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Procédure : 2010/2737(RSP)
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RC-B7-0376/2010

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PV 17/06/2010 - 12.1

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P7_TA(2010)0244

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Jeudi 17 juin 2010 - Strasbourg
République démocratique du Congo: le cas de Floribert Chebeya Bahizire
P7_TA(2010)0244RC-B7-0376/2010

Résolution du Parlement européen du 17 juin 2010 sur la République démocratique du Congo: l'affaire concernant Floribert Chebeya Bahizire

Le Parlement européen,

–  vu ses résolutions précédentes sur la République démocratique du Congo (RDC),

–  vu l'accord de partenariat de Cotonou signé en juin 2000,

–  vu la résolution de l'Assemblée parlementaire paritaire ACP-UE, du 22 novembre 2007, sur la situation en République démocratique du Congo, en particulier dans l'est du pays, et son impact sur la région,

–  vu la résolution 60/1 de l'Assemblée générale des Nations unies, du 24 octobre 2005, sur les résultats du Sommet mondial de 2005, et en particulier ses paragraphes 138 à 140 sur la responsabilité de protéger les populations,

–  vu la déclaration d'un porte-parole de la vice-présidente de la Commission/ haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Mme Catherine Ashton, le 3 juin 2010, sur la mort brutale de M. Floribert Chebeya Bahizire,

–  vu les lignes directrices de l'Union européenne de 2004 pour la protection des défenseurs des droits de l'homme et la stratégie locale pour la mise en œuvre des lignes directrices en RDC, adoptées par les chefs de mission le 20 mars 2010,

–  vu la résolution 1856(2008) du Conseil de sécurité des Nations unies sur le mandat de la MONUC,

–  vu l'article 122, paragraphe 5, de son règlement,

A.  considérant que M. Floribert Chebeya Bahizire, directeur exécutif de la Voix des sans-voix pour les droits de l'homme (VSV) a été retrouvé mort dans son véhicule à Kinshasa, le mercredi 2 juin 2010, après avoir été convoqué par la police,

B.  considérant que, selon les informations communiquées par les médias, le mardi 1er juin 2010 dans l'après-midi, M. Floribert Chebeya Bahizire a reçu un appel téléphonique de l'inspection générale de la police le convoquant à un réunion avec le général John Numbi Banza Tambo, inspecteur général de la police, et que, lors de son arrivée au poste de police, M. Chebeya Bahizire n'a pu entrer en contact avec l'inspecteur général et que, par un minimessage téléphonique, il a informé sa famille qu'il était sur le point de rentrer en ville,

C.  considérant que l'action de M. Chebeya Bahizire en matière de défense de la démocratie et des droits de l'homme en RDC depuis les années 1990 – pour des questions touchant à la corruption au sein de l'armée, aux relations entre les milices et les puissances politiques étrangères, au contrôle du respect de la constitution, aux arrestations illégales, aux détentions arbitraires et à l'amélioration des conditions carcérales – lui a valu le respect et l'admiration de ses compatriotes ainsi que de la communauté internationale,

D.  considérant que M. Fidele Bazana Edadi, le chauffeur de M. Chebeya Bahizire, est toujours porté disparu,

E.  considérant que la famille Chebeya n'a pas été autorisée à avoir pleinement accès au corps du défunt et que les déclarations concernant l'état du corps lors de sa découverte sont contradictoires,

F.  considérant que M. Philip Alston, rapporteur spécial des Nations Unies pour les exécutions extrajudiciaires, commentant les circonstances du meurtre, a déclaré qu'il existait de fortes présomptions d'une responsabilité officielle,

G.  considérant que l'inspecteur général Numbi Banza, a été suspendu jusqu'à nouvel ordre, et que trois policiers ont également été arrêtés en relation avec l'assassinat, et que le chef adjoint de la police, le colonel Daniel Mukalayi, aurait avoué avoir exécuté M. Chebeya Bahizire sur ordre de son supérieur, le général Numbi Banza Tambo,

H.  considérant que M. Chebeya Bahizire a déclaré à Amnesty International avoir eu à plusieurs reprises le sentiment d'être suivi et de subir la surveillance des services de sécurité,

I.  considérant que la vice-présidente de la Commission/ haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Catherine Ashton, le Secrétaire général des Nations, Ban Ki-moon, le haut-commissaire aux droits de l'homme, Navanethem Pillay, le rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, Philip Alston, et le chef de la force de maintien de la paix des Nations Unies en RDC, Alan Dos, ont tous publié des déclarations condamnant l'assassinat de M. Chebeya Bahizire et ont appelé à une enquête indépendante,

J.  considérant que ce meurtre s'inscrit dans une tendance accrue à l'intimidation et au harcèlement visant des défenseurs des droits de l'homme, des journalistes, des opposants politiques, des victimes et des témoins en RDC, et que de nombreux journalistes et militants des droits de l'homme ont été tués dans des circonstances suspectes en RDC au cours des cinq dernières années,

K.  considérant que de nombreuses ONG ont observé une répression accrue des défenseurs des droits de l'homme en RDC au cours de l'année écoulée, y compris les arrestations illégales, les poursuites, les menaces téléphoniques et les convocations à répétitions dans les bureaux des services de renseignement,

L.  considérant que les enquêtes sur les meurtres du défenseur des droits de l'homme, Pascal Kabungulu Kibembi, en 2005, et de plusieurs journalistes, notamment Franck Ngycke Kangundu et son épouse Hélène Mpaka, en novembre 2005, Serge Maheshe, en juin 2007, et Didace Namujimbo, en novembre 2008, ont été menées par les autorités militaires congolaises et se sont distinguées par de graves irrégularités,

M.  considérant qu'en ce qui concerne le mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) d'avril 2008 visant Bosco Ntaganda pour crimes de guerre, y compris l'enrôlement d'enfants soldats, la RDC, en tant que partie au Statut de Rome, est en violation de ses obligations juridiques à coopérer avec la CPI, pour ce qui est, notamment, de l'arrestation de personnes faisant l'objet d'un mandat d'arrêt, et que, au lieu de ce faire, la RDC a promu Bosco Ntaganda à un poste de haut commandement dans l'armée congolaise, confortant l'impression d'impunité pour les violations des droits de l'homme et contribuant, de ce fait, à l'augmentation du nombre de crimes de cette nature,

N.  considérant que l'état de guerre civile a prévalu pendant des années dans certaines parties de la RDC, entraînant massacres, viols de masse et enrôlement à grande échelle d'enfants soldats,

O.  considérant que les massacres, en particulier ceux perpétrés par la l'Armée de résistance du seigneur (LRA, Lord's Resistance Army), un groupe paramilitaire originaire d'Ouganda, affectent actuellement tous les pays limitrophes de la RDC,

P.  considérant que les personnels des ONG sont également touchés par ces diverses formes de persécution des populations civiles, ce qui a entraîné une réduction de l'aide humanitaire en RDC,

Q.  considérant que le 50e anniversaire de l'indépendance de la RDC doit être célébré prochainement et que les droits de l'homme et la démocratie sont essentiels pour le développement du pays,

1.  condamne avec la plus grande force le meurtre de Floribert Chebeya Bahizire et le fait que Fidèle Bazana Edadi, le chauffeur de M. Chebeya Bahizire, ait disparu; exprime son profond soutien à leur famille;

2.  demande qu'une commission d'enquête indépendante, crédible, sérieuse et transparente soit constituée pour faire la vérité sur la mort de M. Chebeya Bahizire et pour localiser M. Bazana Edadi, et exige que des mesures soient prises pour veiller à ce que les familles des deux hommes soient protégées;

3.  exige que les responsables soient identifiés, traduits en justice, et punis, conformément au droit congolais et aux dispositions internationales pour la protection des droits de l'homme;

4.  salue le fait que les autorités aient répondu positivement à une demande de la famille de M. Chebeya Bahizire qu'une équipe médico-légale d'experts néerlandais invitée, dirigée par le docteur Franklin Van de Groot, procède à une autopsie indépendante afin de déterminer la cause du décès;

5.  exprime sa profonde inquiétude quant à la dégradation générale de la situation des défenseurs des droits humains en RDC; invite les autorités congolaises à se conformer pleinement à la déclaration sur les défenseurs des droits de l'homme adoptée par l'Assemblée générale des Nations unies en 1998, et à mettre en œuvre les recommandations de l'examen périodique universel des Nations unies de 2009 qui sont des mesures visant à protéger les droits des défenseurs des droits de l'homme; insiste sur le fait que punir les responsables des assassinats de défenseurs des droits de l'homme et de journalistes qui ont été commis ces dernières années constitue un élément essentiel pour la démocratisation du pays;

6.  condamne l'oppression qui continue de frapper militants des droits de l'homme, journalistes, opposants politiques, victimes et témoins en RDC; demande aux États membres de veiller à ce que ceux-ci soient protégés et de fournir un soutien logistique et technique à cette fin, en conformité avec les lignes directrices pour la protection des défenseurs des droits de l'homme;

7.  condamne les atrocités commises par la LRA et les autres groupes armés en RDC;

8.  souligne la nécessité de s'attaquer à la corruption et de traduire devant la justice les auteurs de violations des droits de l'homme dans les forces armées congolaises, en soulignant le rôle crucial de la MONUC dans ce processus, grâce à une préparation et à une mise en œuvre communes des opérations et à des mécanismes appropriés d'établissement des responsabilités pour les différents abus; prie instamment la RDC de remplir ses obligations juridiques internationales, d'arrêter Bosco Ntaganda et de transférer ce dernier à la CPI;

9.  appelle tous les acteurs à intensifier la lutte contre l'impunité et à renforcer l'état de droit; demande au gouvernement de la RDC de veiller à ce que les responsables de violations des droits de l'homme et du droit humanitaire international rendent compte de leurs actes, et de coopérer pleinement avec la CPI;

10.  souligne le fait que l'Union européenne et la RDC sont signataires de l'accord de Cotonou qui fait explicitement référence aux responsabilités de l'ensemble des parties en matière de droits de l'homme, de démocratie et d'état de droit; demande qu'une attention toute particulière soit accordée à ces questions lors de l'évaluation de l'accord;

11.  invite les autorités de la RDC, à l'occasion du 50e anniversaire de l'indépendance du pays, à s'engager résolument en faveur d'une pratique politique qui respecte les droits de l'homme et renforce l'état de droit;

12.  charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, à la vice-présidente de la Commission/haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, aux gouvernements et aux parlements des États membres, aux institutions de l'Union africaine, au Secrétaire général des Nations unies, au Conseil de sécurité des Nations unies, au Conseil des droits de l'homme des Nations unies, ainsi qu'aux gouvernements et aux parlements des pays de la région des Grands Lacs.

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