Proposition de résolution - B6-0300/2006Proposition de résolution
B6-0300/2006

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

23.5.2006

déposée à la suite de déclarations du Conseil et de la Commission
conformément à l'article 103, paragraphe 2, du règlement
par Pasqualina Napoletano, Elena Valenciano Martínez-Orozco et Panagiotis Beglitis
au nom du groupe PSE
sur la situation des personnes détenues à Guantanamo

Procédure : 2006/2572(RSP)
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B6-0300/2006

B6‑0300/2006

Résolution du Parlement européen sur la situation des personnes détenues à Guantanamo

Le Parlement européen,

–  vu les conventions de Genève, en particulier la "troisième convention" relative au traitement des prisonniers de guerre et la "quatrième convention" relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre,

–  vu la convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

–  vu, d'une part, les orientations de l'UE en ce qui concerne la lutte contre la torture et la peine de mort et, d'autre part, les lignes directrices de l'UE en matière de dialogue "droits de l'homme" avec les pays tiers,

–  vu le rapport d'Amnesty International d'avril 2006 sur la mise en œuvre, par les États‑Unis d'Amérique, des obligations qui leur incombent en vertu de la convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

–  vu ses précédentes résolutions concernant Guantanamo, en particulier ses résolutions du 7 février 2002 et du 15 février 2006 sur la situation des personnes détenues à Guantamo Bay et ses recommandations du 10 mars 2004 au Conseil,

–  vu le rapport du comité des Nations unies contre la torture, adopté le 19 mai 2006,

–  vu l'article 103, paragraphe 2, de son règlement,

A.  considérant que, le 19 mai 2006, le comité des Nations unies contre la torture, composé d'experts indépendants, a rendu public un rapport accablant qui illustre les graves violations, par les États-Unis, de la convention des Nations unies de 1984 contre la torture,

B.  considérant que ce rapport certifie clairement l'utilisation systématique de la torture, par les autorités américaines, contre des détenus, notamment dans des "centres de détention" contrôlés par les États‑Unis en Irak, en Afghanistan et à Guantanamo Bay (Cuba),

C.  considérant que les conditions de détention dans ces centres sont inhumaines et dégradantes et que, depuis l'ouverture, en 2002, d'un "centre de détention" à Guantanamo par les États‑Unis, il y a eu 41 tentatives de suicide,

D.  se réjouissant de la publication, le 16 mai 2006, par les autorités militaires des États‑Unis, d'une liste de 759 prisonniers incarcérés au centre de détention militaire américain de Guantanamo; regrettant que le Pentagone se soit toutefois refusé à préciser si cette liste était exhaustive et comportait les noms de tous les prisonniers ayant transité par Guantanamo,

E.  déplorant que les États‑Unis n’aient pas reconnu la compétence de la Cour pénale internationale; considérant, de plus, que les États‑Unis ont signé des accords bilatéraux avec certains États candidats à l'adhésion à l’Union européenne pour garantir que les citoyens américains soient exclus de la compétence de la Cour,

1.  condamne avec fermeté les violations des droits de l'homme graves et persistantes commises dans le centre de détention de Guantanamo Bay;

2.  réprouve les tentatives de l'Administration américaine de restreindre l'interprétation de la notion de torture telle qu'elle figure à l'article premier de la convention pertinente des Nations unies, le fait que l'on autorise des méthodes d'interrogatoire interdites par le droit national et par le droit international et le fait que des personnes sont maintenues en captivité dans des centres de détention secrets;

3.  rappelle que la lutte contre le terrorisme international ne peut se faire que dans le respect des droits fondamentaux et des conventions internationales pertinentes;

4.  demande encore une fois aux autorités américaines de fermer dans les plus brefs délais tous ces "centres de détention" critiqués par le comité des Nations unies;

5.  demande que les États‑Unis acceptent et mettent en œuvre l'intégralité des conclusions du rapport du 19 mai 2006 du comité des Nations unies contre la torture, notamment celles qui demandent aux États‑Unis de "prendre des mesures énergiques pour éradiquer toute forme de torture" pratiquée par leurs forces de sécurité ;

6.  fait siennes les conclusions du rapport du comité des Nations unies contre la torture, notamment quand celles-ci demandent ce qui suit:

  • a)les États‑Unis doivent cesser "de détenir des personnes dans des sites de détention secrets, que ce soit sur leur territoire, sur des territoires relevant de leur juridiction ou sur des sites placés sous leur contrôle de fait",
  • b)les États‑Unis "doivent reconnaître que détenir des personnes dans des installations secrètes constitue, en soi, un acte de torture ou une peine ou un traitement cruel, inhumain ou dégradant, selon sa nature exacte, son objectif ou sa sévérité",
  • c)les États‑Unis "doivent cesser de détenir quiconque à Guantanamo Bay et fermer ce centre de détention, permettre aux détenus d'être jugés ou bien les relâcher le plus vite possible et s'assurer qu'ils ne sont pas renvoyés vers un pays où ils pourraient courir un risque réel de torture";

7.  rappelle que les États‑Unis sont également soupçonnés par le comité des Nations unies de "délocaliser" la torture, en transférant dans d'autres pays, en vue de les interroger, des personnes soupçonnées de terrorisme, et attend, à ce propos, les conclusions de sa commission temporaire "CIA" ;

8.  appelle les États‑Unis à prendre des dispositions immédiates contre les responsables de tout acte de torture ou de tout mauvais traitement pratiqués à Guantanamo; demande que ces responsables soient traduits en justice;

9.  souligne que tout prisonnier doit être traité conformément au droit humanitaire international et jugé sans retard, dans un procès équitable et public, par un tribunal compétent, indépendant et impartial; demande la libération immédiate de toutes les personnes qui sont détenues sans qu'il y ait eu, en temps opportun, inculpation et procès équitable;

10.  exprime la vive préoccupation que lui inspire le fait que les États‑Unis adoptent une approche sélective des normes internationales en matière de droits de l'homme et méconnaissent les obligations qui leur incombent en vertu des conventions internationales en matière humanitaire et en matière de droits de l'homme, évolution qui menace de saper dans sa totalité le cadre constitué par le droit international en matière de droits de l'homme, en ce compris le consensus sur l'interdiction absolue de la torture et de toute autre peine ou traitement cruel, inhumain ou dégradant;

11.  invite le Conseil et la Commission à inscrire à l'ordre du jour du prochain Sommet UE‑États‑Unis la question des violations des droits de l'homme commises dans le centre de détention de Guantanamo Bay;

12.  charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, au Haut représentant pour la PESC, au Président et au Congrès des États‑Unis d'Amérique ainsi qu'au Secrétaire général des Nations unies.