RAPPORT sur le statut des médecines non conventionnelles
16 mars 1997
Commission de l'environnement, de la santé publique et de la protection des consommateurs
Rapporteur: M. Paul Lannoye
- Au cours de la séance du 27 octobre 1994, le Président du Parlement européen a annoncé qu'il avait renvoyé la proposition de résolution sur le statut des médecines non conventionnelles, déposée, conformément à l'article 45 du règlement, par M. Pimenta et autres, pour examen au fond, à la commission de l'environnement, de la santé publique et de la protection des consommateurs et, pour avis, à la commission juridique et des droits des citoyens, ainsi qu'à la commission de l'emploi et des affaires sociales.
- A. PROPOSITION DE RÉSOLUTION
- B. EXPOSÉ DES MOTIFS
- Annexe
- AVIS
Au cours de la séance du 27 octobre 1994, le Président du Parlement européen a annoncé qu'il avait renvoyé la proposition de résolution sur le statut des médecines non conventionnelles, déposée, conformément à l'article 45 du règlement, par M. Pimenta et autres, pour examen au fond, à la commission de l'environnement, de la santé publique et de la protection des consommateurs et, pour avis, à la commission juridique et des droits des citoyens, ainsi qu'à la commission de l'emploi et des affaires sociales.
Au cours de sa réunion du 23 novembre 1994, la commission de l'environnement, de la santé publique et de la protection des consommateurs a décidé d'établir un rapport et, par lettre du 28 novembre 1994, en a demandé l'autorisation. Au cours de la séance du 16 janvier 1995, le Président a annoncé que la Conférence des présidents avait donné cette autorisation.
Au cours de sa réunion du 20 décembre 1994, la commission de l'environnement, de la santé publique et de la protection des consommateurs a nommé M. Lannoye rapporteur.
Au cours de ses réunions des 7 mai, 9 juillet, 3 septembre 1996 et 27 février 1997, elle a examiné le projet de rapport.
Au cours de la dernière de ces réunions, elle a adopté la proposition de résolution par 21 voix contre 4 et 2 abstentions.
Étaient présents au moment du vote les députés Collins, président; Lannoye, rapporteur et vice-président; Alber (suppléant M. Burtone), Aparicio Sánchez (suppléant M. Apolinário), Baldi (suppléant M. d'Aboville), Bébéar, Blokland, Breyer, Corbett (suppléant M. Bowe), Correia (suppléant Mme Hulthén), De Coene (suppléant Mme Kokkola), Díez de Rivera Icaza, Eisma, Féret, Florenz, Garosci (suppléant M. Cabrol), Graenitz, Hardstaff (suppléant Mme van Putten), Kirsten M. Jensen, McKenna, Kestelijn-Sierens (suppléant M. Olsson), Kronberger, Kuhn, Liese (suppléant Mme Jackson), Marinucci, Needle, Pollack, Roth-Behrendt, Sornosa Martinez (suppléant M. Bertinotti), Tamino, Trakatellis, et White.
L'avis de la commission juridique et des droits des citoyens est joint au présent rapport; le 24 mars 1995, la commission de l'emploi et des affaires sociales a décidé qu'elle n'émettrait pas d'avis.
Le rapport a été déposé le 6 Mars 1997.
Le délai de dépôt des amendements sera indiqué dans le projet d'ordre du jour de la période de session au cours de laquelle le rapport sera examiné.
A. PROPOSITION DE RÉSOLUTION
Résolution sur le statut des médecines non conventionnelles
Le Parlement européen,
- vu la proposition de résolution de M. Pimenta, M. Dell'Alba, Mme Diez de Rivera Icaza, M. Crowley, M. Ewing, M. Gonzalez Alvarez et Lord Plumb sur la "médecine complémentaire" (ou non traditionnelle) (B4-0024/94),
- vu sa résolution du 13 juin 1991 sur une directive élargissant le champ d'application des directives 65/65/CEE et 75/319/CEE concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives aux médicaments et fixant des dispositions complémentaires pour les médicaments homéopathiques[1],
- vu la directive 92/73/CEE[2] du Conseil élargissant le champ d'application des directives 65/65/CEE et 75/319/CEE concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives aux médicaments et fixant des dispositions complémentaires pour les médicaments homéopathiques,
- vu la ligne budgétaire B6-8332 du budget des C.E. pour l'exercice 1994, la ligne budgétaire B67142 avant-dernier alinéa du budget des C.E. pour l'exercice 1995, les alinéas 4 et 5 de la ligne budgétaire B6-7142 du budget des C.E. pour l'exercice 1996 qui prévoient 1 million d'écus pour la "recherche sur l'efficacité des autres méthodes thérapeutiques - chiropraxie, ostéopathie, acupuncture, naturopathie, médecine chinoise, médecine anthroposophique, phytothérapie, etc.",
- vu le rapport de la commission de l'environnement, de la santé publique et de la protection des consommateurs et l'avis de la commission juridique et des droits des citoyens (A4 0075/97),
A. considérant qu'une partie de la population des États membres de l'UE a recours à certaines médecines et thérapeutiques non conventionnelles et qu'il serait en conséquence irréaliste d'ignorer cet état de fait,
B. considérant l'opinion répandue, y compris chez certains médecins, selon laquelle différentes méthodes de traitement voire différentes approches de la santé et de la maladie ne s'excluent pas mutuellement mais peuvent au contraire être utilisées de manière complémentaire,
C. considérant l'importance d'assurer aux patients une liberté de choix thérapeutique aussi large que possible, en leur garantissant le plus haut niveau de sécurité et l'information la plus correcte sur l'innocuité, la qualité, l'efficacité et les éventuels risques des médecines dites non conventionnelles, et de les protéger contre les personnes non qualifiées,
D. considérant que l'ensemble des systèmes médicaux et disciplines thérapeutiques couverts par la dénomination "médecines non conventionnelles" ont en commun le fait que leur validité n'est pas reconnue ou n'est que partiellement reconnue; considérant qu'on peut qualifier d'"alternatif" un traitement médical ou chirurgical qui peut être appliqué en lieu et place d'un autre traitement, et de "complémentaire" un traitement donné en supplément d'un autre traitement; considérant qu'il est équivoque de parler de discipline médicale "alternative" ou "complémentaire", dans la mesure où seul le contexte précis dans lequel la thérapie est utilisée permet de déterminer si celle-ci est en l'occurrence alternative ou complémentaire; considérant qu'une discipline médicale alternative peut également être complémentaire; considérant que, dans le présent rapport, le terme "médecines non conventionnelles" recouvre les notions de "médecines alternatives", "médecines douces" et "médecines complémentaires" indistinctement utilisées dans certains États membres pour désigner les autres disciplines médicales que la médecine conventionnelle,
E. considérant que le médecin peut, selon sa compétence et sa conscience, recourir à l'ensemble des moyens et de la science que comporte tout type de médecine, afin de préserver au maximum la santé de ses patients,
F. considérant qu'il existe un large éventail de disciplines médicales non conventionnelles et que certaines d'entre elles bénéficient d'une forme de reconnaissance légale dans certains États membres et/ou d'une structure organisationnelle au plan européen (formation de base commune, code de déontologie,...) en particulier la chiropraxie, l'homéopathie, la médecine anthroposophique, la médecine traditionnelle chinoise ( en ce compris l'acupuncture), le shiatsu, la naturopathie, l'ostéopathie, la phytothérapie, etc ..., considérant qu'il existe un large éventail de disciplines médicales non conventionnelles, mais que seules certaines d'entre elles satisfont de façon cumulative aux critères suivants: bénéficier d'une certaine forme de reconnaissance légale dans certains États membres, disposer d'une structure organisationnelle et que la discipline s'auto-réglemente au plan européen,
G. considérant le traité CE et en particulier le Titre III, articles 52 à 66, concernant la libre circulation des personnes et la liberté d'établissement; considérant l'entrave à ces libertés que constitue l'hétérogénéité en matière de statut et de reconnaissance de chacune des disciplines médicales non conventionnelles au sein de l'Union européenne; considérant le fait que la liberté d'exercice dont jouissent actuellement certains praticiens de santé dans leur pays ne devrait en aucun cas se voir restreinte par une modification du statut ou de l'état de reconnaissance de ces disciplines au niveau européen, ni limiter la liberté de choix thérapeutique des patients vis-à-vis des traitements médicaux non conventionnels; considérant les obligations découlant du Traité pour les États membres, et plus précisément, celles prévues à l'article 57, paragraphes 1, 2 et 3,
H. considérant le fait qu'une évolution s'est déjà clairement manifestée soit par l'adoption de législations nationales qui libéralisent l'exercice des médecines non conventionnelles en même temps qu'elles réservent certains actes spécifiques à des praticiens autorisés (loi adoptée le 9 novembre 1993 par le Sénat néerlandais intitulée "Beroepen in de Individuele Gezondheidszorg"), soit par l'adoption d'une réglementation spécifique (loi sur les ostéopathes de 1993 et loi sur les chiropracteurs de 1994 au Royaume-Uni, législation sur la chiropraxie au Danemark de 1991, en Suède 1989 et en Finlande), ou par l'officialisation de la formation (la chiropraxie au Royaume-Uni et dans les pays nordiques) ou encore par l'introduction des médicaments dans la pharmacopée (médecine anthroposophique en Allemagne),
I. considérant qu'une législation européenne en matière de statut et d'exercice des médecines non conventionnelles constituerait une garantie pour les patients; considérant par ailleurs que chaque discipline devrait être à même d'organiser la profession au niveau européen (code de déontologie, registre de la profession, critères et niveau de la formation),
J. considérant le fait qu'il est préalablement nécessaire d'identifier clairement chacune des disciplines médicales non conventionnelles; considérant qu'à cette fin, il convient de mener les études cliniques, évaluations des résultats de traitement, études fondamentales (mécanismes d'action) et autres études scientifiques ou recherches académiques pour évaluer l'efficacité des thérapies mises en oeuvre, étant entendu que cette évaluation doit avoir lieu selon les méthodologies appropriées aux différentes disciplines,
K. considérant le fait que la réglementation et la coordination des critères de formation imposés aux praticiens de disciplines médicales non conventionnelles constitueraient une garantie indispensable pour les citoyens, considérant qu'il est impératif, tant dans l'intérêt des patients que de celui des praticiens, que cette harmonisation s'opère à un haut niveau de qualification, résultant d'un processus rigoureux d'autorégulation au sein même de la profession et débouchant par la suite sur l'obtention d'un diplôme d'État répondant aux exigences spécifiques de chaque discipline ; considérant que les niveaux de formation doivent être appropriés aux spécificités des différentes disciplines médicales non conventionnelles,
L. considérant que la formation des praticiens de médecine conventionnelle devrait inclure une initiation à certaines disciplines médicales non conventionnelles,
M. considérant le fait que la pharmacopée européenne doit pouvoir inclure toute la gamme des produits pharmaceutiques et d'herboristerie des médecines non conventionnelles afin de donner aux thérapeutes la possibilité d'exercer correctement leur profession et, par la même occasion, de garantir aux patients que l'on procédera à une évaluation précise des médicaments non conventionnels; considérant que, pour les mêmes raisons, il est nécessaire de revoir les directives 65/65/CEE, 75/319/CEE et 92/73/CEE ainsi que le règlement 2309/93 instaurant l'Agence européenne pour l'évaluation des médicaments, garantissant ainsi aux patients la qualité et l'innocuité des médecines non conventionnelles,
N. considérant que le Conseil, dans sa résolution 95/C 350/05 du 30 novembre 1995 sur les préparations à base de plantes médicinales[3], invite la Commission à clarifier le "statut légal des plantes médicinales eu égard aux dispositions communautaires en matière de spécialités pharmaceutiques" et à étudier "les conditions spécifiques à remplir pour assurer la protection de la santé publique",
O. considérant la nécessité de prouver la qualité, l'efficacité et l'innocuité des produits thérapeutiques à l'examen et de prévoir la publication de monographies sur chacun des produits,
P. considérant le fait qu'une législation en matière de compléments alimentaires (vitamines, oligoéléments, etc...), compte tenu de l'état actuel de la législation, contribuerait à protéger le consommateur sans restreindre sa liberté d'accès et de choix et garantirait au praticien qualifié la liberté de prescrire l'usage de tels produits,
Q. considérant l'importance que revêtira le développement et l'introduction, autant que possible, des médecines non conventionnelles dans le secteur zootechnique aux fins de parvenir à une meilleure protection des consommateurs contre les résidus pharmaceutiques dans les produits carnés et d'améliorer le bien-être des animaux dans les élevages actuels en prévision, notamment, de la réglementation désormais imminente des techniques d'élevage biologique,
R. considérant la nécessité d'envisager une phase transitoire permettant à chaque praticien aujourd'hui en activité de se conformer à la nouvelle législation, et de mettre en place une commission d'équivalence qui sera chargée d'examiner, cas par cas, la situation des praticiens concernés,
1. demande à la Commission de s'engager, si les résultats de cet examen le permettent, dans un processus de reconnaissance des médecines non conventionnelles et, à cette fin, de prendre les mesures nécessaires pour favoriser la mise en place de comités appropriés;
2. demande à la Commission d'élaborer en priorité une étude approfondie sur l'innocuité, l'opportunité, le champ d'application et le caractère complémentaire et/ou alternatif de chaque discipline non conventionnelle, ainsi qu'une étude comparative entre les modèles juridiques nationaux auxquels sont affiliés les praticiens des médecines non conventionnelles; invite également la Commission à se baser sur ces deux études pour la mise en place d'une éventuelle législation de coordination des médecines non conventionnelles; demande à la Commission de présenter, en priorité pour les nombreuses disciplines médicales non conventionnelles bénéficiant d'une certaine forme de reconnaissance et d'une organisation au niveau européen, les projets de directives nécessaires pour garantir la liberté d'établissement et la liberté de prestation de services des praticiens des médecines non conventionnelles (tel que préconisé par l'article 57 paragraphe 3 du Traité), ainsi que le libre accès aux produits thérapeutiques nécessaires à l'exercice de leur discipline, et de revoir, en conséquence, la législation existante visant les professions médicales et les produits thérapeutiques nécessaires à l'exercice de ces disciplines;
3. invite la Commission, lorsqu'elle établira une législation européenne sur les médecines non conventionnelles, à distinguer clairement entre les disciplines non conventionnelles à caractère "complémentaire" et les médecines dites "alternatives", c'est-à-dire celles qui remplacent la médecine conventionnelle;
4. invite le Conseil et le Parlement européen, à l'issue des travaux préliminaires visés au paragraphe 2 du présent rapport, à favoriser le développement de programmes de recherche dans le domaine des médecines non conventionnelles intégrant l'approche individuelle et holistique, le rôle préventif ainsi que les spécificités des disciplines médicales non conventionnelles;
5. invite la Commission à faire rapport dès que possible au Conseil et au Parlement européen sur les résultats des études et recherches déjà menées à bien dans le cadre de la ligne budgétaire B-7142, affectée depuis 1994 à la recherche sur l'efficacité de l'homéopathie et autres médecines non conventionnelles;
6. invite la Commission à veiller, lors de l'examen de l'efficacité des thérapies appliquées dans le cadre de la médecine non conventionnelle, à ce que ces thérapies, telles qu'elles sont appliquées dans les États membres, n'utilisent pas comme médicaments des organes d'espèces animales menacées et, partant, ne favorisent pas le commerce illicite de ces organes;
7. invite la Commission à présenter un projet de directive en ce qui concerne les compléments alimentaires qui sont souvent à la frontière entre le produit diététique et le médicament. Cette législation devrait permettre de garantir une bonne pratique de fabrication en vue de la protection du consommateur, sans restreindre la liberté d'accès ou de choix et assurer la liberté à tout praticien de recommander de tels produits: invite la Commission à lever les barrières commerciales entre les États, accordant aux fabricants de produits de santé la liberté d'accès à tous les marchés de l'UE;
8. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, aux États membres, à la Commission et au Conseil de l'Europe.
B. EXPOSÉ DES MOTIFS
1. Introduction
Les enquêtes d'opinion effectuées dans différents États membres de l'Union européenne confirment, si besoin en était, l'intérêt croissant des citoyens pour les médecines non conventionnelles[1]. Dans les pays pour lesquels des statistiques sont disponibles, les médecines non conventionnelles sont utilisées par 20 à 50 % de la population.
Cet intérêt croissant tient à une certaine désaffection pour la médecine conventionnelle dont l'extraordinaire développement technologique s'est traduit par un succès indéniable sur le plan médical mais en même temps par une désharmonisation du rapport praticien-patient. En outre, l'arsenal médicamenteux sur lequel se base la médecine conventionnelle est efficace certes mais s'attaque surtout aux symptômes et entraîne souvent des effets indésirables voire de graves états de dépendance.
On observe une tendance à la recherche d'une médecine plus humaine qui prendrait en charge l'être humain en tant que tel et pas seulement sa pathologie. D'où le regain d'intérêt pour des thérapeutiques traditionnelles et des remèdes plus doux qui visent moins à détruire un agent pathogène que rendre au corps humain sa capacité de résister à cet agent.
Cela ne signifie pas cependant que médecines conventionnelles et non conventionnelles s'excluent mutuellement. Au contraire, elles peuvent agir en complémentarité au plus grand bénéfice des patients.
Ces médecines non conventionnelles sont très nombreuses, il est impossible de les citer toutes. Il reste qu'elles ont un point commun, elles ne sont pas ou diversement reconnues par les autorités médicales même si au cours de ces dernières années des tentatives ont été faites d'une part pour mettre en cause les préjugés d'irrationalité scientifique qui leur sont attachés et d'autre part dans la pratique par des expériences de complémentarité de traitement proposées par des médecins à leurs patients.
2. La législation dans les États membres de l'Union européenne
En matière de soins de santé, deux conceptions totalement opposées coexistent aujourd'hui au sein de l'Union européenne. La première considère que seul le corps médical (les médecins) peut pratiquer les soins de santé, soigner les malades, exception faite pour certaines professions auxquelles il est permis de pratiquer des actes médicaux ou paramédicaux déterminés. Hormis ces cas spécifiques, il y a exercice illégal de la médecine. Cette vision est celle qui s'est imposée dans les pays du Sud, ainsi qu'en France, en Belgique et au Luxembourg.
Ceci dit, l'existence de fait d'une pratique des disciplines médicales non conventionnelles dans ces mêmes pays, de même que la demande croissante émanant des patients, a entraîné certaines tolérances, par exemple: en France, l'acupuncture, reconnue par l'Académie de médecine depuis 1950, peut être pratiquée légalement par les docteurs en médecine; par ailleurs, les médicaments homéopathiques font l'objet d'un remboursement par la sécurité sociale au titre de prescriptions médicales.
La seconde, dominante dans les pays du nord de l'Europe, adopte l'approche inverse : toute personne qui le souhaite peut pratiquer les soins de santé mais certains actes sont strictement réservés aux médecins qui, en outre, détiennent l'autorité et sont la référence en matière d'organisation des soins et de politique de santé.
Au Royaume-Uni et en Irlande, en vertu du droit coutumier, toute personne non qualifiée, c'est-à-dire non médecin, peut pratiquer une thérapie à condition de ne pas prétendre au titre de docteur en médecine. Cette situation présente l'immense inconvénient, en l'absence de reconnaissance légale des formations et des titres, de ne protéger ni les praticiens sérieux et compétents ni les patients face à des personnes peu qualifiées ou d'éventuels charlatans. Cette carence est comblée au Royaume-Uni grâce à l'"Osteopaths Act" de 1993 et au "Chiropracters Act" de 1994.
Aux Pays-Bas, une loi relative aux Professions du Secteur des Soins de santé individuels (BIG wet = Beroepen in de Individuele Gezondheidszorg) a été adoptée en novembre 1993. Elle autorise en principe à quiconque la pratique médicale. Toutefois, la loi énumère les actes réservés, c'est-à-dire qui ne peuvent être posés que par des praticiens autorisés. De plus, la loi assortit la liberté de la pratique médicale d'une disposition pénale : nuire à la santé d'un individu est passible d'une peine.
En Allemagne, la liberté de soigner existe depuis 1873 et la profession de Heilpraktiker (praticien de santé) est reconnue depuis 1939; même si aucune formation spécifique n'est exigée, un examen de connaissances médicales de base est requis de même qu'une inscription au registre de la profession[2]. En outre, tant les médicaments homéopathiques qu'anthroposophiques sont inclus dans la pharmacopée nationale (avec commission spécifique créée en 1978 où siègent des représentants de la discipline concernée).
Enfin, au Danemark et en Suède, les non médecins et les paramédicaux peuvent exercer les médecines non conventionnelles dans certaines limites fixées par les lois respectives du 14 mai 1970 et nΊ 409 de 1960. Par ailleurs, la chiropraxie est légalement reconnue comme profession de soin de santé au Danemark (loi nΊ 415 du 06.06.1991), en Suède (loi nΊ 1988/89 : 96) et en Finlande.
3. La législation communautaire
La diversité des approches et les législations des États membres entraînent un traitement inégal des citoyens européens. Ainsi, un praticien de santé officiellement agréé dans un pays peut se voir traduire en justice dans un autre État membre pour exercice illégal de la médecine. Ceci est contraire aux principes énoncés dans le Traité de Rome notamment la libre circulation des personnes et la liberté d'établissement (titre III, art. 52 à 66 du Traité).
Si depuis 1975, les professions médicales et para-médicales ont fait l'objet de plusieurs directives, ce n'est pas le cas pour les médecines non conventionnelles si ce n'est de manière indirecte par l'adoption de la directive 92/73/CEE relative aux médicaments homéopathiques.
Il n'est pas interdit de penser que les intérêts de l'industrie pharmaceutique ont prévalu sur ceux des citoyens. Comment expliquer en effet que l'on ne soit pas encore arrivé à définir une méthodologie spécifique pour les essais cliniques des médicaments homéopathiques alors que la méthodologie conventionnelle est reconnue inadaptée ? Comment expliquer en outre que le règlement 2309/93 instaurant l'Agence européenne pour l'évaluation des médicaments n'inclue pas les médicaments homéopathiques, anthroposophiques ou phytothérapiques dans les procédures décentralisées d'agréation.
Face à cette carence, le Parlement se doit d'inviter la Commission à prendre les initiatives nécessaires pour, selon l'article 57, paragraphe 3 du Traité "coordonner les conditions d'exercice des professions médicales et paramédicales". Cela ne signifie pas qu'il faille uniformiser les conditions d'exercice des disciplines médicales non conventionnelles mais dans le respect du principe de subsidiarité garantir à tout praticien le droit d'établissement en lui donnant les moyens d'exercer sa profession.
Pour ce faire, il est indispensable de légaliser et d'harmoniser le statut des praticiens non conventionnels, de fixer les conditions de formation, d'inclure les médicaments correspondants dans la pharmacopée européenne et de prévoir la prise en charge des soins et des médicaments par les organismes de sécurité sociale.
4. Vers le pluralisme en matière médicale
Les deux objectifs à poursuivre étant d'une part de répondre aux exigences du Traité d'Union européenne et aux revendications légitimes des praticiens des médecines non conventionnelles et, d'autre part, de répondre à une demande croissante des patients, il s'agit de mettre en adéquation offre et demande en partant d'un double principe de liberté : liberté pour les patients de choisir la thérapeutique de leur choix et liberté pour les praticiens d'exercer leur profession.
Il va de soi que ce double principe implique pour le patient la garantie d'innocuité et celle de la qualité des traitements dispensés. Pour les disciplines bénéficiant d'ores et déjà d'une forme de reconnaissance légale dans un ou plusieurs États membres et/ou d'une organisation professionnelle au plan européen[3], la garantie d'innocuité doit être considérée comme établie, pour autant qu'on ait affaire à un praticien compétent. Quant à leur efficacité, elle a fait l'objet d'études, certes peu nombreuses, mais généralement probantes, dès lors qu'on accepte de ne pas se limiter à évaluer l'efficacité sur base de la méthodologie et des critères en vigueur en médecine conventionnelle (essentiellement les essais cliniques en double aveugle).
C'est ainsi que la chiropraxie est maintenant reconnue scientifiquement comme méthode thérapeutique à la suite de plusieurs études commandées par des autorités publiques, notamment par le Conseil de la Recherche médicale en Grande-Bretagne, organisme financé par le gouvernement[4].
L'homéopathie accumule à ce jour les preuves concluantes de son efficacité[5], même si la communauté scientifique orthodoxe n'est pas encore convaincue. On pourrait multiplier les exemples relatifs à l'acupuncture, la médecine traditionnelle chinoise, l'ostéopathie et bien d'autres méthodes de traitement.
Comme l'a écrit la Commission elle-même, la preuve des effets thérapeutiques "n'est pas possible selon les méthodes scientifiques généralement admises, ou suscite, pour le moins, de sérieuses controverses"[6]. Cette ouverture vers le pluralisme en matière médicale a déjà trouvé un prolongement concret par l'adoption des budgets 1994, 1995 et 1996. En effet, la ligne budgétaire B6-8332 du budget des C.E. pour l'exercice 1994 a créé un nouveau poste de 1 million d'écus pour la recherche en homéopathie; la ligne budgétaire B6-7142 avant-dernier alinéa du budget des C.E. pour l'exercice 1995 demandait un montant de 3 millions d'écus destinés à la poursuite de la recherche sur l'efficacité de l'homéopathie et les alinéas 4 et 5 de la ligne budgétaire B6-7142 du budget des C.E. pour l'exercice 1996 prévoient 1 million d'écus pour la "recherche sur l'efficacité des autres méthodes thérapeutiques - chiropraxie, ostéopathie, acupuncture, naturopathie, médecine chinoise, médecine anthroposophique, phytothérapie, etc. -"
Il est clair que pour accompagner et légitimer le processus de reconnaissance des disciplines médicales non conventionnelles, il faut aller plus loin : organiser le dialogue entre les milieux universitaires et les experts de chaque discipline; mener des programmes de recherche pluridisciplinaire sur base de méthodologies définies en commun et de critères de validité appropriés. Quand un effet dû à un produit médicinal homéopathique, à une technique ostéopathique ou autre est ressenti par le patient, il n'y a pas nécessairement causalité directe. Les études cliniques, les évaluations des résultats de traitement et d'autres études scientifiques ou recherches académiques sont en outre nécessaires afin d'analyser le fait observé et la relation. L'hypothèse est qu'un produit médicinal homéopathique, une manipulation ostéopathique ou un traitement par acupuncture produit un effet et que cela doit être démontrable.
Cette nécessité de prouver l'effet thérapeutique ne doit cependant pas aboutir à discriminer les disciplines non conventionnelles par rapport à la médecine conventionnelle : de nombreuses pratiques médicales validées par elle le sont bien plus sur base d'avis émis par le corps médical que sur base d'études scientifiques rigoureuses. Néanmoins, il est correct, en principe, d'affirmer qu'une division entre "science" et "non-science" est à la fois raisonnable et sujette à modification. Dans la mesure où un nombre croissant de traitements et de systèmes complets sont validés scientifiquement, ils cessent d'être "non orthodoxes" et passent dans la pratique quotidienne, quittant par le fait même la sphère des thérapies "non conventionnelles". En réalité, il est plus intelligent de parler, non pas d'une division pure et simple ou rigide entre "science" et "non science", mais d'un éventail fluctuant de preuves et d'acceptabilité, tel qu'on a pu le constater à de multiples reprises tout au long de l'histoire de la science.
5. La formation des praticiens
La garantie de qualité des médecines non conventionnelles doit être assurée par une formation appropriée des praticiens sanctionnée par l'obtention d'un diplôme. Là encore il ne s'agit pas d'uniformiser car le niveau de formation nécessaire pour une qualification professionnelle optimale varie inévitablement d'une discipline à l'autre.
Des systèmes médicaux à part entière tels que l'homéopathie, la médecine anthroposophique, la médecine traditionnelle chinoise (MTC) ou la naturopathie par exemple, sont, en principe, aussi vastes et complets dans leur application que la médecine occidentale conventionnelle, même si les champs de la pathologie et de la thérapeutique couverts par ces différentes médecines, ne sont pas exactement superposables. Un nombre croissant de praticiens de ces systèmes cherchent à maintenir ou à acquérir une autonomie de diagnostic, de traitement et de prise en charge des cas médicaux. De même, de plus en plus de patients qui ont recours à ces thérapies ne considèrent pas leurs praticiens comme des spécialistes traitant une douleur ou un organe mais bien comme des généralistes à qui ils décident de confier la prise en charge de leur santé. Bien que cela ne devrait pas exclure une collaboration intelligente avec les médecins conventionnels ou d'autres praticiens de médecine complémentaire, cela demande un degré d'autonomie professionnelle qui comporte un haut niveau de responsabilité à l'égard du bien-être du patient, et exige une formation aussi rigoureuse que celle actuellement requise pour l'exercice de la médecine occidentale conventionnelle. À cette fin, les études menant à une qualification professionnelle complète dans ces systèmes devraient et pourraient s'effectuer soit en faculté, soit en établissement privé, agréé et subventionné par les autorités nationales. Elles doivent permettre l'obtention d'un diplôme d'État ou reconnu par lui.
D'autres disciplines, telles que la réflexologie, l'aromathérapie, les massages traditionnels orientaux, l'iridologie, etc., sont exercées en complément de techniques thérapeutiques plus vastes comme la médecine occidentale conventionnelle, l'homéopathie, la phytothérapie, la naturopathie, etc., ou en complément l'un de l'autre, et les praticiens ne conçoivent généralement pas d'exercer en toute autonomie. Le diagnostic et les compétences qui y sont liées devraient se limiter à l'interprétation des symptômes ou des conditions déjà identifiées par les praticiens généralistes (de médecine conventionnelle ou autre). Il s'avérerait, par conséquent, inopportun d'exiger de tels praticiens une formation universitaire complète, mais il faut prévoir tout au moins une qualification de haut niveau.
Enfin, il existe, et existera encore pour quelque temps, des praticiens de l'homéopathie, de la phytothérapie, de l'acupuncture et d'autres systèmes médicaux majeurs, qui préfèrent considérer leur rôle comme complémentaire à celui de personnes plus largement ou mieux qualifiées (bien souvent, des docteurs en médecine conventionnelle). De tels praticiens ne recherchent pas leur autonomie mais préfèrent laisser les questions de diagnostic et de suivi médical global des patients à des médecins généralistes, et adresseront les malades à des consultants en hôpital en cas de nécessité. Ici aussi, des qualifications complètes de niveau universitaire semblent inappropriées. Il est cependant clair que les praticiens en question devront posséder une connaissance étendue du système dans lequel ils entendent exercer, sans quoi nous verrions apparaître un système à deux vitesses, source de confusion pour les patients.
6. Légaliser et harmoniser le statut des praticiens
Au-delà de la formation de haut niveau requise pour pratiquer les différentes thérapeutiques non conventionnelles avec garantie maximale de qualité pour les patients, il est essentiel dans le même esprit de codifier le statut professionnel des praticiens.
La plupart des disciplines médicales non conventionnelles, et notamment celles mentionnées explicitement dans ce rapport, sont d'ores et déjà organisées, dans la plupart des États membres voire au plan européen. Cela signifie notamment qu'existe un code de conduite professionnelle définissant les règles à respecter par les membres actifs de la profession de même qu'un registre des membres de ladite profession. En l'absence de statut légal, plusieurs associations professionnelles coexistent parfois dans certains États membres, chacune ayant ses propres code de conduite et registre; a fortiori, entre États membres, des disparités importantes apparaissent.
Une initiative européenne, dans la logique de celle qui a présidé à la confection des directives concernant la liberté d'établissement et de prestation de services pour les médecins, les infirmiers, les dentistes et les sages-femmes, devra non seulement harmoniser le statut des professionnels de santé des disciplines non conventionnelles au sein de l'Union européenne mais aussi au sein des États membres pour lesquels aucune reconnaissance légale n'existe aujourd'hui. Cette reconnaissance ne peut se définir sous la tutelle du corps médical et de ses organes représentatifs nationaux et européens, dans la mesure où ces "nouvelles" disciplines médicales ont une approche autonome (holistique) et spécifique (domaine de connaissance différent).
La mise en place de commissions d'experts où seront représentés, sur une base paritaire, les praticiens de la discipline concernée et les représentants du corps médical est une réponse qui semble adéquate pour évaluer l'efficacité des méthodes thérapeutiques, définir le champ de la responsabilité et les pratiques réservées, et se prononcer sur la reconnaissance des différentes médecines ou thérapeutiques non conventionnelles. Pour ce qui est de son organisation interne (code de déontologie, registre de la profession, mise à niveau en matière de formation des praticiens actuellement en activité), chaque discipline doit pouvoir agir de manière autonome.
7. Élargir le champ d'action de la sécurité sociale
L'absence de statut légal des disciplines médicales non conventionnelles dans la plupart des États membres rend difficile leur prise en charge par le système de sécurité sociale existant. Deux approches se sont développées à cet égard dans l'Union européenne. La première consiste à intégrer partiellement certaines de ces disciplines; c'est le cas par exemple de la France où les médicaments homéopathiques font l'objet d'un remboursement par la Sécurité sociale alors que l'homéopathie ne bénéficie d'aucune reconnaissance légale et que les prestations des homéopathes ne font pas l'objet d'un tarif de remboursement différencié. La seconde approche, beaucoup plus répandue, voit intervenir les caisses d'assurances privées qui acceptent de mettre en place un système parallèle de remboursement.
Aucune de ces deux approches n'est durable. La première du fait de son incohérence, la seconde parce que sa généralisation s'inscrit dans une logique de privatisation de la sécurité sociale dangereuse pour l'évolution de la société.
Il est logique que, dès lors qu'une thérapie est reconnue comme efficace, son remboursement par la sécurité sociale soit assuré. Il ne peut y avoir libre choix thérapeutique pour les patients même s'il y a reconnaissance légale des disciplines médicales on conventionnelles dans le cas d'une discrimination au niveau du remboursement par la sécurité sociale.
Tous les régimes européens de sécurité sociale connaissent des déficits graves. Ceci ne doit pas cependant justifier une exclusion des médecines non conventionnelles, leur prise en compte entre autres sous leurs aspects préventifs doit s'inscrire dans une réforme globale des systèmes sociaux qui pourrait envisager un mécanisme de remboursement basé sur le coût global prévisionnel d'une maladie et non seulement sur celui de traitements ou de médicaments.
Ensuite tout thérapeute désirant se conventionner doit se soumettre aux mêmes obligations, acceptation des barèmes médico-mutualistes et contrôle de l'opportunité du traitement et prescriptions. Cependant, ce contrôle doit être exercé par des experts de la profession concernée.
Il doit rester possible aux médecins et aux praticiens des médecines non conventionnelles qui le souhaitent de ne pas souscrire à une convention médico-mutualiste pour autant que les patients en soient clairement et préalablement informés. D'autre part, on ne peut exclure la possibilité pour les patients qui le désirent de souscrire auprès d'assurances privées des contrats visant à la prise en charge des frais médicaux non remboursés.
8. Intégrer les remèdes des médecines non conventionnelles dans la pharmacopée européenne
La pharmacopée européenne, telle qu'élaborée par le Conseil de l'Europe, doit s'ouvrir à d'autres pharmacopées, notamment aux plantes médicinales de la médecine chinoise.
Rien ne sert de légiférer en matière de statut des médecines non conventionnelles, si en même temps on ne donne pas la possibilité aux praticiens de disposer de la gamme des produits thérapeutiques qu'ils jugent indispensables. D'autant que le haut niveau de formation envisagé doit pouvoir effacer les craintes liées aux risques quant à une mauvaise utilisation des médicaments. Une révision des directives 65/65/CEE et 75/319/CEE, dans un tel contexte, s'impose. Cette révision devra envisager la libre circulation de tous les médicaments, quelle que soit leur nature, pour autant qu'ils aient été agréés par une des médecines non conventionnelles, selon ses propres critères. Cette révision devra également porter sur le contenu des protocoles d'identification des matières premières entrant dans la fabrication des médicaments. Outre les tests biologiques, il sera nécessaire d'inclure la réalisation des analyses macroscopiques et chromatographiques. D'autre part, une commission d'évaluation composée, pour chaque État membre, de praticiens qualifiés des disciplines médicales non conventionnelles, de chercheurs, de représentants des producteurs pharmaceutiques et d'associations de consommateurs compétents en la matière, ainsi que de représentants de la Commission donnera son accord sur les critères de qualité des produits, de même que sur les normes d'efficacité et d'innocuité sur lesquelles seront basées les monographies publiées dans la pharmacopée européenne. Il est nécessaire d'adapter, dans le même esprit, le règlement 2309/93 instaurant l'Agence européenne pour l'évaluation des médicaments.
De plus, à l'arsenal juridique existant, il faudra ajouter une législation européenne en ce qui concerne les compléments alimentaires qui sont souvent à la frontière entre l'aliment diététique et le médicament. Cette législation devra permettre de garantir une meilleure qualité en vue de la protection du consommateur et, éviter, en raison du vide juridique actuel, que ne soient intentés des procès pour exercice illégal de la pharmacie à l'encontre des fabricants et/ou vendeurs desdits compléments.
Il faut cependant rendre la Communauté attentive aux importations en provenance des pays tiers dans lesquels des législations différentes régissent les mêmes produits. Il faudra pouvoir exiger de la part des importateurs une transparence quant aux composants entrant dans une spécialité et leur qualité, à défaut de quoi, la Communauté devra interdire l'importation de produits venant de pays qui refusent d'appliquer des normes de qualité et de précision indispensables.
9. Assurer la transition
Il est clair qu'une harmonisation ne pourrait se réaliser du jour au lendemain. Aussi, il faudra décider un moratoire permettant de suspendre les poursuites judiciaires pour exercice illégal de la médecine, exercées, dans certains États membres (notamment en France) aujourd'hui, à l'encontre des praticiens des disciplines non conventionnelles mentionnées dans le présent rapport. D'autre part, on ne peut évincer tous ceux qui à ce jour ont suivi une des filières et qui professent. Il devra donc être mis en place une commission d'équivalence, composée d'experts de la discipline concernée et d'enseignants académiquement qualifiés, qui sera chargée d'examiner, cas par cas, la situation des personnes concernées et leurs diplômes, ainsi que les mises à niveau éventuellement nécessaires.
- [1] ()Par médecines non conventionnelles, on entend par opposition aux notions de médecines alternatives et/ou complémentaires qui sont utilisées dans le cadre de la médecine conventionnelle (par exemple, le terme "alternatif" est utilisé couramment lorsqu'il décrit un traitement médical qui peut se substituer à un traitement chirurgical et inversement) des disciplines ou pratiques médicales comme l'anthroposophie, l'homéopathie, la médecine chinoise ou la naturopathie qui sont des systèmes médicaux à part entière et qui sont soustendues par des concepts théoriques et/ou philosophiques et pour lesquelles la maladie est vue moins comme due à l'action d'agents extérieurs mais plutôt comme un déséquilibre de l'organisme.
- [2] ()Le Heilpraktiker peut, s'il est détenteur d'une approbation (Erlaubnis), pratiquer les disciplines non conventionnelles.
- [3] ()C'est notamment le cas de l'homéopathie, la phytothérapie, la médecine anthroposophique, la naturopathie, l'acupuncture, la médecine traditionnelle chinoise, l'ostéopathie et la chiropraxie.
- [4] ()-Randomised comparison of chiropractic and hospital outpatient treatment for low back pain of mechanical origin - T.W. Meade, Sandra Dyer, Wendy Browne, Joy Townsend, A.O. Frank, The Medical Research Council Epidemiology and Medical Care Unit, Northwick Park Hospital,Harrow, England, published in the British Medical Journal, Volume 300, 2 June 1990. -Randomised comparison of chiropractic and hospital outpatient treatment for low back pain: results from extended follow-up - T.W. Meade, Sandra Dyer, Wendy Browne, Joy Townsend, A.O. Frank, The Medical Research Council Epidemiology and Medical Care Unit, Northwick Park Hospital, Harrow, England, published in the British Medical Journal, Volume 311, 5 August 1995.
- [5] () -WALACH, H. (1992). Wissenschaftliche Homöopathische Arzneimittelprüfung. Doppelblinde crossover-Studie einer homöopathischen Hochpotenz gegen Placebo. Heidelberg : Haug. -LINDE K., JONAS W.B., MELCHAT D., WORKU F., WAGNER H., EITEK F. (1994). Human and Experimental Toxicology. in : Critical review and meta-analysis of serial agitated dilutions in experimental toxicology, nΊ 13, pp. 481-492. -KLEIGNEN J., KNIPSCHILD P., ter RIET G. (1991). Clinical trials of homeopathy : a meta analysis. In British Medical Journal, nΊ 302, pp. 316-323.
- [6] ()COM (90) 72 final, p. 3.
Annexe
PROPOSITION DE RÉSOLUTION (B4-0024/94) déposée, conformément à l'article 45 du règlement, par les députés PIMENTA, DELL'ALBA, DIEZ DE RIVERA ICAZA, CROWLEY, EWING, GONZALEZ ALVAREZ et Lord PLUMB sur la "médecine complémentaire" (ou non traditionnelle)
Le Parlement européen,
considérant qu'un pourcentage très important de la population (de 18 à 75% selon les pays) a accès à des thérapeutiques "complémentaires",
considérant que des mesures doivent être prises pour garantir aux patients le libre accès au traitement de leur choix, assorti de toutes les garanties nécessaires,
considérant qu'une législation européenne sur l'exercice légal de la "médecine complémentaire" offrirait l'une de ces garanties,
considérant que le libre choix du traitement devrait, parallèlement à d'autres possibilités, pouvoir être couvert par les régimes de sécurité sociale qui ne devraient faire preuve d'aucune discrimination en remboursant les prestations et les produits médicamenteux délivrés dans le cadre de la "médecine complémentaire",
considérant qu'afin de garantir le droit d'établissement des personnes, il convient, conformément à l'article 57 paragraphe 3 du traité, de supprimer les restrictions, en coordonnant les conditions d'exercice des professions médicales, paramédicales et pharmaceutiques dans les différents États membres,
invite la Commission à prendre les mesures nécessaires pour harmoniser le statut des diverses disciplines de la "médecine complémentaire";
invite le Conseil à adopter une législation en la matière afin de garantir aux patients le libre choix du traitement, assorti de toutes les garanties nécessaires, et de garantir de manière effective aux praticiens le droit d'établissement;
invite également le Conseil à transmettre une recommandation aux États membres en vue de la prise en charge de la "médecine complémentaire" par les régimes de sécurité sociale;
AVIS
(article 147 du règlement)
à l'intention de la commission de l'environnement, de la santé publique et de la protection des consommateurs
sur le statut des médecines non conventionnelles
Commission juridique et des droits des citoyens
Rapporteur pour avis: M. Siegbert Alber
PROCÉDURE
Au cours de sa réunion du 29 octobre 1996, la commission juridique et des droits des citoyens a nommé M. Siegbert Alber rapporteur pour avis.
Au cours de sa réunion des 25 et 26 novembre 1996, la commission a procédé à un échange de vues.
Elle a examiné le projet d'avis au cours de sa réunion des 27 et 28 janvier 1997 et a adopté, au cours de cette dernière réunion, l'ensemble des conclusions par 13 voix contre 1 (aucune abstention).
Étaient présents au moment du vote les députés De Clercq, président; Alber, rapporteur pour avis; Añoveros Trias de Bes, Berger, Cassidy, Cot, Crowley, Gebhardt, Herman (suppléant M. Ferri), Hory, D. Martin, Thors, Ullmann, Valverde López (suppléant Mme Palacio Vallelersundi) et Zimmermann.
Le rapport Lannoye a pour objet la reconnaissance des médecines non conventionnelles. Il demande notamment que des directives soient arrêtées pour 7 méthodes thérapeutiques, nommément désignées.
I. Considérations générales
1) Compétence communautaire et base juridique
La dimension transfrontalière des médecines non conventionnelles concerne aussi bien la liberté d'établissement et de service des praticiens non conventionnels que la circulation des produits (essentiellement les médicaments) et la circulation des patients en quête de services (le malade se rend chez le médecin; liberté transfrontalière du choix).
Dans le traité CE, il est question de la santé aux articles 3 littera o) et s)[1], 36, 56, 100A (3) et 129. Si l'article 129 ne prévoit pas, dans ce domaine, d'actes juridiques communautaires, on peut cependant déduire de ses nombreuses références au domaine de la santé que la protection de la santé est bien une préoccupation de l'Union.
Sans mobiliser l'article 235, les articles 54, paragraphe 2, 57, paragraphes 1er et 2, 63 paragraphe 2 et l'article 100A[2] entrent en ligne de compte comme bases juridiques.
Étant donné la spécificité de son paragraphe 3 ("professions médicales, paramédicales ..."), l'article 57 apparaît logiquement comme la base juridique la mieux appropriée. Son paragraphe 1er couvre la reconnaissance mutuelle des diplômes et son paragraphe 2 l'accès aux activités non salariées et leur exercice. La formulation du paragraphe 1er est volontairement générale, ce qui permet d'y inclure les diplômes en médecine non conventionnelle, qui existent déjà dans les États membres. D'ailleurs, le texte du paragraphe 2 est lui aussi général: aucun élément n'y indique que les activités relevant de la médecine non conventionnelle en soit exclues.
Les articles entrant en ligne de compte n'étant pas rédigés dans un sens restrictif, on peut supposer que les institutions participant à la procédure législative posséderont, pour apprécier la base juridique, un large pouvoir d'appréciation.
La compétence en matière de coordination prévue à l'article 57 paragraphe 2 n'est pas limitée aux dispositions législatives, réglementaires et administratives existantes, et ce pour les raisons suivantes: premièrement, le texte de l'article 57, paragraphe 2 ne distingue pas entre les dispositions juridiques et administratives en vigueur et celles qui restent à créer. Deuxièmement, l'absence totale de dispositions peut être interprétée, selon le contexte, comme une interdiction absolue ou une libéralisation totale des médecines non conventionnelles concernées. Ces dispositions peuvent dès lors être harmonisées. Troisièmement, un argument téléologique exclut une interprétation étroite de l'article 57 paragraphe 2: il serait absurde d'attendre une divergence suffisante dans les réglementations nationales pour y rétablir l'uniformité souhaitée!
2) Subsidiarité
Tout d'abord, on constate l'immense disparité des réglementations nationales régissant les médecines non conventionnelles. De sorte que les conditions de concurrence des praticiens non conventionnels dans les États membres sont loin d'être identiques. De ce point de vue donc, l'intervention des institutions européennes se justifie fondamentalement. En revanche, des interventions dans l'organisation ou le système de cotisations et de remboursement des caisses de maladie des États membres n'appellent aucune réglementation européenne: selon le principe de subsidiarité, ces réglementations restent du ressort des États membres.
3) Définition volontairement abstraite ou énumération exhaustive?
Les éléments de définition avancés par M. Lannoye appellent les compléments suivants:
La notion de "médecine non conventionnelle" devrait désigner les thérapeutiques qui ne relèvent pas, ou pas encore, de la médecine traditionnelle, thérapeutiques qui d'une part assurent avec un degré élevé de probabilité la guérison qu'elles promettent et dont l'enseignement, d'autre part, n'est pas nécessairement lié à l'obtention d'un diplôme d'État dans la science médicale.
Il convient de préférer une définition abstraite à une énumération car il serait déraisonnable de restreindre, voire de proscrire les nouveaux développements dans le domaine des médecines non conventionnelles.
Par ailleurs, il serait inapproprié d'arrêter des directives spécifiques pour chaque discipline médicale non conventionnelle. Il convient de préférer une directive unique, comme c'est le cas dans la médecine traditionnelle.
L'absence d'un profil professionnel dans un État membre ne saurait interdire l'exercice de cette profession dans l'État membre concerné s'il existe une directive européenne.
4) Mise en place de commissions
La mise en place de commissions, demandée par M. Lannoye, est en principe utile. Ces commissions devront se conformer à la décision du Conseil du 13 juillet 1987[3]. Le rapport Fontaine (A4-0268/96) sur la libre circulation des médecins et la reconnaissance mutuelle de leurs diplômes, attestations d'examens et autres certificats d'aptitude demande, lui aussi, la mise en place d'un comité de gestion (de type II b).
5) La protection des patients
Un aspect important d'une protection efficace de la santé publique est la protection des patients. Cette protection peut se faire par des qualifications optimales, des devoirs d'information et des mécanismes de compensation appropriés.
5.1. Le niveau de qualification des praticiens non conventionnels
a) Les praticiens traditionnels qui se sont tournés vers l'exercice d'une médecine non conventionnelle disposent des connaissances leur permettant, au besoin, d'engager une thérapeutique traditionnelle. Il convient de se féliciter d'un tel niveau de qualification et c'est cette catégorie de praticiens qui devrait susciter le moins de réserves. Les praticiens possédant une formation de médecin et pratiquant, de surcroît, la médecine non conventionnelle, peuvent donc sans problème exercer comme praticiens non conventionnels.
b) Les médecins non conventionnels non titulaires d'un diplôme de médecin sont souvent dépourvus, de par leur formation, des connaissances de base nécessaires. Il faut donc s'efforcer de viser, chez ces médecins, à un niveau optimal de qualification. Cette démarche peut être assurée par une auto-régulation interne à la profession: des organisations corporatives pourraient ainsi contrôler l'accès à la discipline concernée et son exercice. À condition que les membres de la profession soient suffisamment honnêtes, ce sont eux qui auraient vocation pour évaluer leurs collègues. On peut supposer à cet égard que les différentes professions appliqueront des critères stricts afin de réduire la concurrence. Ces organisations corporatives devraient être contrôlables publiquement, le minimum de qualification exigé devant être le niveau exigé par un État membre pour la profession de praticien de santé (Heilpraktiker). Il faut préciser que ce niveau de qualification n'est pas décrit de façon abstraite mais qu'il peut être considéré par les autorités compétentes (qui disposent d'un large pouvoir d'appréciation au cas par cas) comme existant ou non[4]. En tout état de cause, les praticiens non conventionnels devront posséder des connaissances de base en médecine traditionnelle, plus des connaissances approfondies dans la discipline médicale non conventionnelle concernée.
5.2. Mécanismes de prévention et de compensation
Il s'agit de mécanismes destinés à protéger les patients. Ce sont, d'une part, notamment des devoirs d'information, d'autre part, des assurances responsabilité civile obligatoire. L'information, obligatoire et aussi exhaustive que possible, doit être assurée par le praticien traitant lui-même. Les campagnes d'information peuvent également être utiles. Quant au contenu de cette information, c'est aux organisations professionnelles qu'il revient de le définir et de le contrôler. Enfin, une assurance responsabilité civile obligatoire devrait accompagner l'appartenance (obligatoire) à l'organisation professionnelle concernée. Cette assurance ne peut être moins rigoureuse que les assurances similaires applicables aux médecins conventionnels.
II. Conclusions juridiques et amendements
A) Conclusions
1. Les médecines non conventionnelles doivent être définies de façon abstraite: on entend par "médecine non conventionnelle" les procédés thérapeutiques qui ne relèvent pas, ou pas encore, de la médecine traditionnelle, qui entraînent très probablement la guérison qu'ils promettent et dont l'exercice n'est pas nécessairement lié à l'obtention d'un diplôme d'État dans le domaine de la science médicale (diplôme de médecin).
2. Il convient d'affirmer le principe d'une compétence communautaire dans le domaine des médecines non conventionnelles. Les réglementations à adopter dans ce domaine peuvent notamment être basées sur l'article 57 paragraphes 1er et 2. À cet effet, la référence à l'article 138B, paragraphe 2, du traité doit apparaître explicitement dans le texte de la résolution.
3. Toute réglementation communautaire doit avoir pour premier objectif d'assurer la liberté de choix thérapeutique des patients, de les informer pleinement des avantages, des limites et des dangers du recours aux médecines non conventionnelles et de les protéger contre les charlatans.
4. Les médecins non conventionnels doivent posséder un niveau de qualification optimal. Ce niveau de qualification doit être à tout le moins équivalent, par exemple, à celui fixé pour la profession de praticien de santé (Heilpraktiker).
5. Comme mécanismes de prévention et de compensation, il convient de prévoir, d'une façon générale, l'appartenance obligatoire à des organisations professionnelles ou corporatives publiquement contrôlables et, notamment, une information exhaustive ainsi que la passation obligatoire d'un contrat d'assurance responsabilité civile par la personne pratiquant une thérapeutique non conventionnelle.
B) Les points suivants du rapport Lannoye devraient être modifiés:
6. La proposition de résolution de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe du 28 janvier 1994, dont il est question au deuxième visa du projet de rapport (proposition de résolution) appelle une précision complémentaire: ce texte ne reflète que le point de vue de ses signataires, il n'est pas un avis adopté par l'Assemblée parlementaire. Il convient donc de supprimer le deuxième visa.
7. Le passage du considérant F, dernière phrase, où il est question des "obligations découlant du traité pour les États membres, et plus précisément celles prévues à l'article 57 paragraphe 3, qui incitent les États membres à coordonner les conditions d'exercice des professions médicales et paramédicales" doit être supprimé, l'article 57 paragraphe 3 n'impliquant aucune obligation.
8. La prise en charge par les régimes de sécurité sociale ne relève pas de la compétence communautaire. Il convient donc de modifier en ce sens le considérant L.
9. Des directives séparées sur chacune des disciplines médicales non conventionnelles pourraient ne pas être souhaitables. La Commission, en accord avec les experts des différentes disciplines, devra examiner s'il est préférable que la législation en la matière soit introduite par une directive unique.
10. Le passage du paragraphe 2 évoquant un recours en carence n'est pas compatible avec le texte de l'article 175 paragraphe 2. Il convient de supprimer ce passage.
11. Les commissions suggérées au paragraphe 6 de la résolution ne peuvent être instituées que par des actes juridiques contraignants. Ces actes juridiques doivent reposer sur des bases juridiques prévues au traité. Par ailleurs, la composition paritaire de la commission d'experts prévue au paragraphe 6 a) et le principe d'autorégulation mis en oeuvre pour la commission d'évaluation prévue au paragraphe 6 b) n'apportent pas les garanties nécessaires pour protéger les patients. Il convient donc de supprimer ces dispositions.
12. Enfin, le moratoire réclamé au paragraphe 7 fait problème, d'un point de vue d'État de droit, puisqu'il constitue une ingérence dans la compétence pénale des États membres. En conséquence, tous les passages de la résolution du rapport Lannoye qui tendent à l'institution d'un tel moratoire doivent être supprimés.
- [1] ()Protection du consommateur; cette protection peut porter sur les produits pharmaceutiques.
- [2] ()La directive 92/73 (JO L 297 du 13.10.1992, p. 8) était basée sur l'article 100A.
- [3] ()JO L 197 du 18.7.1987, p. 33.
- [4] ()Loi sur l'exercice professionnel de la science médicale sans nomination (loi sur les praticiens de santé) du 17février 1939 (JOR1 I p. 251; JORF III 2122-2); premier règlement d'exécution de la loi relative à l'exercice professionnel de la science médicale sans nomination (loi sur les praticiens de santé) du 18février 1939 (JOR1 I p. 259; JORF III 2122-2-1); cf. article 1 de la loi sur les praticiens de santé et article 3 paragraphe 1er, 3 paragraphes 2 et 4 du règlement d'exécution. La formation de praticien de santé peut s'acquérir dans des établissements privés dont la fréquentation n'est cependant pas obligatoire. Les services de santé procèdent, sur la base de "guides", à des vérifications des connaissances et des aptitudes des candidats à la profession de praticien de santé, avant que soit octroyée l'autorisation d'exercer cette activité. Les praticiens de santé sont organisés en plusieurs associations de droit privé.