RAPPORT sur la demande de défense de l'immunité parlementaire de Umberto Bossi

22.6.2005 - (2004/2203(IMM))

Commission des affaires juridiques
Rapporteur: Diana Wallis

Procédure : 2004/2203(IMM)
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A6-0209/2005
Textes déposés :
A6-0209/2005
Débats :
Textes adoptés :

PROPOSITION DE DÉCISION DU PARLEMENT EUROPÉEN

sur la demande de défense de l'immunité parlementaire de Umberto Bossi

(2004/2203(IMM))

Le Parlement européen,

–   vu la demande d'un avocat agissant au nom de Umberto Bossi en vue de la défense de l'immunité de ce dernier dans le cadre d'une procédure en instance auprès du tribunal civil de Padoue, en date du 3 août 2005, et communiquée en séance plénière le 13 septembre 2005,

–   vu les articles 9 et 10 du Protocole sur les privilèges et immunités des Communautés européennes, du 8 avril 1965, ainsi que l'article 6, paragraphe 2, de l'Acte portant élection des membres du Parlement européen au suffrage universel direct, du 20 septembre 1976,

–   vu les arrêts de la Cour de justice des Communautés européennes du 12 mai 1964 et du 10 juillet 1986[1],

–   vu l'article 6, paragraphe 3, et l'article 7 de son règlement,

–   vu le rapport de la commission des affaires juridiques (A6‑0209/2005),

A. considérant qu'Umberto Bossi a été député au Parlement européen au cours de la quatrième législature (début du mandat le 19 juillet 1994, vérification du mandat le 15 novembre 1994, expiration du mandat le 19 juillet 1999) et de la cinquième législature (début du mandat le 20 juillet 1999, vérification du mandat le 15 décembre 1999, expiration du mandat le 10 juin 2001 pour incompatibilité),

B.  considérant que les membres du Parlement européen ne peuvent être recherchés, détenus ou poursuivis en raison des opinions ou votes émis par eux dans l'exercice de leurs fonctions[2],

C. considérant que l'interdiction de toute poursuite judiciaire inclut également l'interdiction de poursuites au civil à l'encontre d'un membre du Parlement européen,

1.  décide de défendre l'immunité parlementaire de Umberto Bossi;

2.  propose de déclarer, conformément à l'article 9 du protocole cité et compte tenu des procédures de l'État membre concerné, que l'action en question ne doit pas être poursuivie; demande dès lors au tribunal de tirer les conclusions qui s'imposent;

3.  charge son Président de transmettre immédiatement la présente décision et le rapport de sa commission compétente au tribunal civil de Padoue;

EXPOSÉ DES MOTIFS

I.         Admissibilité de la requête

Le premier mandat de membre du Parlement européen de Umberto Bossi a duré du 19 juillet 1994 au 19 juillet 1999. Le deuxième a duré du 20 juillet 1999 au 10 juin 2001, date à laquelle il a été nommé ministre (incompatibilité conformément à l'article 6, paragraphe 1, 1er tiret, de l'Acte portant sur l'élection des représentants à l'assemblée au suffrage universel direct[3]). Son troisième mandat a débuté le 20 juillet 2004. Les faits relatifs à l'action en justice engagée auprès du tribunal civil de Padoue se sont déroulés en 1998 et en février 1999.

La requête est donc admissible au titre de l'article 6, paragraphe 3, du règlement, étant donné que Umberto Bossi, était, à l'époque des faits, membre du Parlement européen.

II.       Exposé des faits et légitimité de la requête

Au cours de la séance du 13 septembre 2004, le Président a annoncé au Parlement, conformément à l'article 6 du règlement, qu'il avait reçu de l'avocat du député Umberto Bossi une demande de défense de l'immunité parlementaire de ce dernier dans le cadre d'une procédure en instance auprès du tribunal civil de Padoue.

Conformément à l'article 6, paragraphe 3, du règlement, le Président a renvoyé cette demande à la commission des affaires juridiques, compétente au fond.

III.      Exposé des faits

M. Fabrizio Comencini, ancien membre du parti de M. Bossi (la Ligue du Nord) a engagé des poursuites en dommages et intérêts auprès du Tribunal civil de Padoue.

Dans sa déposition, M. Comencini s'est plaint que M. Bossi ait, à plusieurs reprises, parlé de lui en des termes extrêmement insultants et portant atteinte à sa réputation.

Le "Giornale di Vicenza" daté du 9 octobre 1998, se référant au congrès organisé par la Ligue du Nord à Bassano del Grappa, a notamment rapporté que M. Bossi avait déclaré en présence de M. Comencini et de ses partisans: "Crachez-lui au visage", "Bande de traîtres, d'avortons, de parasites, de fainéants. Après avoir fait exploser le MSI, il provoque un schisme au sein de la Ligue: la rupture est dans ses gènes", "Nous sommes des hommes, nous ne sommes pas Comencini, "Une marionnette entre les mains du maître d'Arcore", "Piétinez-le".

En d'autres occasions, M. Bossi a également déclaré que M. Comencini "complotait dans l'ombre", qu'il "envisageait de prêter main forte à la coalition du Pôle des libertés et à son dirigeant, Silvio Berlusconi, le mafioso" afin de "faire triompher le parti du mafioso" et que "nous ne nous allierons jamais au mafioso" (voir "La Padania" en date des 13 octobre, 29 septembre, et 27 octobre 1998). Et encore: "Cosa nostra dicte la ligne que doit suivre Berlusconi, qui manipule Galan et Comencini en Vénétie" ("La Padania" du 13 octobre 1998). "Comencini..., cet homme acheté, soudoyé par Berlusconi" ("Il gazzettino" du 1er décembre 1998).

IV. Dispositions applicables

L'article 9 du Protocole sur les privilèges et immunités des Communautés européennes est libellé comme suit:

      "Les membres de l'Assemblée ne peuvent être recherchés, détenus ou poursuivis en raison des opinions ou votes émis par eux dans l'exercice de leurs fonctions."

      L'essentiel est donc de déterminer si les déclarations qui font l'objet de la procédure en instance ont été faites par M. Bossi dans l'exercice de ses fonctions de député au Parlement européen.

Une procédure civile peut également constituer des poursuites publiques à l'encontre d'un député, au sens de l'article 9 du Protocole sur les privilèges et immunités des Communautés européennes[4].

Le Parlement européen n'a cessé de mettre en avant le principe, fondamental, selon lequel la levée de l'immunité ne peut en aucun cas avoir lieu lorsque les faits ou les propos reprochés au député ont eu lieu dans le cadre de son activité politique ou en liaison directe avec celle-ci[5]. Le droit de tenir de tels propos est essentiel à la mission d'un député, élu du peuple.

En application desdits principes, votre rapporteur constate que les propos de l'ancien membre Umberto Bossi constituent une expression d'opinion légitime dans le cadre d'un débat politique. Ils doivent être appréciés dans le contexte d'une controverse politique entre des responsables politiques, faisant suite à la scission d'un parti politique, et se rapportant à une question d'intérêt véritablement général. En résumé, ces déclarations n'excèdent pas les limites de l'exercice d'une critique politique légitime.

III. Conclusion

Sur la base des considérations qui précèdent, la commission des affaires juridiques recommande au Parlement européen, conformément à l'article 7 bis, paragraphe 2, de son règlement, de défendre l'immunité et les privilèges de son ancien membre Umberto Bossi.

PROCÉDURE

Titre

Demande de défense de l'immunité parlementaire de Umberto Bossi

Numéro de procédure

2004/2203(IMM)

Demande de défense d'immunité
  transmise par
  Date de la demande
  Date de l'annonce en séance



3.8.2004
13.9.2004

Commission compétente au fond
  Date de l'annonce en séance

JURI
13.9.2004

Base réglementaire

art. 6, par. 3, et art. 7

Rapporteur
  Date de la nomination

Diana Wallis
26.10.2004

Rapporteur remplacé

 

Examen en commission

30.11.2004

20.01.2005

30.3.2005

21.6.2005

 

Date de l'adoption

21.6.2005

Résultat du vote final

 

pour:

contre:
abstentions:

15

0
0

Membres présents au moment du vote final

Maria Berger, Bert Doorn, Monica Frassoni, Giuseppe Gargani, Kurt Lechner, Klaus-Heiner Lehne, Katalin Lévai, Antonio López-Istúriz White, Antonio Masip Hidalgo, Viktória Mohácsi, Francesco Enrico Speroni, Diana Wallis, Nicola Zingaretti, Jaroslav Zvěřina

Suppléants présents au moment du vote final

Manuel Medina Ortega

Suppléants (art. 178, par. 2) présents au moment du vote final

 

Date du dépôt – A6

22.6.2005

A6-0209/2005

  • [1]  Affaire 101/63, Wagner/Fohrmann et Krier, Recueil 1964, p. 195, et affaire 149/85, Wybot/Faure et autres, Recueil 1986, p. 2391.
  • [2]  Article 9 du Protocole sur les privilèges et immunités des Communautés européennes.
  • [3]  Journal officiel n° L 278 du 8 octobre 1976, pp 5 à 11
  • [4]  Requête en défense de l'immunité de Jannis Sakellariou (A5-0309/2003) et de Giuseppe Gargani, décision du 16 décembre 2003 (2003/2182 (IMM))
  • [5]  pour la dernière fois dans le cas de la demande de levée de l'immunité de Mogens N.J. Camre, décision du 1er juillet 2003 (2003/2249 (IMM))