et de développer les connaissances et les possibilités personnelles.

4.   Les travaux sur lesquels le rapport se fonde concernent trois aspects:

  • la compréhension de l'information courante dans un journal,
  • la compréhension de documents tels que fiches de paye ou cartes routières,
  • la capacité de calculer, à partir d'une annonce publicitaire, le montant des intérêts à payer sur un emprunt.

Cinq niveaux de compétence allant de 1 ("très faible") à 5 ("très élevé") ont été définis. Le niveau 3 a été considéré comme le minimum nécessaire pour faire face aux exigences de la vie quotidienne et travailler dans une société complexe et développée.

5.   Classement

Le classement suivant s'est dégagé: Suède, Danemark, Norvège, République tchèque, Allemagne, Pays‑Bas, Finlande, Belgique (Flandre), Canada, Australie, États‑Unis, Nouvelle‑Zélande, Royaume‑Uni, Hongrie, Irlande, Slovénie, Pologne, Portugal, Chili (la France s'était retirée de l'étude en novembre 1995). Aucun gouvernement ne peut se permettre de se reposer sur ses lauriers. Dans chacun des pays suivants, plus de 15 % de la population n'atteignent que le niveau 1 pour la compréhension d'une information courante dans le journal: Belgique (Flandre), Irlande, Portugal et Royaume‑Uni. Même dans le pays qui obtient les meilleurs résultats au test (Suède), 8 % de la population adulte éprouvent de graves difficultés dans la vie quotidienne et au travail. Le rapport conclut que, dans l'ensemble des pays et des régions qui ont participé à l'étude, au moins un adulte sur quatre n'atteint pas le niveau 3. Le manque d'instruction est un problème bien ancré. Remédier à celui‑ci constitue un défi important pour les gouvernements.

6.   Éducation à temps plein

La relation entre alphabétisation et résultats scolaires n'est pas directe. De nombreux adultes se débrouillent très bien en dépit d'un faible niveau d'éducation. Inversement, certains ne sont pas à l'aise en dépit d'un niveau élevé d'éducation. Il n'empêche – et cela n'est pas surprenant – que l'étude de l'OCDE montre que les résultats scolaires constituent le principal indicateur en matière d'alphabétisation. En moyenne, plus une personne est restée longtemps dans l'enseignement à temps plein et plus grandes sont ses compétences. La corrélation négative entre âge et alphabétisation reflète le fait que les groupes âgés qui ont participé au test avaient généralement passé moins de temps à l'école que les jeunes. Une éducation à temps plein de haute qualité contribue dans une mesure notable à l'alphabétisation de la population dans son ensemble. D'après l'OCDE et différents autres observateurs, la marge d'amélioration se situe dans un enseignement plus large et de meilleure qualité ciblé sur le quartile inférieur de la population en âge scolaire et de la population ayant des besoins particuliers en matière d'éducation.

7.   En dehors de l'éducation à temps plein

Cette formule ne garantit pas un niveau d'éducation élevé parmi les adultes. L'étude de l'OCDE conclut que, parmi ceux qui quittent l'enseignement à temps plein, quatre facteurs contribuent à une alphabétisation élevée et au maintien de celle‑ci:

  • un fort pourcentage de population occupant des emplois qualifiés,
  • des structures industrielles et professionnelles et des schémas d'organisation du travail nécessitant et récompensant les qualifications,
  • la participation à l'éducation et à la formation des adultes,
  • l'utilisation des qualifications à domicile.

Ces éléments mettent en évidence l'importance des politiques centrées sur le lieu de travail (les employeurs des secteurs privé et public ont un rôle important à jouer en promouvant et en récompensant l'alphabétisation) ainsi que dans le milieu familial (programmes d'apprentissage visant l'ensemble de la famille).

8.   Que peut et doit faire l'Europe?

L'article 149, paragraphe 1, du traité dispose que la Communauté respecte pleinement la responsabilité des États membres pour le contenu de l'enseignement et l'organisation du système éducatif, ainsi que leur diversité culturelle et linguistique. Par ailleurs, les ressources consacrées à l'éducation au niveau européen sont limitées par rapport à l'ensemble du budget. Enfin, la Communauté n'intervient que si elle peut apporter une valeur ajoutée vérifiable et appropriée. Compte tenu de ces contraintes, on peut définir trois secteurs relevant de la compétence de la Commission, pour lesquels une base juridique est disponible et dans lesquels la Communauté pourrait contribuer à l'alphabétisation en Europe:

  • collecter des informations sur la manière dont les États membres envisagent de donner suite aux conclusions du Conseil de Lisbonne en matière d'éducation et encourager la diffusion des meilleures pratiques;
  • aider les États membres (grâce à la méthode de coordination ouverte) à réaliser un programme d'action à long terme pour améliorer le niveau de l'éducation et de la formation en Europe, renforcer la qualité de la formation des enseignants et des formateurs et consacrer un effort particulier à l'aptitude à lire, à écrire et à calculer – voir rapport de la Commission intitulé "Les objectifs concrets futurs des systèmes d'éducation"[1];
  • promouvoir le développement et l'entretien de l'alphabétisation grâce à des programmes tels que SOCRATES (GRUNDTVIG), LEONARDO et YOUTH ainsi qu'à des projets soutenus par les Fonds structurels.

CONCLUSIONS

La commission de la culture, de la jeunesse, de l'éducation, des médias et des sports invite la commission de l'emploi et des affaires sociales, compétente au fond, à incorporer dans la proposition de résolution qu'elle adoptera les éléments suivants:

1.   fait observer que, si l'illettrisme total constitue un phénomène relativement rare en Europe, au moins un adulte sur quatre, dans tous les pays d'Europe, n'est pas suffisamment alphabétisé pour faire face aux exigences de la vie quotidienne et du travail dans une société complexe et développée;

2.   estime qu'il faut améliorer l'alphabétisation des Européens pour atteindre l'objectif défini à Lisbonne de faire de l'Europe "l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d'une croissance économique durable accompagnée d'une amélioration quantitative et qualitative de l'emploi et d'une plus grande cohésion sociale", dans laquelle soient promues une participation plus consciente des citoyens à la vie politique, une meilleure connaissance de leurs droits et leur aptitude à les faire valoir;

3.   rappelle aux États membres les responsabilités que les traités leur confient en ce qui concerne le contenu et l'organisation du système éducatif;

4.   estime qu'il convient de tenir compte des orientations approuvées par le Conseil européen de Nice en ce qui concerne les objectifs communs relatifs à la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, et de promouvoir la participation au monde du travail et l'accès de tous aux ressources, aux droits, aux biens et aux services, évitant ainsi les risques de marginalisation au bénéfice des catégories plus menacées;

5.   se félicite du rapport de la Commission sur les objectifs concrets futurs des systèmes d'éducation; est d'avis que les institutions de l'Union ont un rôle utile à jouer pour permettre aux États membres de réaliser le programme d'action à long terme destiné à améliorer le niveau de l'éducation et de la formation en Europe en renforçant la qualité de la formation des enseignants et des formateurs et en consacrant un effort particulier à l'aptitude à lire, à écrire et à calculer;

6.   invite la Commission à soutenir le développement et le maintien de l'alphabétisation grâce à des programmes tels que SOCRATES, LEONARDO et YOUTH ainsi qu'à des projets soutenus par les Fonds structurels;

7.   invite la Commission à prévoir des programmes en matière d'alphabétisation dans le contexte d'une éventuelle Année du livre ou de la lecture;

8.   invite instamment les États membres à reconnaître que les migrants, les demandeurs d'asile et les adultes expulsés du marché du travail en raison des innovations technologiques sont confrontés à des problèmes particuliers et à faire le nécessaire pour améliorer leur alphabétisation en coordonnant leurs initiatives avec celles des organisations bénévoles religieuses ou laïques ainsi que des organisations syndicales et patronales.

  • [1] COM(2001) 59.