RAPPORT sur la directive 86/609 relative à la protection des animaux utilisés à des fins expérimentales ou à d'autres fins scientifiques
(2001/2259(INI))
13 novembre 2002
Commission de l'environnement, de la santé publique et de la politique des consommateurs
Rapporteur: Jillian Evans
PAGE RÉGLEMENTAIRE
Au cours de la séance du 17 janvier 2002, le Président du Parlement a annoncé que la commission de l'environnement, de la santé publique et de la politique des consommateurs avait été autorisée à élaborer un rapport d'initiative, conformément à l'article 163 du règlement, sur la directive 86/609 relative à la protection des animaux utilisés à des fins expérimentales ou à d'autres fins scientifiques.
Au cours de sa réunion du 22 janvier 2002, la commission de l'environnement, de la santé publique et de la politique des consommateurs a nommé Jillian Evans rapporteur.
Au cours de ses réunions des 2 octobre 2002 et 5 novembre 2002, la commission a examiné le projet de rapport.
Au cours de la dernière de ces réunions, elle a adopté la proposition de résolution par 24 voix contre 17 et 3 abstentions.
Étaient présents au moment du vote Caroline F. Jackson (présidente), Alexander de Roo et Anneli Hulthén (vice-présidents), Jillian Evans (rapporteur) et María del Pilar Ayuso González, Jean-Louis Bernié, David Robert Bowe, John Bowis, Hiltrud Breyer, Martin Callanan, Dorette Corbey, Chris Davies, Avril Doyle, Anne Ferreira, Marialiese Flemming, Karl-Heinz Florenz, Cristina García-Orcoyen Tormo, Laura González Álvarez, Robert Goodwill, Françoise Grossetête, Cristina Gutiérrez Cortines, Marie-Thérèse Hermange (suppléant Raffaele Costa), Marie Anne Isler Béguin, Eija-Riitta Anneli Korhola, Bernd Lange, Giorgio Lisi (suppléant Christa Klaß), Torben Lund, Minerva Melpomeni Malliori, Patricia McKenna, Emilia Franziska Müller, Riitta Myller, Giuseppe Nisticò, Marit Paulsen, Frédérique Ries, Dagmar Roth-Behrendt, Guido Sacconi, Giacomo Santini (suppléant Peter Liese), Karin Scheele, Horst Schnellhardt, María Sornosa Martínez, Catherine Stihler, Nicole Thomas-Mauro, Antonios Trakatellis et Phillip Whitehead.
Le rapport a été déposé le 13 novembre 2002.
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
Résolution du Parlement européen sur la directive 86/609 relative à la protection des animaux utilisés à des fins expérimentales ou à d'autres fins scientifiques (2001/2259(INI))
Le Parlement européen,
– vu la directive 86/609/CEE concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la protection des animaux utilisés à des fins expérimentales ou à d'autres fins scientifiques[1],
– vu le traité établissant la Communauté européenne, en particulier un amendement du traité sur l'Union européenne qui comporte un protocole invitant l'Union européenne et les États membres à tenir pleinement compte du bien-être des animaux lors de l'élaboration des politiques agricole, des transports, du marché intérieur et de la recherche,
– vu la Convention ETS 123 du Conseil de l'Europe du 31 mars 1986 pour la protection des animaux vertébrés utilisés à fins expérimentales ou à d'autres fins scientifiques, à laquelle la Communauté a adhéré,
– vu la décision du Conseil 1999/575/CE concernant la conclusion par la Communauté de la Convention européenne pour la protection des animaux vertébrés utilisés à des fins expérimentales ou à d'autres fins scientifiques[2],
– vu le sixième programme d'action pour l'environnement qui vise à prendre des mesures positives vers le développement d'un système cohérent qui minimise la nécessité de l'expérimentation animale et développe des méthodes d'essai alternatives,
– vu l'article 163 de son règlement,
– vu le rapport de la commission de l'environnement, de la santé publique et de la politique des consommateurs (A5‑0387/2002),
A. considérant qu'une procédure d'infraction a été engagée contre l'Autriche en 2000 pour transposition incomplète de la directive dans la législation nationale,
B. considérant qu'un arrêt a été rendu contre la Belgique en 1998 pour transposition incomplète de la directive dans sa législation nationale – en particulier pour reconnaissance insuffisante de données recueillies sur la base d'expériences effectuées dans d'autres États membres; considérant qu'un avis motivé a été adressé à la Belgique en 2001 pour avoir autorisé une large utilisation des chats et chiens errants à des fins de recherche,
C. considérant qu'un avis motivé a été adressé à la France pour mise en œuvre incorrecte des articles 4, 7 (3), 12 (2), 18 (1), 18 (3) et 22 (1),
D. considérant qu'un arrêt a été rendu contre l'Irlande en 2001 pour absence de mise en œuvre de la directive – en particulier des articles 2(d), 11 et 12 et qu'une lettre de mise en demeure a été adressée pour avoir appliqué une définition trop étroite d'une "expérience",
E. considérant que la Commission a intenté une action contre le Luxembourg pour transposition inappropriée de la directive dans sa législation nationale,
F. considérant qu'une requête contre les Pays-Bas a été soumise à la Cour de justice européenne le 18 mai 2001,
G. considérant que des procédures légales formelles ont été initiées contre le Portugal pour mise en œuvre incorrecte de la directive – en particulier l'utilisation de chats et chiens errants à des fins de recherche,
H. considérant qu'un avis motivé a été adressé à l'Espagne pour mise en œuvre incorrecte de la directive en Andalousie,
I. considérant que des procédures contre le Royaume-Uni ont été achevées en août 1998 lorsque la législation concernant les procédures scientifiques impliquant des animaux a été modifiée,
J. considérant qu'il est prouvé au moins dans un cas au Royaume-Uni que les instituts de recherche ont reçu des autorisations pour des expériences beaucoup moins perturbantes et pénibles que celles qui sont menées actuellement,
K. considérant qu'il est prouvé dans au moins un cas au Royaume-Uni que des chercheurs utilisent un nombre d'animaux plus élevé que le nombre autorisé et le dissimulent,
L. considérant qu'il est prouvé dans au moins un cas au Royaume-Uni que des animaux sont laissés sans surveillance pendant de longues périodes, même lorsqu'ils viennent de subir des expériences traumatisantes et que l'on pratique la privation de nourriture et/ou d'eau,
M. considérant que la directive 86/609/CEE n'a pas été mise en œuvre de façon satisfaisante dans tous les États membres et que l'application des exigences et des objectifs à long terme a été dans le meilleur des cas un processus lent,
N. considérant que cinq États membres (Autriche, Irlande, Italie, Luxembourg Portugal) n'ont pas encore achevé la ratification ou l'adhésion à la Convention,
O. considérant que la collecte et le collationnement des informations statistiques sur l'utilisation des animaux à des fins expérimentales restent problématiques,
P. considérant que les données statistiques exigées ne fournissent pas les détails nécessaires à la surveillance de l'application de l'article 7 de la directive,
Q. considérant que les États membres appliquent toujours des normes divergentes en ce qui concerne l'autorisation, la surveillance et l'examen de projets expérimentaux,
R. considérant que l'efficacité des contrôles varie d'un État membre à l'autre,
S. considérant que l'application du principe des trois R (Replacement, Reduction and Refinement) est très différente selon les établissement de recherche,
T. considérant que l'exigence d'éviter tout risque de double emploi dans les expériences n'est pas appliquée de façon appropriée,
U. considérant qu'en dépit des progrès accomplis par le biais des travaux du CEVMA, le développement et la mise en œuvre de méthodes alternatives n'a pas été dûment encouragé dans l'ensemble des États membres,
V. considérant que de nouvelles révélations concernant les besoins physiques, comportementaux et psychologiques des animaux de laboratoire exigent des améliorations concernant l'élevage et les soins et rendent donc indispensable une amélioration des normes prévues à l'annexe II,
W. considérant que les développements scientifiques et technologiques se traduisant par de nouvelles utilisations des animaux rendent urgente la révision de la directive 86/609/CEE,
X. considérant que tous les animaux utilisés à des fins scientifiques ne sont pas inclus dans la directive et que, en particulier, celle-ci ne couvre pas le nombre très important d'animaux utilisés dans la recherche fondamentale,
Y. considérant que la diversité des applications potentielles des manipulations génétiques n'était pas pleinement connue en 1986 mais que les statistiques font apparaître une augmentation significative du nombre des animaux utilisés au cours de ces expériences et qu'une augmentation annuelle est prévue,
Z. considérant qu'il y a eu une croissance rapide de la recherché liée au développement de la xénotransplantation, une technologie qui soulève des questions sur le statut des animaux,
AA. considérant que le maintien de l'utilisation de primates non humains à des fins expérimentales ou à d'autres fins scientifiques suscite de graves préoccupations et que la décision du Conseil 1999/575/CE a d'ores et déjà établi que l'utilisation de tels êtres/animaux doit être réduite,
BB. considérant que les techniques permettant de reconnaître la douleur, la souffrance et l'angoisse des animaux ainsi que les systèmes de gestion de la douleur sont inappropriés dans de nombreux établissements de recherche,
CC. considérant que dans sa recommandation pour la deuxième lecture modifiant la directive du Conseil 76/768/CEE concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux produits cosmétiques, le Parlement européen juge indispensable l'interdiction de l'expérimentation animale en vue de la fabrication de cosmétiques,
DD. considérant que la loi britannique Guidance on the Operation of Animals (procédure scientifique) affirme déjà en 1986 qu'une procédure devrait être considérée comme grave "s'il y a lieu de craindre que, même pour un seul animal, elle entraîne de réelles souffrances",
EE. considérant que l'examen des besoins éthologiques des animaux n'est toujours pas obligatoire,
FF. considérant que les normes minimales concernant l'hébergement et les soins ne sont toujours pas obligatoires,
1. invite la Commission, en liaison avec la révision de la législation relative aux expériences animales, à tenir compte des recommandations du Conseil de l'Europe et à répondre dans la mesure du possible aux besoins physiologiques et comportementaux des animaux;
2. demande à la Commission de respecter ses engagements, conformément au protocole d'amendement à la Convention européenne, de présenter, avant la fin 2003, une proposition afin d'adapter les dispositions de la directive 86/609/CEE[3] et d'incorporer les amendements et règles de procédure suivants;
3. considère que le champ d'application de la directive doit être aligné sur celui de la Convention du Conseil de l'Europe qui couvre également les animaux utilisés à des fins d'éducation et de formation;
4. considère que les États membres devraient être soumis à l'obligation de mettre en place une procédure de surveillance éthique faisant partie du système d'autorisation pour l'approbation d'expériences animales;
5. considère que l'expérimentation animale est une question controversée qui soulève des problèmes éthiques et qu'il convient d'accorder l'attention requise aux circonstances dans lesquelles son utilisation est appropriée;
6. considère que certains objectifs des expériences animales inacceptables sur le plan éthique ne devraient pas être autorisés. Notamment:
- •la mise au point et l'expérimentation d'armes, y compris d'agents chimiques, sur des animaux;
- •le développement et l'expérimentation de produits cosmétiques y compris de leurs ingrédients;
- •l'utilisation de primates capturés à l'état sauvage;
7. demande que l'autorisation de procéder à des expériences sur les animaux prévoie que le demandeur puisse clairement exposer et justifier les objectifs des expériences en fonction du critère selon lequel ces dernières doivent être utiles pour l'animal ou pour l'homme; l'autorisation ne peut en outre être accordée que si le demandeur est à même de prouver que les résultats souhaités ne peuvent être obtenus qu'en utilisant des animaux vivants et qu'il n'existe pas de méthodes expérimentales de substitution; avant l'octroi d'une autorisation, il est procédé à une évaluation sur les plans éthique et du bien-être des animaux, afin de déterminer les limites des épreuves auxquelles les animaux peuvent être soumis; même s'il est possible de prouver que des expériences peuvent être utiles pour l'animal ou pour l'homme, elles ne doivent pas être autorisées si les épreuves subies par les animaux utilisés dépassent la limite maximale;
8. considère que les expériences effectuées sur des animaux considérés comme appartenant à des espèces menacées d'extinction selon l'annexe 1 de la Convention CITES et l'annexe CI no 3626/82 devraient être interdites;
9. considère que la nécessité d'une utilisation continue de primates non humains dans le domaine de la recherche et de l'expérimentation devrait être évaluée de façon critique à la lumière des connaissances scientifiques avec l'intention de réduire et à terme de mettre fin à leur utilisation;
10. considère que la définition d'un animal devrait être élargie afin d'inclure les céphalopodes et décapodes;
11. considère qu'une base de données centrale comportant des informations sur l'ensemble des expériences en cours ou finalisées, devrait être établie pour les expériences animales approuvées afin de garantir l'absence de tests répétés; la base de données comporte également des données sur les expériences animales n'ayant donné aucun résultat directement applicable, de manière à ce que les expériences publiées ne soient pas seules enregistrées; pour finir, la base de données comporte des informations sur des méthodes expérimentales de substitution à même de remplacer ou de réduire l'utilisation d'animaux;
12. considère que les données qui doivent être collectées en vertu de la directive 86/609 devraient être plus détaillées et inclure le nombre d'animaux transgéniques utilisés; elles devraient également prendre en considération le degré de souffrance subie;
13. considère que l'utilisation du format uniforme pour la présentation des données collectées par les États membres devrait être rendue obligatoire et que la présentation des données devrait avoir lieu chaque année plutôt que tous les trois ans;
14. considère que l'article 22 devrait être mieux appliqué de façon à éviter toute répétition inutile des expériences et qu'il ne devrait pas y avoir d'obligation légale de répéter les expériences en vue de la mise sur le marché d'un produit dans un pays donné;
15. considère que les animaux transgéniques doivent être inclus dans la directive, qu'ils doivent être pleinement recensés et que leur traçabilité doit être garantie tout au long de la vie;
16. considère que les animaux issus de manipulations génétiques et les animaux qui à la naissance présentent de graves malformations résultant d'expériences antérieures entraînant une souffrance ou un malaise sporadique ou permanent doivent être tués de façon humaine à la première occasion possible;
17. considère que les procédures d'autorisation devraient être plus rigoureuses que prévu dans la directive 86/609/CEE – les demandes d'autorisation devraient inclure une analyse coût/bénéfice et indiquer le degré de souffrance provoqué par les expériences;
18. considère qu'une inspection centrale au niveau de l'UE devrait être mise en place afin d'autoriser les inspecteurs dans les États membres à visiter sans préavis les établissements – privés et publics – où ont lieu les expériences animales et à annuler toute autorisation non respectée;
19. considère qu'un cours de formation au niveau de l'UE à l'intention de ceux qui se livrent à des recherches utilisant les animaux et de ceux qui sont chargés de prendre soin des animaux utilisés à des fins d'expérimentation devrait être instauré en tant qu'exigence obligatoire; un tel cours de formation doit également garantir que les chercheurs et les personnes chargées de prendre soin des animaux assurent, le cas échéant, la préparation et la socialisation des animaux utilisés pour les expériences, de manière à ce que ces derniers soient familiarisés avec les autres animaux et les personnes ainsi qu'avec la procédure d'expérimentation;
20. considère que seuls des techniciens qualifiés devraient être autorisés à s'occuper des animaux utilisés pour des expériences et qu'un ratio minimum personnel/animaux devrait être respecté – en particulier lorsqu'un animal vient de subir une expérience et/ou une anesthésie;
21. considère que des analgésiques ou d'autres méthodes appropriées devraient être utilisés afin de garantir qu'un animal n'est pas soumis à une douleur ou souffrance modérée ou même légère ni à une douleur, angoisse ou souffrance grave;
22. considère que les normes minimales d'hébergement et de soins prévues à l'annexe II doivent être rendues obligatoires;
23. considère que, étant donné que jusqu'à 9 millions d'animaux "excédentaires" naissent et sont tués chaque année dans l'UE, une révision et une amélioration des procédures de reproduction sont indispensables;
24. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission.
- [1] JO L 358 du 18.12.1986, p. 1.
- [2] JO L 222 du 24.8.1999, p. 29.
- [3] Proposition de décision du Conseil concernant la conclusion du Protocole d'amendement à la Convention européenne pour la protection des animaux vertébrés utilisés à des fins expérimentales ou à d'autres fins scientifiques (COM(2001) 704).
EXPOSÉ DES MOTIFS
On estime à environ 12 millions le nombre d'animaux vertébrés utilisés chaque année dans l'UE au cours de la mise au point et de l'expérimentation de produits chimiques, biologiques et autres substances. L'utilisation d'animaux à ces fins est à juste titre l'objet d'un large débat et un sujet d'intérêt public, d'autant plus que la directive 86/609/CEE visant à contrôler de telles expériences ainsi que le fondement scientifique et l'impulsion politique qui la sous-tendent datent de près de vingt ans.
Beaucoup de choses ont changé depuis que la directive a été adoptée – la science s'est considérablement développée dans des domaines non prévus par la directive initiale et, d'autre part, l'opinion à l'égard des animaux a changé et le bien-être des animaux est une question qui préoccupe davantage.
Il est donc inapproprié que la directive concernant la protection des animaux utilisés à des fins expérimentales ou à d'autres fins scientifiques se fonde initialement non pas sur le bien-être de ces animaux mais sur l'absence de distorsion de concurrence entre les États membres. Il en résulte que certains types d'expériences – tels que ceux destinés à la recherche fondamentale, à l'enseignement ou à la formation ne sont pas couverts par la directive.
La Commission elle-même a reconnu la nécessité de mettre à jour la directive 86/609 et a décidé d'engager ce processus avant la fin 2003. Les preuves concernant la mise en œuvre et le respect de la directive rassemblées dans le cadre de la préparation du présent rapport soulignent la nécessité d'engager ces réformes dès que possible. On constate des lacunes fondamentales concernant la mise en œuvre – alors que certains États membres ont adopté une législation nationale plus sévère que les dispositions de la directive 86/609/CEE, d'autres ont omis de mettre en œuvre et de faire appliquer certains des principes fondamentaux qui sous-tendent la directive – un fait mis en évidence par les actions pour infraction engagées actuellement par la Commission à l'encontre de certains États membres.
Collecte de données
L'un des exemples les plus flagrants des lacunes de la directive actuelle a été la difficulté à collationner et interpréter les données qui devraient être collectées en vertu des dispositions de la directive 86/609. Bien que le format concernant la collecte des données ait été dans une certaine mesure normalisé, il demeure pratiquement impossible de connaître le nombre exact d'animaux utilisés pour chaque type de procédure expérimentale et il n'existe pas de dispositions prévoyant le degré de gravité des expériences animales. Actuellement, il est impossible de déduire des données disponibles si l'article 7, paragraphe 2, de la directive est dûment appliqué. Les preuves statistiques publiées doivent démontrer qu'il n'existe pas d'autre méthode scientifiquement satisfaisante n'impliquant pas un animal. Tous les États membres ne collectent pas les données avec la même régularité – alors que certains vont au-delà de l'exigence trimestrielle, d'autres s'en tiennent à ce délai et ne publient pas de résultats internes dans l'intervalle. La plupart des lacunes concernant la collecte de données devraient être corrigées au moment de la révision de la directive. Pour que de telles données soient utiles, les chiffres devraient être publiés chaque année dans tous les États membres, avec une ventilation détaillée et dans un format uniforme. Étant donné que ceux qui se livrent à des expériences animales – les sociétés pharmaceutiques en particulier – conservent d'ores et déjà de telles données, ceci ne devrait pas s'avérer difficile.
Normes divergentes entre États membres
Il est apparu que les normes diffèrent entre États membres sur certains aspects de la mise en œuvre et de l'application de la directive 86/609. Il semblerait que le bien-être des animaux ait une moindre importance dans certains États membres, ce qui se traduit par des divergences concernant l'autorisation, le contrôle et l'examen de projets expérimentaux. Alors que certains États membres s'efforcent de faire respecter leur législation nationale grâce à des visites d'inspecteurs dans les établissements concernés, d'autres ont mis en œuvre la directive de façon beaucoup moins rigoureuse. Il n'y a manifestement pas eu d'harmonisation des normes et toute révision de la directive 86/609 devrait viser à garantir non seulement le relèvement des normes minimales mais également les progrès des États membres vers un niveau de surveillance de l'expérimentation animale plus efficace.
L'approche des trois R – (Replacement, Reduction and Refinement) à l'égard de l'expérimentation animale telle que définie par Russell et Burch[1] gagne du terrain dans le débat de l'Union européenne sur cette question. Il convient de s'en féliciter, tout en soulignant qu'il est indispensable que cette approche soit acceptée et également appliquée dans tous les États membres. Loin de réduire les expérimentations, le fait que celles-ci soient répétées démontrent que le principe de Reduction n'est pas suivi, pas plus que la disposition contre la répétition inutile d'expériences prévue dans la directive 86/609 n'est respectée.
Champ d'application de la directive 86/609
L'une des questions controversées depuis que la directive a été adoptée est que tous les animaux ne sont pas couverts par ces dispositions. Depuis 1986, le domaine de l'expérimentation animale a connu d'importants développements – l'un d'eux a été l'augmentation imprévue mais considérable du nombre d'animaux transgéniques créés et utilisés. Il est inadmissible qu'une directive visant à réglementer l'utilisation d'animaux utilisés à des fins expérimentales ou à d'autres fins scientifiques n'englobe pas tous les animaux faisant l'objet d'expérimentations. Les animaux transgéniques devraient être inclus dans toute révision de la directive 86/609 de même que toutes les formes animales – y compris les formes d'embryon et de fœtus et les êtres ayant la capacité de souffrir tels que les céphalopodes et décapodes. Le critère acceptable devrait être celui de la sensibilité à la souffrance. Dans ce cas, il y a lieu d'éviter toute expérience.
D'autre part, il est condamnable que le champ d'application de la directive omette des expériences menées par certains organismes ou institutions et que des millions d'animaux utilisés chaque année dans le domaine de l'éducation et de la recherche scientifique fondamentale ne soient pas pris en considération. Etant donné le débat récent sur l'éthique de l'expérimentation animale à des fins d'éducation, il s'agit d'un aspect de la directive qui exige une attention urgente. D'autre part, l'avenir des expériences effectuées sur des primates non humains doit être reconsidéré.
Soins et traitement des animaux
Il apparaît qu'il existe plusieurs lacunes dans la façon dont sont traités les animaux lorsqu'ils sont soumis à des expériences. Bien qu'il existe des lignes directrices de caractère non obligatoire concernant l'éducation et la formation des personnes chargées des animaux de laboratoire (FEELASA)[2], il n'existe pas à l'heure actuelle d'ensemble de normes au niveau européen qui puisse être suivi. Un rapport récent de l'université de Cambridge énumère un catalogue des souffrances animales. Que de tels faits puissent se produire dans un pays souvent cité comme possédant la législation la plus sévère en matière de bien-être des animaux prouve de façon déplorable les lacunes constatées en ce qui concerne l'application et le respect de la directive 86/609.
Toutes les personnes et pas seulement celles qui sont mentionnées en tant que personnes compétentes ou en tant que vétérinaires opérant sur place devraient suivre un cours, sanctionné par un diplôme, sur le bien-être des animaux, y compris sur l'éthique des expériences scientifiques et autres effectuées sur des animaux. Une même formation sanctionnée par un tel diplôme, valide et reconnu dans l'ensemble des États membres améliorerait le niveau de soins offerts et permettrait d'autre part aux employeurs de garantir la possibilité pour les techniciens qualifiés d'être employés par n'importe quel pays de l'UE.
Révision de la directive 86/609
Le protocole d'Amsterdam sur le bien-être des animaux qui est entré en vigueur le 1er mai 1999 exige que l'on tienne pleinement compte des exigences en matière de bien-être des animaux. Ceci, ainsi que le fait que la convention ETS 123 a été signée par la CE, rend indispensable une révision urgente de la directive ainsi que l'extension de sa base juridique. Ce rapport devrait être considéré comme une première étape et ses commentaires et recommandations devraient être pris en considération.