RAPPORT sur une approche de l'Union européenne en matière de droit pénal

24.4.2012 - (2010/2310(INI))

Commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures
Rapporteur: Cornelis de Jong

Procédure : 2010/2310(INI)
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A7-0144/2012

PROPOSITION DE RÉSOLUTION DU PARLEMENT EUROPÉEN

sur une approche de l'Union Européenne en matière de droit pénal

(2010/2310(INI))

Le Parlement européen,

–   vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (traité FUE), et notamment sa troisième partie, titre V, chapitre 4, intitulé "Coopération judiciaire en matière pénale",

–   vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, et notamment son titre VI relatif à la justice,

–   vu la communication de la Commission du 20 septembre 2011 intitulée "Vers une politique de l'UE en matière pénale: assurer une mise en œuvre efficace des politiques de l'UE au moyen du droit pénal" (COM(2011)0573),

–   vu les conclusions du Conseil du 30 novembre 2009 relatives à des dispositions types permettant d'orienter les travaux menés par le Conseil dans le domaine du droit pénal,

–   vu sa résolution du 25 octobre 2011 sur la criminalité organisée dans l'Union européenne[1],

–   vu sa recommandation du 7 mai 2009 à l'intention du Conseil sur la mise en place d'un espace de justice pénale dans l'Union européenne[2],

–   vu ses études menées sur l'harmonisation du droit pénal au sein de l'Union européenne[3] et sur le développement d'un espace de justice pénale dans l'Union[4],

–   vu l'article 48 de son règlement,

–   vu le rapport de la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures (A7-0144/2012),

A. considérant que, conformément à l'article 3, paragraphe 2, du traité sur l'Union européenne (traité UE), l'Union doit offrir à ses citoyens un espace de liberté, de sécurité et de justice sans frontières intérieures, au sein duquel est assurée la libre circulation des personnes, en liaison avec des mesures appropriées, notamment en matière de prévention de la criminalité et de lutte contre ce phénomène;

B.  considérant que, conformément à l'article 83 du traité FUE, le Parlement et le Conseil pourraient établir des règles minimales relatives à la définition des infractions et des sanctions pénales;

C. considérant que l'article 83, paragraphe 3, du traité FUE introduit une procédure dite de "frein d'urgence" dans le cas où un membre du Conseil estime que la proposition de mesure législative porte atteinte aux aspects fondamentaux de son système de justice pénale, reconnaissant ainsi que le droit pénal reflète souvent les valeurs fondamentales, les coutumes et les choix d'une société donnée, tout en respectant pleinement la législation internationale relative aux droits de l'homme;

D. considérant que les principes de subsidiarité et de proportionnalité, tels qu'énoncés à l'article 5 du traité UE, sont dès lors particulièrement pertinents pour les propositions législatives régissant le droit pénal;

E.  considérant que les systèmes de droit pénal et de procédure pénale des États membres ont été développés au fil des siècles, que chaque État membre possède ses propres variantes et particularités et que, par conséquent, les domaines clés du droit pénal doivent continuer à relever des compétences des États membres;

F.  considérant que le principe de la reconnaissance mutuelle est appliqué dans un nombre croissant de domaines politiques, en particulier en ce qui concerne les jugements et les décisions judiciaires, et que ce principe présuppose une confiance mutuelle, laquelle requiert la mise en place de normes de protection minimales au niveau le plus élevé possible;

G. considérant que l'harmonisation du droit pénal au sein de l'Union européenne doit favoriser la mise en place d'une culture juridique européenne commune en matière de lutte contre la criminalité qui complète les traditions juridiques nationales sans pour autant s'y substituer et qui exerce une influence positive sur la confiance mutuelle des États membres à l'égard de leurs systèmes juridiques respectifs;

H. considérant que le droit pénal doit constituer un système législatif cohérent régi par un ensemble de principes fondamentaux et de normes de bonne gouvernance, dans le respect total de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, de la Convention européenne des droits de l'homme et d'autres conventions internationales sur les droits de l'homme dont les États membres sont signataires;

I.   considérant que, eu égard à sa capacité naturelle à limiter certains droits de l'homme et certaines libertés fondamentales de personnes soupçonnées, accusées ou condamnées, en plus des éventuels effets de stigmatisation liés aux enquêtes pénales, et compte tenu du fait que l'usage excessif de la législation pénale entraîne une diminution de son efficacité, le droit pénal doit être appliqué en dernier ressort (ultima ratio) à des actes clairement définis et délimités, auxquels des mesures moins strictes ne peuvent être appliquées efficacement, et qui causent un préjudice important à la société et aux individus;

J.   considérant que la législation pénale européenne devrait, en règle générale, prévoir des sanctions uniquement pour les actes commis intentionnellement ou, dans des cas exceptionnels, pour les actes résultant d'une grave négligence, et qu'elle doit reposer sur le principe de la culpabilité individuelle (nulla poena sine culpa), bien que, dans certains cas particuliers, il puisse être justifié d'invoquer la responsabilité des personnes morales pour certains types d'infractions;

K  considérant que, conformément à l'exigence de lex certa, les éléments d'une infraction pénale doivent être formulés de manière précise afin d'assurer la prévisibilité de son application, de sa portée et de sa signification;

L.  considérant que, dans le cas des directives, les États membres conservent un certain pouvoir discrétionnaire sur les modalités de transposition des dispositions dans leur législation nationale, ce qui signifie que pour satisfaire à l'exigence de lex certa, non seulement la législation européenne elle‑même, mais également sa transposition dans la législation nationale, doivent être d'une qualité irréprochable;

M. considérant que l'introduction de dispositions européennes en matière pénale ne se limite pas à l'espace de liberté, de sécurité et de justice, mais peut concerner quantité de politiques différentes;

N. considérant que jusqu'à présent, l'Union européenne a souvent élaboré ses dispositions en matière de droit pénal sur une base ad hoc, créant ainsi la nécessité d'une cohérence accrue;

O. considérant qu'il est nécessaire que le Parlement mette au point ses propres procédures afin de garantir, avec le colégislateur, un système pénal européen cohérent de la plus haute qualité;

P.  considérant que pour faciliter la coopération en matière de droit pénal entre la Commission, le Conseil et le Parlement, un accord interinstitutionnel doit être conclu;

Q. considérant que, conformément à l'article 67, paragraphe 1, du traité FUE, l'Union constitue un espace de liberté, de sécurité et de justice dans le respect des droits fondamentaux et des différents systèmes et traditions juridiques des États membres;

1.  souligne que les propositions de dispositions européennes en matière de droit pénal matériel doivent respecter pleinement les principes de subsidiarité et de proportionnalité;

2.  rappelle que le droit pénal doit respecter pleinement les droits fondamentaux des personnes soupçonnées, accusées ou condamnées;

3.  souligne qu'à cet égard, il ne suffit pas de se référer à des notions abstraites ou à des effets symboliques, mais qu'il faut prouver que de nouvelles dispositions de droit pénal matériel sont nécessaires à l'aide d'éléments de fait indispensables attestant que:

–   les dispositions pénales portent essentiellement sur les actes qui causent des préjudices importants, pécuniaires ou non, à la société, à des individus ou à un groupe d'individus;

–   il n'existe pas de mesures moins intrusives permettant de sanctionner de tels actes;

–   l'infraction concernée est d'une nature particulièrement grave et revêt une dimension transfrontalière ou a un effet négatif direct sur la mise en œuvre effective d'une politique de l'Union dans un domaine qui a fait l'objet de mesures d'harmonisation;

–   il existe une nécessité de lutter, sur une base commune, contre l'infraction pénale concernée, ce qui signifie qu'une approche commune européenne présente une valeur ajoutée pratique compte tenu, notamment, de l'étendue et de la fréquence de l'infraction au sein des États membres; et

–   conformément à l'article 49, paragraphe 3, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, la sévérité des sanctions proposées n'est pas disproportionnée par rapport à l'infraction pénale;

4.  reconnaît l'importance des autres principes généraux régissant le droit pénal, tels que:

–   le principe de la culpabilité individuelle (nulla poena sine culpa), qui prévoit des sanctions uniquement pour les actes qui ont été commis intentionnellement ou, dans des cas exceptionnels, pour les actes résultant d'une négligence grave;

–   le principe de la sécurité juridique (lex certa): la description des éléments d'une infraction pénale doit être formulée de manière précise de sorte qu'un individu soit en mesure de prévoir les actes pour lesquels il sera tenu pénalement responsable;

–   le principe de la non‑rétroactivité et de la lex mitior: les exceptions au principe de la rétroactivité ne sont applicables que si elles profitent au contrevenant;

–   le principe ne bis in idem en vertu duquel une personne qui a été définitivement condamnée ou acquittée dans un État membre ne peut être poursuivie ni punie pour les mêmes faits, dans le cadre d'une procédure pénale, dans un autre État membre;

–   le principe de la présomption d'innocence en vertu duquel toute personne accusée d'une infraction est présumée innocente tant que sa culpabilité n'a pas été légalement établie;

5   se félicite que la Commission ait reconnu, dans sa récente communication relative à la politique de l'Union européenne en matière pénale, qu'il convenait toujours de déterminer, au début du processus d'élaboration d'une législation en matière pénale, s'il était réellement nécessaire d'adopter des mesures de droit pénal matériel;

6.  encourage la Commission à proposer des mesures destinées à faciliter une application plus uniforme et plus cohérente, au niveau national, des dispositions en vigueur dans le droit pénal matériel de l'Union européenne, sans préjudice des principes de nécessité et de subsidiarité;

7.  souligne que des mesures d'harmonisation devraient être proposées principalement dans le but de favoriser l'application du principe de la reconnaissance mutuelle dans la pratique plutôt que d'étendre le champ d'application du droit pénal européen harmonisé;

8.  encourage la Commission à continuer d'intégrer dans ses analyses d'impact le critère de la nécessité et de la proportionnalité, de prendre exemple sur les bonnes pratiques en vigueur dans les États membres qui appliquent des garanties élevées de droits procéduraux, d'intégrer une évaluation fondée sur sa liste de contrôle des droits fondamentaux et d'introduire un critère qui précise la manière dont ses propositions reflètent les principes généraux régissant le droit pénal susmentionnés;

9.  souligne qu'il est nécessaire d'instaurer des normes de protection uniformes minimales au plus haut niveau possible pour les suspects et les prévenus au cours des procès au pénal, et ce afin de renforcer la confiance mutuelle;

10. invite la Commission et les États membres à prendre également en considération les mesures non législatives qui renforcent la confiance entre les différents systèmes juridiques dans les États membres, améliorent la cohérence et soutiennent la mise en place d'une culture juridique européenne commune en matière de lutte contre la criminalité;

11 souligne qu'il est nécessaire d'adopter une approche européenne en matière de droit pénal plus cohérente et de haute qualité, et regrette qu'une approche fragmentée ait été poursuivie jusqu'ici;

12. se félicite de l'existence d'un groupe de coordination interservices en matière de droit pénal au sein de la Commission et invite la Commission à fournir au Parlement des informations plus spécifiques sur le rôle et le fonctionnement de ce groupe;

13. demande que soit créée, au sein de la Commission, une autorité de coordination chargée précisément d'étudier toutes les propositions qui comportent des dispositions en matière de droit pénal, et ce afin de garantir la mise en place d'une approche cohérente;

14. se félicite de l'existence d'un groupe de travail sur le droit pénal matériel au sein du Conseil et invite le Conseil à fournir au Parlement des informations spécifiques sur la manière dont ce groupe coopère avec les autres groupes de travail du Conseil qui examinent les dispositions pénales dans des domaines stratégiques autres que la justice et les affaires intérieures;

15. demande qu'un accord interinstitutionnel sur les principes et les méthodes de travail régissant les propositions de futures dispositions européennes en matière de droit pénal matériel soit conclu et invite la Commission et le Conseil à mettre sur pied un groupe de travail interinstitutionnel au sein duquel ces institutions et le Parlement pourront élaborer un accord de ce type et débattre de thèmes plus généraux et, le cas échéant, consulter des experts indépendants, afin de garantir la cohérence du droit pénal européen;

16. estime que ce groupe de travail interinstitutionnel devrait contribuer à définir la portée et l'application appropriées des sanctions pénales au niveau européen, et examiner la législation en vigueur dans le but de réduire la fragmentation et les conflits de compétence qui caractérisent l'approche actuelle;

17. décide de déterminer le meilleur moyen de parvenir à une approche cohérente de la législation européenne en matière de droit pénal matériel au sein du Parlement et attire l'attention, à cet égard, sur l'absence, au stade actuel, d'un comité de coordination, ainsi que sur le rôle important que pourrait jouer son service juridique;

18. souligne l'importance qu'il y a pour le Parlement à créer un service d'information en mesure d'aider les différents députés dans leur travail quotidien et de garantir ainsi la qualité des travaux du Parlement en tant que colégislateur;

19. souligne qu'une approche cohérente requiert du Parlement qu'il dispose, avant d'adopter une proposition législative sur le droit pénal matériel, d'une analyse juridique de la proposition indiquant que toutes les exigences mentionnées dans sa résolution ont été pleinement respectées ou précisant les améliorations qui doivent encore être réalisées;

20. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission, ainsi qu'aux parlements nationaux des États membres et au Conseil de l'Europe.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Avec l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, la structure en piliers a été abandonnée et les bases ont été jetées pour l'élaboration d'un droit pénal faisant partie intégrante du droit de l'Union européenne. Étant donné que, par le passé, le droit pénal a longtemps été considéré comme relevant de la compétence exclusive des États membres et que ce n'est qu'en 1992, avec le traité de Maastricht, qu'une première ouverture vers l'élaboration du droit pénal européen a été créée, cette décision peut être considérée comme étant fondamentale.

Bien que, formellement, le traité comporte les bases pour de nouvelles dispositions européennes en matière pénale, le droit pénal n'est pas pour autant devenu un thème moins sensible. C'est pourquoi le traité prévoit une procédure dite de "frein d'urgence", si un État membre estime que la proposition législative porte atteinte aux aspects fondamentaux de son système de justice pénale. Il s'agit d'une procédure exceptionnelle prévue par le traité.

En outre, le droit pénal se différencie des autres domaines juridiques, car, par définition, il limite certains droits de l'homme et certaines libertés fondamentales des personnes accusées et/ou condamnées. Dans de nombreux cas, la liberté de circulation est limitée, mais même si l'infraction est uniquement passible d'amendes, une restriction du droit de propriété est au moins appliquée. De telles restrictions sont en principe légales et légitimes, mais elles requièrent un "test de nécessité". Même si une personne n'est pas condamnée, les enquêtes pénales peuvent à elles seules avoir un effet stigmatisant. Certains pourraient penser qu'il n'y a pas de fumée sans feu.

De plus, il convient de rappeler certaines considérations pratiques. Une vague de nouvelles initiatives européennes en matière de droit pénal matériel pourrait facilement surcharger de travail les administrations nationales. Les propositions doivent être formulées de telle sorte qu'elles puissent être pleinement appliquées et mises en œuvre. Les ressources des autorités nationales compétentes sont limitées, particulièrement en cette période de crise économique. Le risque existe que l'adoption d'une nouvelle législation ne permette pas d'améliorer son application, portant ainsi atteinte et à la crédibilité et à l'efficacité du droit pénal matériel de l'Union européenne.

Pour toutes ces raisons, l'Union européenne doit adopter une approche très prudente lors de l'élaboration de dispositions complémentaires en matière de droit pénal ou lors de la révision des dispositions existantes. Le bilan n'est pas parfait, comme l'a judicieusement démontré le groupe d'universitaires qui composent l'initiative pour une politique européenne en matière pénale ("European Criminal Policy Initiative"). Ce groupe a notamment indiqué que l'utilisation de nombreuses références croisées dans les textes juridiques constituait une violation du principe de la lex certa: la législation doit être claire et facile à comprendre afin que chacun soit en mesure de déterminer si un acte constitue une infraction pénale ou non. Cela est d'autant plus vrai pour les directives, car elles doivent être transposées dans le droit national et tout manque de clarté peut donner lieu à des interprétations divergentes, ce qui peut aisément accroître la confusion au lieu de la dissiper.

L'Union européenne n'a pas créé un espace distinct pour les dispositions de droit pénal. Elles figurent dans les instruments liés à la justice et aux affaires intérieures, mais également dans beaucoup d'autres domaines stratégiques de l'Union. Dans sa récente communication sur la politique de l'Union européenne en matière pénale, la Commission mentionne, par exemple, le secteur financier (manipulations de marché ou opérations d'initiés), la fraude, le faux monnayage, les infractions graves aux règles de l'Union applicables aux professionnels du transport, qu'il s'agisse de règles sociales, techniques, de sécurité ou de marché, les infractions graves aux règles européennes sur la protection des données, les infractions douanières, les infractions au détriment de l'environnement, la pêche illicite, non déclarée et non réglementée, ainsi que certains aspects des politiques relatives au marché intérieur.

La question se pose de savoir comment assurer une cohérence et une haute qualité dans une branche du droit qui semble présente dans tant de domaines différents. Au niveau national, il est fréquent de voir un service du ministère de la justice responsable de l'ensemble de la coordination du droit pénal. Cela signifie que, quel que soit le ministère qui lance l'initiative d'une nouvelle proposition législative, ce service central procédera toujours à une dernière vérification avant que le gouvernement national n'adopte un projet de loi de ce type.

La situation est différente au sein des institutions européennes. La Commission a mis en place un groupe de coordination interservices sur le droit pénal, dont le rôle est similaire à celui du service central susmentionné au sein d'un ministère de la justice au niveau national. Cependant, le mandat de ce groupe n'est pas encore défini très clairement, tout comme la procédure à suivre en cas de désaccord. Il est certain que les différents membres de la Commission assument une part de responsabilité, mais il n'y a aucun commissaire coordinateur.

Au sein du Conseil, les ministres de la justice et des affaires intérieures tentent d'assurer la coordination des propositions législatives qui comportent des dispositions pénales. Ils ont créé un groupe de travail spécial sur le droit pénal matériel qui n'examine pas uniquement des propositions typiquement liées à la justice et aux affaires intérieures, mais qui, dans la pratique, revendique être compétent pour toutes les dispositions pénales, quel que soit le sujet concerné. Cette structure n'a toutefois pas permis d'éviter la fragmentation actuelle ni la qualité parfois médiocre des dispositions européennes en matière de droit pénal.

Malheureusement, le Parlement lui-même semble être doté du système le moins développé. Il est vrai que le Parlement dispose d'une commission spéciale qui traite des questions liées à la justice et aux affaires intérieures, à savoir la commission des libertés civiles, mais il ne s'agit pas d'une commission coordinatrice et celle‑ci n'est pas compétente pour toutes les propositions législatives qui comportent des dispositions pénales.

Au cours de l'audition du 8 décembre 2011 sur une approche européenne en matière de droit pénal, le service juridique du Parlement a indiqué qu'il pourrait en théorie dispenser des conseils juridiques au Parlement sur la qualité et la cohérence des propositions législatives en matière de droit pénal. Cependant, cela impliquerait une tâche supplémentaire, nouvelle, car le service juridique n'effectue pas actuellement de travail de ce type sur une base structurelle. Par conséquent, l'attribution d'une telle tâche au service juridique devra s'accompagner de ressources supplémentaires.

Afin de garantir une approche européenne de haute qualité et cohérente en matière de droit pénal, il convient non seulement d'améliorer les structures internes au sein de chacune des trois institutions européennes mentionnées, mais il est également indiqué que ces trois institutions parviennent à un accord sur les méthodes de travail et les principes pertinents qu'il convient d'appliquer.

En 2009, le Conseil a adopté des conclusions relatives à des dispositions types permettant d'orienter ses travaux dans le domaine du droit pénal. En 2011, la Commission a présenté son point de vue dans une communication. Dans la présente résolution, le Parlement précisera les principes qui sont importants pour ses propres travaux. En conséquence, nous nous orientons désormais rapidement vers la situation dans laquelle les trois institutions ont toutes clarifié leurs positions, mais uniquement en ce qui concerne leurs propres procédures législatives internes.

Pour faciliter la coopération à l'avenir, il semble indispensable que les institutions s'accordent sur un type de cadre commun. Il serait utile qu'un tel cadre comporte un ensemble de principes régissant tout instrument de droit pénal. De plus, des dispositions types, telles que celles qui figurent, par exemple, dans les conclusions du Conseil de novembre 2009, pourraient être ajoutées. Un tel cadre pourrait servir de base pour les analyses d'impact qui doivent être préparées par la Commission et pourrait contribuer à l'élaboration des analyses juridiques appropriées pour le Conseil et le Parlement. En outre, ce cadre pourrait comporter des lignes directrices précises pour les procédures internes dans chacune des institutions, et ce afin de garantir une approche cohérente.

En théorie, les principes ‑ en particulier ‑ pourraient également se prêter à une codification via une méthode législative plus formelle, fondée sur une proposition de la Commission suivie d'une adoption formelle par le Conseil et le Parlement. Cependant, dans la mesure où les accords sur les méthodes de travail internes ne se prêtent pas à ce type d'instrument plus formel, cela risquerait de fragmenter le cadre en plusieurs parties. Par conséquent, le meilleur moyen d'élaborer un cadre interinstitutionnel, ne serait‑ce que pour des raisons pragmatiques, serait de le faire sur une base moins formelle en confiant cette tâche à un groupe de travail interinstitutionnel.

Le rapporteur estime que des dispositions en matière de droit pénal sont trop facilement proposées en raison de leurs prétendus effets symboliques et dissuasifs: elles visent en fait à montrer aux citoyens européens que l'Union européenne se préoccupe sérieusement de leur sécurité et à faire comprendre clairement aux délinquants potentiels qu'ils seront sévèrement punis. Or, en réalité, ce n'est pas une disposition à caractère pénal en tant que telle qui permet de réduire le taux de criminalité dans l'Union européenne. La poursuite des infractions pénales est tout aussi, voire plus importante. Le fait même que l'Union européenne ait adopté une nouvelle législation ne réduit pas le taux de criminalité. Son application ne peut être efficace que si les dispositions juridiques sont parfaitement claires et correspondent aux systèmes nationaux existants. L'existence de dispositions pénales combinée à leur application permet, en règle générale, de produire des effets sur la criminalité.

Enfin, on ne soulignera jamais assez combien il est important de respecter pleinement la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et les autres instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme lors de l'élaboration de nouvelles dispositions de droit pénal. Dans tous les cas, il est impératif de vérifier que les droits de l'homme sont respectés, car il s'agit en l'occurrence de l'une des mesures les plus intrusives qu'un gouvernement puisse imposer à ses citoyens. La nécessité d'un tel contrôle n'a pas été évoquée explicitement dans le présent rapport, mais il va de soi que, dans le cadre des principes qui ont été mentionnés, un tel contrôle devra être effectué systématiquement.

RÉSULTAT DU VOTE FINAL EN COMMISSION

Date de l'adoption

12.4.2012

 

 

 

Résultat du vote final

+:

–:

0:

49

4

0

Membres présents au moment du vote final

Jan Philipp Albrecht, Sonia Alfano, Mario Borghezio, Rita Borsellino, Simon Busuttil, Philip Claeys, Carlos Coelho, Rosario Crocetta, Agustín Díaz de Mera García Consuegra, Ioan Enciu, Frank Engel, Cornelia Ernst, Tanja Fajon, Monika Flašíková Beňová, Kinga Göncz, Nathalie Griesbeck, Sylvie Guillaume, Salvatore Iacolino, Sophia in ‘t Veld, Teresa Jiménez-Becerril Barrio, Juan Fernando López Aguilar, Monica Luisa Macovei, Svetoslav Hristov Malinov, Véronique Mathieu, Nuno Melo, Louis Michel, Claude Moraes, Jan Mulder, Georgios Papanikolaou, Carmen Romero López, Judith Sargentini, Birgit Sippel, Csaba Sógor, Renate Sommer, Axel Voss, Renate Weber, Josef Weidenholzer, Cecilia Wikström, Tatjana Ždanoka, Auke Zijlstra

Suppléant(s) présent(s) au moment du vote final

Alexander Alvaro, Vilija Blinkevičiūtė, Birgit Collin-Langen, Cornelis de Jong, Franziska Keller, Ádám Kósa, Antonio Masip Hidalgo, Hubert Pirker, Kārlis Šadurskis, Carl Schlyter, Bogusław Sonik

Suppléant(s) (art. 187, par. 2) présent(s) au moment du vote final

Giles Chichester, Zita Gurmai