RAPPORT sur le rapport annuel 2006 de la Banque européenne d'investissement
28.3.2008 - (2007/2251(INI))
Commission du contrôle budgétaire
Rapporteur: Jean-Pierre Audy
PROPOSITION DE RÉSOLUTION DU PARLEMENT EUROPÉEN
sur le rapport annuel 2006 de la Banque européenne d'investissement (BEI)
Le Parlement européen,
– vu les articles 266 et 267 du traité CE, relatifs à la banque européenne d'investissement (BEI), et vu le protocole (n° 11) sur les statuts de la BEI[1],
– vu l'article 248 du traité CE, relatif au rôle de la Cour des comptes,
– vu le Traité de Lisbonne signé le 13 décembre 2007 par les chefs d'Etat et de gouvernement des Etats membres de l'Union européenne,
– vu sa résolution du 15 février 2007 sur le rapport annuel de la BEI pour l'année 2005[2],
– vu la décision du Conseil du 19 avril 2007 concernant la participation de la Communauté à l'augmentation du capital du Fonds européen d'investissement (FEI)[3],
– vu l'arrêt de la cour du 10 juillet 2003, relatif aux compétences d’investigation de l’Office européen de lutte anti-fraude (OLAF) auprès de la BEI[4],
– vu la décision du Conseil du 19 décembre 2006[5] confiant à la BEI un nouveau mandat l’autorisant à accorder des prêts à concurrence de 12,4 milliards d'EUR dans les pays voisins de l’Union européenne,
– vu le règlement (CE) n° 680/2007 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2007, déterminant les règles générales pour l'octroi d'un concours financier communautaire dans le domaine des réseaux transeuropéens de transport et d'énergie[6] et la décision 1982/2006/CE du Parlement européen et du Conseil du 18 décembre 2006 relative au septième programme-cadre de la Communauté européenne pour des actions de recherche, de développement technologique et de démonstration[7] (qui concerne le Mécanisme de financement avec partage des risques, MFPR),
– vu la signature le 11 janvier 2008 entre la BEI et la Commission de l'accord de coopération établissant l'instrument de garantie de prêt pour les projets relatifs au réseau transeuropéen de transport (GPTT),
– vu la décision 1639/2006/EC du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 2006 établissant le programme cadre pour l’innovation et la compétitivité (2007-2013)[8],
– vu le 49e rapport annuel (2006) de la BEI, et sa politique de divulgation du 28 mars 2006,
– vu les « Principes européens pour l’environnement », lancés en 2006 par la BEI,
– vu le plan d’activité de la banque 2007–2009, tel qu’approuvé par le conseil d’administration à sa réunion du 12 décembre 2006,
– vu le discours prononcé par M. Philippe Maystadt, président de la BEI, devant la commission du contrôle budgétaire le 11 septembre 2007,
– vu les états financiers de l'exercice 2006 approuvés et faisant l'objet d'une opinion d’audit favorable d'un auditeur indépendant et du comité de vérification de la BEI,
– vu l'étude sur les nouveaux instruments financiers pour les infrastructures et les services européens de transport[9],
– vu les travaux et les conclusions du colloque qui s'est tenu à Clermont-Ferrand (France) le 14 décembre 2007 sur le thème : "l'aménagement et le développement du territoire de l'Union européenne : le défi des investissements dans l'Union et leurs financements : la place de la banque européenne d'investissement",
– vu l'article 45 et l'article 112, paragraphe 2, de son règlement,
– vu le rapport de la commission du contrôle budgétaire (A6‑0079/2008),
A. considérant que la BEI a pour mission de contribuer, en faisant appel aux marchés de capitaux et à ses fonds propres, au développement équilibré et sans heurt du marché commun,
B. considérant le rôle de la BEI dans le développement harmonieux de l’ensemble de la Communauté, et dans la réduction des écarts de développement des diverses régions, y compris des régions ultrapériphériques,
C. considérant le montant du capital souscrit qui s'élève à 163,7 milliards d'EUR au 31 décembre 2006, sur lequel les Etats membres ont libéré 8,2 milliards d'EUR,
D. considérant que les statuts de la BEI prévoient que le total des prêts et des garanties accordés par le BEI ne doit pas excéder 250 % le montant du capital souscrit ;
E. considérant que la BEI n'est pas soumise aux obligations de Bâle II, mais a décidé de s'en imposer volontairement les règles dans la mesure où elles s'appliquent à son activité,
F. considérant l'accord de la commission de surveillance du secteur financier du Luxembourg pour suivre de manière rapprochée les politiques de gestion des risques de la BEI, mais uniquement en qualité d'organe informel et purement consultatif, en laissant à la BEI le soin de la définition du cadre d'application de Bâle II en fonction de ses propres besoins,
G. considérant que la BEI a fait de l'approvisionnement énergétique sûr, compétitif et durable une de ses priorités, qui s'ajoute aux priorités suivantes: cohésion économique et sociale, appui à la recherche, à la technologie et à l'innovation, réseaux transeuropéens de transport et d'énergie, viabilité de l'environnement à long terme, lutte contre le changement climatique, appui aux petites et moyennes entreprises (PME),
H. considérant les besoins importants de l’Union européenne en matière de financement d’infrastructures, évalués à 600 milliards d'EUR[10],
I. considérant le rôle primordial de la BEI dans le développement des réseaux transeuropéens en mettant à disposition divers instruments et mécanismes,
J. considérant les difficultés rencontrées par l’Union européenne dans le financement de projets d’envergure européenne, par exemple le projet Galileo,
K. considérant la qualité des ressources humaines de la BEI, particulièrement en matière d'ingénierie financière et d'aide au montage de projets,
L. considérant le rôle éminent joué par la BEI dans le financement de projets dans les pays en développement,
Généralités
1. félicite la BEI pour son rapport d’activité de 2006 et l’encourage à poursuivre son action en faveur du développement de l’économie européenne, pour assurer la croissance, la création d’emplois, la cohésion interrégionale et sociale;
2. se félicite de la transparence et de la coopération totale de la BEI avec le Parlement;
3. demande une session d'information a minima annuelle entre la BEI et la commission du contrôle budgétaire du Parlement concernant l'exécution de la facilité d'investissement du Fonds européen de développement (FED), parallèlement à la procédure de décharge FED;
Contrôle budgétaire et gestion
4. invite la BEI à tout mettre en œuvre pour conserver la notation AAA, garante de l’activité de la banque et de meilleurs taux pour ses prêts, d’adapter sa politique prudentielle dans cette optique, sans toutefois négliger l’investissement à très long terme;
5. souligne que la BEI pratique une politique de "tolérance zéro" contre la fraude et la corruption, se félicite de l'augmentation du nombre d'enquêtes, ainsi que de la collaboration renforcée avec l'OLAF; invite également la BEI à adopter une politique et des mesures antifraude qui incluent des mesures tendant à la mise en place:
i)
d'un mécanisme administratif d'exclusion des sociétés reconnues coupables de corruption par la Banque et d'autres banques multilatérales de développement,
ii) d'une politique de protection des dénonciateurs d'abus et
iii) d'un processus de révision du guide pour la passation des marchés;
6. se félicite de l'existence d’un bureau de plainte, pour recevoir et traiter les plaintes extérieures, ainsi que d'un mécanisme de recours pour les plaintes adressées via le médiateur européen; salue et soutient activement le dialogue entre le médiateur et la BEI; invite cette dernière à réexaminer en conséquence son système d'arbitrage interne et à publier de nouvelles lignes directrices relatives au mécanisme de recours qui couvrent l'ensemble des opérations financées par la BEI;
7. salue la volonté de transparence de la BEI, dans le cadre de sa politique de divulgation, et la mise à disposition d’informations nombreuses à destination du grand public, y compris des listes des projets financés, produites chaque année, accompagnées d'informations succinctes sur ces projets; encourage la BEI à développer les activités de son service "Evaluation des opérations", qui réalise l'évaluation ex post d'un échantillon représentatif de projets et de programmes;
Mécanismes de contrôles comptables et prudentiels et de mesure des résultats
8. note l'opinion d'audit externe favorable et les conclusions du rapport annuel du comité de vérification; réitère son souhait de voir la BEI soumise aux mêmes règles prudentielles que les établissements de crédit et à un véritable contrôle prudentiel, tout en constatant qu’il semble que ces règles ne s'appliquent pas aux institutions financières internationales comparables;
9. demande qu'une mission indépendante de régulation soit mise en place afin de veiller à la qualité de la situation financière de la BEI, à l'exacte mesure de ses résultats et au respect des règles de bonne conduite de la profession;
10. suggère que la BEI saisisse le comité européen des contrôleurs bancaires (CEBS) pour obtenir un avis sur cette mission de contrôle qui devra préciser qui pourrait la diligenter dans l'attente de la création d'un véritable régulateur bancaire européen; propose que soit envisagée toute solution, par exemple: intervention du CEBS, intervention d’un régulateur national, intervention des régulateurs nationaux par rotation annuelle;
11. félicite la BEI des efforts accomplis dans l’introduction des normes comptables IFRS (de l'anglais International Financial Reporting Standards ou normes internationales d'information financière) dans ses états consolidés, ainsi que dans les comptes du Fonds européen d'investissement (FEI) pour qui l’exercice 2006 est celui de la première application des normes comptables IFRS;
12. partage, sous réserve que toutes les informations soient données aux tiers, les réticences de la BEI à précipiter l’application des normes comptables IFRS pour les comptes statutaires tant qu’un large consensus en la matière ne se dégage pas au sein des Etats membres concernant, notamment, la comptabilisation à la juste valeur qui peut introduire une très grande volatilité dans la détermination des résultats financiers non consolidés de la BEI;
13. recommande néanmoins une veille technique sur cette question qui deviendra cruciale en terme de présentation, d’approbation et d’utilisation des résultats comptables avec le développement des opérations de capital-risque, du financement des PME, et la nécessaire ingénierie financière que l’Union européenne devra mettre en place pour financer ses infrastructures;
14. prend note des choix méthodologiques adoptés par la BEI pour évaluer les risques de crédit, visant à pallier les inconvénients dus au manque d'expérience en matière de pertes sur des crédits, tout en attirant l'attention sur la nécessité d'introduire des mesures préventives pour assurer une réduction des risques et, dès lors, une protection maximale des ressources financières, en vue de garantir la réalisation des objectifs de la politique européenne;
15. prend acte des efforts effectués pour surmonter ces difficultés sur la base de techniques de transposition des paramètres internes et externes et souhaite être informé de la nouvelle méthodologie qui a été introduite pour noter les clients de la BEI et apprécier les risques de crédit; note, s'agissant des opérations de titrisation, que l'approche simplifiée utilisée actuellement pourra être revue dans le futur;
16. souhaite, concernant l’application de Bâle II, que la BEI puisse démontrer sa capacité à faire face à sa mission, au regard de ses fonds propres, soit 33,5 milliards d'EUR, et à conserver la meilleure notation, soit AAA;
Stratégie et objectifs
17. se félicite des orientations de la nouvelle stratégie 2007-2009, incluant le renforcement de la valeur ajoutée, l'augmentation progressive de la prise de risque, entre autres dans les activités en faveur des PME et des collectivités locales, l'utilisation de nouveaux instruments financiers et l'intensification de la coopération avec la Commission; soutient sans réserve le plan d'activité de la banque pour la période 2007-2009;
Nouvelles priorités stratégiques et instruments
18. se félicite de l’inclusion de la promotion d’une énergie sûre, compétitive et durable parmi les axes majeurs du plan d’activité de la Banque, notamment des sources d'énergie renouvelables et alternatives, et demande que soient établis des critères de financement liés au respect de l'environnement, conformément aux objectifs stratégiques de l'Union européenne en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre;
19. se félicite que le développement durable demeure une exigence fondamentale pour la BEI; félicite la BEI de ses excellents résultats en termes d’activités de prêt concernant la protection de l’environnement et la cohésion sociale et économique; encourage la BEI à renforcer ses politiques environnementale et sociale afin d'améliorer encore et de mettre à jour les normes qu'elle applique actuellement, en particulier en ce qui concerne ses activités liées aux prêts extérieurs, et d'assurer la cohérence de ces activités, plus particulièrement sur le continent africain, avec le Consensus européen pour le développement[11] et la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement; demande à la BEI de veiller à s’engager activement avec la société civile, notamment par des procédures de consultation;
20. félicite la BEI pour les contrats-cadres signés entre la Banque et la Commission : MFPR et GPTT; encourage la Commission et la BEI à développer plus d'instruments conjoints à l’appui des politiques de l’Union européenne tout en s'efforçant de mobiliser plus de capitaux privés, en vue de garantir pleinement la réalisation des objectifs prioritaires de la BEI;
Financement des grands projets d’infrastructures
21. rappelle que la BEI doit éviter toute concurrence avec le secteur privé, tout en agissant en complémentarité, dans la recherche d’un effet de levier optimal pour le financement de projets européens;
22. réitère son encouragement à la BEI à donner la priorité au financement des réseaux transeuropéens (RTE), notamment les infrastructures transfrontalières permettant l'interconnexion des réseaux nationaux, qui constituent un élément essentiel pour le développement d'une économie de marché centrée sur la cohésion sociale; invite la BEI à accorder la priorité, pour le financement des RTE, aux projets d'infrastructure ou de transport à empreinte carbonique plus faible ou négative;
23. suggère que la Commission confie à la BEI, compte tenu de la qualité de ses ressources humaines, du recul et de son expérience dans le financement des grandes infrastructures, une mission de réflexion stratégique sur le financement des infrastructures, en tenant compte de la nécessité d'assurer un développement régional équilibré et en n'excluant aucune hypothèse: subventions, libération des sommes souscrites par les Etats membres au capital de la BEI, prêts (dont prêts BEI, notamment adossés à la procédure des prêts spéciaux des Etats membres[12]), instruments innovants tels le MFPR et le GPTT, ingénierie financière adaptée aux projets à long terme non immédiatement rentables, développement de systèmes de garanties, création d'une section d'investissement au sein du budget de l'Union européenne, consortiums financiers entre pouvoirs européen, nationaux et locaux, partenariats public-privé, etc.;
Aide aux PME
24. invite la BEI à veiller à ce que suffisamment de capital risque soit mis à la disposition des PME, qui éprouvent des difficultés pour attirer des capitaux à risque; se félicite du lancement de l'initiative commune JEREMIE (Joint European Resources to Medium Enterprises) développé en 2005 par la Direction générale de la politique régionale de la Commission et la BEI pour permettre un meilleur accès des entreprises aux dispositifs d'ingénierie financière, et encourage le développement du programme Compétitivité et Innovation (CIP) dans le cadre des priorités de l'agenda de Lisbonne;
25. rappelle que le Parlement a approuvé la participation de la Communauté à l’augmentation de capital du FEI, afin de mettre à disposition du FEI les moyens dont il a besoin pour poursuivre sa mission et mettre en œuvre la politique de cohésion économique et sociale;
26. soutient la nécessité de mieux répondre aux défaillances de marché pour le financement des PME et encourage le Commission, la BEI et le FEI à continuer la diversification des instruments financiers communautaires en amont (transfert de technologie) et en aval (financement mezzanine) du capital risque, ainsi qu'à favoriser le développement du microcrédit en Europe dans le cadre de la nouvelle Initiative européenne pour un développement du microcrédit en faveur de la croissance et de l'emploi;
Aide aux montages de projets
27. souligne le rôle d’expertise de la BEI dans le montage de projet, notamment grâce au programme JASPERS (assistance conjointe à la préparation de projets dans les régions européennes), rappelle qu’une valeur ajoutée importante de la BEI réside dans sa capacité d’ingénierie sur le montage de financement de projets et les partenariats public-privé privé, notamment dans le cadre du Centre d’expertise européen pour les partenariats public-privé (EPEC), et demande à la BEI de mieux communiquer en direction de responsables de projets au niveau local sur l’aide technique qu’elle peut fournir;
28. félicite la BEI de l’ouverture de nouveaux bureaux dans les États membres, qui permettront une meilleure visibilité de la BEI, et une plus grande proximité avec les responsables de projets pour la facilitation des projets et aideront la BEI à nouer des liens plus étroits avec les organisations, les institutions et les autorités locales en vue de faire évoluer favorablement la politique communautaire de développement régional équilibré et de favoriser une implication plus rapide des pays qui ont rejoint l'Union européenne depuis 2004;
Opérations à l’extérieur de l’Union européenne
29. note avec satisfaction les conclusions favorables de la revue des activités de la Facilité euro-méditerranéenne d’investissement et de partenariat (FEMIP); sur base de cette revue, se félicite de l’appel lancé par le Conseil à étoffer davantage encore la FEMIP pour renforcer le partenariat euro-méditerranéen; espère, dans ce cadre, que le mandat de prêts confié à la BEI pour la période 2007-2013, complété par les ressources budgétaires appropriées, permettra d’accélérer le processus d’intégration économique régionale;
30. invite la BEI à agir, dans les régions en développement, en conformité avec les principes de la Déclaration de Paris sur l’efficacité de l’aide, adoptée le 2 mars 2005, notamment en fournissant une aide efficace, en renforçant la responsabilité mutuelle et en adoptant des indicateurs de développement mesurables;
31. considère que la FEMIP doit demeurer le pivot autour duquel articuler toute initiative européenne en faveur d’une nouvelle ambition pour le développement du bassin méditerranéen;
32. encourage la BEI à poursuivre sa politique d'émissions diversifiées dans différentes monnaies mondiales, y compris dans les monnaies des pays émergents tout en continuant à se couvrir des risques de change;
°
° °
33. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, à la Banque européenne d'investissement, ainsi qu'aux gouvernements et aux parlements des États membres.
- [1] Protocoles annexés au traité instituant la Communauté européenne.
- [2] JO C 287 E du 29.11.2007, p. 544.
- [3] JO L 107 du 25.4.2007, p. 5.
- [4] Affaire C-15/00, Rec. 2003, p. I-07281.
- [5] JO L 414 du 19.12.2006, p. 95.
- [6] JO L 162 du 22.6.2007, p. 1.
- [7] JO L 412 du 30.12.2006, p. 1
- [8] JO L 310 du 9.11.2006, p. 15.
- [9] PE 379.207, IP/B/TRAN/IC/2006-184.
- [10] PE 379.207, IP/B/TRAN/IC/2006-184.
- [11] Déclaration conjointe du Conseil et des représentants des gouvernements des États membres réunis au sein du Conseil, du Parlement européen et de la Commission sur la politique de développement de l'Union européenne intitulée "Le Consensus européen pour le développement (JO C 46 du 24.2.2006, p. 1).
- [12] Article 6 des statuts de la BEI.
EXPOSÉ DES MOTIFS
La Banque européenne d'investissement (BEI), créée par le Traité de Rome, fête son cinquantième anniversaire en 2008. Ses membres sont les Etats membres de l'Union européenne, dont les ministres des finances constituent son conseil des gouverneurs. Elle a pour mission de contribuer, en faisant appel aux marchés des capitaux et à ses ressources propres, au développement équilibré et sans heurt du marché commun dans l’intérêt de la Communauté.
C'est un instrument communautaire mais au sein duquel le pouvoir est exercé de manière intergouvernemental.
Régulièrement, depuis 1999, le Parlement européen s'est exprimé sur le rapport d'activité de la BEI. En ce qui concerne les relations établies entre la BEI et le Parlement européen, le rapporteur tient à souligner la totale coopération de la BEI, impulsée, notamment, par son président Philippe Maystadt, et la qualité des contacts et des informations dont il a pu disposer. Cette volonté de transparence se retrouve aussi dans la mise à disposition d'information pour le grand public, notamment par le biais du site Internet (www.eib.org).
Le rapport n'a naturellement pas de vocation législative, mais entend exprimer l'opinion des représentants des citoyens européens au moment où l’Union européenne est confrontée aux exigences des résultats en faveur de ces mêmes citoyens qui, souvent sans le savoir, bénéficient des prestations de la BEI. Par le présent rapport, le Parlement européen peut donner une appréciation politique sur les activités de la BEI et sur sa gestion, et le rapporteur invite ses collègues à féliciter la BEI pour son action, et pour son ambitieux plan d'activité.
Il est à noter que, jusqu'ici, le rapport sur le rapport annuel d'activité de la BEI avait été attribué à la commission des affaires économiques et monétaires ; toutefois, le règlement du Parlement européen stipule que la commission du contrôle budgétaire a dans ses compétences "les questions concernant le contrôle des activités financières de la BEI". Le rapporteur a interprété cette compétence dans une acceptation large tout en ayant une attention particulière aux questions relatives au contrôle financier, notamment en matière de régulation bancaire.
Contrôle budgétaire et gestion : le rapporteur propose une mission de régulation bancaire en faveur de la BEI
En termes de mécanismes de contrôle, la BEI dispose de son propre service de contrôle interne : l’inspection générale. Le contrôle externe est assuré par un cabinet d’audit de notoriété internationale et par un comité de vérification. Par ailleurs, la BEI a souligné que sa gestion était également examinée par les agences de notation qui lui attribuent la note maximale AAA. Il est apparu au rapporteur que le moment était venu de mettre en place un véritable contrôle de régulation bancaire. Le rapporteur suggère que le comité européen des contrôleurs bancaires (CEBS) soit saisi par la BEI, elle-même, pour examiner les conditions de cette mission de régulation et, notamment, déterminer qui pourrait être à même de l'assurer, en l'absence, et le rapporteur le regrette, d'un véritable régulateur bancaire européen. Le rapporteur demande que toute solution soit envisagée et il fait des propositions concrètes, comme par exemple : intervention du CEBS, intervention d’un régulateur national, ou intervention des régulateurs nationaux par rotation annuelle. Le rapporteur s'est interrogé sur le fait de savoir si, à défaut de solution publique et, sur la base d'un appel d'offre européen, cette mission ne pourrait pas être confiée à un cabinet privé indépendant. Après réflexion, il a renoncé à soumettre cette idée pour en rester à une mission publique de régulation bancaire européenne en espérant qu'une solution puisse être trouvée.
Le rapporteur soutient les réticences de la BEI à précipiter l’application des normes comptables IFRS pour les comptes statutaires tant qu’un large consensus en la matière ne se dégage pas au sein des Etats membres concernant, notamment, la comptabilisation à la juste valeur qui peut introduire une très grande volatilité dans la détermination des résultats financiers non consolidés de la banque et demande à ce qu'une veille technique soit menée sur ce sujet.
Par ailleurs, tout en saluant la volonté de la BEI de se conformer volontairement aux règles de Bâle II qui ne lui sont pas applicables, le rapporteur souhaite que ces dispositions soient mise en œuvre pour démontrer la capacité de la Banque à faire face à sa mission et à conserver la meilleure notation AAA avec les fonds propres dont elle dispose actuellement, soit 33,5 milliards d'euros. Néanmoins, le rapporteur note les spécificités de la BEI au regard, notamment, du fonctionnement de ses capitaux propres : faiblesse des capitaux libéré par rapport au capital souscrit ; soit 8,2 Mrd€ libérés pour un capital souscrit de 163,7 Mrd€ au 31 décembre 2006, capacité du conseil d’administration d’exiger, pour faire face aux besoins de la banque, le versement de tout ou partie du solde du capital souscrit non libéré (soit en théorie 155 Mrd€), ratio prudentiel particulier fixé à l’article 18 point 5 des statuts de la Banque qui prévoit une limitation des engagements à 2,5 fois les capitaux propres souscrit (ratio très peu modifié par le traité de Lisbonne en cours de ratification), etc. Le rapporteur s’est interrogé si la BEI doit continuer à s’inscrire volontairement dans la mise en œuvre d’une norme qui ne lui est pas applicable. Après cette interrogation, il suggère de soutenir la banque dans sa démarche volontaire et vertueuse tout en reconnaissant son caractère spécifique et en souhaitant que les tiers soient correctement informés de ces spécificités.
Stratégie et objectifs ; une priorité : le financement des grandes infrastructures européennes
Le rapporteur souligne la qualité de la nouvelle stratégie 2007-2009 de la BEI, incluant le renforcement de la valeur ajoutée, l'augmentation progressive de la prise de risque, entre autres dans les activités en faveur des PME et des collectivités locales, l'utilisation de nouveaux instruments financiers et l'intensification de la coopération avec la Commission.
Cependant, en matière de financement des infrastructures européennes, et dont le besoin est estimé a minima à 600 milliards d'euros par une étude interne du Parlement européen, le rapporteur propose de réfléchir au rôle de l’Union européenne en matière d’investissements et qu'une mission soit confiée à la BEI.
Les financements mis en œuvre par les Etats membres et l’Union, dont le rapporteur insiste sur le fait qu'ils doivent venir en complément des capitaux privés, et non en concurrence, sont très loin de pouvoir satisfaire les besoins. On peut évoquer les difficultés de financement de Galileo, où de nombreuses lignes de crédit ont été mobilisées: crédits transférés de la PAC, 7e PCRD, budget des agences européennes, instrument de flexibilité, etc. On comprend bien, au vu de la complexité du montage financier et de son caractère miraculeusement aléatoire (montée des cours mondiaux de certaines productions agricoles), qu’il n’est pas crédible d’imaginer reproduire une telle démarche à chaque projet d'envergure européenne. Dans ce contexte, la BEI, tant par son expérience de financeur de l’investissement en Europe que par son expertise des modes de financement, peut apporter un précieux témoignage sur ce problème.
Face à l'ampleur des investissements d'infrastructures (autoroute, aéroports, ports, réseaux ferrés à grande vitesse et fret, voies navigables, technologies de l'information et de la communication, espace, politique de santé, production et réseau d'alimentation en eau potable, recherche et développement, etc.) dont a besoin le territoire de l'Union européenne dans l’accélération de la compétition économique et sociale mondiale actuelle tout en respectant les objectifs liés à l'environnement, le rapporteur suggère que la Commission confie à la BEI, compte tenu de la qualité de ses ressources humaines, du recul et de son expérience dans le financement des grandes infrastructures, une mission de réflexion stratégique sur le financement des infrastructures en n'excluant aucune hypothèse : subventions, libération des sommes souscrites par les Etats membres au capital de la BEI, prêts (dont prêts BEI, notamment adossés à la procédure des prêts spéciaux des Etats membres prévus à l’article 6 des statuts de la banque), instruments innovants tels que le Mécanisme de financement avec partage des (MFPR) et l’Instrument de garantie de prêt pour les projets relatifs au RTE-Transport (GPTT), ingénierie financière adaptée aux projets à long terme non immédiatement rentable selon les critères financiers issus des logiques de marché, développement de systèmes de garanties, création d'une section d'investissement au sein du budget européen, consortiums financiers entre pouvoirs européen, nationaux et locaux, partenariats public-privé, etc.
Il devient nécessaire que nous réfléchissions à une politique d'aménagement et de développement du territoire européen et aux financements à mettre en place. La BEI peut nous aider à conduire cette réflexion en matière de financement des investissements : au fond, il s'agit de réactualiser l'ancienne idée de Jacques Delors d'un plan "grands travaux" adossé à "un grand emprunt" avec les technologies financières d'aujourd'hui et d'entraîner l'Union européenne dans un rôle moteur d'aménageur de son territoire. Nous devons toujours garder à l'esprit que le secteur privé n'investira pas s'il a le sentiment que la sphère publique européenne ne le fait pas: c'est une question de confiance collective dans l'avenir.
En matière d'aide aux PME, le rapporteur souligne la qualité des programmes mis en place notamment par le FEI, dont l'augmentation de capital a récemment été approuvée par le Parlement européen. Les paragraphes relatifs aux aides aux montages de projet visent à attirer l'attention de la BEI sur le fait que, trop souvent, des projets échouent du fait de montages financiers mal préparés: l'information, l'aide technique et la proximité, sont des critères sur lesquels la BEI peut encore progresser, pour permettre aux plus grands nombres de projets de trouver les financements adéquats.
Enfin, le rapporteur a tenu à rappeler le rôle important de la BEI dans la politique de développement de l'Union européenne, ainsi que dans sa politique de voisinage. Il appelle tout particulièrement au renforcement de la FEMIP, dans le cadre d'un partenariat renforcé avec les pays de la Méditerranée.
RÉSULTAT DU VOTE FINAL EN COMMISSION
Date de l’adoption |
26.3.2008 |
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Résultat du vote final |
+: –: 0: |
28 2 2 |
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Membres présents au moment du vote final |
Jean-Pierre Audy, Herbert Bösch, Costas Botopoulos, Mogens Camre, Paulo Casaca, Jorgo Chatzimarkakis, Antonio De Blasio, Petr Duchoň, James Elles, Szabolcs Fazakas, Markus Ferber, Christofer Fjellner, Lutz Goepel, Ingeborg Gräßle, Umberto Guidoni, Dan Jørgensen, Rodi Kratsa-Tsagaropoulou, Nils Lundgren, Marusya Ivanova Lyubcheva, Ashley Mote, Jan Mulder, Bill Newton Dunn, Bart Staes, Søren Bo Søndergaard, Jeffrey Titford, Paul van Buitenen, Kyösti Virrankoski |
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Suppléant(s) présent(s) au moment du vote final |
Dumitru Oprea, Pierre Pribetich, Gabriele Stauner, Ralf Walter |
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Suppléant(s) (art. 178, par. 2) présent(s) au moment du vote final |
Pilar Ayuso, Albert Deß, Markus Pieper |
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