RAPPORT sur des allégations de transport et de détention illégale de prisonniers par la CIA dans des pays européens: suivi du rapport de la commission TDIP du PE

2.8.2012 - (2012/2033(INI))

Commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures
Rapporteure: Hélène Flautre
Rapporteure pour avis (*): Sarah Ludford, commission des affaires étrangères
(*) Commission associée – article 50 du règlement

Procédure : 2012/2033(INI)
Cycle de vie en séance
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A7-0266/2012

PROPOSITION DE RÉSOLUTION DU PARLEMENT EUROPÉEN

sur des allégations de transport et de détention illégale de prisonniers par la CIA dans des pays européens: suivi du rapport de la commission TDIP du PE

(2012/2033(INI))

Le Parlement européen,

–   vu le traité sur l'Union européenne (UE), et notamment ses articles 2, 3, 4, 6, 7 et 21,

–   vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, et notamment ses articles 1er, 2, 3, 4, 18 et 19,

–   vu la Convention européenne des droits de l'homme et les protocoles qui l'accompagnent,

–   vu les instruments des Nations unies en matière de droits de l'homme, et notamment le Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966, la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants du 10 décembre 1984 et les protocoles y afférents, et la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées du 20 décembre 2006,

–   vu l'article 5 du traité de l'Atlantique Nord de 1949,

–   vu le règlement (CE) n° 1236/2005 du Conseil du 27 juin 2005 concernant le commerce de certains biens susceptibles d'être utilisés en vue d'infliger la peine capitale, la torture ou d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants[1],

–   vu le programme de Stockholm – une Europe ouverte et sûre qui sert et protège les citoyens[2] et la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 20 avril 2010 intitulée "Mettre en place un espace de liberté, de sécurité et de justice au service des citoyens européens: plan d'action mettant en œuvre le programme de Stockholm" (COM(2010)0171),

–   vu les orientations pour la politique de l'Union européenne à l'égard des pays tiers en ce qui concerne la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ainsi que les orientations de l'Union concernant la peine de mort,

–   vu la déclaration de Bruxelles du 1er octobre 2010, adoptée lors de la 6e conférence des commissions parlementaires de contrôle des services de renseignements et de sécurité des États membres de l'Union européenne,

–   vu l'étude conjointe des Nations unies sur les pratiques mondiales en matière de détention secrète dans le contexte de la lutte contre le terrorisme, élaborée par le rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste, Martin Scheinin; le rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, Manfred Novak; le groupe de travail sur la détention arbitraire, représenté par sa vice-présidente, Shaheen Sardar Ali; et le groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, représenté par son président, Jeremy Sarkin[3],

–   vu le rapport du Conseil des droits de l'homme des Nations unies, élaboré par le rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, portant sur les commissions d'enquête en réaction aux méthodes ou pratiques de torture ou d'autres formes de mauvais traitements[4],

–   vu le rapport du rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste, Martin Scheinin, intitulé "Compilation of good practices on legal and institutional frameworks and measures that ensure respect for human rights by intelligence agencies while countering terrorism, including on their oversight" (Compilation de bonnes pratiques concernant les cadres et mesures juridiques et institutionnels garantissant le respect des droits de l'homme par les agences de renseignements dans le contexte de la lutte contre le terrorisme, y compris le contrôle de ces agences")[5],

–   vu les contributions du Conseil de l'Europe, et notamment les travaux de l'ancien commissaire aux droits de l'homme, Thomas Hammarberg, et du Comité européen pour la prévention de la torture (CPT), et vu les résolutions sur le sujet de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, et notamment les résolutions intitulées "Allégations de détentions secrètes et de transferts interétatiques illégaux de détenus concernant des États membres du Conseil de l'Europe"[6] et "Détentions secrètes et transferts illégaux de détenus impliquant des États membres du Conseil de l'Europe: second rapport"[7], ainsi que le rapport de la commission des affaires juridiques et des droits de l'homme de l'Assemblée parlementaire intitulé "Les recours abusifs au secret d'État et à la sécurité nationale: obstacles au contrôle parlementaire et judiciaire des violations des droits de l'homme"[8],

–   vu les affaires portées devant la Cour européenne des droits de l'homme Al-Nashiri/Pologne, Abu Zubaydah/Lituanie, Abu Zubaydah/Pologne et El-Masri/"ancienne République yougoslave de Macédoine", entendue par la Grande Chambre le 16 mai 2012,

–   vu sa résolution du 25 novembre 2009 sur la communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil intitulée "Un espace de liberté, de sécurité et de justice au service des citoyens – programme de Stockholm"[9],

–   vu ses résolutions du 14 février 2007[10] et du 19 février 2009[11] sur l'utilisation alléguée de pays européens par la CIA pour le transport et la détention illégale de prisonniers,

–   vu ses résolutions relatives à Guantánamo, et en particulier celles du 9 juin 2011 intitulée "Guantánamo: décision imminente en matière de peine de mort"[12], du 4 février 2009 sur le retour et la réintégration des détenus du centre de détention de Guantánamo[13], et du 13 juin 2006 sur la situation des prisonniers à Guantánamo[14], et vu sa recommandation au Conseil du 10 mars 2004 sur le droit des prisonniers de Guantánamo à un procès équitable[15],

–   vu sa résolution du 15 décembre 2010 sur la situation des droits fondamentaux dans l'Union européenne (2009) – mise en œuvre concrète après l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne[16],

–   vu sa résolution du 14 décembre 2011 sur la politique antiterroriste de l'UE: principales réalisations et défis à venir[17],

–   vu le discours prononcé à Strasbourg le 17 septembre 2008 par Jacques Barrot, vice‑président de la Commission européenne[18],

–   vu les déclarations de la Commission concernant la nécessité, pour les États membres concernés, d'enquêter sur les allégations d'implication dans le programme de transferts interétatiques et de détention secrète de la CIA, et vu les documents communiqués à la rapporteure par la Commission, parmi lesquels quatre courriers envoyés à la Pologne, quatre envoyés à la Roumanie et deux envoyés à la Lituanie entre 2007 et 2010,

–   vu la communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen du 15 octobre 2003 sur l'article 7 du traité sur l'Union européenne – Respect et promotion des valeurs sur lesquelles l'Union est fondée (COM(2003)0606),

–   vu la lettre envoyée le 29 novembre 2005 par la présidence de l'Union européenne à la secrétaire d'État américaine, Condoleezza Rice, demandant "toutes les clarifications que les États-Unis peuvent apporter concernant ces rapports (détention et transports allégués de personnes soupçonnées de terrorisme dans ou via des États membres de l'Union européenne), dans l'espoir que ces clarifications permettront d'apaiser les inquiétudes des parlements et du public",

–   vu les 2 748e et 2 749e sessions du Conseil "Affaires générales et relations extérieures" du 15 septembre 2006 et leurs débats sur le sujet "Lutte contre le terrorisme – lieux de détention secrets",

–   vu la déclaration de l'Union européenne effectuée le 7 mars 2011 lors de la 16e session du Conseil des droits de l'homme concernant l'étude conjointe susmentionnée de l'ONU sur les détentions secrètes,

–   vu l'article "Counter-terrorism and human rights" de Villy Sovndal, Gilles de Kerchove et Ben Emmerson, publié dans le journal European Voice du 19 mars 2012,

–   vu la réponse donnée le 5 décembre 2005 par la secrétaire d'État américaine, Condoleezza Rice à la lettre de la présidence européenne du 29 novembre 2005, réponse établissant que "[...] les transferts interétatiques sont un outil essentiel dans la lutte contre le terrorisme. Ces transferts ne sont pas une méthode utilisée uniquement par les États-Unis ni par le gouvernement actuel", niant les allégations d'implication directe des États-Unis dans des pratiques de torture et soulignant que l'"objectif" des transferts interétatiques n'était pas de faire torturer les personnes concernées, et vu ses déclarations selon lesquelles "nous [les États‑Unis] respectons la souveraineté de nos partenaires"[19],

–   vu l'admission par le président américain George W. Bush, dans son discours prononcé depuis la salle Est de la Maison Blanche le 6 septembre 2006, de l'existence d'un programme de transferts interétatiques et de détention secrète mené par la CIA et incluant des opérations à l'étranger,

–   vu les mémoires de George W. Bush, publiées le 9 novembre 2010,

–   vu la version non classifiée, publiée en août 2009, du rapport de 2004 rédigé par l'inspecteur général de la CIA John Helgerson concernant les opérations d'interrogatoire menées par la CIA sous le président Bush,

–   vu le rapport de 2007 du Comité international de la Croix-Rouge concernant le traitement de 14 détenus "de grande valeur" sous la garde de la CIA, qui est devenu accessible au public en 2009,

   vu les différentes initiatives lancées au niveau national pour rendre compte de l'implication des États membres dans le programme de transferts interétatiques et de détention secrète de la CIA, parmi lesquelles l'enquête en cours au Danemark et les enquêtes passées en Suède, les enquêtes pénales en cours en Pologne et au Royaume-Uni, les procédures pénales passées en Italie, en Allemagne, en Lituanie, au Portugal et en Espagne, l'enquête parlementaire conjointe impliquant tous les partis au Royaume-Uni et les enquêtes parlementaires passées en Allemagne, en Lituanie, en Pologne et en Roumanie,

   vu l'enquête judiciaire portugaise interrompue soudainement en 2009 après deux années,

   vu les conclusions des enquêtes nationales déjà menées dans certains États membres,

–   vu les nombreux comptes rendus parus dans les médias et les reportages de journalistes d'investigation, notamment, mais sans que cette liste soit exhaustive, les rapports d'ABC News de 2005[20] et 2009[21] et les articles parus en 2005[22] dans le Washington Post, sans lesquels les restitutions et les détentions seraient restées secrètes,

–   vu les recherches, enquêtes et rapports réalisés par des chercheurs indépendants, des organisations de la société civile et des organisations non gouvernementales nationales et internationales depuis 2005, et notamment par Human Rights Watch[23], Amnesty International et Reprieve,

–   vu les auditions organisées par sa commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures (LIBE) le 27 mars 2012 et par sa sous-commission des droits de l'homme le 12 avril 2012, et vu la visite de la délégation LIBE en Lituanie du 25 au 27 avril 2012, la visite de la rapporteure en Pologne le 16 mai 2012 et toutes les contributions écrites et orales reçues par la rapporteure,

–   vu la demande commune d'accès aux données de vol introduite auprès du directeur d'Eurocontrol par le président de la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures et par la rapporteure le 16 avril 2012, et vu la réponse exhaustive reçue d'Eurocontrol le 26 avril 2012,

–   vu la note de la DG IPOL intitulée "The results of the inquiries into the CIA's programme of extraordinary rendition and secret prisons in European states in light of the new legal framework following the Lisbon Treaty" (Résultats des enquêtes sur le programme de restitutions extraordinaires et de prisons secrètes de la CIA dans les États européens à la lumière du nouveau cadre juridique établi à la suite du traité de Lisbonne),

–   vu les articles 48 et 50 de son règlement,

–   vu le rapport de la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures et l'avis de la commission des affaires étrangères (A7-0266/2012),

A. considérant que le Parlement a condamné le programme de transferts interétatiques et de détention secrète de la CIA mené par les États-Unis, qui a entraîné des violations multiples des droits de l'homme, et notamment des cas de détention illégale et arbitraire, de torture et d'autres mauvais traitements, des violations du principe de non-refoulement et des disparitions forcées; considérant que sa commission temporaire sur l'utilisation alléguée de pays européens par la CIA pour le transport et la détention illégale de prisonniers (ci-après la "commission temporaire") a documenté l'utilisation de l'espace aérien et du territoire de l'Union européenne par la CIA, et considérant que le Parlement a, depuis lors, réitéré sa demande d'enquêtes approfondies sur la collaboration de certaines agences et de certains gouvernements nationaux avec le programme de la CIA;

B.  considérant qu'il a, à plusieurs reprises, appelé à ce que la lutte contre le terrorisme soit menée dans le respect total de la dignité humaine, des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment dans le cadre de la coopération internationale dans ce domaine, sur la base de la Convention européenne des droits de l'homme, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, des constitutions nationales et des législations nationales sur les droits fondamentaux, et qu'il a réitéré cet appel en dernier lieu dans son rapport sur la politique antiterroriste de l'Union, dans lequel il a déclaré que le respect des droits de l'homme était une condition préalable pour garantir l'efficacité de cette politique;

C. considérant qu'il a sévèrement, et à plusieurs reprises, condamné les pratiques illégales telles que la "restitution extraordinaire", l'enlèvement, la détention sans jugement, la disparition, les prisons secrètes et la torture, et qu'il a réclamé des enquêtes approfondies sur le degré présumé d'implication de certains États membres dans la collaboration avec les autorités américaines, en particulier la CIA, y compris sur le territoire de l'Union;

D. considérant que la présente résolution a pour objet de "donner des suites politiques aux travaux de la commission temporaire et d'examiner l'évolution de la situation, notamment – à supposer qu'aucune mesure appropriée n'ait été adoptée par le Conseil et/ou la Commission – en déterminant l'existence éventuelle d'un risque manifeste de violation grave des principes et des valeurs sur lesquels l'Union est fondée, et de lui recommander, sur la base des articles 6 et 7 du traité UE, toute résolution qui s'avérerait nécessaire à cet égard"[24];

E.  considérant que l'Union européenne est fondée sur un engagement envers la démocratie, l'état de droit, les droits de l'homme et les libertés fondamentales, le respect de la dignité humaine et le droit international, non seulement dans ses politiques internes, mais également dans ses politiques externes; considérant que l'engagement de l'Union envers les droits de l'homme, renforcé par l'entrée en vigueur de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et le processus d'adhésion à la Convention européenne des droits de l'homme, doit être reflété dans tous les domaines d'action afin que la politique européenne en matière de droits de l'homme soit efficace et crédible;

F.  considérant qu'un processus adéquat de responsabilité est essentiel pour préserver la confiance des citoyens dans les institutions démocratiques de l'Union, pour protéger et promouvoir efficacement les droits de l'homme dans les politiques internes et externes de l'Union et pour garantir l'adoption de politiques de sécurité légitimes et efficaces fondées sur l'état de droit;

G. considérant que, jusqu'à présent, aucun État membre n'a pleinement rempli ses obligations de protéger, préserver et respecter les droits de l'homme internationaux et d'empêcher la violation de ces droits;

H. considérant que les instruments régissant la politique étrangère et de sécurité commune de l'Union européenne (PESC) comprennent la Déclaration universelle des droits de l'homme, le Pacte international des Nations unies relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et ses deux protocoles facultatifs, ainsi que la Convention des Nations unies contre la torture et son protocole facultatif, la Convention européenne des droits de l'homme, la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, lesquels prévoient non seulement une interdiction absolue de la torture, mais créent également une obligation formelle d'enquêter sur les allégations de torture et de prévoir des voies de recours et des réparations; considérant que les orientations de l'Union européenne sur la torture constituent le cadre des efforts déployés par l'Union "pour empêcher et éliminer la torture et les mauvais traitements dans toutes les régions du monde";

I.   considérant que, pour garantir la promotion du droit international et le respect des droits de l'homme, tous les accords d'association, les accords commerciaux et les accords de coopération contiennent des clauses relatives aux droits de l'homme; considérant par ailleurs que l'Union européenne participe à un dialogue politique avec des pays tiers sur la base des orientations relatives aux droits de l'homme, lesquelles incluent la lutte contre la peine de mort et contre la torture; considérant que, dans le cadre de l'instrument européen pour la démocratie et les droits de l'homme (IEDDH), l'Union soutient les organisations de la société civile qui luttent contre la torture et encouragent la réhabilitation des victimes d'actes de torture;

J.   considérant que, si elles sont pratiquées de manière répandue ou systématique, les détentions secrètes, qui équivalent à des disparitions forcées, peuvent être considérées comme un crime contre l'humanité; considérant que les états d'urgence et la lutte contre le terrorisme constituent un environnement propice à la détention secrète;

K. considérant que, bien que l'Union ait démontré qu'elle était décidée à éviter toute collusion en matière de torture dans le règlement (CE) n° 1236/2005 du Conseil[25], modifié en dernier lieu en décembre 2011[26], qui interdit les exportations et les importations de biens qui n'ont aucune autre utilisation pratique que celle d'infliger la peine capitale, la torture et d'autres peines ou traitement cruels, inhumains ou dégradants, il reste encore beaucoup à faire pour en assurer l'application complète;

L.  considérant que le fait de se fonder uniquement sur des garanties diplomatiques pour autoriser l'extradition ou la déportation d'une personne vers un pays où des motifs sérieux permettent de penser qu'elle risquerait d'être victime de torture ou de mauvais traitements est incompatible avec l'interdiction absolue de la torture inscrite dans le droit international, le droit de l'Union, les constitutions nationales et les législations des États membres[27];

M. considérant que le Conseil a admis, le 15 septembre 2006, que "l'existence de lieux de détention secrets où les personnes détenues sont maintenues dans un vide juridique est contraire au droit humanitaire international ainsi qu'au droit pénal international", mais que, jusqu'à présent, il n'a pas reconnu ni condamné l'implication de certains États membres dans le programme de la CIA, alors même que les autorités politiques et judiciaires de ces États membres ont reconnu l'utilisation de l'espace aérien et du territoire de pays européens par la CIA;

N. considérant que le programme de la CIA continue d'entraîner des violations des droits de l'homme, comme le montre notamment le maintien en détention administrative à la prison de Guantánamo de MM. Abu Zubaydah et Abd al-Rahim al-Nashiri, auxquels l'enquête pénale polonaise sur les prisons secrètes de la CIA a accordé le statut de victimes;

O. considérant que les recherches menées par les Nations unies, par le Conseil de l'Europe, par les médias nationaux et internationaux, par des journalistes d'investigation et par la société civile ont révélé de nouvelles informations concrètes concernant l'emplacement de sites de détention secrète de la CIA en Europe, les vols de transfert à travers l'espace aérien européen et les personnes transportées ou détenues;

P.  considérant que la commission d'actes illégaux sur le territoire de l'Union peut s'être développée dans le cadre d'accords bilatéraux ou multilatéraux de l'OTAN;

Q. considérant que les enquêtes nationales et les recherches internationales prouvent que les membres de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) se sont engagés à prendre des mesures dans la lutte contre le terrorisme qui ont autorisé la circulation de vols secrets et l'utilisation du territoire de certains États membres de l'Union européenne dans cadre du programme de restitutions mené par la CIA, ce qui montre que l'ensemble des États membres de l'Union qui sont également membres de l'OTAN avaient connaissance de ce programme;

R.  considérant que l'étude conjointe sur les pratiques mondiales concernant le recours à la détention secrète dans le cadre de la lutte contre le terrorisme (A/HRC/13/42), présentée par le rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste, le rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, le groupe de travail sur la détention arbitraire et le groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, a répertorié les sites de détention secrète utilisés sur le territoire des États membres de l'Union dans le cadre du programme de la CIA, et que des lettres de suivi ont été envoyées aux États membres leur demandant des informations supplémentaires, comme indiqué dans les rapports sur les communications des titulaires de mandats au titre des procédures spéciales, y compris celui du 23 février 2012[28];

S.  considérant que, selon le rapport du Conseil de l'Europe de 2011, les données communiquées par les agences polonaises en 2009 et 2010 "apportent la preuve irréfutable" que sept avions liés à la CIA ont atterri en Pologne, et que les médias polonais ont indiqué que des chefs d'accusation avaient été retenus contre d'anciens dirigeants des services de renseignements polonais et ont révélé d'éventuels contacts entre les officiers de renseignement et le gouvernement polonais concernant l'utilisation d'un centre de détention de la CIA sur le territoire polonais; considérant qu'en 2011, des journalistes d'investigation roumains ont cherché à démontrer l'existence d'un "site noir" au sein de l'office du registre national roumain d'informations classifiées[29], sur la base d'informations fournies par d'anciens employés de la CIA; considérant que l'existence de ce "site noir" a été niée par les autorités roumaines et qu'elle n'a pas été confirmée par l'enquête menée par le parlement roumain; considérant que d'anciens dissidents libyens ont entamé des procédures judiciaires à l'encontre du Royaume-Uni pour l'implication directe du MI6 dans le transfert, la détention secrète et les tortures dont ils ont été victimes ainsi que des membres de leurs familles;

T.  considérant que les autorités lituaniennes se sont engagées à apporter des éclaircissements sur la participation de la Lituanie au programme de la CIA en menant des enquêtes parlementaires et judiciaires; considérant que l'enquête menée par la commission de la défense et de la sécurité nationale du Seimas portant sur les allégations de transfert et d'incarcération de personnes détenues par la CIA sur le territoire lituanien a établi que cinq aéronefs liés aux activités de la CIA ont atterri en Lituanie entre 2003 et 2005 et que les deux installations destinées à héberger des détenus en Lituanie (Projet n° 1 et Projet n° 2) ont été préparées à la demande de la CIA; considérant que la délégation LIBE remercie les autorités lituaniennes d'avoir accueilli les députés du Parlement européen à Vilnius en avril 2012 et d'avoir permis à la délégation LIBE d'accéder au Projet n° 2; considérant que l'agencement des bâtiments et leur aménagement intérieur semblent compatibles avec la détention de prisonniers; considérant que de nombreuses questions liées aux opérations de la CIA en Lituanie restent en suspens en dépit de l'enquête judiciaire réalisée ultérieurement en 2010 et clôturée en janvier 2011; considérant que les autorités lituaniennes se sont dites prêtes à relancer les enquêtes si d'autres informations devaient être révélées, et que le ministère public a proposé de fournir de plus amples informations relatives à l'enquête pénale en réponse à une demande écrite du Parlement;

U. considérant que les autorités portugaises doivent encore apporter des éclaircissements quant au nombre non négligeable d'éléments indiquant que de nombreux vols, recensé notamment par la commission temporaire du Parlement, ont servi à effectuer des transferts entre Bagram, Diego Garcia, des prisons secrètes et Guantánamo;

V.  considérant que les conclusions des tribunaux et les recherches menées sur les aspects logistiques liés au camouflage de ces opérations illégales, notamment la création de plans de vol factices, les vols civils et militaires classés comme "vols d'État" et le recours à des compagnies aériennes privées pour les transferts organisés par la CIA, ont confirmé le caractère systématique et l'ampleur de l'implication européenne dans le programme de la CIA; considérant qu'une analyse des nouvelles données fournies par Eurocontrol confirme en particulier la thèse selon laquelle, afin de masquer l'origine et la destination des transferts de prisonniers, les contractants chargés d'assurer les vols de transferts passaient d'un avion à l'autre à mi-parcours;

W. considérant que l'Union européenne a élaboré des politiques internes de sécurité et de lutte contre le terrorisme fondées sur la coopération policière et judiciaire et sur l'encouragement du partage de renseignements; considérant que ces politiques doivent être ancrées dans le respect des droits fondamentaux et de l'état de droit et dans un contrôle parlementaire efficace des services de renseignements;

X. considérant que, selon le Comité européen pour la prévention de la torture, "les techniques d'interrogatoire utilisées dans les centres de détention gérés par la CIA dans d'autres pays ont certainement entraîné des violations de l'interdiction de la torture et des traitements inhumains et dégradants"[30];

Y. considérant que les relations entre l'Union européenne et les États-Unis sont fondées sur une collaboration et une coopération étroites dans de nombreux domaines, sur la base de valeurs communes que sont la démocratie, l'état de droit et les droits fondamentaux; considérant que l'Union et les États-Unis ont intensifié leur engagement dans la lutte contre le terrorisme depuis les attentats terroristes du 11 septembre 2001, notamment avec la déclaration conjointe sur le contre-terrorisme du 3 juin 2010; considérant néanmoins qu'il est nécessaire de veiller à la conformité des pratiques engagées avec les déclarations d'intention et de surmonter les divergences entre la politique de l'Union et celle des États-Unis en matière de lutte contre le terrorisme;

Z.  considérant qu'en décembre 2011, le gouvernement des États-Unis a adopté la loi de finances relative au budget de défense nationale (National Defense Authorization Act), dite loi NDAA, qui inscrit dans le droit la détention illimitée de personnes suspectées d'être engagées dans des activités terroristes aux États-Unis et compromet le droit à une procédure régulière et à un procès équitable; considérant que le champ d'application de la loi NDAA fait l'objet d'un recours juridictionnel;

AA.     considérant que le 22 janvier 2009, le président Obama a signé trois décrets pour interdire le recours à la torture pendant les interrogatoires, établir un groupe de travail interinstitutionnel chargé d'examiner systématiquement les politiques et les procédures de détention ainsi que tous les cas individuels et ordonner la fermeture du centre de détention de la baie de Guantánamo;

AB.     considérant néanmoins que le centre de détention de la baie de Guantánamo n'est toujours pas fermé en raison de la vive opposition du Congrès des États-Unis; considérant qu'afin d'accélérer sa fermeture, les États-Unis ont appelé les États membres de l'Union européenne à accueillir des détenus de Guantánamo; considérant que le Haut-Commissaire des Nations unies pour les droits de l'homme a fait part de sa profonde déception face à la non-fermeture du centre de détention de la baie de Guantánamo et au maintien d'un système de détention arbitraire;

AC.     considérant que des détenus de Guantánamo sont toujours jugés par des tribunaux militaires, notamment à la suite de la décision du 7 mars 2011 du président des États-Unis de signer le décret levant après deux ans le gel de nouveaux procès miliaires et de la loi du 7 janvier 2012 empêchant les transferts de détenus de Guantánamo aux États-Unis à des fins de jugement;

Généralités

1.  rappelle que les stratégies antiterroristes ne peuvent être efficaces que si elles sont conduites dans le strict respect des obligations relatives aux droits de l'homme et notamment du droit à une procédure régulière;

2.  réitère que l'efficacité des mesures antiterroristes et le respect des droits de l'homme ne sont pas contradictoires mais qu'ils constituent des objectifs complémentaires qui se renforcent mutuellement; rappelle que le respect des droits fondamentaux est une composante essentielle de la réussite des politiques de lutte contre le terrorisme;

3.  insiste sur le caractère hautement sensible des politiques de lutte antiterroriste; considère que seuls de véritables motifs de sécurité nationale peuvent justifier le secret; rappelle cependant que le respect du secret d'État ne saurait en aucune cas prévaloir sur les droits fondamentaux imprescriptibles, et que, de ce fait, les arguments se fondant sur le secret d'État ne sauraient être invoqués pour limiter l'obligation légale des États d'enquêter sur les violations graves des droits de l'homme; estime que la classification de certaines informations et le secret d'État ne doivent pas être sujets à des définitions extensives et que les recours abusifs au secret d'État et à la sécurité nationale constituent des obstacles sérieux au contrôle démocratique;

4.  souligne que les personnes suspectées de terrorisme ne doivent pas faire l'objet de procédures spéciales; rappelle que toute personne doit être en mesure de bénéficier de toutes les garanties prévues par le principe de procès équitable tel que défini à l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme;

5.  réitère sa condamnation des pratiques de "restitution extraordinaire", de prisons secrètes et de torture, qui sont interdites par les législations nationales et internationales établissant le respect des droits de l'homme et qui violent, entre autres, les droits à la liberté, à la sécurité, à un traitement humain, à la protection contre la torture, au non-refoulement, à la présomption d'innocence, à un procès équitable, à un conseil juridique et à une protection égale devant la loi;

6.  insiste sur la nécessité de prévoir des garanties afin d'éviter à l'avenir toute violation des droits fondamentaux dans la mise en œuvre des politiques antiterroristes;

7.  estime que les États membres ont fait part de leur volonté de respecter le droit international, mais qu'ils n'ont pas correctement respecté, jusqu'à présent, l'obligation formelle qui leur incombe d'enquêter sur les graves violations des droits de l'homme liées au programme de la CIA et regrette à cet égard les retards pris pour faire toute la lumière dans cette affaire afin d'apporter dans les meilleurs délais une pleine réparation aux victimes, et notamment, le cas échéant, des excuses et une indemnisation;

8.  est convaincu que les difficultés rencontrées par les États membres dans la conduite des enquêtes les empêchent de se conformer pleinement à leurs obligations internationales, ce qui met à mal la confiance mutuelle dans la protection des droits fondamentaux et engage dès lors la responsabilité de l'Union européenne dans son ensemble;

9.  rappelle que l'engagement des États membres et de l'Union européenne à enquêter sur l'implication européenne dans le programme de la CIA est conforme au principe de coopération sincère et loyale consacré par l'article 4, paragraphe 3, du traité UE;

Processus de prise de responsabilités dans les États membres

10. exprime sa préoccupation quant aux obstacles auxquels se sont heurtées les enquêtes parlementaires et judiciaires nationales sur l'implication de certains États membres dans le programme de la CIA, et qui sont décrits en détail dans le rapport du Conseil de l'Europe de 2011 sur les recours abusifs au secret d'État et à la sécurité nationale, parmi lesquels le manque de transparence, la classification des documents, la prévalence des intérêts nationaux et politiques, le portée trop limitée des enquêtes, la restriction du droit des victimes à une participation et à une défense efficaces, l'absence de techniques d'enquêtes rigoureuses et le manque de coopération entre les autorités chargées des enquêtes dans l'ensemble de l'Union; invite les États membres à éviter de baser leurs procédures pénales nationales sur des motifs juridiques autorisant et provoquant l'interruption des procédures pour cause de prescription et donnant lieu à l'impunité et à respecter le principe du droit coutumier international selon lequel la prescription ne peut et ne doit être appliquée dans des cas de violations graves des droits de l'homme;

11. exhorte les États membres qui n'ont pas respecté leur obligation formelle de mener des enquêtes indépendantes et effectives à enquêter sur les violations des droits de l'homme, en tenant compte de tous les nouveaux éléments de preuve mis au jour; invite notamment les États membres à enquêter sur l'existence de prisons sécrètes sur leur territoire ou sur le déroulement d'opérations au cours desquelles des personnes ont été détenues dans des infrastructures situées sur leur territoire dans le cadre du programme de la CIA;

12. note que l'enquête parlementaire menée en Roumanie a conclu qu'aucune preuve ne pouvait être établie pour démontrer l'existence d'un site secret de détention de la CIA sur le territoire roumain; invite les autorités judiciaires à ouvrir une enquête indépendante sur des sites présumés de détention secrète de la CIA en Roumanie, notamment à la lumière des nouveaux éléments de preuve concernant des vols entre la Roumanie et la Lituanie;

13. encourage la Pologne à poursuivre son enquête pénale en cours sur les détentions secrètes mais déplore le manque de communication officielle concernant la portée, le déroulement et l'état d'avancement de cette enquête; invite les autorités polonaises à mener une enquête rigoureuse avec toute la transparence requise et permettant la participation effective des victimes et de leurs avocats;

14. fait observer que les enquêtes parlementaires et judiciaires qui eurent lieu en Lituanie entre 2009 et 2011 n'ont pas pu démontrer que des prisonniers furent détenus secrètement en Lituanie; invite les autorités lituaniennes à respecter leur engagement à rouvrir l'enquête pénale sur l'implication de la Lituanie dans le programme de la CIA si de nouveaux éléments venaient à être apportés au dossier, au vu des preuves apportées par les données d'Eurocontrol montrant que l'avion N787WH, qui aurait transporté Abu Zubaydah, a bel et bien fait une halte au Maroc le 18 février 2005 avant de poursuivre sa route vers la Roumanie et la Lituanie; relève que l'analyse des données d'Eurocontrol révèle également de nouvelles informations au niveau des plans de vol reliant la Roumanie à la Lituanie, par un changement d'avion à Tirana, en Albanie, le 5 octobre 2005, et reliant la Lituanie à l'Afghanistan via le Caire, en Égypte, le 26 mars 2006; estime qu'il est essentiel que de nouvelles enquêtes portent, au-delà des abus de pouvoir des fonctionnaires, sur une éventuelle détention illégale et de mauvais traitements infligés à des personnes sur le territoire lituanien; encourage le bureau du procureur général à étayer de preuves les affirmations faites pendant la visite de la délégation de la commission LIBE, selon lesquelles l'enquête judiciaire conclut, de manière "catégorique" que "les installations des Projets n° 1 et 2 n'ont hébergé aucun détenu en Lituanie";

15. prend acte de l'enquête pénale ouverte au Royaume-Uni sur les transferts à destination de la Libye et se réjouit de la décision de poursuivre l'enquête plus large sur la responsabilité du Royaume-Uni dans le cadre du programme de la CIA à l'issue de cette première enquête; invite le Royaume-Uni à mener cette enquête avec toute la transparence requise et en permettant la participation effective des victimes et de la société civile;

16. reconnaît que les enquêtes menées par les États membres doivent être basées sur des preuves juridiques solides et sur le respect des systèmes judiciaires nationaux et de la législation de l'Union, et pas uniquement sur les suppositions des médias et de l'opinion publique;

17. invite les États membres concernés, tels que la Finlande, le Danemark, le Portugal, l'Italie, le Royaume-Uni, l'Allemagne, l'Espagne, l'Irlande, la Grèce, Chypre, la Roumanie et la Pologne, qui sont mentionnés dans le rapport de la commission temporaire, à divulguer toutes les informations nécessaires concernant tous les avions suspects liés à la CIA et à leur territoire; invite tous les États membres à respecter le droit d'accès aux informations et à fournir une réponse adéquate aux demandes d'accès à des informations; exprime à cet égard sa préoccupation quant au fait que la plupart des États membres, à l'exception du Danemark, de la Finlande, de l'Allemagne, de l'Irlande et de la Lituanie, n'ont pas répondu de manière adéquate aux demandes effectuées par Reprieve et par Access Info Europe d'accéder à des informations pour leurs enquêtes sur les cas de restitutions extraordinaires;

18. demande aux États membres de réviser les dispositions ou les interprétations complaisantes vis-à-vis de la torture, comme l'avis juridique de Michael Wood (visé dans la résolution précitée du Parlement du 14 février 2007) qui, en opposition avec la jurisprudence internationale, jugeait légitime de recevoir et d'utiliser des informations obtenues par la torture, à condition de ne pas en être directement responsable (ce qui constitue un encouragement et une légitimation de la sous-traitance de la torture);

19. demande à tous les États membres de signer et de ratifier la Conventions des Nations unies pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées;

20. invite les États membres, à la lumière de la coopération et de l'échange d'informations accrus entre leurs agences de renseignements et de sécurité, à garantir un contrôle démocratique complet de ces agences et de leurs activités au travers d'une surveillance parlementaire interne, exécutive, judiciaire et indépendante adéquate, de préférence par les commissions parlementaires spécialisées, dotées de pouvoirs et d'attributions étendus, habilitées notamment à demander des informations et dotées de moyens d'enquête et de recherche suffisants pour pouvoir examiner non seulement des questions de politique, d'administration et de financement, mais aussi le travail opérationnel de ces agences;

Réaction des institutions de l'Union

21. estime qu'il est fondamental que l'Union condamne toutes les pratiques abusives en matière de lutte contre le terrorisme, y compris tout acte de ce type commis sur son territoire, afin qu'elle puisse non seulement se montrer à la hauteur de ses valeurs, mais également les défendre de façon crédible dans ses partenariats extérieurs;

22. rappelle que le Conseil ne s'est jamais officiellement excusé d'avoir violé le principe consacré par les traités relatif à la coopération loyale entre les institutions de l'Union lorsqu'il a essayé d'induire en erreur le Parlement européen en lui fournissant des versions intentionnellement tronquées des procès-verbaux des réunions du COJUR (Groupe de travail du Conseil sur le droit public international) et du COTRA (Groupe de travail "Relations transatlantiques") avec de hauts fonctionnaires américains; attend des excuses de la part du Conseil;

23. attend du Conseil qu'il fasse enfin une déclaration admettant l'implication d'États membres dans le programme de la CIA et les difficultés rencontrées par les États Membres dans le cadre des enquêtes;

24. invite le Conseil à apporter tout son soutien aux processus d'établissement de la vérité et de prise de responsabilité dans les États membres en abordant formellement la question lors des réunions du Conseil JAI, en partageant toutes les informations, en apportant son soutien aux enquêtes et, en particulier, en acceptant les demandes d'accès à des documents;

25. invite le Conseil à organiser l'audition des agences européennes de sécurité concernées, et notamment d'Europol, d'Eurojust et du coordinateur de l'Union européenne pour la lutte contre le terrorisme, afin de faire la clarté sur ce qu'elles savent de l'implication des États membres dans le programme de la CIA et des réactions de l'Union; invite également le Conseil à proposer des mesures visant à garantir le respect des droits de l'homme dans l'échange de renseignements et une séparation stricte des rôles entre les services de renseignements et les services répressifs, de façon à ce que les agences de renseignements ne soient pas autorisées à exercer un pouvoir d'arrestation et de détention, et l'invite à faire rapport au Parlement dans un délai d'un an;

26. demande au Conseil d'encourager les États membres à partager les bonnes pratiques en matière de contrôle parlementaire et judiciaire des services de renseignements, en associant les parlements nationaux et le Parlement européen;

27. réitère son appel au Conseil et aux États membres à ne pas se fonder sur des garanties diplomatiques inapplicables dans les cas d'extradition ou de déportation de personnes suspectées de menacer la sécurité nationale, lorsqu'il existe un risque véritable que les personnes concernées soient soumises à la torture ou à de mauvais traitements ou qu'elles soient jugées sur la base d'aveux extorqués de cette manière;

28. invite les autorités concernées à ne pas invoquer le secret d'État en matière de coopération des services de renseignements internationaux pour entraver l'obligation de rendre des comptes et les voies de recours; insiste également sur le fait que seuls de véritables motifs de sécurité nationale peuvent justifier le secret qui, dans tous les cas, ne prévaut pas sur les droits fondamentaux imprescriptibles, tels que l'interdiction absolue de la torture;

29. prie instamment les autorités concernées de veiller à strictement distinguer les activités des services de renseignements et de sécurité, d'une part, des activités des autorités chargées du maintien de l'ordre, d'autre part, de sorte à garantir le respect du principe général que nul ne peut être à la fois juge et partie;

30. souligne que la commission temporaire chargée de l'enquête qui a servi de base aux résolutions du Parlement du 14 février 2007 et du 19 février 2009 a mis en évidence de graves lacunes dans les procédures d'autorisation et de contrôle des appareils civils survolant l'espace aérien des États membres ou atterrissant sur leur territoire, qui ont non seulement facilité le non-respect de ces procédures lors des "restitutions extraordinaires" de la CIA, mais ont également permis à la criminalité organisée, notamment les réseaux terroristes, de les contourner facilement; rappelle également la compétence de l'Union dans le domaine de la sécurité et de la sûreté des transports et la recommandation du Parlement à la Commission de réglementer et de surveiller la gestion de l'espace aérien, des aéroports et de l'aviation non commerciale en Europe; invite par conséquent l'Union et ses États membres à cesser de reporter un examen approfondi de leur mise en œuvre de la Convention relative à l'aviation civile internationale (Convention de Chicago) en ce qui concerne l'autorisation et les inspections des appareils civils survolant leur espace aérien ou atterrissant sur leur territoire afin de garantir le renforcement de la sécurité et l'exercice systématique de contrôles, ce qui exige une identification préalable des passagers et de l'équipage, et afin de faire en sorte que tous les vols classés "vols d'État" (qui ne relèvent pas de la Convention de Chicago) obtiennent une autorisation préalable adéquate; rappelle également sa recommandation selon laquelle la Convention de Tokyo relative aux infractions et à certains autres actes survenant à bord des aéronefs doit être appliquée de manière efficace par les États membres;

31. prend acte des initiatives prises par la Commission en réaction aux recommandations du Parlement; déplore toutefois que ces initiatives ne se soient pas inscrites dans un programme et une stratégie plus larges visant l'établissement des responsabilités pour les violations des droits de l'homme commises dans le cadre du programme de la CIA, ainsi que la réparation et l'indemnisation nécessaires des victimes;

32. invite la Commission à examiner la question de savoir si la collaboration au programme de la CIA a enfreint des dispositions du droit européen, notamment en matière d'asile et de coopération judiciaire;

33. invite la Commission à faciliter et à soutenir l'entraide et la coopération judiciaires entre les autorités chargées des enquêtes, dans le respect des droits de l'homme, ainsi que la coopération entre les avocats impliqués dans l'établissement des responsabilités dans les États membres, et l'invite notamment à veiller à ce que les informations importantes circulent et à promouvoir l'utilisation efficace de tous les instruments et de toutes les ressources disponibles de l'Union;

34. invite la Commission à adopter, dans un délai d'un an, un cadre de contrôle et de soutien des processus nationaux en matière de responsabilité, incluant notamment des obligations de compte-rendu imposées aux États membres et des lignes directrices relatives au respect des droits de l'homme dans les enquêtes, sur la base des normes élaborées par le Conseil de l'Europe et les Nations unies;

35. invite la Commission à adopter, à la lumière des lacunes institutionnelles révélées dans le cadre du programme de la CIA, des mesures ayant pour but de renforcer la capacité de l'Union à prévenir et à réparer les violations des droits de l'homme au niveau de l'Union, et à consolider le rôle joué par le Parlement;

36. invite la Commission à envisager de proposer des mesures en vue d'une coopération et d'un échange d'informations permanents entre le Parlement européen et les commissions parlementaires de contrôle des services de renseignements et de sécurité des États membres dans les cas indiquant que des actions communes ont été menées sur le territoire de l'Union européenne par les services de renseignements et de sécurité des États membres;

37. invite la Commission à présenter des propositions en vue de développer des mécanismes de contrôle démocratique des activités de renseignement transfrontalières dans le contexte des politiques européennes de lutte contre le terrorisme; compte exercer pleinement ses propres pouvoirs parlementaires pour contrôler les politiques de lutte contre le terrorisme conformément aux recommandations émises par le département thématique du Parlement (PE 453.207);

38. invite le Médiateur européen à enquêter sur le non-respect des droits fondamentaux et des principes de bonne administration et de coopération loyale par la Commission, le Conseil et les agences de sécurité de l'Union, notamment Europol et Eurojust, dans leur réponse aux recommandations de la commission TDIP;

39. invite l'Union européenne à garantir que ses propres obligations internationales soient pleinement respectées et que ses politiques et instruments de politique étrangère, comme les orientations contre la torture et les dialogues sur les droits de l'homme, soient pleinement mis en œuvre, de sorte qu'elle soit en meilleure position pour inviter à l'application rigoureuse des clauses des droits de l'homme dans tous les accords internationaux qu'elle signe et pour exhorter ses principaux alliés, notamment les États‑Unis, à respecter leur propre droit national et le droit international;

40. réaffirme que la lutte internationale contre le terrorisme et la coopération internationale bilatérale ou multilatérale dans ce domaine, y compris dans le cadre de l'OTAN ou entre les services de renseignements et de sécurité, ne peuvent être menées que dans le plein respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales et doivent s'accompagner d'un contrôle démocratique et judiciaire approprié; invite les États membres, la Commission, le service européen pour l'action extérieure (SEAE) et le Conseil à garantir l'application de ces principes dans leurs relations extérieures, et insiste sur le fait que ces institutions devraient effectuer un examen approfondi des antécédents de leurs partenaires en matière de droits de l'homme avant d'adhérer à tout nouvel accord, notamment en matière de coopération des services de renseignements et de partage d'informations, réviser les accords actuellement en vigueur lorsque leurs partenaires ne respectent pas les droits de l'homme, et informer le Parlement européen des conclusions de ces examens et de ces révisions;

41. demande qu'il soit mis un terme à l'ingérence des services spéciaux d'un État étranger dans les affaires intérieures des États membres souverains de l'Union européenne et que la lutte contre le terrorisme soit menée dans le plein respect des droits de l'homme, des libertés fondamentales, de la démocratie et de l'état de droit;

42. rappelle que le Protocole facultatif à la Convention contre la torture exige la mise en place de systèmes de surveillance couvrant toutes les situations de privation de liberté et souligne que l'adhésion à cet instrument international constitue une protection supplémentaire; encourage vivement les pays partenaires de l'Union européenne à ratifier le Protocole facultatif, à établir des mécanismes préventifs indépendants au niveau national qui soient conformes aux Principes de Paris et à ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées;

43. demande de nouveau, conformément au droit international, notamment l'article 12 de la Convention contre la torture, à tous les États faisant l'objet d'allégations crédibles de déployer tous les efforts possibles afin d'apporter les clarifications nécessaires, et si les indications persistent, de mener des enquêtes approfondies sur tous les actes présumés de restitution extraordinaire, de prisons secrètes, de torture et autres violations graves des droits de l'homme, de façon à établir la vérité et, le cas échéant, déterminer la responsabilité, garantir l'obligation de rendre des comptes et empêcher l'impunité, y compris en poursuivant des individus en justice lorsqu'une responsabilité pénale est constatée; demande à la HR/VP et aux États membres de prendre à cet égard toutes les mesures nécessaires pour veiller à un suivi adéquat de l'étude conjointe des Nations unies sur les pratiques mondiales concernant le recours à la détention secrète dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, notamment en ce qui concerne la lettre de suivi envoyée le 21 octobre 2011 par les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales à 59 États demandant aux différents gouvernements de fournir des informations actualisées sur la mise en œuvre des recommandations contenues dans cette étude;

44. invite l'Union à garantir que ses États membres, ainsi que ses associés et ses partenaires (notamment ceux concernés par l'accord de Cotonou), qui ont accepté d'accueillir d'anciens détenus de Guantánamo leur proposent réellement un soutien complet en ce qui concerne leurs conditions de vie, les actions pour faciliter leur intégration à la société, la possibilité d'un traitement médical, y compris un rétablissement psychologique, l'accès à des documents d'identité et de voyage, ainsi que l'exercice du droit au regroupement familial et de tous les autres droits conférés aux personnes bénéficiant du statut de réfugié politique;

45. est particulièrement préoccupé par la procédure menée par une commission miliaire américaine en ce qui concerne M. Abd al-Rahim al-Nashiri qui pourrait être condamné à mort s'il est déclaré coupable; invite les autorités américaines à exclure la possibilité de condamner Abd al-Rahim al-Nashiri à la peine de mort et réitère son opposition de longue date à la peine de mort dans tous les cas et en toutes circonstances; fait observer que l'affaire de M. al-Nashiri est pendante devant la Cour européenne des droits de l'homme depuis le 6 mai 2011; invite les autorités de tout pays dans lequel M. al-Nashiri a été détenu à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour garantir que M. al-Nashiri ne soit pas condamné à la peine de mort; prie instamment la HR/VP d'évoquer avec les États-Unis en priorité le cas de M. al-Nashiri, conformément aux orientations de l'Union européenne concernant la peine de mort;

46. rappelle que l'application pleine et entière de la clause relative aux droits de l'homme dans les accords avec les pays tiers est fondamentale dans les relations qu'entretiennent l'Union européenne et ses États membres avec ces pays et estime qu'il existe une réelle volonté de réexaminer la manière dont les gouvernements européens ont coopéré avec les appareils de répression de dictatures au nom de la lutte contre le terrorisme; considère à cet égard que la politique européenne de voisinage révisée récemment doit soutenir fermement la réforme du secteur de la sécurité, qui doit notamment garantir une séparation claire entre les fonctions de renseignements et celles de répression; invite le SEAE, le Conseil et la Commission à renforcer leur coopération avec le Comité pour la prévention de la torture et avec d'autres instruments appropriés du Conseil de l'Europe en matière de planification et de mise en place de projets de soutien à la lutte contre le terrorisme avec des pays tiers ainsi qu'en ce qui concerne toutes les formes de dialogue avec des pays tiers dans ce domaine;

47. invite l'ancienne République yougoslave de Macédoine à identifier les responsables de l'enlèvement, apparemment en raison d'une erreur d'identité, de Khaled El-Masri, ayant entraîné sa détention illégale et des actes de torture présumés, et à les obliger à répondre de leurs actes; déplore l'absence d'action de la part du bureau du procureur de Skopje en vue de conduire une enquête pénale concernant la plainte de M. El-Masri; fait observer que la Cour européenne des droits de l'homme a repris cette affaire et que la Grande Chambre a tenu sa première audience le 16 mai 2012; considère que le comportement reproché au gouvernement de l'ancienne République yougoslave de Macédoine dans cette affaire est contraire aux principes fondateurs de l'Union européenne que sont les droits fondamentaux et l'état de droit et qu'il doit être dûment évoqué par la Commission en lien avec la candidature de l'ancienne République yougoslave de Macédoine en vue de l'adhésion à l'Union européenne;

48. invite l'OTAN et les autorités américaines à mener leurs propres enquêtes, à coopérer étroitement avec les enquêteurs parlementaires ou judiciaires des États membres ou de l'Union sur ces questions[31], notamment en répondant rapidement, le cas échéant, aux demandes d'entraide judiciaire, à divulguer des informations sur les programmes de restitutions extraordinaires ou sur les autres pratiques enfreignant les droits de l'homme et les libertés fondamentales et à fournir aux représentants légaux des personnes soupçonnées toutes les informations nécessaires à la défense de leurs clients; demande une confirmation du fait que tous les accords de l'OTAN, les accords entre l'OTAN et l'Union et les autres accords transatlantiques respectent les droits fondamentaux;

49. rend hommage aux initiatives menées par la société civile américaine pour mettre en place en 2010 un groupe de travail bipartite indépendant chargé d'examiner la politique et les actions du gouvernement des États-Unis concernant l'arrestation, la détention et le jugement de "terroristes présumés" et la détention aux États-Unis sous les administrations Clinton, Bush et Obama;

50. invite les États-Unis, au vu du rôle fondamental du partenariat transatlantique et de leur autorité en la matière, à mener des enquêtes approfondies et à veiller à ce que les responsables de toute violation commise répondent de leurs actes, à faire en sorte que le droit national et le droit international en la matière soient totalement appliqués, de manière à combler les vides juridiques, à mettre fin aux procès militaires, à appliquer pleinement le droit pénal aux individus soupçonnés de terrorisme et à rétablir le réexamen de la détention, l'habeas corpus, la procédure régulière, la protection contre la torture et la non-discrimination entre les étrangers et les citoyens américains;

51. invite le président Obama à honorer l'engagement qu'il a pris en janvier 2009 de fermer le centre de détention de la baie de Guantánamo, à permettre à toute personne détenue qui ne fera pas l'objet d'une inculpation de retourner dans son pays d'origine ou dans un autre pays sûr dès que possible, ainsi qu'à juger immédiatement les prisonniers de Guantánamo contre lesquels il existe suffisamment de preuves recevables au cours d'une audience publique équitable assurée par un tribunal indépendant et impartial et, à veiller, en cas de condamnation, à ce qu'ils soient emprisonnés aux États-Unis conformément aux normes et aux principes internationaux en vigueur; exige de même que les cas de violation des droits de l'homme observés à Guantanamo fassent l'objet d'une enquête et que les responsabilités soient déterminées;

52. demande que tout prisonnier qui ne fera pas l'objet d'une inculpation mais qui ne peut être rapatrié en raison d'un véritable risque de torture ou de persécution dans son pays d'origine bénéficie de l'opportunité de s'installer aux États-Unis sous protection humanitaire et d'obtenir réparation[32]; presse également les États membres de bien vouloir accueillir ces anciens prisonniers de Guantánamo;

53. invite les autorités américaines à supprimer la possibilité de détention illimitée sans accusation ni procès en vertu de la loi NDAA;

54. appelle la Conférence des présidents de délégation à veiller au lancement de dialogues parlementaires concernant la protection des droits fondamentaux dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, sur la base des conclusions de l'étude conjointe des Nations unies sur les pratiques mondiales concernant le recours à la détention secrète dans le cadre de la lutte contre le terrorisme et de son suivi, ainsi que de la compilation par les Nations unies de bonnes pratiques en matière de cadres et de mesures juridiques et institutionnels, notamment de contrôle, visant à garantir le respect des droits de l'homme par les services de renseignement dans la lutte antiterroriste;

55. s'engage à consacrer sa prochaine rencontre parlementaire conjointe avec les parlements nationaux à réexaminer le rôle joué par les parlements pour garantir la prise de responsabilités en ce qui concerne les violations des droits de l'homme dans le cadre du programme de la CIA et à promouvoir une coopération renforcée et des échanges réguliers entre les instances nationales chargées de contrôler les services de renseignements, en présence des autorités nationales, des institutions et des agences européennes concernées;

56. est résolu à poursuivre la mission qui lui a été confiée par la commission temporaire conformément aux articles 2, 6 et 7 du traité UE; charge sa commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures ainsi que sa sous-commission des droits de l'homme de s'adresser au Parlement en séance plénière sur ce point un an après l'adoption de la présente résolution; juge essentiel dès lors d'évaluer dans quelle mesure les recommandations adoptées par le Parlement ont été suivies d'effets et, lorsque cela n'a pas été le cas, d'en analyser les raisons;

57. demande au Conseil, à la Commission, au Médiateur européen, aux gouvernements et aux parlements des États membres, des pays candidats à l'adhésion et des pays associés, au Conseil de l'Europe, à l'OTAN, aux Nations unies et au gouvernement ainsi qu'aux deux chambres du Congrès des États-Unis de le tenir informé de toutes les évolutions éventuelles dans les domaines abordés par le présent rapport;

58. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, au Médiateur européen, aux gouvernements et aux parlements des États membres, aux gouvernements et aux parlements des pays candidats à l'adhésion et des pays associés, au Conseil de l'Europe, à l'OTAN, aux Nations unies, ainsi qu'au gouvernement et aux deux chambres du Congrès des États-Unis.

  • [1]  JO L 200 du 30.7.2005, p. 1.
  • [2]  JO C 115 du 4.5.2010, p. 1.
  • [3]  A/HRC/13/42, 19.2.2010.
  • [4]  A/HRC/19/61, 18.1.12.
  • [5]  A/HRC/14/46, 17.5.10.
  • [6]  Résolution 1507 (2006).
  • [7]  Résolution 1562 (2007).
  • [8]  Doc. 12714 du 16.9.2011.
  • [9]  JO C 285 E du 21.10.2010, p. 12.
  • [10]  JO C 287 E du 29.11.2007, p. 309.
  • [11]  JO C 76 E du 25.3.2010, p. 51.
  • [12]  Textes adoptés de cette date, P7_TA(2011)0271.
  • [13]  JO C 67 E du 18.3.2010, p. 91.
  • [14]  JO C 300 E du 9.12.2006, p. 136.
  • [15]  JO C 102 E du 28.4.2004, p. 521.
  • [16]  JO C 169 E du 15.6.2012, p. 49.
  • [17]  Textes adoptés de cette date, P7_TA(2011)0577.
  • [18]  SPEECH/08/716, "Une politique visant à assurer l'effectivité des droits fondamentaux sur le terrain".
  • [19]  "Remarks en route to Germany", conférence de presse de Condoleezza Rice à Berlin, le 5 décembre 2005, et "Press Availability at the Meeting of the North Atlantic Council" (Conférence de presse lors de la réunion du Conseil de l'Atlantique Nord), à Bruxelles, le 8 décembre 2005.
  • [20]  ‘Sources Tell ABC News Top Al Qaeda Figures Held in Secret CIA Prisons’, ABC News, 5.12.2005.
  • [21]  ‘Lithuania Hosted Secret CIA Prison to Get “Our Ear”‘, ABC News, 20.8.2009.
  • [22]  ‘CIA Holds Terror Suspects in Secret Prisons’, 2.11. 2005, et ‘Europeans Probe Secret CIA Flights’, Washington Post, 17.11.2005.
  • [23]  Voir notamment la déclaration de Human Rights Watch concernant les infrastructures de détention secrète des États-Unis en Europe du 6.11.2005, le rapport d'Amnesty International Europe: "Open secret: Mounting evidence of Europe's complicity in rendition and secret detention" du 15.11.2010 et le rapport de Reprieve "Rendition on Record: Using the Right of Access to Information to Unveil the Paths of Illegal Prisoner Transfer Flights", 15.12.2011.
  • [24]  Paragraphe 232 de sa résolution du 14 février 2007 précitée.
  • [25]  JO L 200 du 30.7.2005, p. 1.
  • [26]  JO L 338 du 21.12.11, p. 31.
  • [27]  Article 5 de la Déclaration universelle des droits de l'homme, article 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et la jurisprudence correspondante, et article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.
  • [28]  A/HRC/19/44.
  • [29]  "Inside Romania's secret CIA prison", The Independent, 9.12.2011.
  • [30]  Rapport du CPT sur sa visite en Lituanie du 14 au 18 juin 2010 (19 mai 2011).
  • [31]  Voir entre autres la résolution précitée du Parlement du 9 juin 2011.
  • [32]  Voir le paragraphe 3 de sa résolution du 4 février 2009 précitée.

AVIS DE la commission des affaires ÉtrangÈres (6.7.2012)

à l’intention de la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures

sur des allégations de transport et de détention illégale de prisonniers par la CIA dans des pays européens: suivi du rapport de la commission TDIP du PE
(2012/2033(INI))

Rapporteure pour avis: Sarah Ludford (*)

(*) Commission associée – article 50 du règlement

SUGGESTIONS

La commission des affaires étrangères invite la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures, compétente au fond, à incorporer dans la proposition de résolution qu'elle adoptera les suggestions suivantes:

A. considérant que l'Union européenne est fondée sur un engagement envers la démocratie, l'état de droit, les droits de l'homme et les libertés fondamentales, le respect de la dignité humaine et le droit international, non seulement dans ses politiques internes, mais également dans ses politiques externes; considérant que l'engagement de l'Union envers les droits de l'homme, renforcé par l'entrée en vigueur de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et le processus d'adhésion à la Convention européenne des droits de l'homme, doit être reflété dans tous les domaines d'action afin que la politique européenne en matière de droits de l'homme soit efficace et crédible;

B.  considérant que les instruments régissant la politique étrangère et de sécurité commune de l'Union européenne (PESC) comprennent la Déclaration universelle des droits de l'homme, le Pacte international des Nations unies relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et ses deux protocoles facultatifs, ainsi que la Convention des Nations unies contre la torture et son protocole facultatif, la Convention européenne des droits de l'homme, la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, lesquels prévoient non seulement une interdiction absolue de la torture, mais créent également une réelle obligation d'enquêter sur les allégations de torture et de prévoir des voies de recours et des réparations; considérant que les orientations de l'Union européenne sur la torture constituent le cadre des efforts déployés par l'Union "pour empêcher et éliminer la torture et les mauvais traitements dans toutes les régions du monde";

C. considérant que, si elles sont pratiquées de manière répandue ou systématique, les détentions secrètes, qui équivalent à des disparitions forcées, peuvent être considérées comme un crime contre l'humanité; considérant que les états d'urgence et la lutte contre le terrorisme constituent un environnement propice à la détention secrète;

D. considérant que, pour garantir la promotion du droit international et le respect des droits de l'homme, tous les accords d'association, les accords commerciaux et les accords de coopération contiennent des clauses relatives aux droits de l'homme; considérant par ailleurs que l'Union européenne mène également ses dialogues politiques avec les pays tiers sur la base des orientations relatives aux droits de l'homme, lesquelles incluent la lutte contre la peine de mort et contre la torture; considérant que, dans le cadre de l'instrument européen pour la démocratie et les droits de l'homme (IEDDH), l'Union soutient les organisations de la société civile qui luttent contre la torture et encouragent la réhabilitation des victimes d'actes de torture;

E.  considérant que l'étude conjointe sur les pratiques mondiales concernant le recours à la détention secrète dans le cadre de la lutte contre le terrorisme (A/HRC/13/42), présentée par le Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste, le Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, le Groupe de travail sur la détention arbitraire et le Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, a répertorié les sites de détention secrète utilisés sur le territoire des États membres de l'Union dans le cadre du programme de la CIA, et que des lettres de suivi ont été envoyées aux États membres leur demandant des informations supplémentaires comme indiqué dans les rapports sur les communications des titulaires de mandats au titre des procédures spéciales, y compris celui du 23 février 2012 (A/HRC/19/44);  

F.  considérant que les relations entre l'Union européenne et les États-Unis sont fondées sur une collaboration et une coopération étroites dans de nombreux domaines, sur la base de valeurs communes que sont la démocratie, l'état de droit et les droits fondamentaux; considérant que l'Union et les États-Unis ont intensifié leur engagement dans la lutte contre le terrorisme depuis les attentats terroristes du 11 septembre 2001, notamment par la déclaration conjointe sur le contre-terrorisme du 3 juin 2010; considérant néanmoins qu'il est nécessaire de veiller à la conformité des pratiques engagées avec les déclarations d'intention et de surmonter les divergences entre la politique de l'Union et celle des États‑Unis en matière de lutte contre le terrorisme;

G. considérant qu'en décembre 2011, le gouvernement des États-Unis a adopté la loi de finances relative au budget de défense nationale (National Defense Authorization Act), dite loi NDAA, qui inscrit dans le droit la détention illimitée de personnes suspectées d'être engagées dans des activités terroristes aux États-Unis et compromet le droit à une procédure régulière et à un procès équitable; considérant que le champ d'application de la loi NDAA fait l'objet d'un recours juridictionnel;

H. considérant que le 22 janvier 2009, le président Obama a signé trois décrets pour interdire le recours à la torture pendant les interrogatoires, établir un groupe de travail interinstitutionnel chargé d'examiner systématiquement les politiques et les procédures de détention ainsi que tous les cas individuels et ordonner la fermeture de Guantánamo;

I.   considérant néanmoins que le camp de Guantánamo n'est toujours pas fermé en raison de la vive opposition du Congrès des États-Unis; considérant qu'afin d'accélérer la fermeture du camp, les États-Unis ont appelé les États membres de l'Union européenne à accueillir des détenus de Guantánamo; considérant que le Haut-Commissaire des Nations unies pour les droits de l'homme a fait part de sa profonde déception face à la non-fermeture de Guantánamo et au maintien d'un système de détention arbitraire;

J.   considérant que des détenus de Guantánamo sont toujours jugés par des tribunaux militaires, notamment à la suite de la décision du 7 mars 2011 du président des États-Unis de signer le décret levant après deux ans le gel de nouveaux procès miliaires et de la loi du 7 janvier 2012 empêchant les transferts de détenus de Guantánamo aux États-Unis à des fins de jugement;

K. considérant qu'il a, à plusieurs reprises, appelé à ce que la lutte contre le terrorisme soit menée dans le respect total de la dignité humaine, des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment dans le cadre de la coopération internationale dans ce domaine, sur la base de la Convention européenne des droits de l'homme, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, des constitutions nationales et des législations nationales sur les droits fondamentaux, et qu'il a réitéré cet appel en dernier lieu dans son rapport sur la politique antiterroriste de l'Union, dans lequel il a déclaré que le respect des droits de l'homme était une condition préalable pour garantir l'efficacité de cette politique;

L.  considérant que, bien que l'Union ait démontré qu'elle était décidée à éviter toute collusion en matière de torture dans le règlement (CE) n° 1236/2005 du Conseil[1], modifié en dernier lieu en décembre 2011[2], qui interdit les exportations et les importations de biens qui n'ont aucune autre utilisation pratique que celle d'infliger la peine capitale, la torture et d'autres peines ou traitement cruels, inhumains ou dégradants, il reste encore beaucoup à faire pour en assurer l'application complète;

M. considérant que le fait de se fonder uniquement sur des garanties diplomatiques pour autoriser l'extradition ou la déportation d'une personne vers un pays où des motifs sérieux permettent de croire qu'elle risquerait d'être victime de torture ou de mauvais traitements est incompatible avec l'interdiction absolue de la torture inscrite dans le droit international, le droit de l'Union, les constitutions nationales et les législations des États membres[3];

N. considérant qu'il a sévèrement, et à plusieurs reprises, condamné les pratiques illégales telles que la "restitution extraordinaire", l'enlèvement, la détention sans jugement, la disparition, les prisons secrètes et la torture, et qu'il a demandé d'enquêter plus avant au sujet du degré présumé de participation de certains États membres dans la collaboration avec les autorités américaines, en particulier la CIA, et concernant le territoire de l'Union;

O. considérant que la commission d'actes illégaux sur le territoire de l'Union peut s'être développée dans le cadre d'accords bilatéraux ou multilatéraux de l'OTAN;

1.  rappelle que les stratégies antiterroristes ne peuvent être efficaces que si elles sont conduites dans le strict respect des obligations relatives aux droits de l'homme et notamment du droit à une procédure régulière;

2.  réitère sa condamnation des pratiques de "restitution extraordinaire", de prisons secrètes et de torture, qui sont interdites en vertu du respect des droits de l'Homme, à l'échelle nationale et internationale, et qui violent, entre autres, les droits à la liberté, à la sécurité, à un traitement humain, à la protection contre la torture, au non-refoulement, à la présomption d'innocence, à un procès équitable, à un conseil juridique et à une protection égale devant la loi;

3.  estime qu'il est fondamental que l'Union condamne toute pratique abusive en matière de lutte contre le terrorisme, y compris tout acte de ce type commis sur son territoire, afin qu'elle puisse non seulement se montrer à la hauteur de ses valeurs, mais également les défendre de façon crédible dans ses partenariats extérieurs;

4.  rappelle que l'application pleine et entière des clauses d'accords relatives aux droits de l'homme est fondamentale dans les relations qu'entretiennent l'Union européenne et ses États membres avec des pays tiers et considère qu'il existe une réelle volonté de revoir la coopération des gouvernements européens avec l'appareil de répression de dictatures au nom de la lutte contre le terrorisme; considère à cet égard que la politique européenne de voisinage révisée récemment doit soutenir fermement la réforme du secteur de la sécurité qui doit notamment garantir une séparation claire des fonctions des services de renseignements et de celles des autorités chargées du maintien de l'ordre; invite le SEAE, le Conseil et la Commission à renforcer leur coopération avec le Comité pour la prévention de la torture et avec d'autres instruments appropriés du Conseil de l'Europe en matière de planification et de mise en place de projets de soutien à la lutte contre le terrorisme avec des pays tiers ainsi qu'en ce qui concerne toutes les formes de dialogue avec des pays tiers dans ce domaine;

5.  demande de nouveau, conformément au droit international et en particulier à l'article 12 de la Convention contre la torture, à tous les États faisant l'objet d'allégations crédibles de déployer tous les efforts possibles afin d'apporter les clarifications nécessaires, et si les indications persistent, de mener des enquêtes approfondies sur tous les actes allégués de restitution extraordinaire, de prisons secrètes, de torture et autres violations graves des droits de l'homme, de façon à établir la vérité et, le cas échéant, déterminer la responsabilité, garantir l'obligation de rendre des comptes et empêcher l'impunité, y compris en poursuivant des individus en justice lorsqu'une responsabilité pénale est constatée; demande à la HR/VP et aux États membres de l'Union de prendre à cet égard toutes les mesures nécessaires pour veiller à un suivi adéquat de l'étude conjointe des Nations unies sur les pratiques mondiales concernant le recours à la détention secrète dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, en particulier concernant la lettre de suivi envoyée le 21 octobre 2011 par les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales à 59 États demandant à leurs gouvernements respectifs de fournir des informations actualisées sur la mise en œuvre des recommandations contenues dans cette étude;

6.  invite l'OTAN et les autorités américaines à mener leurs propres enquêtes, à coopérer étroitement avec les enquêteurs parlementaires ou judiciaires des États membres ou de l'Union sur ces questions[4], notamment en répondant rapidement, le cas échéant, aux demandes d'entraide judiciaire, à divulguer des informations sur les programmes de restitutions extraordinaires ou sur les autres pratiques enfreignant les droits de l'homme et les libertés fondamentales et à fournir aux représentants légaux des personnes soupçonnées toutes les informations nécessaires à la défense de leurs clients; demande de confirmer que tous les accords de l'OTAN, les accords entre l'OTAN et l'Union et les autres accords transatlantiques respectent les droits fondamentaux;

7.  rend hommage aux initiatives menées par la société civile américaine en vue de mettre en place en 2010 un groupe de travail bipartite indépendant chargé d'examiner la politique et les actions du gouvernement des États-Unis concernant l'arrestation, la détention et le jugement de "terroristes présumés" et la détention aux États-Unis sous les administrations Clinton, Bush et Obama;

8.  invite les autorités concernées à ne pas invoquer le secret d'État en matière de coopération des services de renseignements internationaux pour entraver l'obligation de rendre des comptes et les voies de recours; insiste également sur le fait que seuls de véritables motifs de sécurité nationale peuvent justifier le secret qui, dans tous les cas, ne prévaut pas sur les droits fondamentaux imprescriptibles, tels que l'interdiction absolue de la torture;

9.  invite l'Union européenne à garantir que ses propres obligations internationales soient pleinement respectées et que ses politiques et instruments de politique étrangère, comme les orientations contre la torture et les dialogues sur les droits de l'homme, soient pleinement mis en œuvre, de sorte qu'elle soit en meilleure position pour inviter à l'application rigoureuse des clauses des droits de l'homme dans tous les accords internationaux qu'elle signe et pour presser ses principaux alliés, comme les États-Unis, à respecter leur propre droit national et le droit international;

10. rappelle que le Protocole facultatif à la Convention contre la torture exige la mise en place de systèmes de surveillance couvrant toutes les situations de privation de liberté et insiste sur le fait que l'adhésion à cet instrument international constitue une protection supplémentaire; encourage vivement les pays partenaires de l'Union européenne à ratifier le Protocole facultatif, à établir des mécanismes préventifs indépendants au niveau national qui soient conformes aux Principes de Paris et à ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées;

11. invite l'ancienne République yougoslave de Macédoine à identifier les responsables de l'enlèvement, apparemment en raison d'une erreur d'identité, de Khaled El-Masri, qui a entraîné sa détention illégale et des actes de torture présumés, et à les obliger à répondre de leurs actes; déplore l'absence d'action de la part du bureau du procureur de Skopje pour mener une enquête pénale concernant la plainte de M. El-Masri; fait observer que la Cour européenne des droits de l'homme a repris l'affaire de M. El-Masri et que la Grande Chambre a tenu sa première audience le 16 mai 2012; considère que le comportement reproché au gouvernement de l'ancienne République yougoslave de Macédoine dans l'affaire de M. El-Masri est contraire aux principes fondateurs de l'Union européenne que sont les droits fondamentaux et l'état de droit et qu'il doit être évoqué par la Commission dans le cadre du processus d'adhésion à l'Union européenne de l'ancienne République yougoslave de Macédoine;

12. est particulièrement préoccupé par la procédure menée par une commission miliaire américaine concernant M. Abd al-Rahim al-Nashiri qui pourrait être condamné à mort s'il est déclaré coupable; invite les autorités américaines à exclure l'imposition de la peine de mort à Abd al-Rahim al‑Nashiri et réitère son opposition de longue date à la peine de mort en tout état de cause et dans toutes les circonstances; fait observer que l'affaire de M. al‑Nashiri est pendante devant la Cour européenne des droits de l'homme depuis le 6 mai 2011; invite les autorités de tout pays dans lequel M. al-Nashiri a été détenu à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour garantir que M. al-Nashiri ne soit pas condamné à la peine de mort; prie instamment la HR/VP d'évoquer en priorité le cas de M. al-Nashiri avec les États-Unis, conformément aux orientations de l'Union européenne concernant la peine de mort;

13. réaffirme que la lutte internationale contre le terrorisme et la coopération internationale bilatérale ou multilatérale dans ce domaine, y compris dans le cadre de l'OTAN ou entre les services de renseignements et de sécurité, doivent uniquement être menées en respectant pleinement les droits de l'homme et les libertés fondamentales et s'accompagner d'un contrôle démocratique et judiciaire approprié; invite les États membres, la Commission, le service européen pour l'action extérieure (SEAE) et le Conseil à garantir l'application de ces principes dans leurs relations extérieures, et insiste sur le fait que ces institutions devraient effectuer un examen approfondi des antécédants de leurs partenaires en matière de droits de l'homme avant d'adhérer à tout nouvel accord, notamment en matière de coopération des services de renseignements et de partage d'informations, réviser les accords actuellement en vigueur lorsque leurs partenaires ne respectent pas les droits de l'homme, et informer le Parlement européen des conclusions de ces examens et de ces révisions;

14. réitère son appel au Conseil et aux États membres à ne pas se fonder sur des garanties diplomatiques inapplicables dans les cas d'extradition ou de déportation de personnes suspectées de menacer la sécurité nationale, lorsqu'il existe un risque véritable que les personnes concernées soient soumises à la torture ou à de mauvais traitements ou qu'elles soient jugées sur la base d'aveux extorqués de cette manière;

15. prie instamment les autorités concernées de veiller à strictement distinguer les activités des services de renseignements et de sécurité, d'une part, des activités des autorités chargées du maintien de l'ordre, d'autre part, de sorte à garantir le respect du principe que nul ne peut être à la fois juge et partie;

16. souligne que la commission temporaire du Parlement européen chargée de l'enquête qui a servi de base à ses résolutions du 14 février 2007 et du 19 février 2009 a mis en évidence de graves lacunes dans les procédures d'autorisation et de contrôle des appareils civils survolant l'espace aérien ou atterrissant sur leur territoire, qui ont non seulement facilité leur non-respect lors des "restitutions extraordinaires" de la CIA, mais ont également permis à toute personne engagée dans la criminalité organisée de passer outre, y compris les réseaux terroristes; rappelle également la compétence de l'Union dans le domaine de la sécurité et de la sûreté des transports et la recommandation du Parlement à la Commission visant à réglementer et à surveiller la gestion de l'espace aérien de l'Union; invite par conséquent l'Union et ses États membres à cesser de reporter un examen approfondi de leur mise en œuvre de la Convention relative à l'aviation civile internationale (Convention de Chicago) en ce qui concerne l'autorisation et les inspections des appareils civils survolant leur espace aérien ou atterrissant sur leur territoire afin de garantir le renforcement de la sécurité et l'exercice systématique de contrôles, ce qui exige une identification préalable des passagers et de l'équipage, et afin de faire en sorte que tous les vols classés "vols d'État" (qui ne relèvent pas de la Convention de Chicago) obtiennent une autorisation préalable adéquate; rappelle également sa recommandation selon laquelle la Convention de Tokyo relative aux infractions et à certains autres actes survenant à bord des aéronefs doit être appliquée de manière efficace par les États membres;

17. appelle la Conférence des présidents de délégation à veiller à entamer des dialogues parlementaires concernant la protection des droits fondamentaux dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, sur la base des conclusions de l'étude conjointe des Nations unies sur les pratiques mondiales concernant le recours à la détention secrète dans le cadre de la lutte contre le terrorisme et de son suivi, ainsi que de la compilation par les Nations unies de bonnes pratiques en matière de cadres et de mesures juridiques et institutionnels, notamment de contrôle, visant à garantir le respect des droits de l'homme par les services de renseignement dans la lutte antiterroriste;

18. invite les États-Unis, au vu du rôle cardinal du partenariat transatlantique et de leur autorité en la matière, à mener des enquêtes approfondies et à veiller à ce que les responsables de toute violation commise répondent de leurs actes, à faire en sorte que les droits national et international en la matière soient totalement appliqués, de manière à combler les vides juridiques, à mettre fin aux procès militaires, à appliquer pleinement le droit pénal aux individus suspectés de terrorisme et à rétablir le réexamen de la détention, l'habeas corpus, la procédure régulière, la protection contre la torture et la non‑discrimination entre les étrangers et les citoyens américains;

19. invite le président Obama à honorer l'engagement qu'il a pris en janvier 2009 de fermer Guantánamo, à permettre à toute personne détenue qui ne fera pas l'objet d'une inculpation de retourner dans son pays d'origine ou dans un autre pays sûr dès que possible, ainsi qu'à juger immédiatement les prisonniers contre lesquels il existe suffisamment de preuves recevables au cours d'une audience publique équitable assurée par un tribunal indépendant et impartial et, à veiller, en cas de condamnation, à ce qu'ils soient emprisonnés aux États‑Unis conformément aux normes et aux principes internationaux en vigueur; exige de même que les cas de violations des droits de l'homme observés à Guantánamo fassent l'objet d'une enquête et que les responsables soient identifiés;

20. invite les autorités américaines à supprimer la possibilité de détention illimitée sans accusation ni procès en vertu de la loi NDAA;

21. demande à tous les États membres de l'Union de signer et de ratifier la Conventions des Nations unies pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées;

22. demande que tout prisonnier qui ne fera pas l'objet d'une accusation mais qui ne peut être rapatrié en raison d'un véritable risque de torture ou de persécution dans son pays d'origine bénéficie de l'opportunité de s'installer aux États-Unis sous protection humanitaire et d'obtenir réparation[5]; presse également les États membres de l'Union de bien vouloir accueillir ces anciens prisonniers de Guantánamo;

23. invite l'Union à garantir que ses États membres, ainsi que ses associés et ses partenaires, notamment en vertu de l'accord de Cotonou, qui ont accepté d'accueillir d'anciens détenus de Guantánamo leur proposent effectivement un soutien complet en ce qui concerne leurs conditions de vie et leur intégration à la société, en leur fournissant un traitement médical, y compris un rétablissement psychologique, ainsi qu'un accès à des documents d'identité et de voyage, l'exercice du droit au regroupement familial et de tous les autres droits conférés aux personnes ayant un statut de réfugié politique.

RÉSULTAT DU VOTE FINAL EN COMMISSION

Date de l'adoption

5.7.2012

 

 

 

Résultat du vote final

+:

–:

0:

60

3

1

Membres présents au moment du vote final

Pino Arlacchi, Elmar Brok, Jerzy Buzek, Tarja Cronberg, Arnaud Danjean, Michael Gahler, Marietta Giannakou, Andrzej Grzyb, Anna Ibrisagic, Liisa Jaakonsaari, Anneli Jäätteenmäki, Jelko Kacin, Ioannis Kasoulides, Tunne Kelam, Nicole Kiil-Nielsen, Evgeni Kirilov, Maria Eleni Koppa, Andrey Kovatchev, Paweł Robert Kowal, Eduard Kukan, Vytautas Landsbergis, Ryszard Antoni Legutko, Krzysztof Lisek, Sabine Lösing, Ulrike Lunacek, Mario Mauro, Francisco José Millán Mon, Alexander Mirsky, María Muñiz De Urquiza, Annemie Neyts-Uyttebroeck, Norica Nicolai, Raimon Obiols, Kristiina Ojuland, Ria Oomen-Ruijten, Pier Antonio Panzeri, Alojz Peterle, Bernd Posselt, Hans-Gert Pöttering, Libor Rouček, Tokia Saïfi, Nikolaos Salavrakos, György Schöpflin, Werner Schulz, Adrian Severin, Marek Siwiec, Geoffrey Van Orden, Kristian Vigenin, Sir Graham Watson, Boris Zala

Suppléant(s) présent(s) au moment du vote final

Charalampos Angourakis, Jean-Jacob Bicep, Véronique De Keyser, Andrew Duff, Tanja Fajon, Hélène Flautre, Elisabeth Jeggle, Baroness Sarah Ludford, Carmen Romero López, Helmut Scholz, Indrek Tarand, Alejo Vidal-Quadras, Dominique Vlasto, Joachim Zeller

Suppléant(s) (art. 187, par. 2) présent(s) au moment du vote final

Petru Constantin Luhan

  • [1]  JO L 200 du 30.7.2005, p.1.
  • [2]  JO L 338 du 21.12.2011, p.31.
  • [3]  Article 5 de la Déclaration universelle des droits de l'homme, article 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et la jurisprudence en la matière, article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.
  • [4]  Voir, entre autres, la résolution du Parlement européen du 9 juin 2011 sur Guantánamo: décision imminente en matière de peine de mort (P7_TA(2011)0271).
  • [5]  Voir le paragraphe 3 de la résolution du Parlement européen du 4 février 2009 sur le retour et la réintégration des détenus du centre de détention de Guantanamo (P6_TA (2009)0045).

RÉSULTAT DU VOTE FINAL EN COMMISSION

Date de l’adoption

10.7.2012

 

 

 

Résultat du vote final

+:

–:

0:

50

2

5

Membres présents au moment du vote final

Jan Philipp Albrecht, Edit Bauer, Mario Borghezio, Rita Borsellino, Emine Bozkurt, Arkadiusz Tomasz Bratkowski, Simon Busuttil, Philip Claeys, Carlos Coelho, Ioan Enciu, Frank Engel, Cornelia Ernst, Monika Flašíková Beňová, Hélène Flautre, Kinga Gál, Kinga Göncz, Sylvie Guillaume, Anna Hedh, Salvatore Iacolino, Sophia in ‘t Veld, Lívia Járóka, Timothy Kirkhope, Juan Fernando López Aguilar, Baroness Sarah Ludford, Monica Luisa Macovei, Svetoslav Hristov Malinov, Véronique Mathieu, Anthea McIntyre, Louis Michel, Claude Moraes, Antigoni Papadopoulou, Georgios Papanikolaou, Carmen Romero López, Renate Sommer, Rui Tavares, Nils Torvalds, Kyriacos Triantaphyllides, Wim van de Camp, Axel Voss, Josef Weidenholzer, Cecilia Wikström, Tatjana Ždanoka

Suppléant(s) présent(s) au moment du vote final

Elena Oana Antonescu, Michael Cashman, Anna Maria Corazza Bildt, Leonidas Donskis, Dimitrios Droutsas, Lorenzo Fontana, Mariya Gabriel, Monika Hohlmeier, Hubert Pirker, Raül Romeva i Rueda, Salvador Sedó i Alabart, Michèle Striffler

Suppléant(s) (art. 187, par. 2) présent(s) au moment du vote final

Zita Gurmai, Nadja Hirsch, Elisabeth Jeggle