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Procédure : 2010/2663(RSP)
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RC-B7-0271/2010

Débats :

PV 20/05/2010 - 12.1
CRE 20/05/2010 - 12.1

Votes :

PV 20/05/2010 - 13.1
CRE 20/05/2010 - 13.1

Textes adoptés :

P7_TA(2010)0194

Compte rendu in extenso des débats
Jeudi 20 mai 2010 - Strasbourg Edition JO

12.1. Liberté de religion au Pakistan
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Procès-verbal
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  La Présidente. – L’ordre du jour appelle le débat sur sept propositions de résolution sur la liberté de religion au Pakistan(1).

 
  
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  Charles Tannock, auteur.(EN) Madame la Présidente, l’incapacité du Pakistan à édifier une démocratie forte et durable a eu des conséquences, selon moi très lourdes, sur la liberté de religion dans ce pays. Les dirigeants qui se sont succédé à la tête du pays se sont tous servis de l’islam pour justifier la répression des minorités et légitimer l’autocratie, en particulier l’autocratie militaire, bien qu’il faille reconnaître que le gouvernement actuel a entrepris des efforts pour remédier à cet état de fait.

La Constitution du Pakistan, censée défendre la liberté de religion, n’en autorise pas moins encore des lois telles que les lois sur le blasphème, qui sont discriminatoires envers les non-musulmans, et la persécution des minorités chiite et ahmadie est une chose tout à fait courante. Il apparaît malheureusement que la primauté de l’identité religieuse, sur laquelle le Pakistan s’est fondé et s’est construit, nourrit un climat d’intolérance et souvent même de violence envers ceux qui n’appartiennent pas au courant religieux majoritaire.

La prolifération des madrasas d’obédience déobandi, qui prêchent des messages de haine contre l’Occident, a créé un environnement où prospèrent l’extrémisme et le fondamentalisme, et de trop nombreux citoyens européens - notamment dans mon pays, le Royaume-Uni - sont tombés dans leurs griffes. C’est le plus apparent chez les talibans pakistanais, mouvement terroriste dont les intentions sont apparues une nouvelle fois au grand jour lors du récent attentat - heureusement manqué - de Times Square, à New York.

Je crains, personnellement, que rien ne change au Pakistan, à moins que ce pays ne mette en place un système politique et éducatif qui défende véritablement les principes de liberté de religion, de tolérance et d’égalité.

 
  
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  Anneli Jäätteenmäki, auteure.(EN) Madame la Présidente, mon groupe, l’ALDE, se réjouit des mesures prises par le gouvernement du Pakistan dans l’intérêt des minorités religieuses depuis novembre 2008, et soutient les efforts faits par le ministre chargé des questions des minorités pour établir un réseau de comités locaux pour l’harmonie interreligieuse en vue de promouvoir le dialogue entre les religions.

Il reste cependant beaucoup de chemin à parcourir pour atteindre la véritable liberté de religion au Pakistan. Les rapports et les enquêtes d’agences indépendantes révèlent que les minorités au Pakistan sont privées des libertés civiles fondamentales et de l’égalité des chances en matière d’emploi, d’éducation et de représentation politique.

Les dispositions juridiques sont dangereusement vagues et continuent de prêter le flanc à des abus qui touchent les gens de toutes confessions au Pakistan. Nous savons également que les femmes au Pakistan subissent des violences domestiques, tant physiques que psychologiques. Il reste donc beaucoup à faire.

 
  
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  Eija-Riitta Korhola, auteure.(FI) Madame la Présidente, notre résolution sur le Pakistan revient à maintes reprises sur les inquiétudes que suscitent tout particulièrement, à nos yeux, les lois sur le blasphème. Nous tenons cependant à reconnaître, en même temps, les évolutions très positives enregistrées sous l’actuel gouvernement pakistanais, et nous encourageons ce pays à poursuivre sa politique de réforme démocratique qui respecte les droits des minorités.

Shahbaz Bhatti, le tout premier ministre chargé des questions des minorités de l’histoire du Pakistan, a été la semaine dernière l’hôte du groupe du Parti populaire européen (Démocrates-Chrétiens). Nous apprécions grandement son travail et les réformes que le gouvernement a réalisées. La liste des améliorations apportées est impressionnante: quota de 5 % pour les minorités dans la fonction publique, reconnaissance des jours fériés non musulmans, et futurs sièges au sénat, pour ne citer que ces exemples.

Le projet le plus inspirant concerne les comités locaux pour l’harmonie interreligieuse, s’ils réussissent à apaiser les tensions entre les différents groupes dans le pays et, partant, à prévenir le recrutement de terroristes. C’est un acte de paix tout à fait significatif, dont les effets sont appelés à se propager dans toute la région. Ce travail de maintien de la paix, assuré sans armes, est la meilleure guerre possible contre le terrorisme, parce qu’il s’attaque à ses causes profondes. Si le projet réussit, il méritera un prix de la paix. Je voudrais dire à M. Tannock que voilà , précisément le système éducatif qu’il appelle de ses vœux.

 
  
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  Lidia Joanna Geringer de Oedenberg, auteure.(PL) En tant que représentants d’une communauté fondée sur la liberté, l’égalité et la tolérance, nous nous devons de condamner toutes les pratiques discriminatoires, y compris celles qui ont cours loin des frontières de l’Union. L’exclusion des représentants de minorités religieuses des listes électorales, comme cela s’est passé en 2007 au Pakistan, représente incontestablement une de ces pratiques. De plus, selon l’article 260 de la Constitution du Pakistan, les citoyens de ce pays sont divisés en deux catégories: musulmans et non-musulmans. Une disposition récente impose désormais l’inscription de l’identité religieuse sur le passeport. La communauté ahmadie, notamment, est victime d’une discrimination systématique: les autorités pakistanaises ne permettent même pas aux ahmadis de participer à des réunions publiques ou de publier des écrits.

Les lois sur le blasphème, et la peine de mort qu’elles prévoient, affectent aussi tout particulièrement les minorités religieuses. Le Conseil de l’Union européenne doit sans plus tarder mettre ce sujet à l’ordre du jour de ses relations avec Islamabad. Après tout, le Pakistan reçoit 200 millions d’euros du budget de l’UE au titre de l’accord de coopération signé il y a six ans entre l’Union européenne et le Pakistan pour la période 2007-2013.

Les récents événements au Pakistan montrent que le pays est prêt à apporter de profonds changements à son système. J’espère que, comme cela s’est passé pour la révision tant attendue de la Constitution, qui a enfin été entérinée, il sera bientôt possible de modifier d’autres dispositions qui sont clairement discriminatoires à l’égard des minorités du Pakistan.

 
  
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  Nicole Kiil-Nielsen, auteure. − Madame la Présidente, la liberté de religion n’est pas assurée au Pakistan. En 2009, on y a constaté une augmentation des attaques violentes contre les minorités religieuses, y compris des assassinats.

De plus, près de 80 % de la population des minorités vit sous le seuil de pauvreté. Cependant, ceci ne constitue pas le seul problème de violation des droits humains au Pakistan: restriction de la liberté de réunion, menaces contre les organisations de la société civile, arrestations de syndicalistes, kidnappings, assassinats de journalistes.

Depuis que le Pakistan a déclaré son soutien à la guerre contre le terrorisme menée par les États-Unis, des centaines, voire des milliers de personnes suspectées de liens avec des groupes terroristes ont été arbitrairement détenues: arrestations sans mandat, détentions sans aucune base légale, sans avocat, lieux de détention non déclarés, disparitions forcées, mauvais traitements, tortures.

Dans la seule prison de Lahore, 4 651 prisonniers étaient détenus en 2009 pour une capacité d’accueil de 1 050 détenus. Les violences subies par les femmes ne cessent d’augmenter: viols, suicides, attaques à l’acide, femmes brûlées. Ce ne sont pas deux minutes ni deux heures, mais deux journées entières qu’il me faudrait pour décrire le calvaire enduré par les fillettes et les femmes pakistanaises.

C’est dans ce contexte que notre Parlement, soucieux du respect des femmes, de la liberté de conscience et des droits humains, s’apprête à user de son nouveau pouvoir de veto sur la conclusion d’un accord de réadmission entre l’Union européenne et le Pakistan, exigeant ainsi davantage de garanties sur les conditions dans lesquelles serait mis en œuvre un tel accord de réadmission des ressortissants pakistanais et des Afghans ayant transité par le Pakistan.

 
  
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  Joe Higgins, auteur.(EN) Madame la Présidente, en tant qu’international socialiste, je défends ardemment le droit de chaque individu à la liberté de croyance et de pratique religieuse, pour autant que les droits fondamentaux des autres soient respectés. Le peuple pakistanais et plus encore les minorités religieuses se trouvent aujourd’hui pris entre le sectarisme institutionnel de l’État pakistanais et, dans certaines régions, les forces ultraréactionnaires et obscurantistes des talibans.

Il y a, bien sûr, une contradiction fondamentale à voir les groupes de droite de cette Assemblée se poser en défenseurs de la liberté et des droits de l’homme au Pakistan tout en soutenant la guerre en Afghanistan, alors que celle-ci déborde largement sur le Pakistan, avec les très graves conséquences que cela entraîne. Le massacre de civils en Afghanistan par les forces de l’OTAN et, au Pakistan, par une armée équipée par les Occidentaux n’est pas seulement criminel en soi, mais peut aussi pousser certains civils dans les bras des groupes réactionnaires.

Au cœur de la crise pakistanaise, on trouve les structures capitalistes féodales sous lesquelles croît à l’heure actuelle une immense pauvreté. Ni les élites pakistanaises corrompues, représentées par l’actuel gouvernement, ni le principal parti d’opposition, n’ont de réponse à apporter au peuple. Il est vital que le pays se dote d’organismes indépendants représentant les travailleurs et les pauvres, comme la Fédération progressiste des travailleurs du Pakistan, qui, avec son demi-million d’adhérents, s’efforce de reconstruire des traditions sociales fortes, fédératrices de l’ensemble des travailleurs, transversales par rapport aux particularismes religieux ou nationaux, et qui unissent les hommes et les femmes. Telle est la direction que doit prendre le Pakistan à l’avenir.

 
  
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  Bernd Posselt, au nom du groupe PPE.(DE) Madame la Présidente, nous devons être critiques, mais aussi faire preuve de beaucoup d’objectivité et de discernement à l’égard du Pakistan, qui est un allié important. Le Pakistan est un pays islamique, et nous devons respecter cela. Il a été fondé par les musulmans lors de la partition des Indes britanniques sur la base de leur appartenance religieuse, de la même manière que l’Inde a été fondée par des hindous. Les deux pays ont eu des minorités dès le début, et les deux ont développé une grande tradition de tolérance. Il importe de renforcer ce respect de toutes les minorités religieuses, et notamment des chrétiens. Nous avons le devoir, selon moi, d’insister là-dessus. Qui défendra la cause des chrétiens, si l’Europe, qui est un continent presque à 100 % chrétien, ne le fait pas?

Nous sommes tenus par une obligation très spécifique, mais, en même temps, nous devons dire clairement que nous respectons le rôle influent et souvent constructif que le Pakistan joue et peut continuer à jouer dans le monde islamique.

 
  
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  Marietje Schaake, au nom du groupe ALDE.(EN) Madame la Présidente, comme l’ont souligné plusieurs de mes collègues, les extrémistes peuvent facilement se servir des lois sur le blasphème comme des prétextes pour pouvoir se livrer à des violences contre des minorités religieuses ou non religieuses. La liberté de religion est bien sûr importante, mais la liberté de ne pas avoir de religion l’est tout autant.

Ces lois sur le blasphème, dans un pays où la liberté d’expression est réprimée au nom de la religion, présentent aussi d’autres risques: mercredi dernier, un tribunal pakistanais a prononcé l’interdiction du réseau social Facebook. L’autorité des télécommunications du Pakistan a donné ordre à tous les fournisseurs de services Internet du pays de bloquer l’accès au site. La mesure a été prise pour empêcher les usagers de prendre connaissance de remarques prétendument insultantes sur l’islam ou le prophète Mahomet. Une dessinatrice a pris l’initiative d’inviter les gens à poster des dessins de Mahomet, en réaction aux pressions exercées, notamment, sur la célèbre série South Park, dont des épisodes ont été censurés.

Facebook, parmi d’autres services et plateformes en ligne, constitue une ouverture virtuelle importante au reste du monde. En donnant aux Pakistanais l’accès à de multiples sources d’information et de contacts, le réseau social leur offre la possibilité d’échanger des idées; les jeunes générations de Pakistanais, tout particulièrement, peuvent ainsi éclairer leur esprit via l’internet, alors que le contenu de leurs manuels scolaires est souvent discriminatoire et partial. La criminalisation de la liberté d’expression n’est pas le meilleur moyen de permettre à la société pakistanaise de se confronter à la diversité. Les caricaturistes, les journalistes et tous les citoyens doivent pouvoir s’exprimer librement, quitte à offenser certains.

Il n’y a pas qu’au Pakistan que la liberté d’expression est bafouée; en Europe aussi, le débat public subit de graves atteintes. Les menaces aux journalistes, aux caricaturistes, aux artistes, deviennent toujours plus fréquentes et mettent en cause le fondement même de nos sociétés libérales démocratiques. L’autocensure gagne du terrain, tandis que des responsables politiques, des caricaturistes ou des journalistes font l’objet de menaces de mort et doivent désormais se mettre sous protection policière.

Veillons sans relâche à défendre la liberté d’expression dans l’Union européenne, mais aussi au Pakistan et dans le monde entier. C’est le meilleur remède contre l’extrémisme.

 
  
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  Tomasz Piotr Poręba, au nom du groupe ECR.(PL) Les élections de 2008 ont permis le retour de la démocratie et d’un gouvernement civil au Pakistan, bien que cette démocratie ne soit pas totalement stable.

Les autorités pakistanaises ont pris sur la question des libertés religieuses un certain nombre de décisions qui méritent d’être saluées, mais il semble que des mesures supplémentaires s’imposent. L’instauration d’un quota d’emplois publics au profit des minorités religieuses, la reconnaissance des jours fériés non musulmans, ainsi que la création d’une Journée nationale des minorités, constituent un progrès vers la stabilisation et la démocratisation du pays. Il faut cependant souligner qu’il n’existe toujours pas de droits précisément définis qui protègent les minorités, ce qui peut conduire à des situations insensées, comme la condamnation d’un couple chrétien à une peine de 25 ans d’emprisonnement pour avoir touché le livre sacré du Coran avec des mains impures.

Certaines communautés religieuses font encore l’objet de persécutions, et il est également troublant de constater que des dispositions fondées sur la charia sont effectivement toujours appliquées dans les zones rurales, notamment dans le nord du pays. Nous devons poursuivre notre soutien financier aux défenseurs des droits de l’homme au Pakistan et presser les autorités pakistanaises d’accorder à leurs citoyens leurs pleins droits à la liberté de religion.

 
  
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  Eva-Britt Svensson, au nom du groupe GUE/NGL.(SV) Madame la Présidente, je partage l’essentiel de ce qui a été dit concernant les violations des droits de l’homme au Pakistan.

Je voudrais insister en particulier sur la situation des musulmans ahmadis et la persécution dont ils font l’objet. Celle-ci prend des formes diverses: de la persécution institutionnalisée au meurtre de sang-froid, des pratiques discriminatoires au harcèlement, à tous les niveaux de la société. La situation est toujours la même, malgré les promesses d’amélioration faites tant par le précédent que par l’actuel gouvernement. Les améliorations n’ont pas eu lieu, et la persécution continue.

Il est temps que la communauté internationale et l’Union européenne se réveillent et prennent des mesures pour mettre un terme aux violations des droits de l’homme qui sont perpétrées tous les jours au Pakistan.

 
  
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  Bastiaan Belder, au nom du groupe EFD.(NL) Lors de la création de l’État du Pakistan en 1947, son fondateur, Mohammed Ali Jinnah, a prononcé ces paroles mémorables: «Nous partons du principe fondamental que nous sommes tous des citoyens, et les citoyens égaux d’un seul État». Ces mots paraissent bien vides de sens aujourd’hui, surtout pour les quelque 15 millions de chrétiens qui vivent au Pakistan. Ils vivent dans une atmosphère d’intimidation et de menace permanente, dans les villes comme dans les campagnes, sans excepter la capitale, Islamabad.

Le système juridique pakistanais est malheureusement complice et coresponsable de la situation précaire dans laquelle se trouvent les ressortissants chrétiens de ce pays. C’est le résultat d’un processus historique d’islamisation rampante de la société pakistanaise depuis la fin des années 1970, qui a conduit à une dégradation alarmante du statut juridique de la communauté chrétienne pakistanaise.

Concrètement, nous faisons référence aux lois des années 80 sur le témoignage et sur le blasphème, instruments juridiques qui ont en fait mis la chrétienté hors la loi, puisque le témoignage rendu par un non-musulman dans un procès ne vaut que la moitié de celui d’un musulman – si tant est, au demeurant, que le juge consente à entendre le témoignage d’un chrétien!

Les lois sur le blasphème sont encore plus néfastes pour les chrétiens pakistanais. Elles prévoient l’emprisonnement à vie pour la profanation du Coran et la peine de mort pour des remarques péjoratives sur l’islam ou le prophète Mahomet. En résumé, un chrétien au Pakistan peut se retrouver subitement dans le couloir de la mort pour peu qu’un musulman témoigne contre lui!

Madame la Présidente, chers collègues, tout cela a créé une atmosphère presque insupportable de peur et d’incertitude. Des centaines de chrétiens pakistanais croupissent en prison depuis des années, sans jamais avoir été entendus par un tribunal. J’exhorte donc le Conseil et la Commission à conditionner l’octroi de toute aide, quelle qu’elle soit, au gouvernement pakistanais à l’abolition urgente de cette discrimination pernicieuse à l’encontre des minorités religieuses du pays.

 
  
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  Laima Liucija Andrikienė (PPE).(EN) Madame la Présidente, la Constitution du Pakistan fait une distinction entre musulmans et non-musulmans, permettant ainsi une discrimination sur la base de la religion. Dans ce contexte il importe de rappeler ici que, en décembre 2009, le président Asif Ali Zardari a réaffirmé l’engagement du PPP (Parti populaire pakistanais) de défendre le droit des membres de toutes les minorités d’être traités comme des citoyens égaux.

Malheureusement, les rapports et les enquêtes des agences indépendantes révèlent que les minorités au Pakistan sont privées des libertés civiles fondamentales et de l’égalité des chances en matière d’emploi, d’éducation et de représentation politique. Autrement dit, la situation globale en ce qui concerne la liberté de religion au Pakistan, sans même entrer dans les détails, est difficile et suscite de nombreux motifs d’inquiétude.

Je tiens également à souligner la contradiction qui existe entre l’engagement du gouvernement pakistanais envers la liberté de religion et le rôle déterminant qu’il a joué, au nom de l’Organisation de la conférence islamique, pour faire approuver le programme de «lutte contre la diffamation des religions» aux Nations unies. Je voudrais rappeler ici les conclusions du Conseil du 16 novembre 2009 sur le rapport entre la législation internationale en matière de droits de l’homme, qui protège les individus et les groupes d’individus, et la notion de diffamation des religions.

 
  
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  La Présidente. – Chers collègues, je voudrais vous rappeler que le temps nous sera compté cet après-midi, et que tous ceux qui dépassent leur temps de parole réduisent d’autant le nombre d’interventions d’une minute au titre de la procédure «catch-the-eye» que nous serons en mesure d’accepter.

 
  
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  Ryszard Czarnecki (ECR).(PL) Un adage américain dit qu’un repas n’est jamais gratuit. Nous devrions le reprendre à notre compte et dire que l’aide de l’Union européenne ne peut pas être accordée à titre gratuit, et que nous ne pouvons pas donner 200 millions d’euros sans rien espérer en retour. Demandons quelque chose! Nous devons au moins demander le respect, par exemple, de valeurs similaires à celles qui représentent pour nous une sorte d’étalon moral, éthique et politique. Les persécutions dont font l’objet au Pakistan, depuis de nombreuses années, les personnes de confession non musulmane – c’est-à-dire des chrétiens, pour la plupart – constituent une situation absolument inacceptable. Nous débattons souvent des problèmes des différentes minorités, pas nécessairement religieux, en Europe et dans le monde. Défendons aujourd’hui la minorité chrétienne et les autres minorités religieuses du Pakistan, même si ce n’est bien évidemment pas le seul problème que connaît ce pays en proie à de graves conflits politiques et malheureusement confronté à des risques de déstabilisation.

 
  
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  Csaba Sógor (PPE). (HU) En examinant la situation au Pakistan, nous devons considérer deux faits incontestables. Premièrement, le Pakistan est un acteur stratégique indispensable dans la lutte contre le terrorisme. Nous devons tout mettre en œuvre pour garantir que la sécurité des citoyens européens ne sera pas compromise. Deuxièmement, le Pakistan n’a pas la même vision des minorités religieuses et ethniques que celle qui repose sur les valeurs prônées par l’Europe et les démocraties libérales avancées. L’Europe ne peut pas rester silencieuse face aux violations flagrantes des droits de l’homme commises dans d’autres États, et nous devons donc faire part de nos inquiétudes, même lorsque c’est un de nos alliés stratégiques qui est concerné. L’Union européenne ne pourra adopter des mesures crédibles à l’égard de pays tiers que si elle s’attache à régler de manière satisfaisante les problèmes des minorités religieuses et nationales sur son propre territoire. Il doit être clair aux yeux du monde que l’une des valeurs fondamentales de l’Union européenne réside dans le niveau élevé de protection des droits de l’homme et des droits des minorités, que l’Union considère - ou dois-je dire devrait considérer - comme ayant un caractère contraignant d’abord et avant tout pour elle-même. Ce n’est qu’alors que nous pourrons effectivement exiger de nos partenaires des avancées ou des mesures similaires dans ce domaine.

 
  
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  Zbigniew Ziobro (ECR).(PL) Nous nous réjouissons que le Pakistan soit engagé dans la lutte contre le terrorisme international, mais cette circonstance ne doit pas pour autant masquer d’autres réalités très brutales, à savoir les graves violations des droits des minorités religieuses, notamment des chrétiens, qui sont commises.

Régulièrement, si ce n’est très souvent, des informations nous parviennent sur de nouvelles agressions, de nouvelles violences, de nouvelles menaces et même des assassinats - des chrétiens ont ainsi été brûlés vifs, uniquement parce qu’ils étaient chrétiens -, y compris de femmes et d’enfants. Cette sorte d’informations suscite la question de savoir pourquoi de telles choses se passent dans un pays qui joue un rôle aussi important dans les relations internationales et dans la lutte contre le terrorisme. Eh bien, elles se passent parce que, malheureusement, les autorités pakistanaises sont dans une grande mesure responsables d’avoir créé une atmosphère qui encourage de telles choses, en maintenant en vigueur des lois iniques sur le blasphème, et en ne réagissant pas aux abus des forces de l’ordre et des instances judiciaires au Pakistan.

Nous sommes en droit d’attendre un changement radical, y compris de la part de l’Union européenne et de ses institutions, par rapport à une telle conduite.

 
  
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  Martin Kastler (PPE).(DE) Madame la Présidente, environ 75 % à 80 % des victimes de persécution religieuse dans le monde sont des chrétiens. Au sein de cette Assemblée, nous menons un combat spécifique pour les droits de l’homme dans le monde. La liberté de religion est, à mon sens, une notion qui se trouve au cœur de notre politique des droits de l’homme. C’est pourquoi je regrette que la gauche et les libéraux de gauche au Parlement européen s’accordent souvent pour garder le silence sur le sort des chrétiens.

Cela dit, je me réjouis que nous déposions aujourd’hui tous ensemble une résolution sur la terrible situation qui prévaut au Pakistan. Sur les 156 millions de Pakistanais, 95 % sont musulmans, près de 3 %, chrétiens et près de 2 %, hindous. En tant que chrétien, je voudrais insister ici, une nouvelle fois, sur le sort des chrétiens pakistanais, qui sont fortement persécutés. Quiconque permet que des actes de violence soient perpétrés contre des chrétiens doit recevoir une réponse du monde civilisé. Par conséquent, il faut que l’Union introduise, dans sa politique de développement et sa coopération économique, un critère qui tienne compte de cet aspect et qui prévoie des sanctions si nécessaire.

 
  
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  La Présidente. – Nous passons à présent au débat en procédure «catch-the-eye». J’ai reçu beaucoup plus de demandes que je ne pourrai en satisfaire. Nous n’avons que deux minutes. Je donne la parole à quatre orateurs.

 
  
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  Michael Gahler (PPE).(DE) Madame la Présidente, quel que soit le pays considéré, il faut tenir compte de son point de départ et se demander si la direction qu’il prend, en matière de droits de l’homme et des minorités, est ou non la bonne. En ma qualité de chef de la mission d’observation de l’Union européenne pour les dernières élections au Pakistan, il y a deux ans, j’ai formulé un certain nombre de recommandations, et je me réjouis de voir que ce pays a commencé à en appliquer quelques-unes. Je citerai notamment la ratification du pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui n’est pas seulement signé, mais pleinement ratifié désormais, et celle de la convention des Nations unies contre la torture. Il faut saluer aussi la création d’un ministère spécifiquement chargé des minorités, qui va s’efforcer de mettre progressivement fin aux discriminations.

Entre autres questions, celle des ahmadis a également été soulevée. L’une de mes recommandations a été, pour les prochaines élections, de ne plus obliger les ahmadis à s’inscrire sur une liste électorale séparée, mais de les incorporer aux listes générales. Je pense que ce serait là une mesure concrète qui contribuerait à mettre fin aux discriminations dont cette minorité fait l’objet.

 
  
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  Heidi Hautala (Verts/ALE).(FI) Madame la Présidente, je voudrais indiquer que j’ai rencontré moi aussi le ministre des minorités lors de son passage ici cette semaine. J’ai eu la conviction qu’il s’efforçait sincèrement d’établir une compréhension mutuelle entre les différents groupes religieux. Pourtant, lui non plus n’a pas su répondre à la question de savoir pourquoi le Pakistan, qui siège aux Nations unies et qui fait partie du Conseil des droits de l’homme des Nations unies, a fait campagne avec tant de zèle, au nom de l’Organisation de la conférence islamique, pour faire adopter un code international de lutte contre la diffamation des religions. Ce n’est certainement pas là le moyen idéal de favoriser la compréhension mutuelle entre les groupes religieux.

J’espère que l’Union prendra à l’avenir des mesures plus fermes au niveau international pour empêcher l’entrée en vigueur de nouvelles dispositions de ce type, qui constituent une entrave structurelle à l’application des droits de l’homme. Les États-Unis ont été bien plus actifs que l’Union européenne sur ce terrain.

 
  
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  Jacek Olgierd Kurski (ECR).(PL) Madame la Présidente, la situation au Pakistan suit une évolution dynamique, nous recevons des informations contradictoires, et il nous faut observer ce qui s’y passe avec beaucoup d’attention, afin de ne pas commettre d’erreur. C’est une bonne chose que le gouvernement pakistanais ait pris certaines mesures dans l’intérêt des minorités religieuses, comme la garantie d’un quota de 5 % d’emplois publics à leur bénéfice. C’est une bonne chose que le gouvernement pakistanais ait réservé, ou ait promis de réserver, des sièges au Sénat pour les minorités, y compris des femmes représentantes de groupes minoritaires.

Néanmoins il reste à faire. Le gouvernement et les institutions pakistanaises doivent faire quelque chose contre les lois sur le blasphème, qui entraînent la peine de mort au Pakistan et qui sont souvent invoquées pour justifier la censure, la criminalisation, la persécution et, dans certains cas, les assassinats de membres de minorités politiques, raciales et religieuses. Les autorités pakistanaises doivent faire quelque chose à propos du code pénal, qui prévoit la peine de mort pour toute personne reconnue coupable de blasphème.

Dans un pays qui reçoit de l’aide de l’Union européenne, et au XXIe siècle, il n’est pas tolérable que l’on exécute des gens comme cela. Je vous remercie.

 
  
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  Elena Băsescu (PPE).(RO) Après près de neuf ans de dictature militaire, les élections qui se sont déroulées en 2008 au Pakistan ont annoncé le début d’un processus de démocratisation dans ce pays. Malheureusement, Benazir Bhutto a été assassinée quelques semaines avant le scrutin. Le Parti du peuple pakistanais, qu’elle dirigeait, a remporté les élections. Les minorités au Pakistan connaissent de nombreux problèmes, mais plusieurs mesures positives ont été prises à l’initiative du gouvernement actuel: promotion du dialogue interculturel, établissement d’un quota de 5 % pour les minorités dans l’administration fédérale, reconnaissance de certains jours fériés non musulmans. L’engagement du gouvernement pakistanais de réserver des sièges au Sénat pour les minorités est digne d’être salué. Je voudrais souligner, pour finir, le rôle particulièrement important que joue le Pakistan dans la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme.

 
  
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  Antonio Tajani, vice-président de la Commission. − Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les députés, l’Union européenne suit de près la situation des minorités religieuses au Pakistan et la constitution du Pakistan reconnaît la liberté de religion et prévoit que l’État sauvegarde les droits des minorités.

Le Pakistan a connu des avancées dernièrement: l’adoption d’amendements à la constitution, qui renforce le rôle des assemblées élues au Pakistan, et des progrès institutionnels dans le domaine des droits de l’homme avec, en particulier, l’établissement d’un ministère des droits de l’homme et d’un ministère des minorités. En outre, une commission nationale indépendante des droits de l’homme est en cours de création.

Par ailleurs, le Pakistan a ratifié le pacte international relatif aux droits civils et politiques et la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Ceci constitue un pas dans la bonne direction, à condition que ces instruments soient mis en œuvre de manière efficace. Mais le Pakistan doit redoubler d’efforts pour assurer une meilleure intégration des minorités religieuses, y compris la minorité chrétienne, au sein des structures sociales, économiques et politiques. La réputation internationale du Pakistan a été ternie par des incidents tels que celui qui a eu lieu l’an passé à Gojra, lorsque sept chrétiens ont été brûlés vifs lors d’attaques lancées par des extrémistes contre une église et des habitations, ou encore lors d’attaques sur les chiites, mais aussi lors de discriminations à l’encontre de ahamadis.

En ce qui concerne les droits des minorités religieuses, l’Union européenne a systématiquement utilisé le dialogue politique avec le Pakistan, afin de soulever les questions des droits de l’homme, et également entrepris plusieurs démarches diplomatiques. À cela est venu se greffer, depuis 2007, un dialogue sur les droits de l’homme dans le cadre de l’accord de coopération avec le Pakistan, qui prévoit un tel dialogue régulier sur la gouvernance et les droits de l’homme.

Lors de ce dialogue, l’Union européenne a toujours insisté pour que les droits individuels et des minorités soient respectés. Dans le cadre de ce dialogue sur les droits de l’homme, l’Union européenne a également régulièrement soulevé auprès du gouvernement du Pakistan l’application de la loi sur le blasphème. En termes absolus, il semble que la majorité des accusés sont de confession musulmane, mais je suis conscient que la loi sur le blasphème a souvent été appliquée contre les minorités religieuses et que des fausses accusations ont été lancées pour régler des comptes personnels ou pour des questions d’appât du gain. La dernière réunion de la commission mixte a eu lieu le 25 mars 2010, précédée la veille par la réunion d’un sous-groupe sur la gouvernance, les droits de l’homme et la migration.

À cette occasion, la situation des minorités au Pakistan a été soulevée. En même temps, nous n’avons pas hésité à évoquer les préoccupations pakistanaises concernant la situation des minorités religieuses ici, chez nous, en Europe.

L’Union européenne compte également soulever ces questions lors du prochain sommet avec le Pakistan, le 4 juin prochain. Une grande partie de la population pakistanaise n’a pas accès à l’éducation et ignore les comportements sociaux de base. Au travers de l’aide à la coopération que fournit la Commission européenne, priorité est donnée à l’amélioration de l’accès à l’éducation de base dans le cadre de la politique et de l’éducation du pays. J’ose espérer qu’à moyen terme ceci mènera à une attitude plus tolérante envers la liberté religieuse.

 
  
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  La Présidente. – Le débat est clos.

Le vote aura lieu prochainement.

Déclarations écrites (article 149)

 
  
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  Monica Luisa Macovei (PPE), par écrit.(EN) Les lois sur le blasphème du Pakistan sont réputées les plus dures au monde. L’exercice des droits à la liberté d’expression et de religion peut conduire à l’emprisonnement et à la mort. Les sections 295 B et C du code pénal pakistanais criminalisent les remarques péjoratives à l’égard du Coran et de Mahomet en prévoyant respectivement l’emprisonnement à vie et la peine de mort. La section 298 punit de prison l’offense aux sentiments religieux, et les sections 298 A, B et C criminalisent les remarques péjoratives sur des figures ou des lieux saints et mettent hors-la-loi le groupe religieux des ahmadis (qui se considèrent eux-mêmes comme musulmans). La liberté de religion implique aussi bien la liberté de croire en n’importe quelle religion que celle de ne croire en aucune. Le ministre pakistanais des minorités a annoncé hier que des modifications étaient en préparation pour mettre un terme à l’utilisation abusive des lois sur le blasphème. J’estime pour ma part que ces lois devraient être abrogées, car un texte modifié restera toujours un héritage du passé et continuera à servir de prétexte à de nouvelles violences et à de nouvelles discriminations.

 
  
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  Cristian Dan Preda (PPE), par écrit.(RO) Le gouvernement pakistanais a adopté ces dernières années une série de mesures qui témoignent clairement d’une certaine sensibilité au sort des minorités nationales. Pour n’en citer que quelques-unes, je rappellerai la nomination de Shahbaz Bhatti comme ministre des minorités, le quota de 5 % d’emplois publics réservés aux minorités, et l’engagement en faveur de la représentation des minorités religieuses au Sénat. Ces efforts doivent être encouragés, mais il reste encore beaucoup à faire pour améliorer la situation des minorités religieuses.

Un tournant essentiel, selon moi, consisterait en une révision des dispositions concernant les infractions liées à la religion, connues sous le nom de «lois sur le blasphème». La possibilité de se servir abusivement de ces dispositions a créé un climat d’intolérance qui a encouragé la violence religieuse, la discrimination, l’intimidation, et la persécution des minorités religieuses. Au-delà des aspects juridiques, il importe que le gouvernement prenne des mesures décisives pour prévenir la violence. La promotion de la tolérance est essentielle à la protection des minorités religieuses au Pakistan.

 
  
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  Anna Záborská (PPE), par écrit. (SK) La civilisation européenne, telle que nous la connaissons aujourd’hui, ne serait pas possible sans la liberté de religion. La quête d’un ordre de réalité qui transcende l’individu doit aller de pair avec la tolérance. Le chemin vers Dieu – comme aussi le choix du chemin sans Dieu – est différent et singulier pour chaque individu. Si nous avons appris quelque chose au cours des deux mille ans de christianisme en Europe, c’est bien cela. Cette expérience a été longue et douloureuse, acquise au prix de millions de vies innocentes. Nous, Européens, avons dès lors le droit de demander à d’autres de ne pas prendre cette voie. Nous condamnerons toujours les actes de violence et le meurtre d’innocents, dans quelque pays que ce soit, et à plus forte raison lorsqu’il s’agit d’un pays allié et ami.

 
  

(1) Voir procès-verbal.

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