RAPPORT sur la violation des droits de la femme et les relations internationales de l'Union européenne
(2002/2286(INI))

8 octobre 2003

Commission des droits de la femme et de l'égalité des chances
Rapporteur: Miet Smet

Procédure : 2002/2286(INI)
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A5-0334/2003
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A5-0334/2003
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PAGE RÉGLEMENTAIRE

Au cours de la séance du 13 février 2003, le Président du Parlement a annoncé que la commission des droits de la femme et de l'égalité des chances avait été autorisée à élaborer un rapport d'initiative, conformément à l'article 163 du règlement, sur la violation des droits de la femme et les relations internationales de l'Union européenne et que la commission des affaires étrangères, des droits de l'homme, de la sécurité commune et de la politique de défense avait été saisie pour avis.

Au cours de sa réunion du 26 novembre 2002, la commission des droits de la femme et de l'égalité des chances avait nommé Miet Smet rapporteur.

Au cours de ses réunions des 1er septembre et 2 octobre 2003, la commission a examiné le projet de rapport.

Au cours de la dernière de ces réunions, elle a adopté la proposition de résolution à l'unanimité moins une abstention.

Étaient présents au moment du vote Anna Karamanou (présidente), Olga Zrihen Zaari (vice‑présidente), Miet Smet (rapporteur), Ulla Maija Aaltonen, María Antonia Avilés Perea, Regina Bastos, Johanna L.A. Boogerd-Quaak, Armonia Bordes, Lone Dybkjær, Fiorella Ghilardotti, Rodi Kratsa-Tsagaropoulou, Thomas Mann, Maria Martens, Ria G.H.C. Oomen-Ruijten (suppléant Emilia Franziska Müller), Patsy Sörensen, Joke Swiebel, Feleknas Uca, Elena Valenciano Martínez-Orozco et Sabine Zissener.

La commission des affaires étrangères, des droits de l'homme, de la sécurité commune et de la politique de défense a décidé le 21 janvier 2003 qu'elle n'émettrait Pas d'avis.

Le rapport a été déposé le 8 octobre 2003.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION DU PARLEMENT EUROPÉEN

sur la violation des droits de la femme et les relations internationales de l'Union européenne (2002/2286(INI))

Le Parlement européen,

–   vu les relations extérieures de l'Union européenne, telles que définies en particulier aux articles 11, 177, 178 et 181 du Traité CE,

–   vu la clause relative aux droits de l'homme dans les accords d'association de l'Union européenne et en particulier l'article 25 de l'accord de Cotonou,

–   vu les articles 4, 5, 6, 20 et 21, paragraphe 1, de la Charte des droits fondamentaux de l'UE,

–   vu le rapport annuel de l'UE sur les droits de l'homme de 2001[1],

–   vu la recommandation (2002) 5 de la commission ministérielle du Conseil de l'Europe aux États membres sur la protection des femmes contre la violence, adoptée le 30 avril 2002,

–   vu la résolution 2003/44 sur l'intégration des droits des femmes dans le système des Nations unies et la résolution 2003/45 sur la violence contre les femmes de la commission des droits de l'homme des Nations unies[2],

–   vu la Convention de 1979 des Nations unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination contre les femmes (CEDAW), et les recommandations générales n° 12, 14 et 19 du comité CEDAW[3],

–   vu la déclaration de Vienne et le Programme d'action, tel qu'adopté par la Conférence mondiale sur les droits de l'homme le 25 juin 1993[4],

–   vu les conclusions sur l'examen de Beijing Plus 5 sur le suivi de la plate-forme d'action de Beijing (130 bis)[5],

–   vu les déclarations de la présidence grecque au Conseil de l'UE selon lesquelles des efforts soutenus sont déployés pour que les aspects de genre fassent partie intégrante des travaux des Conseils Affaires générales; préoccupé parle fait que les femmes continuent de faire l'objet de violence dans de nombreuses parties du monde,

–   vu sa résolution du 20 septembre 2001 sur les mutilations génitales féminines[6],

–   vu sa résolution du 7 février 2002 sur la politique de l'Union européenne vis-à-vis des pays méditerranéens partenaires par rapport à la promotion des droits des femmes et de l'égalité des chances dans ces pays[7],

–   vu l'article 163 de son règlement,

–   vu le rapport de la commission des droits de la femme et de l'égalité des chances (A5‑0334/2003),

A.   conscient que, comme l'affirme le comité CEDAW dans sa Recommandation générale N° 19 1 , la violence à l'encontre des femmes constitue une forme de discrimination, en portant atteinte à l'intégrité physique et psychologique des femmes, elle compromet la possibilité pour les femmes de jouir pleinement de leurs droits humains fondamentaux et universels, tels que le droit à la vie et le droit à la sécurité et à l'intégrité de la personne, tel qu'établi dans les instruments européens et universels en matière de droits de l'homme,

B.   rappelant que, comme l'affirme la Déclaration de la Conférence mondiale de Vienne de 1993 sur les droits de l'homme, "les droits humains de la femme et de la fillette sont une partie inaliénable, intégrante et indivisible des droits humains universels", et que, comme réaffirmé par la Déclaration de Beijing de 1995 et la Plate-forme d'action, des mesures doivent être prises "en vue de l'élimination de la violence contre les femmes dans la vie publique et privée",

C.   conscient que les victimes de violence sont tant des femmes que des hommes; toutefois, l'application internationale des droits de l'homme tend à moins prendre en compte les violences exercées contre les femmes, lesquelles trouvent leur origine dans le modèle de relations inégales entre hommes et femmes qui prévaut dans la plupart des sociétés, et les références non admissibles à la culture et à la tradition,

D.   considérant que, sur la base de son mandat de respecter et de protéger les droits de l'homme dans la politique internationale, l'UE devrait contribuer de manière positive et prendre des mesures en vue d'éliminer la violence sous toutes ses formes, mais avant que cet objectif final ne soit atteint, éliminer les formes de violence les plus graves, les plus dégradantes et/ou les plus dangereuses contre les femmes devrait être la priorité,

E.   considérant que les pratiques telles que la mutilation génitale, la lapidation, le châtiment public, l'immolation, le viol, la mutilation à l'acide, les crimes d'honneur, les mariages forcés, l'esclavage et l'exploitation sexuelle constituent des formes particulièrement horribles et inacceptables de violence perpétrées contre les femmes et les jeunes filles,

F.   rappelant que la législation internationale consacre certes formellement les droits personnels et collectifs des femmes, mais que beaucoup d'États partenaires de l'Union européenne ont émis diverses réserves à propos de cette législation, en sorte que l'application d'une grande partie de celle-ci est impossible juridiquement, et que, par ailleurs, lorsque d'importantes conventions internationales sont signées et ratifiées sans réserves, leur application est malaisée du fait de stéréotypes traditionnels ou religieux et de mécanismes insuffisants et qu'il est rare que des décisions positives soient prises pour protéger les droits des femmes et les inscrire dans la vie sociale et économique,

G.   croyant fermement que de telles pratiques ne sont ni tolérables ni justifiables sur la base de leur inscription dans la tradition, et qu'aucun relativisme culturel ne doit être invoqué et accepté lorsque sont commises de grossières violations des droits humains,

H.   regrettant que les femmes soient constamment l'objet de différentes formes de violence dans de nombreux pays qui sont partenaires de l'UE dans les accords de développement et commerciaux et considérant qu'il devrait y avoir une approche intégrée à l'égard des facteurs sociaux, culturels, économiques et légaux qui tiennent les femmes éloignées des centres de décision et les relèguent à une position sociale et économique inférieure,

I.   considérant que le Conseil a déjà fixé dans des accords de développement et commerciaux une série d'instruments légaux et politiques visant à garantir le respect dans les pays partenaires des droits humains, de la démocratie et de l'état de droit[8],

J.   considérant que les femmes sont spécifiquement victimes de la pauvreté et de la violence mais qu’elles sont aussi des actrices incontournables du développement et de la cohésion sociale de leur pays et qu’il convient de prendre en compte ces deux axes dans la politique de coopération et de développement de l’Union européenne,

1.   se félicite de la communication de la Commission intitulée "Programme d'action pour l'intégration de l'égalité entre les femmes et les hommes dans la coopération au développement de la Communauté"[9], tout en soulignant la nécessité d'une action plus radicale et contraignante pour lutter contre la violence envers les femmes;

2.   salue l'inclusion dans l'accord de Cotonou avec les pays ACP des dispositions concernant la question de genre comme élément du dialogue politique (article 8), de l'égalité entre les hommes et les femmes et l'intégration de la dimension hommes-femmes (article 31) et de la mutilation génitale (article 25)[10];

3.   rappelle son initiative dans les lignes concernées du budget 2003 d'inclure une clause selon laquelle l'absence d'action pour empêcher ou lutter contre de graves violences contre les femmes (lapidation, châtiment public, mutilation génitale, immolation ou viol) constituera un motif de suspension de l'aide de l'Union européenne;

4.   se félicite de la mise en œuvre du nouveau programme de l'Union européenne, lancé en janvier 2003, sur la santé sexuelle et reproductive des femmes dans vingt-deux pays ACP et demande l'extension et le renforcement de ce programme;

5.   demande l'accroissement de la participation des femmes dans les organismes internationaux, dans les missions diplomatiques officielles et dans les initiatives internationales, afin que soient pris en compte l'expérience, le point de vue et les besoins de 50 % de la population, ce qui contribuera à faire avancer les problèmes et favorisera la viabilité à long terme des décisions concernant les femmes, étant donné que le sexe est une variable importante, négligée en politique étrangère;

6.   souligne la nécessité d'une définition exhaustive de la violence, tant privée que publique, selon les lignes directives proposées par le CEDAW à inclure dans les accords de développement et commerciaux, et invite tous les États membres ainsi que les États tiers à signer et à introduire cet instrument dans leur ordre juridique interne;

7.   demande avec insistance au Conseil et à la Commission d'inclure dans les futurs accords de commerce et de développement, indépendamment et en plus de la clause concernant le respect des droits de l'homme, une clause spécifique prévoyant l'application de sanctions et, enfin, la suspension de l'accord dans des cas de violations graves et récurrentes des droits des femmes constituant des épisodes de violence, tels que mutilation génitale, mutilation à l'acide, châtiment public, immolation, vengeance familiale, lapidation, viol, traite des femmes, crimes d'honneur, mariages forcés et esclavage;

8.   considère que les sanctions ou la suspension de l'accord devraient être prises en compte dans les cas où, en dépit des preuves de violence accrue et grave contre les femmes, le gouvernement du pays partenaire s'abstient systématiquement de réagir positivement à ces phénomènes au niveau législatif, administratif et juridique. En tout cas, l'impact des sanctions ou la suspension de la accord sur la population, et en particulier sur les enfants et les femmes, devrait être soigneusement étudié et évalué;

9.   demande à la Commission européenne d'assurer la participation des organisations féminines locales des pays partenaires à ses actions de lutte contre la violence à l'égard des femmes;

10.   invite la Commission à établir des clauses commerciales favorables ou défavorables pour les pays partenaires selon leur degré de lutte contre la violence à l'encontre des femmes, ainsi que l'établissement d'incitants pour les pays partenaires en fonction de leurs réalisations dans les domaines de la démocratisation et de l'état de droit;

11.   invite la Commission et les États membres à inclure dans leurs programmes d'aide au développement des projets spécifiquement attentifs à la lutte contre la violence faite aux femmes et en faveur de l'émancipation des femmes; de même, invite la Commission et les États membres à prévoir un pourcentage significatif de leurs projets d'aide en faveur exclusivement des femmes, de leur bien-être et de leur développement; souligne sur la nécessité d'inclure dans ces projets la participation active des femmes locales;

12.   prie la Commission de prendre en compte le statut et la progression de la situation des femmes dans les domaines économiques, juridiques, sociaux et culturels, notamment l'état de ratification de la CEDAW et de son protocole additionnel, et d'entamer des discussions avec les pays partenaires sur certains sujets sensibles tels que les dispositions discriminatoires dans le droit de la famille et le droit pénal, la violence domestique, la discrimination dans l'accès aux services de santé et d'éducation et l'aide juridique; souligne la nécessité d'utiliser de manière adéquate les fonds communautaires existants pour financer des actions positives dans des pays où de graves déséquilibres de pouvoir entre les sexes entravent l'émancipation des femmes, la participation à la société et l'éducation, plaçant ainsi les femmes devant un risque particulier de violence;

13.   demande aux États membres, lors de l’examen de demande d’octroi du statut de réfugié et de son éventuelle reconnaissance, de tenir compte des persécutions et/ou de la crainte des persécutions propres aux femmes en raison de leur sexe;

14.   souligne la nécessité d'inclure complètement les questions de violence contre les femmes et d'insister auprès du gouvernement iranien sur l'importance de la ratification de la CEDAW lors des négociations actuelles sur la conclusion d'un accord commercial et de coopération;

15.   lance aussi un appel aux gouvernements des pays partenaires:

  • -pour qu'ils manifestent la volonté politique indispensable et accélèrent les réformes législatives, administratives et autres afin d'instaurer l'égalité juridique entre hommes et femmes et d'intégrer l'égalité des sexes dans toutes leurs politiques, en encourageant particulièrement la participation des femmes aux processus de prise de décision;
  • -pour qu'ils mettent en œuvre des stratégies d'information et des politiques de lutte contre la violence exercée contre les femmes en promouvant une formation spécifique de la police et des magistrats, en encourageant l'égalité des chances dans l'enseignement (en évitant particulièrement l'interruption et l'abandon des études par les jeunes filles) et en renforçant les programmes de santé;

16.   suggère l'établissement de contacts permanents au moyen des délégations de la Commission avec les institutions locales, nationales et internationales concernées et les ONG travaillant dans les pays partenaires, afin de collecter toutes les données disponibles et utiles sur les questions liées au genre et à la violence et sur la situation des femmes dans les pays tiers et d'émettre une communication annuelle sur les données ainsi collectées en utilisant l'information générale fournie par les pays tiers;

17.   demande que soit garantie la participation des femmes au processus d'accords avec les pays tiers, afin que soit systématiquement intégrée la perspective de genre, et que soit pris en compte l'impact sur la vie et sur la condition des femmes;

18.   encourage la Commission à former et à recruter du personnel spécialisé dans le domaine des théories sur le genre et l'intégration de l'égalité hommes-femmes, permettant à la Commission de fournir des données ventilées par sexe dans les documents de stratégie par pays et par région, de coordonner l'action de l'UE pour lutter contre la violence à l'égard des femmes si nécessaire, et d'évaluer son impact;

19.   demande à la Commission de soulever les questions liées à la violence contre les femmes dans tous les forums, conférences et organisations internationaux pertinents, tels que les réunions du G8 et les négociations de l'OMC, et en conséquence, de proposer des mesures et des clauses anti-violence dans les accords multilatéraux;

20.   exhorte les États membres à soutenir pleinement toutes les mesures actuelles et futures de l'UE en vue de lutter contre la violence contre les femmes, à tous les niveaux de négociation et de mise en œuvre, dans le cadre des accords bilatéraux et multilatéraux;

21.   exhorte les États membres à adopter une législation spécifique ou à faire respecter plus sévèrement la législation existante interdisant et châtiant la mutilation génitale dans leur propre pays et, dans le même temps, à mettre au point des programmes nationaux de prévention afin d'éradiquer à terme la pratique des mutilations génitales;

22.   exhorte à nouveau les États membres et la Commission à prendre des mesures concrètes et coordonnées contre la traite des femmes en Europe en coopération avec EUROPOL, INTERPOL et avec EUROJUST, conformément à sa résolution du mois de février 2001, et à ratifier le nouveau protocole des Nations unies sur la traite des êtres humains;

23.   charge son Président de transmettre la présente résolution à la Commission, au Conseil, aux gouvernements des États membres et des pays candidats ainsi qu'aux partenaires commerciaux et associés de l'UE.

  • [1] JO C 131 du 5.6.2003, p. 138.
  • [2] http://www.un.org/
  • [3] http://www.unifem.org/
  • [4] http://www.unhchr.ch/huridoca.nsf/(Symbol/A.CONF.157.23
  • [5] http://www.unifem.org/
  • [6] JO C 77 du 28.3.2002, p. 126.
  • [7] JO C 284 du 21.11.2002, p. 337.
  • [8] COM 1995/216 du 25 mai 1995; règlement du Conseil (CE) 975/1999 du 29 avril 1999, JO L 120; règlement du Conseil (CE) 976/1999 du 29 avril 1999, JO L 120, p. 8.
  • [9] COM 2001/295.
  • [10] http://www.eurosur.org/wide/EU/Cotonou/newcotnou.htm

EXPOSE DES MOTIFS

Relations extérieures de l'UE

Les relations extérieures de l'UE couvrent un spectre large et varié de connections avec des pays tiers. Ces relations peuvent être unidimensionnelles comme l'aide alimentaire ou aussi complexes que les accords de partenariat ou les accords d'adhésion future. Il existe une grande variété de relations intermédiaires, des simples accords commerciaux à l'Accord de Cotonou, qui couvre le commerce, le développement, les aspects culturels et autres.

La politique commerciale a pour base juridique l'article 133 du traité, qui fixe l'objectif de "contribuer … au développement harmonieux du commerce mondial, à la suppression progressive des restrictions aux échanges internationaux et à la réduction des barrières douanières". En outre, la politique commerciale de l'UE doit prendre en compte des normes plus générales en matière sociale et économique, notamment l'égalité entre les femmes et les hommes, comme objectif général inhérent à toutes les politiques de l'UE (article 2).

La politique de développement, fondée sur l'article 177 du traité, favorise le développement économique et social durable des pays en développement, leur insertion dans l'économie mondiale et la lutte contre la pauvreté. En outre, elle "contribue à l'objectif général de développement et de consolidation de la démocratie et de l'état de droit, ainsi qu'à l'objectif du respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales" (article 177, paragraphe 3). Ce dernier doit être pris en compte dans toutes les politiques qui sont susceptibles d'affecter les pays en développement (article 178) ainsi que dans toutes les formes de coopération économique, financière et technique avec les pays tiers (article 181 bis).

La politique extérieure, conformément à l'article 11 du traité UE, devrait être définie et mise en œuvre en ayant pour objectif (inter alia) "le développement et le renforcement de la démocratie et de l'état de droit, ainsi que le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales."

En théorie, la Communauté européenne remplace les États membres dans les relations extérieures dans les domaines qui relèvent de sa compétence exclusive. Toutefois, les États membres continuent d'y participer aux côtés de la Commission et/ou du Conseil. Toute action dans ce domaine doit donc être entreprise conjointement par l'UE et ses États membres.

Respect des droits de l'homme

Depuis 1992, la CE a inclus dans tous ses accords avec les pays tiers une clause définissant le respect des droits de l'homme et de la démocratie. Une décision du Conseil de 1995 a fixé les conditions générales sur les bases de cette clause, qui constitue un "élément essentiel" de l'accord : conformément à la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités, la violation d'un élément essentiel autorise les parties à se retirer de l'accord.

Il s'agissait d'une innovation importante dans les accords bilatéraux et qui a été encore développée dans l'accord de Cotonou signé avec les pays ACP en juin 2000. A l'exception de l'aide alimentaire, où une telle clause est inadmissible pour des raisons humanitaires, le respect des droits de l'homme et la démocratie font à présent partie intégrante des relations extérieures de l'UE.

Sur cette base, un large éventail d'instruments ont été mis au point tels que les démarches et les interventions dans les forums des Nations unies, et des sanctions ciblées qui peuvent aller d'un refus d'octroi de visas à des hauts dignitaires du régime au gel des avoirs détenus dans des pays de l'UE. Pour preuve, le "gel", en 1980, de l'accord avec la Turquie en raison des nombreuses violations des droits de l'homme à la suite de l'intervention militaire dans ce pays.

D'autres instruments consistent en des actions positives telles que la coopération financière, le dialogue bilatéral ou la surveillance. L'"initiative pour la démocratie et les droits de l'homme" compte un budget de quelque 100 millions d'euros qui peuvent aussi être attribués à des projets dans des pays avec lesquels aucun accord de ce type n'a été conclu.

Droits de l'homme et violence à l'encontre des femmes

Toute forme de violence physique ou mentale à l'égard des êtres humains est considérée comme une violation sérieuse selon la Charte des droits fondamentaux des Nations unies. Sur cette base, la violence à l'encontre des femmes est une grave violation des droits de l'homme; les femmes jouissent des mêmes droits que les hommes et par conséquent, en théorie, il n'est pas nécessaire de prévoir des dispositions spéciales pour les femmes.

Néanmoins, les droits reconnus dans la société humaine n'ont pas une valeur absolue. En effet, dans certains cas, c'est une autre valeur, supérieure dans la hiérarchie, qui prévaut sur le droit précédent, comme c'est le cas des interventions médicales.

Alors que cela va de soi lorsqu'une valeur appartient à un ordre supérieur à un autre, les valeurs telles que la tradition, la paix sociale et la dignité sont de loin plus difficiles à situer dans la hiérarchie. La violence à l'encontre des femmes est donc considérée, dans de nombreux cas, comme valeur inférieure à, par exemple la tradition, la cohésion sociale ou l'honneur des partenaires masculins dans une famille. La mutilation sexuelle des femmes est considérée comme l'expression du respect de la tradition, les crimes d'honneur comme maintien de la paix sociale et la lapidation et le châtiment public des femmes comme une sauvegarde de l'ordre social.

Une philosophie sociale dans laquelle tous les êtres humains ne sont pas égaux et où les droits des femmes sont secondaires à ceux des hommes ne peut être acceptée et, en effet, cette position n'est pas largement approuvée, même dans les cas d'indifférence internationale initiale, comme pendant le régime des Taliban en Afghanistan.

Pour l'UE, les droits de l'homme et la démocratie doivent prévaloir sur toute coutume ou philosophie sociale, qui enfreint ces valeurs. L'UE défend le principe selon lequel les droits humains des femmes et de la fillette sont une partie inaliénable, intégrante et indivisible des droits de l'homme universels, tels qu'affirmé dans la Déclaration de Vienne de 1993 des Nations unies[1] et réaffirmé par la Déclaration de Pékin en 1995. En outre, le respect des droits humains de femmes, en particulier la prévention de la violence contre les femmes a été identifié comme la première priorité pour le 21è siècle par le Parlement européen dans son premier rapport annuel sur les droits de l'homme, qui a déclaré que l'Union européenne avait une grande responsabilité dans la promotion des droits des femmes dans le monde entier.

La violence à l'encontre des femmes a déjà été soulignée lors de la Conférence des Nations unies à Copenhague en 1980, qui a recommandé qu'une législation devrait être adoptée et mise en œuvre pour prévenir la violence domestique et sexuelle contre les femmes.

Dans sa recommandation générale N° 19 de 1992, le comité de la CEDAW (Convention sur l'élimination de toutes le formes de discrimination à l'égard des femmes) définit la violence fondée sur le sexe, comme "la violence exercée contre une femme parce qu'elle est une femme ou qui touche spécialement la femme. Elle englobe les actes qui infligent des tourments ou des souffrances d'ordre physique, mental ou sexuel, la menace de tels actes, la contrainte ou autres privations de liberté.

Les États peuvent être tenus responsables lorsqu'ils s'abstiennent d'empêcher ou d'enquêter et de punir des actes de violence.

Besoin de mesures spécifiques

La violence à l'encontre des femmes ne peut être éliminée sans contester les facteurs qui concourent directement ou indirectement à faire des femmes un objet de soumission. Un héritage culturel plaçant les hommes aux positions privilégiées dans un nombre de domaines juridiques, sociaux, économiques et politiques leur garantit le pouvoir : un tel pouvoir alimente la violence physique ou morale à l'égard des femmes.

Selon la recommandation de la CEDAW, la violence peut être engendrée par des attitudes traditionnelles et des stéréotypes imposés sur les femmes, en particulier dans les zones rurales. D'autres sources de violence sont la pornographie, la traite des femmes et l'exploitation de la prostitution féminine, le tourisme sexuel, le harcèlement sexuel sur le lieu de travail, la stérilisation obligatoire ou l'avortement et la violence domestique et familiale.

Il est donc évident que la promotion du développement économique, de l'éducation et de la participation des femmes au processus de décision est la principale méthode de lutte contre la violence, soit-elle publique ou domestique.

De même, une étroite coopération entre les organismes internationaux tels que l'ONU et l'UE d'une part, et les gouvernements nationaux et les ONG de l'autre, fondée sur la discrimination positive en faveur des femmes dans la politique de développement est un instrument fondamental.

Les mesures prises par l'UE pour promouvoir la démocratie et sauvegarder les droits de l'homme devraient également être utilisées en vue d'éliminer toutes les formes de violence à l'égard des femmes et sauvegarder les droits fondamentaux des femmes. Une clause générale sur le respect des droits de l'homme ne suffit pas pour régler et souligner la question de la violence à l'égard des femmes.

Action de l'UE pour lutter contre la violence

Dans le monde entier, la Commission a contribué à améliorer le statu de la femme et lutter contre les discriminations et la violence, comme dans les programmes visant à encourager l'égalité d'accès à l'éducation, aux élections, à l'aide aux victimes de trafic sexuel ou de viol.

Depuis novembre 1982, le Conseil des ministres de l'UE a adopté plusieurs séries de conclusions et/ou de résolutions pertinentes. Premièrement, celles-ci abordent de près la coopération au développement et le rôle des femmes dans les pays en développement. Petit à petit, elles ont évolué pour aborder les Femmes dans le Développement (WID) et, plus tard, le Genre et le Développement (GAD).

Dans une importante résolution sur l'intégration des questions de genre dans la coopération au développement (N° 12847/95) adoptée en décembre 1995 sur la base d'une communication de la Commission, le Conseil a reconnu que la réduction de disparités existantes fondées sur le sexe était un point crucial dans le développement. Il a aussi demandé l'intégration de la dimension des femmes dans les activités de coopération au développement et, en particulier l'analyse de la répartition hommes/femmes des politiques de développement, la surveillance de l'égalité des chances et l'évaluation des politiques, l'égalité de participation, et le partage du pouvoir politique.

Sur cette base, l'article 31 de l'accord de Cotonou prévoit que la coopération visera aussi à garantir l'accès des femmes à toutes les ressources requises pour le plein exercice de leurs droits fondamentaux. Plus spécifiquement, des mesures devraient également être prises en ce qui concerne l'accès des femmes aux services sociaux de base (éducation et formation, soins de santé et planning familial) et aux ressources productives, et la situation des femmes dans l'aide d'urgence et les opérations de réhabilitation. A l'article 25, la CE soutient les efforts entrepris pour empêcher la mutilation sexuelle des femmes.

Nécessité d'autres actions de l'UE

Comme les relations extérieures de l'UE sont définies à la fois par les institutions de l'UE et par les États membres, la lutte contre la violence à l'égard des femmes présuppose un engagement fort à ces deux niveaux. Les mêmes principes que pour la défense des droits de l'homme et la démocratie et les même instruments politiques et juridiques devraient être utilisés pour identifier et lutter contre la violence à l'égard des femmes tant au niveau intérieur que dans les pays tiers.

Une clause spécifique, interdisant la violence à l'égard des femmes devrait être introduite dans les accords extérieurs. Pour rendre cette clause efficace, l'évaluation de la violence pourrait être fondée sur des études et des rapports de l'UE et d'organismes internationaux ainsi que des missions ad hoc auxquelles le Parlement européen devrait participer.

Une définition de la violence, dans l'esprit de la définition donnée par le comité CEDAW pourrait être incluse dans les accords. La définition devrait être suffisamment large pour s'appliquer à toutes les formes de violence y compris celles dues à une oppression systématique des femmes dans de nombreux domaines de la vie politique et sociale.

Comme pour les droits de l'homme et la démocratie, les États membres de l'UE doivent toutefois veiller à ce que toutes les formes de violence à l'égard des femmes soient reconnues et pénalisées par leurs propre législation et pratiques.

A cet égard, il convient de souligner que dans l'UE, seules la Suède, la Grande-Bretagne et la Belgique ont une législation spécifique sur la mutilation génitale. Ces pratiques sont sanctionnées sur la base d'une législation sur l'intégrité physique des mineurs. En France, quelques affaires concernant la mutilation génitale ont été portées devant les tribunaux, mais dans l'ensemble, le problème semble être ignoré.

Les délégations de la commission devraient employer du personnel formé dans les questions d'égalité des chances et l'intégration de la dimension des femmes dans les politiques de développement; il devrait y avoir une collecte et déségrégation des données par sexe afin de vérifier l'influence sur les femmes et évaluer la "violence" ou le risque de violence.

En termes d'instruments politiques, l'UE devrait continuer d'ouvrir toutes les voies de dialogue avec les pays tiers sur la base d'une déclaration claire engageant les parties à un tel dialogue sur la question spécifique de l'égalité des sexes et la violence. A ce propos, l'article 8 de l'accord de Cotonou pourrait prévoir un bon exemple (dialogue politique).

En cas de violence notifiée, les réactions et les solutions doivent aller des mesures positives (intégration de programmes et de projets anti-violence) à des mesures négatives telles que les sanctions ou la suspension de l'accord. Cela dépendrait du degré de violence et de la coopération des pays concernés (en particulier, la signature/ratification et respect de la CEDAW). Dans la mise en œuvre de sanctions, une considération attentive doit être accordée à ses répercussions sociales et économiques sur les femmes et sur la population dans son ensemble.

Enfin, l'UE pourrait généraliser la clause horizontale du budget 2003 : L'absence de mesure pour empêcher et lutter contre les graves violences à l'égard des femmes (lapidation, châtiment public, mutilation génitale, immolation par le feu ou viol) constituera un motif de suspension de l'assistance de l'UE[2].

  • [1] La déclaration de Vienne de 1993 affirme que "Les violences fondées sur l'appartenance au sexe féminin et toutes les formes de harcèlement et d'exploitation sexuels, y compris celles qui sont la conséquence de préjugés culturels et d'une traite internationale, sont incompatibles avec la dignité et la valeur de la personne humaine et doivent être éliminées."
  • [2] Cette clause a été insérée par le Parlement européen dans la coopération financière et technique avec les pays tiers et sur la consolidation d la démocratie, l'état de droit, les respect des droits de l'homme tels libertés fondamentales.

ANNEXE

LA RÉACTION EUROPÉENNE À LA VIOLENCE CONTRE LES FEMMES DANS LES PAYS TIERS : LA RÉALITÉ

Ce document analyse la réaction concrète de la Commission européenne envers les violations persistantes des droits des femmes. Il s'agit d'une analyse d'études de cas de six pays ayant un lien avec l'Union européenne par différents accords. Ce texte est essentiellement fondé sur les informations disponibles sur le site Internet de la Commission et sur les réponses aux questions écrites[1] à la Commission. Les mêmes questions ont également été posées au Conseil en janvier et en février 2003, mais n'ont pas encore obtenu de réponse.

Partenariat ACP-UE : Kenya, Nigeria et Zambie

La coopération entre l'UE et le Kenya, le Nigeria et la Zambie repose sur le partenariat ACP-UE. L'accord de Cotonou, qui définit le cadre général des relations ACP-UE pour les vingt prochaines années, renvoie au respect des droits de l'homme, y compris l'égalité entre les femmes et les hommes, comme un élément essentiel de l'accord et à la nécessité d'un dialogue exhaustif entre les deux parties.

Kenya

La violence et les discriminations contre les femmes sont fréquentes au Kenya, selon Amnesty International. La majorité des femmes et des filles kenyanes ont subi des mutilations génitales bien qu'il existe une loi interdisant la mutilation génitale féminine pour les jeunes filles de moins de 17 ans. La violence sexuelle est un autre problème majeur, que rencontrent de nombreuses femmes kenyanes[2]. La Commission a déjà attiré l'attention du gouvernement kenyan et de plusieurs agents non gouvernementaux à plusieurs reprises sur le sujet de la violence contre les femmes et elle continuera de le faire. La Commission soutient des mesures adéquates pour réaliser des progrès dans le domaine des droits de l'homme, y compris des droits de la femme. Elle contribue aussi financièrement à des initiatives spécifiques de la société civile pour lutter contre la violence envers les femmes, notamment par un projet axé sur la mutilation génitale féminine.

Nigeria

Au Nigeria, les femmes sont de plus en plus victimes de flagellation ou de mort par lapidation pour adultère. Ces sentences sont arrêtées par les tribunaux des états du nord du Nigeria appliquant la loi religieuse (sharia)[3]. Dans des cas individuels, la Commission a lancé des appels au Président directement ou par les voies diplomatiques et est intervenue au niveau du gouvernement nigérian pour mettre fin à l'application de la peine de mort. Le Parlement européen[4] et la Présidence du Conseil[5] ont exprimé à plusieurs reprises leur aversion à l'égard de la lapidation et du châtiment corporel, de l'application de la sharia et de la peine de mort dans le pays. Ces institutions ont toutes deux déclaré que ces pratiques constituent une grave violation des droits de l'homme. Le document de stratégie de ce pays, signé avec le Nigeria en 2002, comprend le soutien à l'amélioration du statut des femmes. La réforme judiciaire, y compris la question du droit pénal de la sharia, est abordée par l'initiative européenne pour la démocratie et les droits de l'homme et par l'aide aux organisations de la société civile. Plus récemment, l'Assemblée parlementaire ACP-UE a demandé au gouvernement du Nigeria de prendre les mesures nécessaires pour veiller au respect de l'état de droit et des droits fondamentaux.

Zambie

Selon le rapport de "Human Rights Watch" de janvier 2003, en Zambie les filles sont cinq fois plus susceptibles d'être infectées par le virus VIH que les garçons, parce qu'elles sont fréquemment victimes d'abus sexuels. Un autre problème clé est l'incapacité du système judiciaire à traiter correctement les plaintes pour abus sexuels[6]. Le commissaire compétent a discuté de cette question avec le Président de Zambie et la Commission travaille avec le gouvernement zambien pour préparer des programmes spéciaux de formation pour les juges et les officiers de police. Le problème du VIH est traité en partie par l'utilisation de la ligne budgétaire B7-6211, qui accorde des prêts pour améliorer les soins et le traitement des personnes infectées et qui soutient aussi des projets visant à aborder les besoins des jeunes femmes exposées à l'infection.

Pour ces trois pays, la Commission évoque la possibilité de tenir des consultations et, ultérieurement, si nécessaire, de prendre les mesures appropriées en cas de non respect des éléments essentiels de l'accord. La suspension de l'accord n'est qu'une mesure de dernier ressort.

Partenariat euro-méditerranéen : Égypte

Depuis 1995, les relations entre l'Égypte et l'Union européenne doivent être considérées dans le cadre du processus de Barcelone, qui a créé la base d'un partenariat plus intégré entre l'Union et ses voisins méridionaux. Dans la ligne de la Déclaration de Barcelone en 2001, l'Égypte a signé un accord d'association avec l'Union européenne. Bien que des dispositions sur les droits de l'homme soient inscrites dans la déclaration et dans l'accord d'association, les femmes égyptiennes sont encore victimes de discrimination et une majorité d'entre elles ont subi des mutilations génitales.

Le gouvernement égyptien continue de lutter contre la mutilation génitale par des moyens législatifs et par des mesures qui sont conçues pour changer l'attitude de la population. En fait, la mutilation génitale a été déclarée illégale en 1996, mais cette interdiction a été annulée en justice. Dans une résolution de 1997[7], le Parlement européen a exprimé ses regrets sur les arrêts des tribunaux et confirmé son soutien au gouvernement égyptien qui, ultérieurement a réussi a réimposer l'interdiction de mutilation génitale. L'Union européenne soutient le combat contre la mutilation génitale par des programmes en matière de soins de santé de base et reproductive et par le cofinancement, par exemple, de campagnes concernant la mutilation. La Commission apporte son appui à différents programmes, organisations de la société civile et organisations non gouvernementales dans la lutte contre les discriminations à l'égard des femmes. En réalité, l'Union européenne finance depuis plusieurs années des programmes concernant les femmes, en coopération avec l'institut Ibn Khaldoen. Dans certains cas de violation des droits de l'homme, la Commission utilise les voies diplomatiques appropriées pour faire pression sur le gouvernement égyptien, mais, en général, les questions des droits de l'homme sont abordées dans le dialogue politique entre l'Égypte et l'Union.

Accord de coopération : Pakistan

La coopération officielle entre le Pakistan et l'UE a débuté en 1976; depuis peu, un accord de coopération de troisième génération, qui contient une clause appelant au respect des droits de l'homme et des principes démocratiques, a été signé. Au Pakistan, la violence contre les femmes, en particulier "les crimes d'honneur", les viols, l'aspersion d'acide, l'immolation et les meurtres, est largement répandue et a même augmenté au cours des dernières années. Selon Amnesty International, les autorités pakistanaises n'ont pas réussi à assurer une protection adéquate des femmes qui sont victimes de violence.[8] La délégation de la Commission européenne au Pakistan surveille étroitement tous les événements et initiatives dans le domaine et la Commission européenne a demandé officiellement au gouvernement pakistanais de prendre des mesures efficaces pour arrêter la violence et mettre fin aux discriminations. En 1999, la Présidence du Conseil a émis une déclaration[9] dans laquelle elle condamne les "crimes honneur" et demandé au gouvernement pakistanais de protéger ses citoyens conformément à la Constitution et aux instruments internationaux en matière de droits de l'homme. Le Parlement européen pour sa part a demandé au gouvernement d'assurer la sécurité et un traitement égal pour les femmes face aux factions fondamentalistes dans le pays[10]. Les droits des femmes sont un thème horizontal dans les différents projets européens au Pakistan et ils sont abordés dans l'Initiative européenne pour la démocratie et les droits de l'homme. En 2002, par exemple, un programme lié à la promotion et à la protection des droits des femmes a été financé par l'Initiative européenne pour la démocratie et les droits de l'homme[11].

Aucun accord : Iran

Jusqu'à présent, aucun accord n'a été signé avec l'Iran. Néanmoins, des négociations sur l'accord de coopération et commercial sont engagées, en dépit des graves violations des droits des femmes[12] dans le pays. En Iran, les femmes sont lapidées et torturées et il y a une discrimination systématique contre les femmes, par exemple, l'âge minimum pour le mariage pour les filles avec consentement judiciaire est de 9 ans, ce qui est considéré par le PE comme un abus sexuel potentiel passible de sanction[13].

La Commission européenne souligne que les négociations en cours avec l'Iran sur un accord commercial et de coopération sont liées aux négociations sur le dialogue politique et le contre-terrorisme et cela correspond à la décision du Conseil Affaires générales et relations extérieures du 12 juillet 2002 sur le paquet politique. Le Parlement européen a souligné dans différentes résolutions que l'accord commercial et de coopération avec l'Iran doit comprendre une clause sur les droits de l'homme. Dans ces résolutions, le Parlement européen a exprimé son opposition envers les discriminations que rencontrent les femmes iraniennes et contre l'application de la peine de mort et la lapidation. Les membres du Parlement européen souhaitent que les autorités iraniennes prennent les mesures nécessaires pour garantir l'égalité de traitement entre les femmes et les hommes[14]. En décembre 2002, un dialogue spécifique sur les droits de l'homme avec l'UE a été lancé. L'une des premières questions traitées par ce dialogue était la discrimination contre les femmes. Au cours de sa première réunion, l'UE a souligné l'importance de l'adhésion de l'Iran à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discriminations contre les femmes et a aussi insisté pour que le rapporteur des Nations unies sur la violence contre les femmes soit invité à se rendre en Iran. Récemment, des nouvelles positives sont parvenues d'Iran : le rapporteur des Nations unies a effectivement été invité et un moratoire sur la lapidation est entré en vigueur depuis la fin 2002.

CONCLUSIONS

Bien que les accords avec le Kenya, le Nigeria, la Zambie, l'Égypte et le Pakistan évoquent explicitement les droits humains comme un élément essentiel et bien que les différents exemples de violence contre les femmes indiquent clairement le non respect de ces droits humains, l'Union européenne n'a pas suspendu ses accords avec ces pays. Les canaux diplomatiques et le dialogue politique établi ont été utilisés pour faire pression sur ces pays pour qu'ils améliorent leur situation en matière de droits de la femme. Parallèlement, l'Union européenne a travaillé positivement avec les pays tiers pour lutter contre la violence à l'égard des femmes en soutenant et en finançant des initiatives gouvernementales, non gouvernementales et de la société civile, dans le cadre des différents accords de coopération et d'association et des programmes communautaires, par exemple MEDA[15] et l'initiative européenne pour la démocratie et les droits de l'homme.

Il est évident que l'Union européenne dispose, dans le cas de l'Iran, de moins d'instruments pour lutter contre la violence à l'égard des femmes parce que jusqu'à présent l'Union européenne n'a pas conclu d'accord avec ce pays, bien que l'Union européenne puisse subordonner la signature de l'accord commercial et de coopération avec l'Iran à une amélioration sensible de la situation des femmes dans ce pays.

  • [1] E-0182/02; E-0515/03; E-0517/03; E-0519/03; E-0521/03 et E-0523/03.
  • [2] http://web.amnesty.org/web/wire.nsf/March2002/Kenya
  • [3] http://web.amnesty.org/library/Index:engAFR440082002?OpenDocument&of=themes\WOMEN?OpenDocument&of=THEMES\WOMEN
  • [4] B5-0109/2001 (PV du 15/02/2001), B5-0711/2001 (PV du 15/11/2001), B5-0035/2002 (PV du 07/02/02), A5‑0106/2002 (PV du 25/04/02) et B5-0172/2003 (PV du 13/03/2003).
  • [5] Déclaration de la Présidence sur le châtiment corporel dans l'État de Zamfara du 30/01/2001 (http://europa.eu.int/abc/doc/off/bull/en/200101/p106030.htm), déclaration de la Présidence sur la verdict de la Cour d'appel pour la sharia de Sokoto d'accepter l'appel introduit par Safiya Hussaini le 22/03/2002 (http://europa.eu.int/abc/doc/off/bull/en/200203/p106016.htm), conclusions de la présidence de mars 2002 et déclaration de la présidence sur la peine de mort par lapidation concernant Mme Amina Lawal du 21/08/2002 (http://europa.eu.int/abc/doc/off/bull/en/200207/p106024.htm)
  • [6] http://www.humanrightswatch.org/reports/2003/zambia/
  • [7] B4-0655/1997 (PV du 17/07/1997).
  • [8] http://web.amnesty.org/library/Index/engASA330062002?OpenDocument?OpenDocument
  • [9] Déclaration de la présidence sur le Pakistan du 13 août 1999
    (http://europa.eu.int/abc/doc/off/bull/en/9907/p104021.htm
  • [10] B5-0265/2001 (PV du 05/04/2001).
  • [11] Document de travail du personnel de la Commission, Bruxelles, le 20 décembre 2001, REV 1-Final.
  • [12] La violence contre les femmes était l'une des préoccupations exprimées par le Parlement européen dans sa résolution du 13 décembre 2001. (Résolution A5-0418/2001 du PE).
  • [13] PE 302.056: rapport sur les relations entre l'UE et l'Iran.
  • [14] B4-0059/97 (PV du 20/02/1997), B4-1125/98 (PV du 17/12/1998), B5-0035/2002 (PV du 07/02/02), A5‑0106/2002 (PV du 25/04/02), B5-0527/2002 (PV du 24/10/02) et B5-0592/2002 (PV du 21/11/2002).
  • [15] MEDA est le principal instrument financier de l'Union européenne pour la mise en œuvre du partenariat euro-méditerranéen.