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Procédure : 2008/2696(RSP)
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Textes déposés :

RC-B6-0629/2008

Débats :

PV 18/12/2008 - 13.2
CRE 18/12/2008 - 13.2

Votes :

PV 18/12/2008 - 14.2
CRE 18/12/2008 - 14.2

Textes adoptés :

P6_TA(2008)0641

Compte rendu in extenso des débats
Jeudi 18 décembre 2008 - Strasbourg Edition JO

13.2. Nicaragua
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Procès-verbal
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  La Présidente. - L’ordre du jour appelle le débat relatif aux six propositions de résolution sur le Nicaragua(1).

 
  
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  Marios Matsakis, auteur. (EN) Madame la Présidente, la liberté d’expression, l’indépendance de la justice et la protection des bases démocratiques semblent menacées dans ce pays d’Amérique latine. Il est de notre devoir, en tant que parlementaires européens, de défendre les droits du peuple nicaraguayen et d’envoyer au gouvernement du Nicaragua le message clair que nous ne tolérerons aucune violation de ces droits et que nous veillerons à ce que l’UE et l’ONU exercent toute la pression nécessaire à la sauvegarde et au respect des droits de l’homme des citoyens du Nicaragua.

J’espère que ce message, inscrit dans cette proposition de résolution, sera entendu haut et fort par les personnes concernées et que les mesures nécessaires seront prises dans l’urgence afin de remédier à cette situation.

 
  
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  Manuel Medina Ortega, auteur.(ES) Nous devons prendre en considération plusieurs facteurs dans cette proposition de résolution sur le Nicaragua. Tout d’abord, il y a des allégations de fraude – au moins dans les deux municipalités de Nicaragua et León – qui ternissent les résultats des élections du 9 novembre. Par ailleurs, il y a un gouvernement qui tente de résoudre certains problèmes qui affaiblissent les droits de l’homme en Amérique latine, à savoir la pauvreté, l’illettrisme, la mortalité infantile, la disponibilité d’eau potable et le manque de titularisation des terres indigènes.

Lorsque nous examinons la situation, nous devons donc établir une claire distinction entre ces deux aspects. D’une part, nous devons stimuler et défendre les droits de l’homme, dans leur sens traditionnel, en tant que droits politiques, et d’autre part nous devons encourager le gouvernement du Nicaragua à continuer à soutenir les secteurs les plus défavorisés dans le pays. Nous devons aussi, bien entendu, veiller à ce que l’opposition puisse remplir son rôle, prendre position contre la fraude, et soutenir le travail des ONG. Le résultat doit néanmoins être équilibré.

Le groupe socialiste au Parlement européen a déposé une série de propositions d’amendements oraux en vue d’aboutir à un texte final plus équilibré concernant les allégations de violations de droits fondamentaux, la nécessité ou non de lancer des enquêtes criminelles, et le nombre de municipalités dans lesquelles on a effectivement observé l’une ou l’autre irrégularité.

Pour résumer, nous entendons condamner les prétendues violations de droits fondamentaux politiques, mais sans tomber dans l’extrême consistant à placer le gouvernement du Nicaragua dans une situation difficile, et ce afin de lui permettre de continuer à remplir son rôle de soutien des couches défavorisées de sa société.

 
  
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  Pedro Guerreiro, auteur. – (PT) Madame la Présidente, comme il l’a déjà fait avec d’autres pays ayant pris des dispositions pour affirmer et défendre leur souveraineté nationale et leur indépendance – à savoir leur droit de décider de leur présent et de leur avenir – et ayant mis en place un plan d’émancipation, de progrès social et de solidarité avec les peuples du monde, le Parlement européen s’engage dans une énième tentative d’ingérence inacceptable et méprisable, cette fois-ci vis-à-vis du Nicaragua.

Ce débat et cette proposition de résolution visent simplement à cautionner ouvertement ceux qui soutiennent et encouragent les tentatives d’ingérence et de déstabilisation à l’égard d’un État démocratique et souverain comme le Nicaragua. Au lieu de déformer la situation et les faits et de donner des leçons de démocratie au Nicaragua, le Parlement européen ferait mieux de dénoncer la tentative anti-démocratique de l’UE d’imposer une proposition de traité européen, qui a déjà été rejetée, au mépris total des décisions démocratiques souveraines des peuples français, néerlandais et irlandais.

Au lieu de se mêler d’une question qui concerne uniquement le peuple nicaraguayen, le Parlement européen aurait dû rejeter l’inhumaine directive retour, qui enfreint les droits de l’homme des immigrants, dont beaucoup sont originaires d’Amérique latine, et devrait dénoncer la complicité de l’UE avec les vols criminels de la CIA.

Au lieu d’imiter l’ingérence préconisée par les États-Unis, le Parlement européen devrait dénoncer le chantage inacceptable de l’UE à l’égard du Nicaragua et exiger qu’elle honore les engagements qu’elle a pris envers ce pays.

Ce qui dérange vraiment les artisans de cette initiative, c’est que le Nicaragua est déterminé à améliorer les conditions de vie de ses citoyens en termes de nutrition, de santé et d’éducation, en soutenant les plus défavorisés. La meilleure dénonciation de cette tentative d’ingérence du Parlement européen est l’attitude des peuples d’Amérique latine, qui reconnaissent la légitimité du Nicaragua et affichent leur solidarité avec ce pays. Permettez-moi de me répéter: cessez de prétendre que vous pouvez donner des leçons à la planète entière.

 
  
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  Leopold Józef Rutowicz, auteur. – (PL) Madame la Présidente, le Nicaragua est un pays très petit, pauvre et criblé de dettes, dont le revenu par habitant est très faible.

Ce pays n’a jamais eu beaucoup de chance. Il a été gouverné par des groupes aux multiples appartenances politiques, occupé par des troupes américaines et coincé entre Cuba, l’URSS et les États-Unis. En plus de cela, ce pays a été ravagé par des sécheresses et dévasté par des ouragans, l’un d’entre eux – probablement le plus connu et le plus puissant au monde - ayant causé la mort de 6 000 personnes en 1999. Des changements politiques et des luttes de pouvoir ont nui au développement du Nicaragua, comme à celui de beaucoup de pays sud-américains et africains. Cette situation a engendré des violations des droits de l’homme et la mise en place d’une législation contraire aux conventions internationales.

En venant en aide à la population de ce pays, l’Union européenne estime qu’il est nécessaire d’introduire les principes de démocratie dans le mode de gouvernement et d’adapter sa législation afin de la rendre conforme aux conventions internationales. S’il avait un gouvernement démocratique, le Nicaragua pourrait adhérer à l’Union des pays d’Amérique du sud, qui pourrait devenir à l’avenir l’allié de l’Union européenne sur le plan géopolitique. Dans le cadre du processus de démocratisation, il est important que la classe politique du Nicaragua prenne les dispositions mentionnées dans la résolution, à laquelle je souscris.

 
  
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  Raül Romeva i Rueda, auteur.(ES) La protection des droits des défenseurs des droits de l’homme n’est pas selon moi une question qui peut faire l’objet d’une quelconque division fondée sur les préférences politiques. Cette Assemblée a trop souvent tendance à prononcer des jugements très sévères à l’égard de ceux avec qui nous ne partageons pas certains idéaux politiques, et à défendre trop vigoureusement ceux que nous considérons comme des alliés.

Je tiens à souligner que la question des droits de l’homme doit être examinée dans une perspective universelle.

Le risque que nous encourons aujourd’hui figure également dans la résolution sur le Nicaragua qui a été déposée par certains groupes politiques.

Nous devons garder le contexte à l’esprit. Ce contexte révèle un pays en situation de pauvreté contre laquelle il faut lutter grâce à des mesures structurelles radicales. Il me semble que le gouvernement actuel du Nicaragua prend un grand nombre des dispositions qui s’avèrent nécessaires pour tenter de venir à bout de ce problème.

Il importe également de rappeler, toutefois, que la lutte contre la pauvreté ne peut pas être compatible avec la persécution et le harcèlement de personnes qui, pour l’une ou l’autre raison, ne sont pas d’accord avec la position officielle.

La vraie démocratie est celle qui accepte le désaccord, le débat et la liberté d’expression.

Quelques événements dignes d’intérêt ont émaillé l’actualité récente au Nicaragua. Certains d’entre eux sont positifs, comme l’abolition en juillet de l’article 204 du droit pénal, qui criminalisait l’homosexualité. En tant que vice-président de l’Intergroupe sur les droits LGBT au Parlement européen, je m’en félicite.

D’autres, cependant, sont négatifs et profondément inquiétants, à l’image des nombreux exemples regrettables concernant la détérioration de la situation des femmes. Il est question en particulier de la persécution des femmes qui défendent leurs droits sexuels et génésiques, notamment en aidant une jeune victime de viol à avorter pour sauver sa vie.

Nous ne devons jamais perdre cela de vue dans le cadre des négociations actuelles en vue de conclure un accord d’association. Néanmoins, j’invite également la Commission à consulter le Parlement avant de prendre une décision en la matière.

 
  
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  Fernando Fernández Martín, auteur.(ES) Le débat d’aujourd’hui est consacré à la situation qu’ont générée au Nicaragua les attaques contre les militants des droits de l’homme, les libertés civiles et la démocratie.

Je ne dois pas vous rappeler les noms de Zoilamérica, d’Ernesto Cardenal, de Carlos Mejía Godoy, de Jarquín, de Sergio Ramírez, ou de tant d’autres Nicaraguayens qui ont le sentiment aujourd’hui que leurs espoirs d’un Nicaragua meilleur ont été trahis.

En novembre 2006, M. Ortega demandait aux Nicaraguayens ce qu’il appelait une nouvelle chance, et ceux-ci la lui ont donnée par voie démocratique. Nous savons aujourd’hui pourquoi il la souhaitait. Depuis lors, l’arbitraire, le népotisme et la corruption se sont emparés des institutions du gouvernement, avec comme point culminant la fraude électorale lors du scrutin du 9 novembre. Avant cela, des décisions très graves avaient été prises, par exemple l’annulation du statut juridique de certains partis de l’opposition, ou des menaces et intimidations adressées à des membres de la société civile, à des journalistes et aux médias.

Le président Ortega a qualifié les gouvernements de l’Union européenne de mouches qui pullulent sur les immondices et l’aide étrangère de miettes. Il s’est vite rendu compte qu’il n’y avait pas suffisamment de pétrole vénézuélien pour s’en sortir sans aide au développement.

Alors que nous nous préparons à entamer une phase décisive des négociations en vue d’un accord d’association entre l’Union européenne et l’Amérique centrale, le gouvernement nicaraguayen doit comprendre que nous serons toujours son allié et son ami, mais que le respect des droits de l’homme, de la liberté d’expression et de la démocratie est une condition à laquelle nous ne dérogerons jamais, car nous croyons que c’est avant tout le peuple nicaraguayen qui en bénéficie.

 
  
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  Josu Ortuondo Larrea (ALDE).(ES) Le Nicaragua a organisé des élections municipales le 9 novembre de cette année. Comme lors de précédentes occasions, la légitimité démocratique du processus électoral a été remise en cause. Des allégations de fraude ont été formulées et des manifestations ont débouché sur des affrontements entre les partisans des différents partis politiques. De nombreuses personnes ont été blessées et la crise politique dans laquelle le pays est plongé s’enlise.

Deux partis politiques n’ont pas pu présenter des candidats aux élections locales. C’est inacceptable, parce que c’est une violation du droit fondamental à la participation politique accordé à tous les citoyens.

En outre, nous avons appris de source directe, par des représentants d’organisations de défense des droits de l’homme, la tendance actuelle de la société civile à remettre en question le système judiciaire, les mécanismes de répression administrative qui ont conduit 17 organisations de mouvement social devant les tribunaux, et les actes de harcèlement dont sont victimes des journalistes indépendants et même la délégation de la Commission européenne.

Toutes ces raisons doivent nous inciter à élever la voix en exhortant d’abord les partis politiques à condamner les actes de violence perpétrés par leurs partisans, et ensuite le gouvernement lui-même à rouvrir des espaces de participation démocratique, à respecter la liberté d’expression, à ne plus interdire les manifestations, et à autoriser toutes les ONG à bénéficier d’une aide internationale à la coopération et pas uniquement de l’aide du Venezuela en faveur d’associations pro-gouvernementales.

En outre, ils devraient abroger la criminalisation des avortements thérapeutiques lorsque la vie de la mère est menacée.

Enfin, dans le contexte des négociations sur l’accord d’association entre l’Amérique centrale et l’UE, nous invitons la Commission à rappeler au Nicaragua qu’il doit respecter les principes de l’État de droit, de la démocratie et des droits de l’homme. Cela ne doit cependant pas empêcher l’Europe de fournir une aide au développement et à la prospérité du peuple nicaraguayen, car nous leur souhaitons le meilleur avenir possible.

 
  
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  Jacques Barrot, vice-président de la Commission. − Madame la Présidente, la situation politique au Nicaragua s’est aggravée à l’approche des élections locales du 9 novembre dernier. Les nombreuses démarches et les appels au calme en provenance de la communauté internationale et, en particulier, des missions de l’Union européenne et de la Commission ont été ignorés.

Après le vote, les circonstances entourant le dépouillement et l’annonce des résultats ont donné lieu à une crise avec le principal parti de l’opposition. Le parti libéral constitutionnaliste rejette les résultats et dénonce une fraude massive. Des mouvements citoyens, l’Église et les associations d’entrepreneurs, la communauté internationale ont demandé la révision des résultats ou l’organisation de nouvelles élections. Par ailleurs, les institutions politiques et, en particulier, le parlement sont restés bloqués du fait du manque d’accord entre les deux principales parties.

Les rapports de nos chefs de mission sur place et le rapport des experts électoraux détachés par la Commission ont fait état de violations des lois électorales et des conventions internationales. En accord avec les États membres et après consultation d’autres partenaires, la Commission a envoyé, le 10 décembre, une lettre aux autorités nicaraguayennes pour offrir son appui à toute solution concertée entre les forces politiques du pays afin de sortir de la crise et de restaurer la confiance des citoyens envers les institutions démocratiques. Cette lettre annonçait, par ailleurs, la suspension à partir du 1er janvier 2009, des déboursements des programmes d’appui budgétaire, ainsi que l’ouverture d’une période de consultation avec les autorités nicaraguayennes sur la situation actuelle et les modalités de réorientation de la coopération européenne avec le pays.

Je dois préciser d’ailleurs que la Commission n’a pas retiré son aide de 2008 pour le Nicaragua – 20 millions d’euros ont été distribués, y compris l’aide humanitaire d’urgence – et tout ce qui avait été prévu pour cette année sera payé dans la mesure où les conditions inhérentes à chaque projet seront respectées.

Pour l’année 2009, les 57 millions d’euros prévus comme appui budgétaire ne sont pas retirés mais suspendus. La coopération sera dirigée vers des programmes et des activités qui garantissent que l’aide arrivera directement aux bénéficiaires, à la population nicaraguayenne, sans passer par l’intermédiaire du gouvernement.

J’ajoute que le ministre des affaires étrangères, Samuel Santos, par lettre adressée à la commissaire Ferrero-Waldner, le 12 décembre, a fait savoir son désaccord avec la mesure. Il a réaffirmé la validité des résultats et a montré sa disponibilité à un dialogue sur la coopération que la Commission entend mener dans les plus brefs délais.

Enfin, pour répondre à une des interventions, je dirais que la Commission, évidemment, espère que la crise actuelle sera résolue dans les meilleurs délais et, en tout état de cause, l’accord d’association Union européenne-Amérique centrale consacre, à maintes reprises, l’importance attachée par les parties au respect des principes et valeurs démocratiques et à la bonne gouvernance. Les négociations concernant cet accord d’association constitueront une opportunité pour approfondir la discussion sur ces principes, y compris sur leur application dans la pratique.

Voilà les renseignements que je suis en mesure de vous donner, je sais que Mme Ferrero-Waldner suit très attentivement cette situation avec les services de la Commission.

Je vous remercie et je remercie tous les intervenants d’avoir bien voulu évoquer la situation du Nicaragua.

 
  
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  La Présidente. - Le débat est clos.

Le vote aura lieu à la fin des débats.

Déclarations écrites (article 142)

 
  
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  Kathy Sinnott (IND/DEM), par écrit. Le Nicaragua fait face à de nombreux problèmes urgents: la corruption politique et policière, le manque d’indépendance de la justice, des élections potentiellement frauduleuses, la hausse de la pauvreté, l’illettrisme, un système de soins de santé de piètre qualité. Néanmoins, le fait que le Nicaragua protège ses bébés avant la naissance, contrairement à l’Europe, ne figure pas parmi ses transgressions.

En Europe, nous sommes suffisamment prospères pour prendre soin de nos mères et de nos bébés, mais nous autorisons que plus d’un million de bébés soient tués avant la naissance. Le Nicaragua est pauvre mais tend les bras à sa progéniture. Malgré tous ses problèmes, le Nicaragua a un avenir démographique, alors que l’Europe, qui dénonce le Nicaragua, connaît un rude hiver démographique.

Nous devons aider le Nicaragua à instaurer une démocratie solide, des conditions économiques robustes et honnêtes et des systèmes d’enseignement et de santé efficaces, et nous devons les aider à prendre soin de leurs familles, de leurs femmes et enfants, plutôt que de s’en débarrasser en légalisant l’avortement.

 
  

(1)Cf. procès-verbal.

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