RAPPORT sur l'évolution de la passation de marchés publics

10.5.2010 - (2009/2175(INI))

Commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs
Rapporteure: Heide Rühle


Procédure : 2009/2175(INI)
Cycle de vie en séance
Cycle relatif au document :  
A7-0151/2010

PROPOSITION DE RÉSOLUTION DU PARLEMENT EUROPÉEN

sur l'évolution de la passation de marchés publics

(2009/2175(INI))

Le Parlement européen,

–       vu le traité instituant la Communauté européenne, et en particulier les modifications y apportées par le traité de Lisbonne,

–       vu les directives 2004/18/CE et 2004/17/CE relatives à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services, et la directive 2007/66/CE sur les procédures de recours en matière de passation des marchés publics,

–       vu la communication de la Commission du 19 novembre 2009 intitulée "Mobilisation des investissements privés et publics en vue d'une relance de l'économie et d'une transformation structurelle à long terme: développement des partenariats public–privé" (COM(2009)0615),

–       vu la communication de la Commission du 5 mai 2009 intitulée "Contribuer au développement durable: le rôle du commerce équitable et des systèmes non gouvernementaux d'assurance de la durabilité liés au commerce" (COM(2009)0215),

–       vu la communication de la Commission du 16 juillet 2008 relative à des marchés publics pour un environnement meilleur (COM(2008)0400),

–       vu la communication interprétative de la Commission du 5 février 2008 concernant l'application du droit communautaire des marchés publics et des concessions aux partenariats public–privé institutionnalisés (PPPI) (C(2007)6661),

–       vu le code de bonnes pratiques facilitant l'accès des PME aux marchés publics (document de travail des services de la Commission SEC(2008)2193),

–       vu la communication interprétative de la Commission du 1er août 2006 relative au droit communautaire applicable aux passations de marchés non soumises ou partiellement soumises aux directives marchés publics[1],

–       vu les arrêts suivants rendus par la Cour de justice de l'Union européenne

         –       le 19 avril 2007 dans l'affaire C–295/05 Tragsa,

         –       le 18 décembre 2007 dans l'affaire C–532/03, Commission/Irlande (services irlandais de transport d'urgence en ambulance),

         –       le 13 novembre 2008 dans l'affaire C–324/07 Coditel Brabant,

         –       le 9 juin 2009 dans l'affaire C–480/06, Commission/Allemagne (Stadwerke Hamburg),

         –       le 10 septembre 2009 dans l'affaire C–206/09 Eurawasser,

         –       le 9 octobre 2009 dans l'affaire C–573/07 Sea S.r.l.,

         –       le 15 octobre 2009 dans l'affaire C–196/08 Acoset SpA,

         –       le 15 octobre 2009 dans l'affaire C–275/08, Commission/Allemagne (Datenzentrale Baden-Württemberg),

         –       le 25 mars 2010 dans l'affaire C-451/08 Helmut Müller,

–       vu l’avis du Comité des régions du 10 février 2010 intitulé "Contribuer au développement durable: le rôle du commerce équitable et des systèmes non gouvernementaux d’assurance de la durabilité liés au commerce" (RELEX-IV-026),

–       vu les études suivantes:

         –       "Évaluation de l'impact économique des directives relatives aux marchés publics Markt/2004/10/D rapport final", Europe Economics, 15 septembre 2006,

         –       "The Institutional Impacts of EU Legislation on Local and Regional Governments, A Case Study of the 199/31/EC Landfill Waste and 2004/18/EC Public Procurement Directives”, Institut européen d'administration publique (IEAP), septembre 2009,

–       vu sa résolution du 3 février 2009 sur les achats publics avant commercialisation: promouvoir l'innovation pour assurer des services publics durables et de qualité en Europe[2],

–       vu sa résolution du 20 juin 2007 sur les problèmes spécifiques dans la transposition et l'application de la législation des marchés publics et les rapports de cette dernière avec l'agenda de Lisbonne[3],

–       vu sa résolution du 26 octobre 2006 sur les partenariats public–privé et le droit communautaire des marchés publics et des concessions[4],

–       vu sa résolution du 6 juillet 2006 sur le commerce équitable et le développement[5]

–       vu l'article 48 de son règlement,

–       vu le rapport de la commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs et les avis de la commission du commerce international ainsi que de la commission du développement (A7-0151/2010),

A.     considérant que la crise économique et financière a mis en lumière l’importance économique majeure des marchés publics, que les effets de la crise sur les collectivités communales sont déjà nettement visibles, et que les administrations publiques ne peuvent véritablement s’acquitter de leurs tâches dans l’intérêt général que si elles jouissent de la sécurité juridique requise et que les procédures ne sont pas trop complexes,

B.     considérant que le bon fonctionnement des marchés publics est essentiel au fonctionnement du marché intérieur, tant pour encourager la concurrence transfrontalière que pour stimuler l’innovation, promouvoir une économie à faibles émissions de CO2 et garantir le rendement maximal des dépenses consenties par les autorités publiques,

C.     considérant que le droit de la passation de marchés publics est nécessaire pour garantir une gestion économique et efficace des ressources publiques et pour permettre aux entreprises d’obtenir des marchés publics dans un cadre concurrentiel conforme aux règles du marché,

D.     considérant que la révision de 2004 des directives relatives à la passation des marchés publics devait déboucher sur une simplification, une modernisation et un assouplissement, ainsi que sur une plus grande sécurité juridique,

E.     considérant que le traité de Lisbonne reconnaît pour la première fois l'autonomie des collectivités régionales et locales dans le droit primaire de l'Union européenne, qu'il renforce la subsidiarité et qu'il instaure un droit de recours non seulement pour les parlements nationaux mais aussi pour le Comité des régions,

F.     considérant que la Cour de justice européenne a examiné un nombre disproportionné de procédures en infraction engagées devant la Cour de justice européenne dans ce domaine, qui témoigne des difficultés rencontrées par de nombreux États membres pour respecter les directives sur les marchés publics,

G.     considérant que le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne intègre la notion d’économie sociale de marché, une clause sociale ainsi qu’un protocole relatif aux services d’intérêt général définissant les valeurs partagées au sein de l’UE, afin de faire en sorte que les politiques européennes soient élaborées de manière à répondre aux aspirations des citoyens d’Europe,

H.     considérant que la Convention 94 de l’OIT dispose que les contrats généraux de marchés publics doivent contenir des clauses garantissant une rémunération équitable et des conditions de travail qui ne soient pas moins favorables que celles énoncées dans le cadre de conventions collectives, par exemple,

Observations et recommandations générales

1.      déplore que les objectifs poursuivis par la révision de 2004 des directives relatives à la passation des marchés publics n’ont toujours pas été atteints, notamment en ce qui concerne la simplification des règles de passation des marchés et le renforcement de la certitude juridique; espère néanmoins que les derniers arrêts de la Cour de justice de l’Union européenne contribueront à clarifier les questions juridiques en suspens et permettront de réduire le nombre des procédures de recours; invite la Commission à viser et à poursuivre résolument, lors de chaque examen de la réglementation européenne, les objectifs de simplification et de concision de la procédure de passation des marchés publics;

2.      déplore en outre que la conjonction des droits communautaires, nationaux et régionaux, résultant notamment de la transposition incomplète en droit national des directives européennes sur les marchés publics et d'une multiplicité d'initiatives de droit indicatif prises par la Commission, ainsi que de l’interprétation par les tribunaux européens et nationaux aient débouché sur un régime juridique complexe et opaque, confronte les organismes publics, les entreprises privées et les prestataires de services d’intérêt général à de graves problèmes juridiques, qu'ils ne peuvent plus gérer sans consentir des efforts supplémentaires ou faire appel à des consultants juridiques extérieurs; demande instamment à la Commission de remédier à cette situation et d’étudier, dans le contexte de l’initiative "mieux légiférer" les répercussions du droit indicatif, de limiter ces propositions aux aspects essentiels et de les évaluer au regard de la subsidiarité et de la proportionnalité et eu égard aux cinq principes énoncés par le livre blanc de 2001 sur la gouvernance européenne (ouverture, participation, responsabilité, efficacité et cohérence);

3.      souligne que, du fait de cette évolution, les adjudicateurs de marchés publics doivent souvent privilégier la certitude juridique aux dépens des besoins de leur politique; souligne que, de ce fait, ils sont souvent contraints d’attribuer le marché en question à l’offre la moins chère, et non à l’offre la plus économiquement avantageuse; craint que cette évolution n’affaiblisse la base d’innovation et la compétitivité mondiale de l’UE; demande instamment à la Commission de remédier à cette situation et d’élaborer des mesures stratégiques afin d’encourager et de donner pouvoir aux adjudicateurs de préférer l’offre la plus avantageuse économiquement et qualitativement;

4.      souligne que les initiatives européennes dans le domaine de la passation des marchés publics doivent être mieux coordonnées pour éviter de compromettre la cohérence avec les directives relatives à la passation des marchés publics et confronter les utilisateurs à des problèmes juridiques; réclame dès lors une coordination obligatoire au sein de la Commission, sous la direction du service chargé des marchés publics, à savoir la DG Marché intérieur et services, et avec la participation des autres directions générales concernées; demande la création d’un site web unique et une information régulière des autorités contractantes pour améliorer la transparence et la convivialité de la législation;

5.      déplore le manque de transparence quant à la composition et aux résultats des travaux du groupe consultatif interne de la Commission compétent en matière de passation de marchés publics (CCMP) et quant au rôle et aux attributions du comité consultatif pour l’ouverture des marchés publics (CCO) et invite la Commission à veiller à ce que ce comité ainsi que le nouveau comité consultatif prévu pour les partenariats public–privé aient une composition équilibrée impliquant les syndicats et des représentants des entreprises, notamment des PME, et soient davantage transparents; exige que le Parlement européen soit dûment informé et reçoive toutes les informations disponibles à chaque étape et à la fin du processus;

6.      estime que, dans la mesure où les marchés publics concernent des fonds publics, ils doivent être transparents et ouverts au contrôle public; demande à la Commission de clarifier la situation pour faire en sorte que les autorités locales et autres bénéficient d’une certitude juridique et puissent informer les citoyens de leurs obligations contractuelles;

7.      souligne que l’adjudication des marchés publics doit avoir lieu dans des conditions de transparence et de traitement équitable de tous les intéressés avec pour critère final le rapport prix – rendement du projet, de façon à retenir l’offre optimale et non exclusivement l’offre économiquement la moins chère;

8.      invite la Commission à procéder à une évaluation ex-post des directives relatives à la passation des marchés publics en tenant compte des points de vue exprimés dans le présent rapport; escompte que cette révision sera effectuée sur la base d’une large participation de tous les milieux intéressés et en étroite collaboration avec le Parlement européen; recommande que toute révision prenne en considération l’ensemble du cadre et inclue également la directive relative aux procédures de recours en matière de passation des marchés publics, ainsi qu'une analyse des législations nationales de transposition de la directive relative aux procédures de recours pour faire obstacle à une nouvelle fragmentation du droit des marchés publics; considère qu’il n’est pas encore possible d’évaluer les conséquences pratiques de ces directives, dans la mesure où tous les États membres ne les ont pas encore transposées;

Coopération public-public

9.      rappelle que le traité de Lisbonne, entré en vigueur le 1er décembre 2009, reconnaît pour la première fois dans le droit primaire de l’Union européenne, le droit à l’autonomie régionale et communale (article 4, paragraphe 2, du traité sur l’Union européenne); souligne que dans plusieurs arrêts, la Cour de justice de l’Union européenne a déjà invoqué le droit à l’autonomie communale et fait observer "qu’une autorité publique peut accomplir les tâches d’intérêt public qui lui incombent par ses propres moyens (…) et qu’elle peut aussi le faire en collaboration avec d’autres autorités publiques" (C–324/07); attire en outre l'attention sur l'arrêt de la Grande chambre de la Cour de justice de l'Union européenne du 9 juin 2009 (C–480/06), qui a constaté que le droit communautaire ne prescrit aucune forme juridique spécifique aux organismes publics pour l'exercice commun de leurs tâches publiques; considère dès lors que les partenariats public–privé, comme les coopérations communales et les formes de coopération intra–étatique, ne sont donc pas soumis aux règles de passation des marchés lorsque les critères suivants sont remplis:

–       il s'agit de l’accomplissement d’une tâche publique incombant à toutes les communes concernées,

–       cette tâche est accomplie exclusivement par des organismes publics, autrement dit sans la participation d'entreprises privées, et

–       l'activité est exercée essentiellement pour les organismes publics concernés;

10.    souligne que la Commission a précisé que toutes les actions des autorités publiques ne sont pas soumises au droit des marchés publics. Aussi longtemps que les dispositions du droit de l’UE n’exigent pas la création d’un marché dans un domaine donné, c’est aux États membres qu’il revient de décider si et dans quelle mesure ils souhaitent accomplir eux-mêmes les missions de service public;

11.    fait observer que les conclusions de la Cour de justice de l’Union européenne dans l’arrêt susmentionné ne visent pas directement la seule coopération entre communes mais ont une portée générale, de sorte qu’elles doivent s’appliquer à la coopération d’autres pouvoirs adjudicateurs publics;

12.    fait observer que dans l’arrêt qu’elle a rendu le 10 septembre 2009 (C–573/07), la Cour de justice de l’Union européenne a constaté que la simple possibilité d’une ouverture du capital d’une entreprise jusqu’alors publique à des investisseurs privés ne peut, s’agissant de l’obligation de la passation d’un marché, être prise en considération que si la nature de l’entreprise à capitaux publics change au cours de la période de validité du marché, ce qui modifie la condition fondamentale du marché et nécessite un nouvel appel d’offres compétitif; constate que les règles en matière de partenariats public-public ont évolué considérablement du fait de la jurisprudence de la CJUE et se félicite des récents arrêts de la Cour en la matière; demande à la Commission et aux États membres de diffuser largement des informations sur les conséquences juridiques de ces arrêts;

Concessions de services

13.    fait observer que selon l'article 1er, paragraphe 3 b), de la directive 2004/17/CE et l'article 4 de la directive 2004/18/CE, les concessions de services sont des contrats "présentant les mêmes caractéristiques qu'un marché de services à l'exception du fait que la contrepartie de la prestation des services consiste soit uniquement dans le droit d'exploiter le service, soit dans ce droit assorti d'un prix"; souligne que les concessions de services ont été exclues du champ d'application des directives relatives à la passation des marchés publics, pour offrir plus de souplesse aux pouvoirs adjudicateurs et aux attributaires; rappelle que la Cour de justice de l'Union européenne a elle aussi, dans différents arrêts, confirmé que les concessions de services ne relèvent pas du champ d'application de ces directives, mais qu'elles doivent respecter les principes généraux du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (interdiction de la discrimination, principe d'égalité de traitement et transparence), et que les pouvoirs adjudicateurs publics ont le droit d'assurer la fourniture de services au moyen d'une concession, s'ils estiment qu'il s'agit de la meilleure manière d'assurer le service d'intérêt général concerné, et cela même si le risque associé à l'exploitation est très limité compte tenu des modalités de droit public applicables à l'organisation du service et que ce risque d'exploitation limité est toutefois entièrement transféré (Arrêt du 10 septembre 2009 dans l'affaire C–206/08 paragraphes 72 à 75);

14.    prend acte de la communication de la Commission du 19 novembre 2009 sur le développement de partenariats public–privé et attend avec intérêt l'évaluation qui en sera faite; escompte que la Commission tirera les enseignements des PPP en situation d’échec; souligne qu’il convient de prendre en considération tant la complexité des procédures que les différences importantes qui existent dans le domaine de la culture juridique et de la pratique juridique dans les États membres en ce qui concerne les concessions de services; considère que le débat sur la définition du terme "concessions de services" et l'établissement du cadre juridique qui régit ces concessions a évolué à la suite de l'adoption des directives de 2004 sur les marchés publics et de la jurisprudence complémentaire de la Cour de justice de l’Union européenne; insiste sur le fait qu’une proposition d’acte législatif relatif aux concessions de services ne se justifierait qu’en vue de remédier à d’éventuelles distorsions du marché intérieur; souligne qu’aucune distorsion de cet ordre n’a été identifiée à ce jour, et qu’un acte législatif relatif aux concessions de services est donc inutile aussi longtemps qu’il ne vise pas une amélioration évidente du fonctionnement du marché intérieur;

Partenariat public-privé

15.    se félicite de la clarification juridique des conditions dans lesquelles la législation en matière de marchés publics s'applique aux partenariats public–privé institutionnalisés, compte tenu de l'importance majeure que la Commission attache, dans sa communication du 19 novembre 2009, à la lutte contre le changement climatique, à la promotion des énergies renouvelables et au transport durable; fait observer que les directives relatives à la passation des marchés publics s'appliquent toujours quand une entreprise se voit conférer une mission privée, même mineure; souligne toutefois que tant la Commission, dans sa communication du 5 février 2008, que la Cour de justice de l'Union européenne, dans son arrêt du 15 octobre 2009 dans l'affaire C–196/08, ont constaté que lorsque certaines missions font l'objet d'une adjudication et sont transférées à un partenariat public–privé qui vient d'être créé, la double adjudication n'était pas nécessaire; fait toutefois observer que toutes les conditions suivantes doivent être remplies pour que le transfert d'une concession à une entreprise mixte publique–privée créée à cette fin puisse se faire sans procédure de mise en concurrence:

–       le partenaire privé est choisi par la voie d’une procédure transparente, avec publication préalable du contrat après examen des conditions financières, techniques, opérationnelles et administratives ainsi que des caractéristiques de l’offre en rapport avec le service à fournir;

–       l'entreprise mixte publique–privée conserve pendant toute la durée de la concession le même objet social. Une modification essentielle de l'objet social ou du service transféré ferait naître, de l'avis de la Cour de justice de l'Union européenne, l'obligation de lancer une nouvelle procédure d'adjudication;

         estime dès lors que la question de l'application de la législation des marchés publics aux partenariats public–privé institutionnalisés est réglée, et invite la Commission et les États membres à faire une communication dans ce sens;

16.    souligne cependant que les crises financières récentes ont éclairé d’un jour nouveau les formules de financement et de partage des risques fréquemment utilisées pour les partenariats public-privé; demande à la Commission d’évaluer correctement les risques financiers associés à la création de PPP;

Urbanisme/développement urbain

17.    se félicite de l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne dans l'affaire C–451/08; est d’avis que l’objet large et ambitieux de la directive, s’il convient d’en tenir compte dans l’interprétation de celle–ci, ne doit cependant pas faire croire que, en se fondant sur le but de ce texte, son champ d’application puisse être étendu sans limites. Autrement, le risque existerait que toute activité de réglementation urbanistique soit soumise aux dispositions de la directive étant donné que, par définition, les mesures régissant la possibilité de réaliser des bâtiments modifient, parfois de manière substantielle, la valeur des terrains auxquels elles s’appliquent; est d’avis que le droit des passations a investi ces dernières années des domaines qui ne relevaient pas à l’origine des activités régaliennes d’achat et suggère que le caractère particulier de ces activités d’achat revienne plus nettement au premier plan lors de l’application des règles relatives aux passations;

Passation de marchés sous les valeurs-seuils

18.    rappelle que le Parlement européen s’est associé à la plainte introduite par l'Allemagne le 14 septembre 2006 contre la Commission devant la Cour de justice de l’Union européenne contre la communication interprétative de la Commission du 1er août 2006 relative au droit communautaire applicable aux passations de marchés non soumises ou partiellement soumises aux directives marchés publics, et attend une décision rapide;

Micro, petites et moyennes entreprises

19.    demande à la Commission d’évaluer l’impact des directives en matière de marchés publics sur les micro, petites et moyennes entreprises, notamment dans leur rôle de sous-traitants, et de déterminer, en vue d’une révision future de ces directives, s’il est nécessaire d’élaborer des règles plus précises en matière de sous-traitance pour éviter que les PME agissant en tant que sous-traitants n’aient à accepter des conditions moins favorables que celles dont jouit le bénéficiaire principal du marché public;

20.    invite la Commission à simplifier les procédures de passation des marchés publics afin d’éviter aux pouvoirs locaux comme aux entreprises de devoir consacrer des ressources considérables en temps et en argent à des questions strictement bureaucratiques; souligne que le fait de simplifier les procédures permettra aux PME d’accéder plus facilement à ces procédures et d’y participer de façon plus juste et plus équitable;

21.    estime que la sous-traitance est une forme d’organisation du travail qui convient aux aspects spécialisés de la réalisation de travaux; souligne que les contrats de sous-traitance doivent respecter toutes les obligations imposées aux entrepreneurs principaux, notamment en ce qui concerne le droit du travail et la sécurité. estime qu'à cette fin, il serait opportun d’instaurer une responsabilité solidaire entre l’entrepreneur principal et le sous-traitant;

22.    se déclare en faveur de l’autorisation systématique d’offres alternatives (ou variantes); rappelle que les conditions d’adjudication, notamment l’autorisation d’offres alternatives, sont déterminantes pour la promotion et la diffusion de solutions innovantes; souligne que les descriptions des besoins indiquant les exigences fonctionnelles et de prestation, ainsi que l’autorisation expresse de variantes, offrent aux soumissionnaires la possibilité de proposer des solutions innovantes;

23.    encourage la création d'un portail Internet unique d’entrée sur la totalité des informations relatives aux marchés publics, véritable réseau en amont de tout appel d’offres; note que l'objectif serait de former, d'informer et d'orienter les entreprises vers les marchés et d’expliciter le cadre législatif applicable, en particulier pour les PME (qui n'ont généralement pas une grande quantité de ressources humaines et administratives expertes à l’égard de la terminologie et des procédures liées aux marchés publics) et que des help-desks spécialisés pourraient également les aider à évaluer leurs capacités réelles à effectivement remplir les conditions de l’offre, et le cas échéant à remplir leurs dossiers de réponse;

24.    relève que les PME éprouvent parfois des difficultés à accéder aux marchés publics, et qu’il convient de redoubler d’efforts afin d’élaborer une "stratégie pour les PME"; invite dès lors, dans le cadre de cette stratégie, les États membres à collaborer avec les autorités contractantes en vue d’encourager les possibilités de sous-traitance dans les cas où cette approche est indiquée, à élaborer et à diffuser des techniques de bonnes pratiques, à éviter les procédures de préqualification trop contraignantes, à appliquer des normes dans leurs documents d’appel d’offres de façon à ce que les soumissionnaires ne doivent pas repartir de zéro et à créer un portail centralisé de publication des marchés; invite également la Commission à dresser l’inventaire des initiatives des États membres dans ce domaine et à encourager une diffusion plus large du Recueil européen de bonnes pratiques élaboré dans le cadre du "Small Business Act";

25.    encourage les États membres à promouvoir un "programme de développement des fournisseurs" semblable à ceux qui existent déjà dans certains pays; remarque qu’un tel outil peut servir à promouvoir le dialogue entre les fournisseurs et les acheteurs et permettre aux acteurs concernés de se rencontrer dès les premières phases d’un processus d’achats; souligne qu’un tel mécanisme est essentiel pour stimuler l’innovation et améliorer l’accès des PME aux marchés publics;

26.    demande instamment à la Commission de faire davantage pour veiller à ce que les PME européennes jouent un rôle plus important dans les marchés publics internationaux et d'intensifier les efforts déployés pour prévenir la discrimination dont les PME européennes font l'objet en satisfaisant aux dispositions spécifiques qu'appliquent certains membres de l'accord de l'OMC sur les marchés publics (tels que le Canada et les États-Unis); observe que des mesures visant à améliorer aussi bien la transparence que l'accès aux marchés de marchés publics nationaux aideraient les PME à accéder à ces marchés;

27.    invite la Commission à obtenir l'insertion, dans l'accord renégocié de l'OMC sur les marchés publics (AMP), d'une clause permettant à l'Union européenne de donner la préférence aux PME dans l'attribution de ces marchés, sur le modèle de celles qui sont déjà appliquées par d'autres États parties à cet accord;

Achats verts

28.    attire l’attention sur la grande importance que revêt la passation de marchés publics pour la protection du climat et de l’environnement, l’efficacité énergétique et l’innovation et le renforcement de la compétitivité, et réaffirme qu’il faut encourager les administrations publiques à se fonder sur des critères environnementaux, sociaux et autres lors de la passation de marchés publics, et leur donner les moyens de le faire; se félicite des mesures pratiques prises pour aider les autorités et les autres institutions publiques en matière d’achats durables; invite la Commission à envisager la possibilité d’utiliser les marchés publics verts comme outil de promotion du développement durable;

29.    réaffirme la demande qu’il avait déjà soumise à la Commission, dans son rapport de février 2009, d’élaborer un manuel des achats publics avant commercialisation donnant des exemples pratiques de partage des bénéfices et des risques en fonction des conditions du marché; estime en outre que les entreprises qui participent aux achats avant commercialisation doivent conserver leurs droits de propriété intellectuelle, ce qui favoriserait la compréhension entre les autorités publiques et qui encouragerait les fournisseurs à s’impliquer dans des procédures d’achat avant commercialisation;

30.    salue la création du bureau d’assistance EMAS de la Commission européenne, qui fournit des informations pratiques et qui aide les entreprises et autres organisations à évaluer, communiquer et améliorer leurs performances écologiques dans le cadre des marchés publics; invite la Commission à envisager le développement d’un portail en ligne plus général qui proposerait une aide et des conseils pratiques aux acteurs impliqués dans des procédures de marchés publics, notamment les acteurs impliqués dans des procédures de marchés complexes et collaboratives;

Marchés publics socialement responsables

31.    met l’accent sur le manque de clarté dans le domaine des marchés publics socialement responsables et demande à la Commission de fournir pour ce domaine une aide sous la forme de manuels; attire à cet égard l'attention sur la modification des conditions–cadres par le traité de Lisbonne ainsi que la Charte de droits fondamentaux, et attend que la Commission en tienne dûment compte; souligne le problème qui se pose, à savoir que les critères sociaux se rapportent pour l’essentiel aux processus de production, et que la plupart du temps, ils ne sont donc pas perceptibles dans le produit final et qu’ils ne peuvent être que difficilement contrôlés dans le contexte d’une production mondialisée et de chaînes d’approvisionnement complexes; attend dès lors que dans le domaine de la passation de marchés publics socialement responsables, des critères précis et vérifiables soient définis et qu’une banque de données comportant des critères spécifiques aux produits soit mise en place; attire l’attention sur les difficultés et les coûts que représentent pour les pouvoirs publics contractants la vérification du respect de ces critères, et invite la Commission à offrir une aide en la matière ainsi qu’à promouvoir des instruments pour certifier la fiabilité des chaînes d’approvisionnement;

32.    invite la Commission à indiquer clairement que les administrations publiques peuvent se fonder sur des critères sociaux, tels que le paiement des salaires conventionnels applicables, et d’autres critères lors de la passation de marchés publics; invite la Commission à élaborer des lignes directrices ou d’autres mesures pratiques pour aider les autorités et les autres institutions publiques en matière d’achats durables, et encourage la Commission et les États membres à organiser de fréquentes formations et campagnes de sensibilisation; est favorable à l'idée d'un processus transparent associant les États membres et les autorités locales au développement des critères; fait observer qu'en matière justement de critères sociaux, un tel processus est prometteur;

33.    invite la Commission à encourager les autorités publiques à appliquer les critères du commerce équitable dans leurs appels d’offres publics et dans leurs politiques d’achat sur la base de la définition du commerce équitable entérinée par la résolution du Parlement européen sur le commerce équitable et le développement du 6 juillet 2006 et par la récente communication de la Commission du 5 mai 2009; réaffirme sa demande soumise antérieurement à la Commission de promouvoir ces critères, par exemple en élaborant des orientations constructives pour des achats conformes au commerce équitable; salue l’adoption à l’unanimité de l’avis du Comité des régions du 11 février 2010 appelant de ses vœux une stratégie européenne commune de commerce équitable pour les autorités locales et régionales;

Assistance pratique: banque de données et formations

34.    suggère de développer une banque de données de normes, y compris les normes relatives aux critères environnementaux et sociaux, qui serait fréquemment mise à jour et mise à la disposition des autorités publiques afin de fournir aux adjudicateurs des orientations adéquates et un ensemble clair de règles à respecter pour l’élaboration des appels d’offres et de permettre une vérification aisée du respect des normes concernées; attend que les États membres et toutes les parties concernées soient pleinement associés à ce processus; note que ce processus ascensionnel devrait tenir compte de l’expérience et des connaissances précieuses souvent disponibles aux niveaux local, régional et national; attire également l’attention sur les conséquences négatives d’un marché fragmenté par l’existence de nombreux labels régionaux, nationaux, européens et internationaux différents, tout particulièrement dans les secteurs de l’innovation et de la recherche;

35.    relève l’importance des normes en matière de marchés publics, dans la mesure où ces normes peuvent aider les autorités adjudicatrices à réaliser leurs objectifs en leur permettant d’utiliser des processus éprouvés pour la fourniture de produits et de services, en garantissant une procédure de passation de marché économiquement plus efficace et en faisant en sorte que la passation de marchés corresponde aux objectifs politiques tels que la durabilité ou l’achat auprès de petites entreprises;

37.    reconnaît que la formation et l’échange d’informations entre les autorités publiques et la Commission européenne sont des facteurs essentiels pour surmonter certaines des complexités des marchés publics; craint cependant que le resserrement des budgets publics ne sape ces initiatives; invite donc les États membres et la Commission à utiliser les ressources existantes et les mécanismes dont ils disposent, par exemple les évaluations par les pairs envisagées par la directive sur les services, pour encourager de petites équipes d’experts en marchés publics originaires d’une région à évaluer les activités d’une autre région de l’UE, ce qui contribuerait à instaurer la confiance et à promouvoir les bonnes pratiques dans différents États membres;

36.    encourage la Commission et les États membres à organiser des formations et des campagnes de sensibilisation à l’intention des autorités locales et des décideurs politiques et à y associer d’autres parties prenantes, notamment les prestataires de services sociaux;

Développement régional

38.    souligne que la Cour des comptes indique régulièrement dans ses rapports annuels relatifs à l'exécution du budget de l'UE, et notamment dans son dernier rapport annuel relatif à l'exercice 2008, que le non-respect des règles communautaires régissant les marchés publics est l'une des deux raisons les plus fréquentes d'erreurs et d'irrégularités constatées lors de la mise en œuvre des projets européens cofinancés au titre des Fonds structurels et du Fonds de cohésion; souligne, dans ce contexte, que les irrégularités procèdent souvent d'une transposition incorrecte des dispositions de l'Union européenne et des différentes règles appliquées par les États membres; invite la Commission et les États membres à réviser, en coopération avec les autorités régionales et locales, la panoplie des législations régissant les marchés publics en sorte de les uniformiser et de simplifier l'ensemble du cadre juridique régissant les marchés publics plus précisément pour réduire le risque d'erreurs et garantir une utilisation plus efficace des Fonds structurels;

39.    considère que ce qui peut être dissuasif, ce ne sont pas seulement les coûts et la complexité, c'est aussi le temps nécessaire pour mener à son terme le processus de passation des marchés publics, et la menace d'actions en justice qui se traduisent par de longues procédures de recours, qui sont souvent entravées par différents acteurs – et se félicite, partant, de ce que le plan de relance offre la possibilité d'appliquer, dans le cas de grands projets publics, en particulier en 2009 et en 2010, des versions accélérées des procédures prévues dans les directives relatives aux marchés publics; invite les États membres à appliquer la procédure et à accorder une aide aux autorités locales et régionales pour la mise en œuvre de ces procédures et leur utilisation, dans le respect, dans chaque cas, des règles et réglementations en vigueur en matière de marchés publics;

40.      invite la Commission à étudier la possibilité de continuer à recourir, même au-delà de 2010, à des procédures accélérées dans le cadre des Fonds structurels, ainsi que de prolonger le relèvement temporaire des seuils, aux fins en particulier d'accélérer les investissements;

Commerce international

41.    souligne que le marché intérieur et les marchés internationaux sont de plus en plus interdépendants; estime que, dans ce contexte, les législateurs du marché intérieur de l'Union européenne et les négociateurs de l'Union européenne dans le domaine du commerce international devraient toujours être conscients des conséquences mutuelles que peuvent éventuellement entraîner leurs activités et qu'ils devraient adopter une politique cohérente axée en permanence, dans les politiques de marchés publics, sur la promotion des valeurs de l'Union européenne, telles que la transparence, sur une position de principe contre la corruption, ainsi que sur des progrès en matière de droits sociaux et de droits de l'homme; invite la commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs et la commission du commerce international à organiser des réunions communes d'information afin de renforcer les synergies;

42.    souligne qu'un cadre solide de marchés publics est une condition préalable à un marché équitable orienté sur la libre concurrence et aide à lutter contre la corruption;

43.    souligne par ailleurs l'importance, dans le contexte des engagements de l'Union européenne dans le domaine des marchés publics internationaux, de renforcer les mécanismes anti-corruption dans le domaine des marchés publics et met en avant la nécessité de centrer les efforts sur la transparence et l'équité dans l'utilisation des fonds publics;

44.    invite instamment les vingt-deux États observateurs au sein du comité de l'AMP à accélérer le processus d'adhésion à l'AMP;

45.    invite la Commission à évaluer la possibilité d'inclure dans les accords de marchés publics avec des partenaires internationaux des dispositions requérant la conformité aux obligations en matière de droits de l'homme fondamentaux inscrites dans les conventions et dans les accords internationaux;

46.    croit fermement aux principes de la réciprocité et de la proportionnalité dans le domaine des marchés publics et s'oppose énergiquement aux mesures protectionnistes adoptées dans ce domaine au niveau mondial; invite la Commission à envisager d'imposer des conditions restrictives ciblées et proportionnelles concernant l'accès à certaines parties des marchés publics de l'Union européenne aux partenaires commerciaux qui tirent profit de l'ouverture du marché européen sans manifester aucune intention d'ouvrir leurs propres marchés aux sociétés européennes, afin d'encourager ses partenaires à offrir aux entreprises européennes un accès réciproque et proportionnel à leur marché;

47.    rappelle les dispositions des articles 58 et 59 de la directive 2004/17/CE; invite les États membres à faire davantage usage de la possibilité d'informer la Commission des problèmes rencontrés dans l'accès de leurs entreprises aux marchés des États tiers, et demande à la Commission de prendre des mesures efficaces pour veiller à ce que les entreprises de l'Union européenne aient véritablement accès aux marchés des États tiers;

48.    charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission.

  • [1]  JO C 179 du 1.8.2006, p. 2.
  • [2]  JO C 067E du 18.3.2010, p. 10.
  • [3]  JO C 146E du 12.06.2008, p. 227.
  • [4]  JO C 313E du 20.12.2006, p. 447
  • [5]  Textes adoptés de cette date, P6_TA(2006)0320.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Chaque année, les achats publics de biens et de services dans l'Union européenne représentent plus de 16 % du produit intérieur brut, soit plus de 1 500 milliards d'euros[1]. La partie transfrontalière de ces achats est toutefois minime: 3 % environ. Ces marchés publics se conçoivent essentiellement dans la perspective de l'achat économique et à bon compte de biens et de services pour remplir les tâches dévolues au secteur public.

Les autorités publiques ne sont toutefois pas des acteurs du marché comme les autres, mais elles ont, dans la mesure où elles gèrent des deniers publics, une responsabilité particulière. Les marchés publics doivent, là où c'est possible, contribuer à relever les grands défis: la lutte contre la crise économique et financière mondiale, le changement climatique et la paupérisation croissante dans les pays du sud.

Les pouvoirs adjudicateurs publics tirent sans conteste profit du marché intérieur européen et de ses réglementations: des marchés de plus grande taille accroissent les possibilités de choix, ce qui peut entraîner une diminution des coûts et une amélioration de la qualité; le renforcement de la transparence permet de lutter contre la corruption et la fraude; la coopération transfrontalière crée de nouvelles possibilités d'action et des expériences. La médaille a cependant son revers: dans de nombreux États membres, les institutions régionales et communales sont les entités adjudicatrices publiques les plus importantes. Et c'est précisément dans leur cas, qu'il apparaît que dans le contexte de la crise économique actuelle, les directives européennes régissant les marchés publics limitent les possibilités d'action, tout en renchérissant et en ralentissant la passation des marchés.

Les attributaires – en particulier les petites et moyennes entreprises – pâtissent eux aussi des procédures bureaucratiques et du défaut de sécurité juridique. Il y a de nombreuses études qui mettent en évidence l'augmentation des coûts ou l'allongement de la durée de la procédure, études sur lesquelles il n'est pas possible de s'étendre dans le détail.

Insécurités juridiques

Les causes de cette évolution se situent à différents niveaux. La révision des directives relatives aux marchés publics, en 2004, avait pour objectif de simplifier, de moderniser et d'assouplir la passation des marchés publics. Cet objectif n'a cependant pas été atteint.

D'une part, les directives elles‑mêmes ne sont pas suffisamment claires à bien des égards: les différences politiques au sein du Conseil et du Parlement ont débouché sur des compromis de forme, des failles et des incohérences dans les textes juridiques.

D'autre part, la transposition dans les États membres a pris beaucoup de temps, et au cours de cette transposition, les directives ont souvent encore été rendues plus strictes, des critères supplémentaires ont été introduits, alors que de nombreux instruments de flexibilisation n'ont pas été repris, ce qui revient à dire, en résumé, que la lettre des directives a changé pendant la transposition.

Les ambiguïtés juridiques ont entraîné l'ouverture de nombreuses procédures de recours et d'un grand nombre d'actions en justice, au niveau tant national qu'européen. La jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne et le droit indicatif de la Commission ont tenté de combler les failles juridiques, ce qui n'a pas amélioré la lisibilité.

Tout ceci a débouché sur un régime juridique complexe, qui confronte les petites villes et communes, surtout, mais aussi les petites et moyennes entreprises à de graves problèmes juridiques, qu'elles ne peuvent plus maîtriser sans consentir des efforts supplémentaires ou faire appel à des consultants juridiques extérieurs, et des projets de marché importants n'aboutissent pas en raison d'ambiguïtés juridiques ou de la menace d'actions en justice. Pratiquement aucun autre secteur ne connaît autant de litiges. L'application incorrecte des règles en matière de passation de marché compte au nombre des sources d'erreurs les plus fréquentes dans le domaine des Fonds structurels européens.

Les éléments principaux du conflit juridique sont notamment les partenariats public‑public, l'urbanisme (y compris la construction de logements sociaux) et les concessions de services. Il n'empêche que la situation n'est pas davantage claire dans le domaine des partenariats public‑privé, des marchés concernant les produits du commerce équitable, de l'application des directives régissant la passation des marchés sous les valeurs–seuils, ainsi que de la possibilité de prendre en compte des critères sociaux, comme l'égalité des salaires, l'égalité entre les genres, le respect des conventions collectives, l'emploi de chômeurs de longue durée ou de jeunes inadaptés.

Insuffisance de la coordination au sein de la Commission

Par ailleurs, la coordination au sein de la Commission est insuffisante. De nombreux services ont vu dans les directives sur les marchés un instrument permettant d'atteindre des objectifs pour lesquels l'Union européenne ne disposerait pas autrement de ressources financières suffisantes ou de la compétence législative. Naturellement, il est opportun d'encourager et d'aider les entités adjudicatrices publiques à conclure des marchés responsables du point de vue environnemental et social, et de promouvoir la recherche et le développement. Néanmoins, la multiplicité des initiatives ne contribue pas à la clarté juridique et compromet ainsi l'objectif qui mérite pourtant d'être soutenu. L'extension du droit indicatif provoque des incohérences juridiques supplémentaires.

La Commission devrait, dans le développement du droit indicatif, tenir compte de la proportionnalité et des conséquences pratiques. La dernière étude de l'Institut européen d'administration publique (IEAP) "The Institutional Impacts of EU Legislation on Local and Regional Governments, A Case Study of the 199/31/EC Landfill Waste and 2004/18/EC Public Procurement Directives", dénonce notamment le fort recours au droit indicatif: "using soft law to regulate very important aspects of the Directive is another important shortcoming: it is not possible to foresee the institutional impact of soft law” (recourir au droit indicatif pour réglementer des aspects très importants de la directive, voilà qui constitue une autre faille importante: il n'est pas possible de prévoir les incidences institutionnelles du droit indicatif). Dans l'esprit de l'initiative visant à mieux légiférer, il conviendrait également d'étudier les conséquences du droit indicatif et de se prononcer sur la question de la subsidiarité et de la proportionnalité (étude d'impact abrégée).

Malheureusement, la pondération politique fait également défaut dans le contexte de l'application de la législation communautaire des marchés publics par la Commission. S'il existe un grand nombre d'initiatives, de manuels et de vade‑mecum dans le domaine des marchés de type écologique et efficace du point de vue énergétique, force est de constater que la dernière communication de la Commission concernant les marchés socialement responsables remonte à l'an 2000, c'est‑à‑dire avant la révision des directives régissant les marchés publics. Dans le domaine particulièrement complexe du point de vue juridique des marchés équitables, il n'y a eu jusqu'ici qu'une seule communication, et il n'existe aucun vade‑mecum ni manuel. Une telle situation pourrait être interprétée, à tort, comme reflétant, indirectement, les priorités de la Commission.

Votre rapporteure demande dès lors d'améliorer, au sein de la Commission, la coordination dans le domaine des marchés publics entre les différents services de la Commission et de concevoir une stratégie commune compréhensible pour tous dans le domaine des marchés publics, y compris la mise en place d'un site web unique, pour améliorer la transparence de la législation.

Davantage d'initiatives seraient également nécessaires dans le domaine de l'organisation de l'échange d'expériences, de la conception de procédures et méthodes éprouvées et du soutien à des programmes de formation dans les États membres. Ces formations ne devraient pas s'adresser uniquement aux entités adjudicatrices locales, elles devraient aussi viser les responsables politiques et les autres acteurs, en particulier les organisations non gouvernementales, qui assurent des services sociaux. En l'occurrence, on pourrait également tirer profit de l'expérience acquise en la matière en France où un modèle de ce genre est actuellement à l'essai.

Le rapport critique en outre le manque de transparence s'agissant de la composition et des résultats des activités du groupe consultatif interne de la Commission compétent pour les marchés publics, et invite la Commission à faire en sorte que ce groupe ainsi que le comité pour les partenariats public‑privé qu'il est prévu de créer aient une composition davantage équilibrée et que leurs travaux soient plus transparents.

Clarification juridique des partenariats public‑public par la Cour de justice de l'Union européenne

L'entrée en vigueur du traité de Lisbonne a modifié la situation juridique. Celui‑ci a surtout renforcé le rôle des collectivités locales et régionales. Pour la première fois, l'autonomie locale et régionale est reconnue dans le droit primaire de l'Union européenne (article 4, paragraphe 2, TUE):

"L'Union respecte l'égalité des États membres devant les traités ainsi que leur identité nationale, inhérente à leurs structures fondamentales politiques et constitutionnelles, y compris en ce qui concerne l'autonomie locale et régionale."

De même, le nouveau protocole sur les services d'intérêt général (no 26) souligne en son article premier:

"le rôle essentiel et le large pouvoir discrétionnaire des autorités nationales, régionales et locales pour fournir, faire exécuter et organiser les services d'intérêt économique général d'une manière qui réponde autant que possible aux besoins des utilisateurs".

Dans plusieurs arrêts, la Cour de justice de l'Union européenne a déjà invoqué le droit à l'autonomie communale et fait observer "qu'une autorité publique peut accomplir les tâches d'intérêt public qui lui incombent par ses propres moyens (…) et qu'elle peut aussi le faire en collaboration avec d'autres autorités publiques" (C–480/06 Stadwerke Hamburg). La Cour de justice de l'Union européenne, confirme ainsi la liberté de choix des communes et l'autonomie communale. Ces arrêts ne donnent cependant pas carte blanche à toute forme de coopération entre les communes. La Cour de justice considère que "les partenariats public–privé, comme les coopérations communales et la coopération intra–étatique, ne sont dès lors pas soumis aux règles de passation des marchés lorsque les critères suivants sont remplis:

      1. il s'agit de l'accomplissement en commun d'une tâche publique incombant à toutes les communes,

      2. exclusivement par des organismes publics, autrement dit sans la participation d'entreprises privées, et

      3. l'activité est exercée essentiellement pour les organismes publics concernés;

De plus, la Cour de justice a confirmé que la simple possibilité d'une ouverture d'un partenariat public–public à des participations ne saurait constituer un motif d'empêchement s'il n'existe pas au moment où le marché est attribué une perspective concrète en ce sens.

La situation est ainsi suffisamment éclaircie dans un domaine controversé des marchés publics. La conséquence qui doit nécessairement être tirée de cette jurisprudence, c'est que la Commission doit renoncer à engager des procédures pour violation du traité contre les États membres dans ces domaines, et entreprendre, en coopération avec le Parlement et les parties intéressées, les travaux de consolidation de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne. Le présent rapport devrait en constituer la première base.

Clarification juridique des concessions de services

Les directives révisées définissent pour la première fois les concessions de services, en disant qu'il s'agit de contrats dans lesquels "la contrepartie de la prestation des services consiste soit uniquement dans le droit d'exploiter le service, soit dans ce droit assorti d'un prix". Elles ont été expressément exclues du champ d'application des directives relatives à la passation des marchés publics pour garantir davantage de souplesse aux pouvoirs adjudicateurs et aux attributaires et tenir compte des cultures et traditions juridiques différentes des États membres.

La Cour de justice de l'Union européenne l'a confirmé dans ses derniers arrêts (C-206/09 Eurawasser, 10.09.2009).

Les concessions de service ne relèvent pas du champ d'application des directives relatives à la passation des marchés publics, mais bien du régime "plus souple" des contrats communautaires. Dans cet arrêt, la Cour de justice de l'Union européenne a précisé le critère du transfert de risque. De l'avis de la Cour de justice de l'Union européenne, les concessions de services dans le secteur de l'eau ne sont pas exclues du fait que le rapport d'utilisation est régi dans le cadre d'un statut et est assorti d'une obligation de raccordement et d'utilisation. Le risque économique qui doit être présent dans une concession de service pourrait également être présent de manière restreinte. La Cour de justice de l'Union européenne confirme que les pouvoirs adjudicateurs publics ont le droit d'assurer la fourniture de services au moyen d'une concession s'ils estiment qu'il s'agit de la meilleure manière d'assurer le service d'intérêt général. Un autre domaine donnant souvent lieu à des litiges juridiques est ainsi réglé par la Cour de justice.

Clarification dans le domaine des partenariats public-privé

Dans d'autres domaines également, la Commission et la Cour de justice ont contribué à accroître la clarté. Tant la Commission, dans sa communication du 5 février 2008, que la Cour de justice de l'Union européenne dans son arrêt du 15 octobre 2009 (C–196/08) ont constaté que lorsque certaines missions sont confiées et transférées à un partenariat public–privé qui vient d'être créé, une double adjudication n'est pas nécessaire. Pour que le transfert d'une concession à une entreprise mixte publique–privée créée à cette fin puisse se faire sans adjudication, les conditions suivantes doivent être remplies:

–    l'entrepreneur public est choisi par la voie d'une procédure publique, après examen des conditions financières, techniques, opérationnelles et administratives ainsi que des caractéristiques de l'offre en rapport avec le service à fournir;

–    l'entreprise mixte publique–privée conserve pendant toute la durée de la concession le même objet social. Une modification essentielle de l'objet social ou du service transféré ferait naître, de l'avis de la Cour de justice de l'Union européenne, une obligation d'adjudication.

Ainsi, la clarté juridique est suffisante en ce qui concerne également les partenariats public–privé.

Aménagement urbain

Tous les problèmes ne sont pas pour autant réglés. À l'heure actuelle, c'est le secteur de l'aménagement urbain qui pose des problèmes tout particuliers. Dans ce domaine, une interprétation, faite surtout par des tribunaux allemands, sur la base de l'arrêt Roanne C‑220/05 de la Cour de justice de l'Union européenne, a étendu le champ d'application des directives relatives aux marchés publics à des domaines que celle‑ci ne visait pas. Il doit toutefois être possible aux communes de vendre des terrains avec certaines conditions (par exemple, l'obligation de construire dans un délai de deux ans, sans que cette vente ne doive faire l'objet d'un marché à l'échelle européenne conformément aux critères des marchés publics. Autrement le risque existerait de devoir accepter l'hypothèse "aussi absurde qu'elle soit, d'une soumission aux règles de la directive de toute activité de réglementation urbanistique: en effet, par définition, les mesures régissant la possibilité de réaliser des bâtiments modifient, parfois de manière substantielle, la valeur des terrains auxquels elles s'appliquent." (Citation de Paolo Mengozzi, avocat général, dans ses conclusions présentées à la Cour de justice le 17 novembre 2009).

Les directives relatives aux marchés publics n'ont jamais été conçues pour de tels cas, et il faut espérer que les tribunaux suivront l'avis de l'avocat général.

Marchés publics durables et innovants

Si dans le domaine des marchés écologiques, il existe de nombreuses aides, comme le GPP Toolkit, la "Procura+Kampagne" ou le "TopTen Pro", qui facilitent la tâche des autorités et des autres établissements publics en matière de marchés durables, ainsi que dans le domaine des marchés innovants où il y a une communication de la Commission sur les marchés précommerciaux et une communication "Marchés porteurs: une initiative pour l'Europe", de telles initiatives font totalement défaut dans le secteur des marchés socialement responsables. Il n'empêche que le traité de Lisbonne a également confirmé la valeur qu'il faut attacher à une Europe sociale. Par la voie notamment du nouvel article 3, paragraphe 3, du traité sur l'Union européenne ainsi que de la Charte des droits fondamentaux qui est désormais juridiquement contraignante, l'orientation jusqu'ici purement économique de l'Union européenne est désormais complétée par des objectifs sociaux contraignants. Cette évolution doit également se refléter dans les initiatives de la Commission.

Le secteur des marchés publics socialement responsables précisément souffre du fait que les critères sociaux se rapportent pour l'essentiel aux processus de production, et que ces critères ne sont la plupart du temps pas reconnaissables dans le produit final, ce qui signifie qu'il est plus difficile d'en contrôler le respect dans une production mondialisée et dans des chaînes d'approvisionnement complexes. Et la situation est rendue encore plus complexe et opaque dès lors que dans les procédures de passation, les certificats autodécernés eux‑mêmes doivent être autorisés, pour ne pas enfreindre l'interdiction de discrimination. Contrôler ceux ‑ci, voilà qui dépasse les capacités de la plupart des responsables de marchés publics. Aussi, parallèlement à un manuel, la Commission devrait‑elle également envisager de concevoir des critères précis et vérifiables voire de mettre en place une banque de données fondées sur des critères spécifiques aux produits. Il faudrait également envisager la création d'un service au niveau européen, qui élabore des critères pour des groupes de produits et les contrôle, et qui, le cas échéant, pourrait également être consulté en tant qu'organe extrajudiciaire dans le contexte de plaintes.

Révision des directives relatives aux marchés publics

Dans une perspective générale, il serait opportun que la Commission tienne compte, dans le contexte de la révision envisagée des directives relatives aux marchés publics, des aspects précités, et qu'à cette occasion, elle remédie aux failles juridiques et pratiques dans le domaine de la transposition dans les États membres, tout en éliminant les ambiguïtés juridiques actuelles dans le contexte de l'application de la législation des marchés publics. Il serait également souhaitable de déterminer les domaines dans lesquels l'Union européenne pourrait contribuer à une simplification administrative dans ce secteur et les moyens de le faire. Cela présuppose toutefois une analyse objective, qui doit être réalisée d'urgence, des charges actuelles. Une telle analyse devrait bien entendu être réalisée en associant tous les acteurs concernés. Une mise en garde doit toutefois être faite: à l'heure actuelle, il ne convient pas d'envisager une révision des directives relatives aux marchés publics. Une telle révision serait, pour plusieurs raisons, prématurée actuellement. D'une part, une révision de ces directives devrait nécessairement aller de pair avec une révision de la directive sur les procédures de recours, pour faire obstacle à une nouvelle fragmentation de la législation dans le domaine des marchés publics. Pour l'instant, la directive relative aux procédures de recours n'est toutefois pas encore transposée dans tous les États membres et il n'est toujours pas possible d'évaluer ses effets pratiques sur les marchés publics. D'autre part, les États membres sont confrontés pour l'instant à une grave crise économique et financière dont les conséquences à l'échelle communale demeurent difficilement prévisibles et risquent, à coup sûr, d'augmenter dans les prochaines années. Dans une telle période, une modification de la base juridique des marchés publics serait à l'origine de nouvelles incertitudes et de retards dans la passation des marchés. Toutes les parties en souffriraient.

  • [1]  Données émanant du Fonds monétaire international pour l'année 2006, PIB nominal en millions de dollars sur la base du taux de change d'octobre 2007 pour l'Union européenne: 14.609.840 millions de dollars. - Une partie considérable de ces dépenses est toutefois consacrée aux biens d'armement.

AVIS de la commission du développement régional (24.2.2010)

à l'intention de la commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs

sur l'évolution de la passation de marchés publics
(2009/2175(INI))

Rapporteur pour avis: Oldřich Vlasák

SUGGESTIONS

La commission du développement régional invite la commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs, compétente au fond, à incorporer dans la proposition de résolution qu'elle adoptera les suggestions suivantes:

1. fait observer que si les autorités locales et régionales comptent au nombre des plus importants acheteurs en Europe, et jouent, partant, un rôle essentiel dans l'application des règles en matière de marchés publics, il n'en existe pas moins, compte tenu de la complexité de la législation, de la concurrence et des marchés publics, souvent un manque de connaissances spécifiques du cadre juridique et de son application dans la pratique de formations appropriées et de lignes directrices dans le domaine des marchés au sein des autorités infranationales; invite les États membres à organiser des cours de formation aux règles des marchés publics (y compris des aspects spécifiques, comme les critères sociaux et environnementaux et les critères de diversité et d'égalité) et à encourager l'utilisation des TIC pour améliorer la compréhension de ces règles et les capacités administratives des autorités locales et régionales; évoque, dans ce contexte, la possibilité d'ouvrir, au niveau régional, des marchés publics groupés sur la base d'une collaboration entre autorités locales et régionales, ce qui permettrait d'améliorer de manière significative l'efficacité et l'efficience des marchés publics au travers des contacts ainsi que du partage d'expériences et d'informations; fait observer par ailleurs qu'il convient de poursuivre, au niveau des autorités régionales et locales, le travail visant à mettre au jour et à éliminer les pratiques de corruption, en favorisant notamment la formation, l'éducation et la transparence;

2. souligne que la Cour des comptes indique régulièrement dans ses rapports annuels relatifs à l'exécution du budget de l'UE, et notamment dans son dernier rapport annuel relatif à l'exercice 2008, que le non-respect des règles communautaires régissant les marchés publics est l'une des deux raisons les plus fréquentes d'erreurs et d'irrégularités constatées lors de la mise en œuvre des projets européens cofinancés au titre des Fonds structurels et du Fonds de cohésion; souligne, dans ce contexte, que les irrégularités procèdent souvent d'une transposition incorrecte des dispositions de l'Union européenne et des différentes règles appliquées par les États membres; invite la Commission et les États membres à réviser, en coopération avec les autorités régionales et locales, la panoplie des législations régissant les marchés publics en sorte de les uniformiser et de simplifier l'ensemble du cadre juridique régissant les marchés publics, plus précisément pour réduire le risque d'erreurs et accroître l'efficacité de l'utilisation des Fonds structurels;

3. considère que ce qui peut être dissuasif, ce ne sont pas seulement les coûts et la complexité, c'est aussi le temps nécessaire pour mener à son terme le processus de passation des marchés publics, et la menace d'actions en justice qui se traduisent par de longues procédures de recours, qui sont souvent entravées par différents acteurs, et se félicite, partant, de ce que le plan de relance offre la possibilité d'appliquer, dans le cas de grands projets publics, en particulier en 2009 et en 2010, des versions accélérées des procédures prévues dans les directives relatives aux marchés publics; invite les États membres à appliquer la procédure et à accorder une aide aux autorités locales et régionales pour la mise en œuvre de ces procédures et leur utilisation, dans le respect, dans chaque cas, des règles et réglementations en vigueur en matière de marchés publics;

4.  invite la Commission à étudier la possibilité de recourir, même au-delà de 2010, à des versions accélérées des procédures dans le cadre des Fonds structurels, ainsi que de prolonger le relèvement temporaire des seuils, aux fins en particulier d'accélérer les investissements;

5. déplore que dans certains cas, les crédits des Fonds structurels accordés à des projets d'infrastructure conçus dans le contexte d'un partenariat public–privé (PPP) et de contrats corollaires avec des opérateurs privés sur la base de marchés publics réalisés au niveau infranational aient été à l'origine, par suite de procédures de passation très complexes, d'une perte de subventions communautaires précédemment disponibles pour financer le développement de l'infrastructure; considère qu'il est essentiel de lever les obstacles auxquels se heurtent les PPP pour que l'Union européenne ait la possibilité de réaliser les investissements nécessaires dans l'infrastructure et la fourniture de services de qualité; invite la Commission à faire en sorte que les règles régissant les marchés publics et les Fonds structurels fixent un cadre cohérent pour les PPP en sorte de créer la sécurité juridique pour toutes les parties concernées et de réduire la pression sur les budgets publics, dans le contexte du principe du cofinancement et des suites de la crise économique mondiale;

6. reconnaît que les autorités locales et régionales ont le droit de décider démocratiquement quel est le meilleur moyen de fournir des services publics, et de décider également de faire appel à des entreprises qu'elles possèdent ou contrôlent, sans la participation d'aucun partenaire privé; considère que même sans une obligation de lancer des appels d'offre, la coopération intercommunale ou d'autres formes de coopération public-public en matière de fourniture de services devrait être considérée comme moyen légitime de fournir des services et que les acteurs infranationaux devraient pouvoir confier des missions de fourniture de services publics à des entreprises qu'ils possèdent ou contrôlent;

7. fait observer que les différentes initiatives prises au sein de la Commission qui concernent les marchés publics doivent être mieux coordonnées, de façon à ne pas compromettre la cohérence avec les directives communautaires régissant les marchés publics et confronter les responsables à des problèmes juridiques; demande à cet égard d'améliorer la coordination au sein de la Commission, y compris par la voie d'un site web unique clairement structuré, pour promouvoir la transparence de la législation dans ce domaine;

8. souligne la nécessité d'encourager la participation des PME aux marchés publics conclus par les autorités locales et régionales, conformément aux objectifs généraux de l'Union en faveur des PME; fait observer qu'un service d'information approprié, des conseils et des formations, et une assistance pratique peuvent contribuer à une participation accrue des PME;

9. fait siennes les préoccupations exprimées par de nombreuses autorités locales en relation avec l'interprétation des arrêts[1] de la Cour de justice dans le domaine du développement urbain; est convaincu que l'application stricte, du point de vue tant opérationnel que juridique, des dispositions régissant les marchés publics pourrait entraver le développement urbain; invite la Commission à concevoir, en étroite coopération avec le Parlement européen, le Conseil et les collectivités régionales et locales, les règles régissant les marchés publics de façon suffisamment claire pour que les entités adjudicatrices puissent savoir avec précision quels sont les marchés publics et les concessions de travaux devant faire l'objet d'une adjudication, et les distinguer ainsi des projets dans les domaines du développement urbain qui ne sont pas soumis à cette obligation, en sorte de pouvoir faciliter les conventions foncières entre le secteur public et le secteur privé sans obliger inutilement à recourir à une procédure d'adjudication et sans compromettre les pouvoirs et le droit des autorités locales de décider comment elles entendent développer leur territoire; attend avec grand intérêt la décision de la Cour de justice dans l'affaire C–451/08; approuve les conclusions du 17 novembre 2009 dans l'affaire C‑451/08 de l'avocat général de la Cour de justice, à savoir que "l'objectif large et ambitieux de la directive, s'il convient d'en tenir compte dans l'interprétation de celle-ci, ne doit cependant pas faire croire que, en se fondant sur le but de ce texte, son champ d'application puisse être étendu sans limites" (paragraphe 35); autrement, le risque existe "d'une soumission aux règles de la directive de toute activité de réglementation urbanistique; en effet, par définition, les mesures régissant la possibilité de réaliser des bâtiments modifient, parfois de manière substantielle, la valeur des terrains auxquels elles s'appliquent".

RÉSULTAT DU VOTE FINAL EN COMMISSION

Date de l’adoption

22.2.2010

 

 

 

Résultat du vote final

+:

–:

0:

39

1

0

Membres présents au moment du vote final

François Alfonsi, Luís Paulo Alves, Charalampos Angourakis, Catherine Bearder, Jean-Paul Besset, Sophie Briard Auconie, Zuzana Brzobohatá, Alain Cadec, Ricardo Cortés Lastra, Tamás Deutsch, Rosa Estaràs Ferragut, Seán Kelly, Evgeni Kirilov, Constanze Angela Krehl, Petru Constantin Luhan, Ramona Nicole Mănescu, Iosif Matula, Miroslav Mikolášik, Franz Obermayr, Jan Olbrycht, Wojciech Michał Olejniczak, Markus Pieper, Georgios Stavrakakis, Nuno Teixeira, Michael Theurer, Michail Tremopoulos, Viktor Uspaskich, Lambert van Nistelrooij, Oldřich Vlasák, Kerstin Westphal, Hermann Winkler, Joachim Zeller, Elżbieta Katarzyna Łukacijewska

Suppléant(s) présent(s) au moment du vote final

Vasilica Viorica Dăncilă, Karin Kadenbach, Heide Rühle, Peter Simon, László Surján, Evžen Tošenovský, Sabine Verheyen

  • [1]  Arrêt de la Cour de justice (première chambre) du 18 janvier 2007 dans l'affaire C–220/05 Jean Auroux et autres/commune de Roanne.

AVIS de la commission du commerce international (2.3.2010)

à l'intention de la commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs

sur les nouveaux développements en matière de marchés publics
(2009/2175(INI))

Rapporteure pour avis: Małgorzata Handzlik

SUGGESTIONS

La commission du commerce international invite la commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs, compétente au fond, à incorporer dans la proposition de résolution qu'elle adoptera les suggestions suivantes:

1.   souligne que le marché intérieur et les marchés internationaux sont de plus en plus interdépendants; estime que, dans ce contexte, les législateurs du marché intérieur de l'Union européenne et les négociateurs de l'Union européenne dans le domaine du commerce international devraient toujours être conscients des conséquences mutuelles que peuvent éventuellement entraîner leurs activités et qu'ils devraient adopter une politique cohérente axée en permanence, dans les politiques de marchés publics, sur la promotion des valeurs de l'Union européenne, telles que la transparence, sur une position de principe contre la corruption, ainsi que sur des progrès en matière de droits sociaux et de droits de l'homme; afin de renforcer les synergies, invite la commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs et la commission du commerce international à organiser des réunions communes d'information;

2.   souligne qu'un cadre solide pour les marchés publics est une condition préalable à un marché équitable orienté sur la libre concurrence, et qu'un tel cadre aiderait à lutter contre la corruption;

3.   estime qu'un accord plurilatéral comme l'accord de l'OMC sur les marchés publics (AMP) constitue le meilleur outil pour garantir des conditions d'équité aux entreprises européennes du point de vue de l'accès du marché aux marchés publics au niveau international; invite donc instamment la Commission à conclure les négociations sur le texte provisoire arrêté en 2006 à titre de version révisée de l'AMP entré en vigueur en 1996, et l'invite également à poursuivre ses efforts afin de conclure un AMP ambitieux; souligne que, dans son préambule et son article V, l'AMP reconnaît le traitement spécial et différencié en faveur des pays en développement;

4.   invite instamment les vingt-deux États observateurs au sein du comité de l'AMP à accélérer le processus d'adhésion à l'AMP;

5.   estime que le marché des marchés publics de l'Union européenne reste le marché de marchés publics le plus ouvert au niveau mondial;

6.   déplore que ses partenaires internationaux n'aient pas encore ouvert leurs marchés intérieurs de marchés publics aux entreprises européennes comme l'Union européenne a, elle, ouvert le sien aux entreprises des pays tiers; déplore profondément que ses partenaires commerciaux les plus importants recourent à des pratiques de marchés publics qui constituent une discrimination à l'égard des fournisseurs européens soumissionnant dans le cadre de marchés publics organisés dans des pays tiers; déplore que certains partenaires commerciaux essentiels (y compris les membres de l'AMP) prennent des mesures protectionnistes dans le domaine des marchés publics;

7.   invite instamment à la Commission à faire davantage pour veiller à ce que les PME européennes jouent un rôle plus important dans les marchés publics internationaux; l'invite instamment à intensifier ses efforts pour prévenir la discrimination dont les PME européennes font l'objet et ce, en satisfaisant aux dispositions spécifiques imposées par certains membres de l'AMP (comme le Canada et les États-Unis); fait observer que des mesures visant à améliorer aussi bien la transparence que l'accès aux marchés de marchés publics nationaux aideraient les PME à accéder à ces marchés;

8.   croit fermement aux principes de la réciprocité et de la proportionnalité dans le domaine des marchés publics et s'oppose énergiquement aux mesures protectionnistes adoptées dans ce domaine au niveau mondial; invite la Commission à envisager d'imposer des conditions restrictives ciblées et proportionnelles concernant l'accès à certaines parties des marchés publics de l'Union européenne aux partenaires commerciaux qui tirent profit de l'ouverture du marché européen sans manifester aucune intention d'ouvrir leurs propres marchés aux sociétés européennes, afin d'encourager ses partenaires à offrir aux entreprises européennes un accès réciproque et proportionnel à leur marché;

9.   rappelle les dispositions des articles 58 et 59 de la directive 2004/17/CE; invite les États membres à recourir plus souvent à la possibilité d'informer la Commission des problèmes rencontrés dans l'accès de leurs entreprises aux marchés des pays tiers, et demande à la Commission de prendre des mesures efficaces pour veiller à ce que les entreprises de l'Union aient véritablement accès aux marchés des pays tiers;

10  invite la Commission à obtenir l'insertion, dans l'AMP renégocié, d'une clause permettant à l'Union européenne de donner la préférence aux PME dans l'attribution des marchés publics, sur le modèle de celles qui sont d'ores et déjà appliquées par d'autres États parties à cet accord;

11. souligne par ailleurs la nécessité, dans le contexte des engagements de l'Union européenne dans le domaine des marchés publics internationaux, de renforcer les mécanismes anti-corruption dans ce domaine et met en avant la nécessité de centrer les efforts sur la transparence et l'équité dans l'utilisation des fonds publics;

12. invite la Commission à étudier la possibilité d'utiliser les marchés publics verts à titre d'instrument pour promouvoir le développement durable;

13. invite la Commission à évaluer la possibilité d'inclure dans les accords de marchés publics avec des partenaires internationaux des dispositions requérant la conformité aux obligations en matière de droits de l'homme fondamentaux inscrites dans les conventions et dans les accords internationaux.

RÉSULTAT DU VOTE FINAL EN COMMISSION

Date de l’adoption

23.2.2010

 

 

 

Résultat du vote final

+:

–:

0:

16

5

5

Membres présents au moment du vote final

William (The Earl of) Dartmouth, Daniel Caspary, Christofer Fjellner, Joe Higgins, Yannick Jadot, David Martin, Emilio Menéndez del Valle, Vital Moreira, Cristiana Muscardini, Godelieve Quisthoudt-Rowohl, Niccolò Rinaldi, Helmut Scholz, Iuliu Winkler, Jan Zahradil, Paweł Zalewski

Suppléant(s) présent(s) au moment du vote final

Catherine Bearder, José Bové, George Sabin Cutaş, Mário David, Salvatore Iacolino, Syed Kamall, Elisabeth Köstinger, Jörg Leichtfried, Matteo Salvini, Michael Theurer, Jarosław Leszek Wałęsa

Suppléant(s) (art. 187, par. 2) présent(s) au moment du vote final

Patrice Tirolien

RÉSULTAT DU VOTE FINAL EN COMMISSION

Date de l’adoption

28.4.2010

 

 

 

Résultat du vote final

+:

–:

0:

28

0

8

Membres présents au moment du vote final

Cristian Silviu Buşoi, Lara Comi, Anna Maria Corazza Bildt, António Fernando Correia De Campos, Jürgen Creutzmann, Christian Engström, Evelyne Gebhardt, Louis Grech, Małgorzata Handzlik, Malcolm Harbour, Philippe Juvin, Sandra Kalniete, Alan Kelly, Eija-Riitta Korhola, Edvard Kožušník, Kurt Lechner, Toine Manders, Mitro Repo, Robert Rochefort, Zuzana Roithová, Heide Rühle, Andreas Schwab, Róża Gräfin Von Thun Und Hohenstein, Kyriacos Triantaphyllides, Bernadette Vergnaud, Barbara Weiler

Suppléant(s) présent(s) au moment du vote final

Pascal Canfin, Cornelis de Jong, Frank Engel, Anna Hedh, Othmar Karas, Emma McClarkin, Catherine Soullie, Anja Weisgerber, Kerstin Westphal

Suppléant(s) (art. 187, par. 2) présent(s) au moment du vote final

Edward Scicluna