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Procédure : 2007/2026(INI)
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Cycle relatif au document : A6-0371/2007

Textes déposés :

A6-0371/2007

Débats :

PV 24/10/2007 - 18
CRE 24/10/2007 - 18

Votes :

PV 25/10/2007 - 7.15
Explications de votes

Textes adoptés :

P6_TA(2007)0486

Compte rendu in extenso des débats
Mercredi 24 octobre 2007 - Strasbourg Edition JO

18. Amélioration de l’exécution des décisions de justice au sein de l’Union européenne: la saisie des avoirs bancaires (Livre vert) (débat)
Procès-verbal
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  La Présidente. - L'ordre du jour appelle le rapport de Kurt Lechner, au nom de la commission des affaires juridiques, sur le Livre vert sur l'amélioration de l'exécution des décisions de justice au sein de l'Union européenne: la saisie des avoirs bancaires [2007/2026(INI)] (A6-0371/2007).

 
  
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  Kurt Lechner, rapporteur. – (DE) Madame la Présidente, ce débat était très intéressant. Nous passons à présent à un sujet très différent. Nous verrons si nous pouvons arriver à un résultat tôt ou tard.

Il y a un dicton qui, je suppose, est compris dans toute l’Europe, à savoir que l’argent ne fait pas le bonheur, mais il permet d’avoir l’esprit tranquille. Dans cet esprit, permettez-moi de souhaiter à tous nos concitoyens en Europe d’avoir l’esprit tranquille.

Cependant, si une autre personne vous doit de l’argent, si quelqu’un vous doit de l’argent à la suite d’une vente, d’un préjudice ou autre, cela est plus souvent source d’inquiétude que de tranquillité d’esprit. Le débiteur va-t-il se soustraire à ses engagements? Va-t-il dissimiler son argent ou ses avoirs, peut-être à une heure encore plus avancée que notre débat de ce soir?

Tous les États membres disposent de procédures qui visent à empêcher ce genre de choses de se produire. Celles-ci comprennent des saisies, des injonctions, des arrestations et des confiscations: il y a beaucoup de termes différents. Les procédures varient énormément et la situation est extrêmement compliquée, et il y aussi le problème de la langue, bien sûr. Quiconque veut recourir aux différentes procédures transfrontalières des États membres pourrait bien découvrir que le cheval s’est sauvé ou, comme nous disons en Allemagne, que le lièvre est déjà de l’autre côté de la colline. Autrement dit, que le débiteur a eu le temps de dissimuler ses avoirs.

C’est actuellement un problème très répandu à travers les frontières européennes, et il devient de plus en plus pressant, étant donné que nous aspirons tous à une zone de paiement unique avec des transactions immatérielles. Cela signifie que les possibilités de dissimuler des avoirs de l’autre côté de la colline sont de plus en plus nombreuses. C’est pourquoi la Commission a pris l’initiative et, je tiens à le souligner, a tout à fait raison de le faire. Elle a présenté un très bon livre vert, qui est complet et détaillé, même si certains points nécessiteront sans doute des éclaircissements. Nous n’en sommes pas encore là, et c’est le but de l’audition. À ce stade, le Parlement européen ne peut pas traiter tous les aspects en détail, et moi non plus, alors je me contenterai de mentionner quelques-uns des points clés.

Tout d’abord, bien que cela aille de soi, le rapport ne porte que sur la saisie et le gel temporaire des avoirs bancaires. Il ne porte pas sur le règlement définitif de la créance. Deuxièmement, il ne porte que sur les avoirs financiers détenus sur des comptes bancaires. Il ne porte pas sur les injonctions ou la saisie d’autres avoirs. Il soulève la question de savoir s’il serait vraiment utile d’harmoniser 27 systèmes différents. Ce serait, selon moi, une approche extrêmement peu maniable et qui prendrait une éternité à mettre en œuvre. Elle empiète sur tellement d’autres domaines qu’elle ne serait pas utile. La bonne approche est celle que la Commission a en tête: une procédure européenne autonome et complémentaire, de préférence sous la forme d’un règlement, qui existerait en parallèle des dispositions nationales, qui resteraient en vigueur. Je devrais, à ce stade, également mentionner le règlement «Bruxelles I». Le règlement qui existe n’est pas adéquat. Le créancier doit non seulement démontrer de manière crédible et sommaire qu’il a une créance, mais aussi démontrer le risque.

Notre principal souci, que je partage, est de protéger le créancier. Ce que je ne veux en aucun cas, c’est une situation dans laquelle des créanciers ou des tiers sont lésés précisément parce que nous avons mis en place une réglementation européenne. Cela se répercuterait sur l’Europe elle-même. Dans certains cas, une saisie injustifiée peut détruire l’existence d’une personne. Je voudrais simplement mentionner les points principaux: qu’un créancier pourrait être responsable des préjudices causés au débiteur, que le créancier devrait être obligé d’introduire la procédure sur le fond dans un délai donné, que le créancier pourrait être tenu de constituer une garantie, que le débiteur devrait avoir le droit d’introduire un recours, qu’une procédure qui prend une éternité, mais qui est largement conforme à la procédure précédente, ne devrait pas être choisie, qu’il devrait exister des dispositions empêchant une surassurance du créancier, et que le débiteur doit se voir garantir le maintien du minimum vital permettant de subvenir à ses besoins.

Il y a le problème des comptes de mandataire. S’il doit y avoir une possibilité de saisie dans ce domaine – et je laisserai cette possibilité ouverte – ils doivent assurément bénéficier d’une protection spéciale. Il en va de même pour les comptes communs, même si ce n’est pas la même chose; en fait, les deux ne sont pas directement liés. Le fait est qu’il est également important de protéger les tiers, et des mesures de protection spéciales sont requises pour les tiers impliqués.

Je voudrais juste signaler que des notifications formelles standardisées seraient utiles pour les communications bancaires et, à cet égard, je voudrais conclure en disant que des études comparant les législations en vigueur ainsi que des analyses détaillées sont indubitablement requises. Je voudrais également remercier, en particulier, la Commission pour ces analyses et études exhaustives, ainsi que mes collègues. Nous avons fait du bon travail ensemble. Je suppose qu’il y aura un large consensus en faveur du rapport.

 
  
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  Franco Frattini, vice-président de la Commission. − (EN) Madame la Présidente, je pense que ce rapport apporte une contribution intéressante à l'examen d'une question très complexe: le recouvrement de créances transfrontalier. J'estime que le rapporteur, M. Lechner, doit être félicité pour avoir préparé la voie en vue d'une solution européenne générale à l'actuelle fragmentation des règles nationales en matière d'exécution des décisions, un problème qui entrave considérablement le recouvrement de créances transfrontalier.

Cette situation est particulièrement préoccupante pour un créancier qui aurait la malchance de voir son débiteur transférer rapidement son argent au départ d'un compte connu vers un autre compte établi dans le même ou un autre État membre. La Commission accueille donc favorablement ce rapport du Parlement.

J'examinerai avec grande attention les principales préoccupations exprimées par le rapporteur et le Parlement en rapport avec le contenu du Livre vert. En particulier, la forme et le champ d'application de l'éventuel instrument communautaire, les effets de la future procédure correspondante, la condition légale de la délivrance d'une ordonnance de saisie, le remboursement des coûts et la protection des débiteurs constituent d'importantes questions qui ont été mises en évidence par le rapporteur. Je peux vous confirmer que toute proposition ou communication dans ce domaine sera précédée d'une évaluation et d'une étude d'incidence approfondies, à mener en étroite coopération avec ce Parlement.

 
  
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  Sharon Bowles (ALDE), rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et monétaires. – (EN) Madame la Présidente, j'accueille favorablement ce Livre vert et attend avec impatience les suites qui en seront données sous la forme de propositions plus concrètes.

Il est clair que, si l'on tient à favoriser le commerce transfrontalier des entreprises, celles-ci doivent pouvoir compter sur une procédure de recouvrement des créances. Les citoyens ont aussi besoin de cette confiance, au niveau individuel et privé. Mon avis a recueilli un soutien unanime en commission des affaires économiques et monétaires, non pas au terme de compromis âprement négociés mais parce qu'une vision commune était présente dès le départ. Je me réjouis de constater que presque tout ce que nous avions adopté a pu être intégré ou abordé dans le rapport final de la commission des affaires juridiques, dont je remercie le rapporteur.

Deux points qui n'ont pas été repris dans ce rapport étaient la possibilité de réaliser des saisies sur comptes joints, et l'examen de la possibilité d'employer la procédure transfrontalière à l'intérieur des États membres. D'une façon moins prescriptive, il y a un amendement concernant les comptes joints qui a recueilli un certain soutien ailleurs. Nous avons clairement affaire à une lacune si un compte joint nominal permet d'échapper à une ordonnance de saisie, mais il importe de protéger les fonds des tiers réels.

Concernant la possibilité d'employer la procédure transfrontalière à l'intérieur des États membres, je note ce que les collègues de la commission des affaires juridiques ont dit à propos de l'utilisation de la procédure qui ne serait possible qu'au niveau transfrontalier, que ce soit pour des raisons juridiques ou des raisons pratiques tenant à l'atteinte de résultats dans un délai raisonnable. Néanmoins, à moins que des recours alternatifs n'existent dans les États membres où la saisie est impossible ou extrêmement difficile, il pourrait y avoir discordance concurrentielle, du moins du point de vue commercial, avec la situation plutôt inhabituelle d'une entreprise transfrontalière mieux lotie qu'une entreprise de l'État membre en question. Les États membres pourraient peut-être prendre note de cette observation car la concurrence pourrait réaliser ce que nous ne réglementons pas ou ne pouvons réglementer.

 
  
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  Panayotis Dimitriou (PPE-DE), rapporteur pour avis de la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures. – (EL) Madame la Présidente, je salue l’initiative de la Commission sur la réglementation transfrontalière de la saisie et du gel temporaire des avoirs bancaires. Je vous félicite vous en particulier, Monsieur Frattini, en tant que commissaire compétent dans le cadre de cette initiative.

Le livre vert de la Commission sur ce sujet a défini des procédures en vue de faire face au problème qui survient lorsque des décisions de justice ne sont pas exécutées en raison d’opérations ou de transferts d’avoirs bancaires en dehors des frontières nationales.

La mesure dont nous débattons s’inscrit dans la stratégie de développement d’une coopération judiciaire entre les États membres de l’UE. Cette mesure est un pas dans la bonne direction; elle doit être mise en œuvre prochainement avec la présentation d’une proposition adéquate. La cause de la justice n’est pas servie si les décisions de justice civiles ou pénales ne peuvent être exécutées. Pour cette raison, la proposition relative à la saisie et au gel des avoirs bancaires transfrontaliers qui est en cours d’examen contribue réellement à l’évolution et à la consolidation de la justice. Le Parlement européen voit, à juste titre, d’un bon œil l’initiative de la Commission et la procédure judiciaire en préparation.

Le rapport Lechner et les avis de la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures et de la commission des finances exposent les paramètres de base de la préparation d’une proposition de décision du Conseil équilibrée sur ce sujet.

Je félicite M. Lechner pour son rapport succinct, mais très informatif et très complet. En tant que rapporteur pour la commission des libertés civiles, mes positions coïncident, pour l’essentiel, avec presque toutes les siennes.

Le rapport devrait être adopté à une écrasante majorité. Il souligne la nécessité de remplir les conditions de délivrance d’une ordonnance de saisie d’avoirs bancaires transfrontalière. Il souligne également la nécessité concomitante de protéger la procédure des abus et d’apporter des garanties de compensation au débiteur présumé si son ordonnance s’avère être nulle et non avenue.

Je crois qu’une ordonnance de saisie peut servir, au terme de la procédure judiciaire, de mesure d’exécution en vue d’une décision d’exequatur définitive. Ce n’est pas l’avis de M. Lechner, mais cela devra être pris sérieusement en considération lorsque la proposition de la Commission correspondante sera présentée, afin d’empêcher la duplication inutiles des procédures.

J’invite la Commission à commencer immédiatement à préparer la proposition sur ce sujet.

 
  
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  Tadeusz Zwiefka, au nom du groupe PPE-DE. – (PL) Madame la Présidente, Monsieur le Commissaire, une faiblesse incontestable des actuelles dispositions de la législation d’exécution est la situation dans laquelle, après avoir vérifié la force exécutoire d’une décision de justice dans un autre État membre, l’exécution reste la compétence exclusive de la législation nationale. En vertu des actes juridiques communautaires actuellement en vigueur, il n’y a aucun moyen d’obtenir une ordonnance de saisie d’avoirs bancaires qui pourrait être exécutée sur tout le territoire de l’Union européenne.

C’est pourquoi un système européen d’ordonnance autorisant la saisie d’avoirs bancaires semble être une solution si adéquate et si nécessaire. Cela permettrait aux créanciers de garantir les montants dus ou la valeur de leur créance en rendant impossible le retrait ou le transfert de fonds déposés sur un ou plusieurs comptes bancaires sur tout le territoire de l’Union européenne. Un tel système devrait être créé après la mise en place d’une procédure autonome complémentaire qui existerait en parallèle des dispositions nationales et ne s’appliquerait qu’aux affaires transfrontalières. Il est utile de souligner qu’une telle ordonnance n’aurait qu’un effet préventif. En d’autres termes, elle bloquerait les fonds du débiteur sur le compte bancaire de ce dernier, sans les transférer sur le compte du créancier.

Le tribunal doit bien sûr s’abstenir d’entendre ou d’informer le débiteur de la procédure avant de saisir ses avoirs bancaires, faute de quoi l’effet obtenu pourrait être l’inverse de celui escompté.

Le montant à saisir devrait être calculé sur la base de la créance du créancier. Il faut cependant souligner que le débiteur doit avoir le droit d’introduire un recours contre l’ordonnance délivrée, et l’institution compétente pour traiter ce recours devrait être le tribunal qui a délivré l’ordonnance.

Il faut également prévoir des dérogations à l’exécution, afin de pouvoir répondre aux besoins de base du débiteur et de sa famille. Il est clair qu’à ce stade, une analyse juridique comparative est requise, car de nombreux aspects nécessitent une étude plus approfondie. Reste néanmoins que l’introduction d’une procédure juridique communautaire telle que l’ordonnance européenne de saisie des avoirs bancaires, qui vise à rationaliser l’exécution des créances monétaires, et à en améliorer l’efficacité, serait une étape importante sur la voie de la création d’un espace économique et judiciaire européen.

En conclusion, je voudrais féliciter M. Lechner pour son rapport remarquable et bien préparé. L’Assemblée doit évidemment être bien consciente de la difficulté de modifier les dispositions communautaires, en particulier dans ce domaine.

 
  
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  Manuel Medina Ortega, au nom du groupe PSE. – (ES) Madame la Présidente, je voudrais commencer par féliciter mon collègue, M. Lechner, pour l’excellent rapport qu’il a produit: il est à la fois équilibré et modéré.

Ici, à cette heure avancée, je ne peux m’empêcher de penser à ce que la saisie signifie. En pratique, dans la vie de tous les jours, les créanciers sont normalement de grandes institutions qui ont un grand pouvoir économique, alors que les débiteurs sont généralement des personnes dans une situation économique beaucoup plus faible. En fait, un des plus beaux poèmes en langue espagnole est dédié à la saisie d’un pauvre et malheureux travailleur.

Il est vrai que sans saisie – si les créanciers n’avaient pas la possibilité de recouvrer leur créance – ceux qui ont besoin d’un crédit ne pourraient pas l’obtenir. Comme je pense que nous nous ennuyons tous un peu, je vais vous raconter l’histoire de l’un de nos dictateurs en Espagne, le général Primo de Rivera. Il pensait que la saisie des avoirs du personnel militaire était une insulte à la profession militaire. Il avait donc interdit la saisie des avoirs du personnel militaire. En conséquence, les banques refusaient de prêter de l’argent aux militaires, et les militaires ont alors dû demander au général qu’il autorise à nouveau la saisie de leurs avoirs.

Ce n’est qu’une histoire, cela dit. Je crois que M. Lechner est parvenu à trouver un équilibre en termes de protection des droits du débiteur, mais j’ai encore une question, et M. Frattini appréciera probablement ce que je veux dire à cet égard.

Au fond, les grands débiteurs, les personnes qui sont impliquées dans de grandes opérations financières et qui finissent par devoir des milliards à des milliers de personnes sans défense, ces grands débiteurs n’ont généralement pas de comptes bancaires en Belgique, à Bruxelles, à Strasbourg ou même à Londres. Souvent, leurs comptes bancaires se trouvent dans des paradis fiscaux.

Ce problème n’est bien sûr pas couvert par les dispositions du livre vert de la Commission. Cependant, comme je sais que le commissaire Frattini s’intéresse à ce sujet, je vais lui poser la question: ne serait-il pas souhaitable de trouver un moyen de faire en sorte que les avoirs de ces grands criminels internationaux qui ruinent les vies de milliers de familles puissent également être saisis?

Comme je l’ai dit, c’est un scénario qui n’entre pas dans le domaine couvert par le livre vert, ni par le débat de ce soir. Cependant, étant donné que les principaux points semblent déjà avoir été abordés de manière très claire par les orateurs précédents et par le commissaire Frattini lui-même, je pense que c’est quelque chose que nous devons examiner. Je suis sûr que le commissaire Frattini aura quelque chose à ajouter à cet égard.

En conclusion, je voudrais juste réitérer une fois encore mes félicitations à M. Lechner: je pense qu’il a produit un rapport équilibré et que la position des débiteurs, des pauvres débiteurs, autrement dit, la majorité des citoyens, est garantie. J’espère que la Commission nous présentera bientôt un texte législatif qui permettra au marché du crédit transfrontalier de continuer à fonctionner.

 
  
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  Diana Wallis, au nom du groupe ALDE. – (EN) Madame la Présidente, je voudrais moi aussi féliciter M. Lechner pour son rapport. Permettez-moi de commencer mon intervention en faisant, pour ainsi dire, une confession. Avant d'entrer dans cette Assemblée, j'étais avocate spécialisée, à vrai dire, dans le recouvrement de créances, souvent transfrontalier.

Mon expérience dans ce domaine me fait dire que les plus gros dégâts sont subis par les petites entreprises qui se sont courageusement lancées dans le négoce transfrontalier, pour ensuite se faire ruiner par une créance irrécouvrable et un débiteur professionnel qui se cache dans un autre pays. Je considère donc cette initiative comme un moyen, si nous parvenons à en faire quelque chose d'efficace, de stimuler l'économie de l'Europe et d'encourager le commerce transfrontalier.

Nous devons nous montrer déterminés. L'ordre de paiement était un pas dans la bonne direction. La présente initiative constitue le pas suivant. Néanmoins, j'aurais deux points à soulever. Tout d'abord, nous parlons uniquement de cas transfrontaliers. Nous acceptons la réalité de cette contrainte mais ce que je refuse de voir, c'est la situation où des créanciers doivent introduire deux requêtes auprès des tribunaux: l'une au sujet des débiteurs dans le pays de départ, suivie d'une autre requête – transfrontalière – dans un autre pays. Cette double démarche peut constituer un avertissement pour le débiteur et causer toutes sortes de complications. Nous devons donc veiller à ce que des procédures concordantes soient disponibles.

Deuxièmement, il s'agit bien sûr d'atteindre un équilibre entre les intérêts des créanciers et ceux des débiteurs. En Angleterre, nous avons un bon système: celui à qui on accorde une telle mesure intermédiaire doit s'engager devant le tribunal à verser des dommages-intérêts, cela dans le but de protéger les intérêts de la tierce partie. Celle-ci peut être la banque chargée d'organiser la saisie, ou une tierce partie éventuellement titulaire d'un compte joint. Je recommanderais un système de ce type.

J'approuve ce rapport et les idées qu'il contient. Je crois qu'il pourrait s'avérer très utile pour stimuler l'économie de l'Europe si nous parvenons à en faire quelque chose d'efficace.

 
  
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  Marek Aleksander Czarnecki, au nom du groupe UEN. – (PL) Madame la Présidente, le Livre vert sur l’amélioration de l’exécution des décisions de justice dans l’Union européenne représente une étape supplémentaire dans le développement d’un espace européen de justice. Je souscris au point de vue mis en avant par le rapporteur dans ce rapport et je soutiens l’introduction d’une procédure rapide et efficace en vue de l’obtention d’une ordonnance de saisie d’avoirs bancaires dans l’Union européenne. Dans le contexte de l’intégration en cours dans l’Espace unique de paiement en euros, une disposition juridique de cette nature semble opportune et souhaitable.

Au vu des nombreuses difficultés inhérentes aux enquêtes relatives au recouvrement de créances, je crois que l’Union européenne devrait introduire une procédure autonome complémentaire en parallèle des dispositions nationales. Cette procédure ne devrait s’appliquer que dans les affaires transfrontalières et ne concerner que les fonds qui se trouvent sur des comptes bancaires et non d’autres avoirs. Il s’agit simplement de garantir provisoirement la créance d’un créancier, pas de la régler définitivement. Des saisies injustifiées pourraient avoir de graves conséquences pour le débiteur et avoir un impact négatif sur la confiance dans le système judiciaire européen.

Je crois dès lors qu’il faut apporter un soin particulier à la protection du débiteur. Cela pourrait se traduire, par exemple, par la constitution d’une garantie par le créancier, par le droit de contester l’ordonnance, par la limitation du montant dû ou même par l’obligation pour le créancier de présenter une demande en vue d’intenter une procédure judiciaire concernant l’action principale.

 
  
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  Lidia Joanna Geringer de Oedenberg (PSE). (PL) Madame la Présidente, les dispositions relatives à la législation d’exécution sont souvent décrites comme le talon d’Achille du système judiciaire européen en matière civile. À ce jour, aucune proposition législative n’a été présentée concernant les moyens concrets d’exécuter les décisions de justice. Exécuter l’ordonnance d’un tribunal après avoir établi sa force exécutoire dans un autre pays relève encore exclusivement du droit national.

Les actuelles variations entre les principes de recouvrement de dettes dans les différents États membres de l’Union européenne entravent sérieusement le recouvrement des créances transfrontalières. Les créanciers qui veulent faire exécuter une ordonnance dans un autre pays sont confrontés à des systèmes judiciaires et à des dispositions juridiques qu’ils ne connaissent pas. Ils doivent également faire face à la barrière de la langue, qui implique des coûts supplémentaires et retarde la procédure d’exécution. Les difficultés relatives au recouvrement de créances transfrontalières entravent la libre circulation des ordres de paiement au sein de l’Union et ont un impact négatif sur le bon fonctionnement du marché intérieur. Les payements qui sont retardés ou jamais exécutés compromettent les intérêts des entreprises comme ceux des consommateurs.

La proposition de la Commission d’introduire un instrument juridique européen unique qui serait indépendant des législations nationales et fonctionnerait en parallèle de celles-ci semble dès lors tout à fait appropriée, sinon essentielle. L’article 65, point c), du Traité instituant la Communauté européenne pourrait servir de base juridique à ce document.

À cet égard, en vertu des dispositions du livre vert, le créancier devrait avoir le droit d’introduire une demande afin qu’une ordonnance de saisie d’avoirs bancaires soit délivrée avant le début de la procédure principale. Au vu de la nature provisoire de la procédure, le créancier devrait toutefois être tenu de justifier sa créance ainsi que la nécessité urgente de délivrer une ordonnance de saisie. Une saisie injustifiée peut, bien sûr, avoir de graves conséquences pour un débiteur, et peut même priver ce dernier des moyens nécessaires pour couvrir ses besoins de base.

Parmi les autres points importants se trouvent le droit du débiteur de contester l’ordonnance et la fixation du montant à payer. Fixer une limite unique au montant à exempter de l’exécution au niveau de l’Union européenne ne semble pas être une bonne idée. Ce genre de décisions devrait continuer à relever de la compétence du système judiciaire du pays d’origine du débiteur.

En ce qui concerne l’exécution des ordonnances de saisie d’avoirs bancaires, il est important de veiller à ce que des normes uniformes en matière de communication entre les tribunaux et les banques soient mises en place au sein de l’Union européenne. Il semble essentiel de réglementer la question du recouvrement des créances transfrontalières en adoptant un acte juridique opportun. Il est toutefois important de ne pas négliger la nécessité de d’abord entreprendre une étude approfondie des dispositions déjà en vigueur dans les différents pays de la Communauté et d’évaluer l’efficacité de solutions alternatives en ce qui concerne les dispositions européennes.

Je voudrais conclure en remerciant M. Lechner pour son rapport bien étudié et bien préparé.

 
  
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  Andrzej Jan Szejna (PSE). (PL) Madame la Présidente, le problème de l’exécution effective des créances monétaires sur le territoire de l’Union européenne est très important pour le bon fonctionnement du marché intérieur. Il est utile d’envisager une action communautaire à cet égard. Il y a un dicton très important que l’on m’a bien fait comprendre quand j’étais avocat stagiaire, selon lequel lorsque l’on fait une faveur à quelqu’un, on devient redevable envers cette personne. C’est parfois vrai. Retarder des paiements ou ne pas les effectuer compromet les intérêts des entreprises comme ceux des consommateurs. Les différences d’efficacité en matière de recouvrement de créances qui existent actuellement au sein de l’Union européenne peuvent menacer la compétitivité d’entreprises dont les activités s’étendent au-delà des frontières d’un État membre donné.

Les systèmes d’exécution des décisions de justice diffèrent d’un État membre à l’autre. Ils sont plus efficaces dans certains États que dans d’autres. Dans l’état actuel des choses, un débiteur peut presqu’instantanément transférer des fonds de comptes connus du créancier vers d’autres comptes dans le même pays ou dans un autre État membre. Cela rend pratiquement impossible pour les créanciers de bloquer ces fonds. En outre, les créditeurs qui veulent faire exécuter une décision de justice dans un autre État membre sont confrontés à un système judiciaire et à des exigences procédurales différents. La barrière de la langue et le coût de la procédure constituent des obstacles supplémentaires.

Je crois dès lors que nous devrions répondre positivement à la proposition de créer un système européen de saisie des avoirs bancaires. Gardant à l’esprit l’intégration en cours dans l’Espace unique de paiement en euros, une réglementation juridique de ce type est à la fois appropriée et essentielle. Je voudrais remercier M. Lechner pour son rapport. Je suis sûr qu’il constituera un tournant dans le système judiciaire de l’Union.

 
  
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  Franco Frattini, vice-président de la Commission. − (IT) Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, juste une brève remarque au sujet des commentaires de M. Medina Ortega ainsi que pour remercier tous les intervenants. Cet instrument européen, cette ordonnance de saisie européenne dont nous parlons, pourrait vraiment compléter les législations nationales et ainsi faire face aux infractions sérieuses aux droits des créanciers qui se produisent au niveau transnational.

Je suis tout à fait d’accord avec M. Medina Ortega sur le fait que nous devons réfléchir à la saisie, ou à la protection, d’une certaine manière, des personnes qui vont chercher refuge dans les paradis fiscaux.

Comme vous le savez tous, l’Europe n’a clairement pas le pouvoir unilatéral d’agir. Ce à quoi nous devons, selon moi, nous atteler, c’est à une coopération plus étroite entre les systèmes judiciaires, les autorités d’enquête financière et les grands groupes banquiers qui opèrent dans ces paradis fiscaux. Nous devons convaincre les gouvernements de ces pays qu’il est en fin de compte dans leur intérêt de coopérer avec l’Union européenne.

Par conséquent, même si nous ne disposons pas d’un instrument actif dans un avenir proche, un instrument unilatéral en vue de contrer le système des paradis fiscaux, nous devrions pouvoir utiliser l’instrument de la démocratie, d’une part, et celui de la coopération judiciaire et financière, d’autre part, pour nous attaquer à ce qui est un problème très réel.

 
  
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  La Présidente. – Le débat est clos.

Le vote aura lieu jeudi 25 octobre 2007.

 
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