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Procédure : 2008/2290(INI)
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A6-0112/2009

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P6_TA(2009)0136

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Jeudi 12 mars 2009 - Strasbourg
Mandat du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie
P6_TA(2009)0136A6-0112/2009

Recommandation du Parlement européen à l'intention du Conseil du 12 mars 2009 sur le mandat du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (2008/2290(INI))

Le Parlement européen,

—  vu la proposition de recommandation à l'intention du Conseil présentée par Mme Annemie Neyts Uyttebroeck et autres au nom du groupe ALDE, sur le mandat du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie ("le Tribunal") (B6-0417/2008), qui couvre les républiques qui composaient, jusqu'au 25 juin 1991, le territoire de la République fédérale socialiste de Yougoslavie, à savoir la Bosnie-et-Herzégovine, la Croatie, l'ancienne République yougoslave de Macédoine , le Monténégro, la Serbie, le Kosovo et la Slovénie,

—  vu que le Tribunal est un organe judiciaire des Nations unies, opérant en Europe et traitant de questions européennes, mis en place en 1993 en tant qu'institution temporaire, avec pour mission spécifique d'examiner les graves violations du droit humanitaire international commises en ex-Yougoslavie depuis 1991, et d'en poursuivre les responsables,

—  vu qu'à cette époque, les systèmes judiciaires nationaux en ex-Yougoslavie ne pouvaient pas, ou ne souhaitaient pas, enquêter ni poursuivre les principaux responsables,

—  vu que le Tribunal a mis 161 personnes en accusation et en a jugé 116, qu'un grand nombre d'accusés se trouvent actuellement à différents stades de la procédure devant le Tribunal et que cinq accusés seulement en sont toujours au stade du pré-procès et attendent encore que débute leur procès, alors que seuls deux des individus inculpés, Ratko Mladić et Goran Hadžić, sont toujours en liberté(1),

—  vu les résolutions S/RES/1503 (2003) et S/RES/1534 (2004) du Conseil de sécurité des Nations unies demandant au Tribunal de prendre toutes mesures en son pouvoir pour terminer ses travaux d'ici à la fin de 2010 ("la stratégie d'achèvement"),

—  vu que les dates mentionnées dans la stratégie d'achèvement ont valeur d'objectifs et ne constituent pas des délais absolus,

—  vu les évaluations remises tous les six mois par le Président et le Procureur du Tribunal, conformément au paragraphe 6 de la résolution 1534 (2004) du Conseil de sécurité des Nations unies concernant les progrès accomplis dans la mise en œuvre de la stratégie d'achèvement,

—  vu la résolution A/RES/63/256 de l'Assemblée générale des Nations unies sur une proposition détaillée concernant les moyens d'inciter le personnel des Tribunaux pénaux internationaux pour le Rwanda et pour l'ex-Yougoslavie à rester à leur service, adoptée par consensus le 23 décembre 2008,

—  vu le soutien considérable et conséquent que l'Union européenne et ses États membres ont fourni au Tribunal,

—  vu qu'une coopération pleine et entière avec le Tribunal est devenue une des pierres de touche dans la politique communautaire envers les pays des Balkans occidentaux,

—  vu sa résolution du 15 janvier 2009 sur Srebrenica(2),

—  vu l'article 114, paragraphe 3, et l'article 83, paragraphe 5, de son règlement,

—  vu le rapport de la commission des affaires étrangères (A6-0112/2009),

A.  considérant que le Tribunal, situé à La Haye doivent bénéficier, ainsi que ses travaux, du soutien résolu et continu de l'Union européenne et de ses États membres,

B.  considérant que le Tribunal a émis des arrêts qui font jurisprudence concernant le génocide, les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité, et qu'il a déjà apporté une contribution considérable au processus de réconciliation dans les Balkans occidentaux, favorisant ainsi la restauration et le maintien de la paix dans la région,

C.  considérant que la coopération pleine et entière avec le Tribunal a été l'une des conditions strictes posées par l'Union dans le cadre de son engagement contractuel avec les pays de la région,

D.  considérant que le Tribunal a contribué à poser les fondations de nouvelles normes en matière de résolution des conflits et de développement post-conflits dans le monde entier, a fourni des enseignements qui pourront servir aux éventuels futurs tribunaux ad hoc et a démontré qu'une justice internationale efficace et transparente était possible, et que sa contribution au développement du droit pénal international est largement reconnue,

E.  considérant que certaines inculpations, certaines décisions et certains jugements du Tribunal ont été contestés dans différentes parties des Balkans occidentaux, et au-delà de cette région; que de précieux enseignements peuvent être tirés de ces réactions, qui feront partie de l'héritage du Tribunal, mais qui mettent également en évidence le caractère nécessaire d'une chambre d'appel et d'un programme d'information,

F.  considérant que le Tribunal continue à mener une large gamme d'activités d'information afin de rapprocher son travail des pays concernés, notamment en facilitant la couverture des procès par les médias locaux, en favorisant l'information directe de la communauté par ses agents sur le terrain et en déployant des efforts pour renforcer les capacités des institutions judiciaires nationales chargées de traiter les crimes de guerre, ainsi qu'à travers plusieurs projets tendant à identifier les meilleures pratiques,

G.  considérant que les résolutions S/RES/1503 (2003) et S/RES/1534 (2004), précitées, du Conseil de sécurité des Nations unies ont demandé que toutes les enquêtes du Tribunal et du Tribunal pénal international pour le Rwanda soient menées à bien à la fin de l'année 2004, que tous leurs procès en première instance soient achevés à la fin de l'année 2008 et que leurs travaux soient terminés en 2010; que le Tribunal a toutefois indiqué qu'il ne sera pas en mesure d'achever les procès en première instance avant la fin de l'année 2009, en raison également du grand nombre d'appels; considérant dès lors que le Conseil de sécurité des Nations unies doit adopter une nouvelle décision pour prolonger le mandat du Tribunal,

H.  considérant que le Tribunal a pris l'initiative de définir un programme qui a été adopté par le Conseil de sécurité des Nations unies dans ses résolutions précitées et qui est désormais connu sous le nom de "stratégie d'achèvement", dont l'objet est de garantir que le Tribunal mène à bien sa mission en temps voulu et en coordination avec les systèmes juridiques nationaux des pays concernés,

I.  considérant que le programme comporte trois phases et des dates-cibles pour la réalisation du mandat du Tribunal, et que l'objectif actuel est de clore l'ensemble des procédures (de première et de deuxième instances), d'ici à 2011 ou le tout début de l'année 2012; qu'afin de répondre à cet objectif, le Tribunal concentre son activité sur les hauts dignitaires soupçonnés d'être responsables de crimes commis dans sa juridiction, a transféré les affaires concernant les accusés d'importance moyenne ou moindre aux juridictions nationales compétentes et a jugé des défendeurs dans le cadre de procès joints, bien qu'il convienne de s'assurer que ces procès joints portent pas atteinte aux droits de l'accusé; considérant que les procureurs et les tribunaux nationaux peuvent engager et traiter eux-mêmes des affaires, ce qu'ils ont fait dans bon nombre de cas, mais que certains tribunaux nationaux peuvent ne pas être en mesure de, ou ne pas souhaiter, mener des actions pénales conformément aux normes internationales et aux exigences d'un procès équitable, et que le transfert aux tribunaux nationaux s'est parfois heurté à la résistance des victimes et des témoins directement impliqués,

J.  considérant que les trois chambres de première instance et la chambre d'appel du Tribunal travaillent de la façon la plus productive possible et traitent d'affaires concernant plusieurs accusés à la fois; que le renvoi d'affaires aux juridictions nationales compétentes a eu des incidences considérables sur le volume de travail global du Tribunal, mais que des facteurs indépendants de sa volonté ont entraîné certains retards et qu'il n'est pas possible d'exclure la possibilité de nouveaux retards,

K.  considérant, en outre, que les deux inculpés qui sont toujours en fuite, Ratko Mladić et Goran Hadžić, doivent être traduits en justice, et que leur arrestation dépendra de la collaboration obligatoire des États, conformément à l'article 29 du statut du Tribunal, qui concerne notamment la recherche, l'arrestation et le transfert des fugitifs, ainsi que la production de preuves conservées, par exemple, dans les archives nationales, et qu'il n'a pas toujours été répondu aux demandes d'arrestation et de transfert d'inculpés en fuite et de production de preuves,

L.  considérant que l'article 21 du statut du Tribunal prévoit le droit, pour toute personne accusée, d'être présente à son procès et que le Tribunal ne pourrait pas, même s'il se trouvait en possession de nombreux éléments de preuve, juger par défaut,

M.  considérant que l'engagement du Tribunal en faveur de l'achèvement rapide de son mandat est reconnu, mais que les affaires pendantes doivent être jugées sans qu'il soit nécessaire de se plier à des contraintes temporelles irréalistes, étant donné que ces contraintes pourraient affecter le droit de l'accusé à un procès équitable; considérant qu'aucun raccourci de procédure ne doit venir compromettre à nouveau la sécurité et le bien-être des victimes et des témoins déposant devant le Tribunal, et que la date cible envisagée dans le cadre de la stratégie d'achèvement du Tribunal ne doit pas impliquer l'immunité pour les deux inculpés toujours en fuite ou des contraintes temporelles excessives pour les procès en cours

1.  adresse au Conseil les recommandations suivantes:

   a) rappelle que l'une des valeurs fondamentales exprimées dans la décision, prise par la communauté internationale, de créer le Tribunal, figuraient la recherche de la justice et la lutte contre l'impunité; souligne, tout en soutenant pleinement le travail du Tribunal, que sa mission ne sera pas totalement réalisée si les procès en cours ne sont pas conclus sans hâte inconsidérée et si les deux inculpés toujours en fuite, Ratko Mladić et Goran Hadžić, ne sont pas traduits en justice et jugés;
   b) souligne que le fait de vouloir accélérer les procédures ne peut justifier que l'on s'écarte des exigences d'un procès équitable et rappelle l'opinion, aujourd'hui largement partagée, selon laquelle l'héritage du Tribunal ne se mesurera pas uniquement à l'aune de sa capacité à juger les responsables des crimes les plus graves relevant de sa juridiction, mais qu'il sera également tenu compte de sa capacité à le faire dans le respect des normes d'équité les plus strictes;
   c) souligne qu'il est crucial, pour que les procès en première instance et les appels puissent être menés à leur terme, de parvenir à retenir le personnel hautement qualifié du Tribunal, et que la perte des connaissances institutionnelles spécialisées nécessaires pour clore les procès en cours pourrait être aggravée par le calendrier prévu dans le cadre de la stratégie d'achèvement; salue, à cet égard, la résolution A/RES/63/256, précitée, de l'Assemblée générale des Nations unies, autorisant le Tribunal à proposer à son personnel des contrats adaptés au calendrier de la stratégie d'achèvement et à envisager la mise en place d'incitations non financières pour retenir les membres clés de son personnel;
   d) souligne que, d'une part, la date fixée dans le cadre de la stratégie d'achèvement contribue à stimuler la productivité du Tribunal mais que, d'autre part, si justice doit être rendue et si le procès de Ratko Mladić et Goran Hadžić doit avoir lieu, cette date ne peut en aucun cas marquer la fin obligatoire des activités du Tribunal;
   e) appelle donc le Conseil à déterminer, de façon urgente, si une extension de deux ans du mandat du Tribunal devrait être envisagée et si elle serait suffisante - sachant qu'une extension ne devrait pas être envisagée uniquement en termes de temps, mais également en termes de résultats - et à avancer l'examen de ces questions au sein des structures appropriées des Nations unies;
   f) demande au Conseil d'encourager le Conseil de sécurité des Nations unies à s'engager à fournir des ressources suffisantes et à soutenir le Tribunal par le biais du budget général des Nations unies jusqu'à la fin du mandat du Tribunal;
   g) invite instamment le Conseil à soutenir les efforts déployés par le Tribunal pour que les pays concernés renforcent leur coopération et intensifient leurs efforts en vue de capturer les deux inculpés toujours en fuite, permettant ainsi au Tribunal de réaliser son mandat, et à s'assurer, avec des Nations unies, qu'il est clairement entendu que ces deux inculpés devront être jugés par le Tribunal ou dans le cadre d'un mécanisme résiduel, écartant ainsi toute proposition éventuelle d'impunité;
   h) souligne que les documents essentiels pour les poursuites engagées contre le général Ante Gotovina, Mladen Markać et Ivan Čermak, devraient être remis par les autorités compétentes; souligne qu'il devrait être répondu aux demandes récemment formulées par le Procureur du Tribunal, Serge Brammertz, en ce qui concerne la localisation et la remise au Tribunal de la documentation pertinente manquante;
   i) souligne que l'Union devrait continuer à insister sur le fait que le respect des critères de Copenhague inclut l'existence d'un système judiciaire pleinement opérationnel, en mesure de traiter des procès pour violations du droit humanitaire, même lorsque le cadre du Tribunal ne sera plus opérationnel; demande au Conseil de fixer des normes précises pour l'évaluation de la performance de l'appareil judiciaire dans les pays des Balkans occidentaux au terme du Tribunal, notamment en vue de garantir que les conditions de détention sont conformes aux normes internationales et que les peines prononcées par le Tribunal sont respectées, et appelle l'Union à accroître le soutien qu'elle apporte aux enquêtes et aux procès pour crimes de guerre menés au niveau national, notamment par le biais d'une aide accordée aux autorités chargées de l'application de la loi, aux autorités judiciaires et aux autorités chargées des poursuites, qui inclurait des financements destinés à la formation et la protection des témoins;
   j) reconnaît que la souveraineté des États demeure l'un des piliers du système international, et souligne qu'il est essentiel que la communauté internationale soutienne également le développement des capacités nationales dans les Balkans occidentaux, afin que les tribunaux locaux puissent poursuivre le travail commencé par le Tribunal; soutient les financements accordés par l'Union en faveur, par exemple, de programmes d'information dans le cadre de l'instrument européen pour la démocratie et les droits de l'homme; appelle, dans ce contexte, le Conseil à envisager d'accroître son soutien à la stratégie d'achèvement du Tribunal et demande une collaboration accrue entre les instances judiciaires et les instances chargées des poursuites dans les Balkans occidentaux, notamment dans le cadre des affaires impliquant une extradition et une aide juridique mutuelle;
   k) observe qu'il sera essentiel de disposer d'un dispositif clair pour assurer les fonctions résiduelles du Tribunal après sa fermeture, afin de garantir que son héritage sera de nature à renforcer les principes qui ont inspiré sa mise en place;
   l) invite le Conseil à poursuivre sans délai, dans le cadre des structures appropriées de l'ONU, les procédures envisagées pour la mise en place d'un dispositif destiné à assurer les fonctions résiduelles immédiates et à long terme, telles que la protection des témoins, la protection contre l'intimidation des témoins, les questions d'outrage à la cour, les révisions en cas de production de preuves à décharge, le suivi des procès transférés à des tribunaux de la région (actuellement assuré par le Bureau du Procureur du Tribunal via l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE)), les conditions de détention et les questions liées à la grâce ou la commutation de peine, etc.; suggère que soit présentée au Conseil de sécurité des Nations unies une proposition concernant l'éventuelle mise en place d'un bureau conjoint chargé d'assurer les futures fonctions résiduelles du Tribunal, du Tribunal pénal international pour le Rwanda et du Tribunal spécial pour la Sierra Leone;
   m) rappelle au Conseil que l'Union devrait particulièrement s'attacher à préserver l'héritage du Tribunal, en garantissant que ses archives soient conservées en toute sécurité dans un lieu sûr et adéquat, éventuellement dans la région des Balkans occidentaux, qu'elles soient aussi complètes et accessibles que possible et que cette documentation soit disponible en ligne; est d'avis que les garanties adéquates de libre accès devraient également être offertes à l'ensemble des procureurs et des avocats de la défense et, au terme d'un délai approprié, aux historiens et aux chercheurs;
   n) souligne que l'héritage du Tribunal devrait également être lié au processus global de réconciliation; appelle, dans ce contexte, les États des Balkans occidentaux à soutenir le travail des organisations non gouvernementales et des autres institutions qui s'emploient à aider les victimes et à promouvoir le dialogue et la compréhension interethniques et contribuent à la recherche de la vérité et à la réconciliation;

2.  charge son Président de transmettre la présente recommandation au Conseil et, pour information, à la Commission, aux gouvernements et aux parlements des États membres, au Conseil de sécurité des Nations unies et au Président du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie.

(1) Lettre du Président du Tribunal international au Conseil de sécurité des Nations unies (S/2008/729) du 24 novembre 2008.
(2) Textes adoptés de cette date, P6_TA(2009)0028.

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