RAPPORT sur la responsabilité sociale des entreprises sous-traitantes dans les chaînes de production
12.2.2009 - (2008/2249(INI))
Commission de l'emploi et des affaires sociales
Rapporteur: Lasse Lehtinen
PROPOSITION DE RÉSOLUTION DU PARLEMENT EUROPÉEN
sur la responsabilité sociale des entreprises sous-traitantes dans les chaînes de production
Le Parlement européen,
– vu l'article 31, paragraphe 1, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne,
– vu les articles 39, 49, 50 et 137 du traité CE,
– vu la directive 94/45/CE du Conseil, du 22 septembre 1994, concernant l'institution d'un comité d'entreprise européen ou d'une procédure dans les entreprises de dimension communautaire et les groupes d'entreprises de dimension communautaire en vue d'informer et de consulter les travailleurs[1],
– vu la directive 2002/14/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2002 établissant un cadre général relatif à l'information et la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne[2]
– vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil prévoyant des sanctions à l'encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier (COM(2007)0249),
– vu sa résolution du 26 octobre 2006 sur l'application de la directive 96/71/CE concernant le détachement de travailleurs[3], et sa résolution du 11 juillet 2007 sur le détachement de travailleurs dans le cadre de la prestation de services[4],
– vu les principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales,
– vu la déclaration de principes tripartite sur les entreprises multinationales et la politique sociale de l'Organisation internationale du travail (OIT),
– vu sa résolution du 15 novembre 2005 sur la dimension sociale de la mondialisation[5],
– vu sa résolution du 13 mars 2007 sur la responsabilité sociale des entreprises: un nouveau partenariat[6],
– vu sa résolution du 23 mai 2007 sur le thème "Promouvoir un travail décent pour tous"[7],
– vu sa résolution du 9 octobre 2008 sur le thème "Intensifier la lutte contre le travail non déclaré"[8],
– vu sa résolution du 11 juillet 2007 sur le livre vert de la Commission intitulé "Moderniser le droit du travail pour relever les défis du XXIe siècle"[9],
– vu l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes dans l'affaire C-60/03 Wolff & Müller[10],
– vu l'étude sur la responsabilité dans les processus de sous-traitance dans le secteur européen de la construction (Liability in subcontracting processes in the European construction sector), réalisée par la Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail,
– vu l'article 45 de son règlement,
– vu le rapport de la commission de l'emploi et des affaires sociales (A6‑0065/2009),
A. considérant que la sous-traitance peut être considérée comme partie intégrante de l'activité économique,
B. considérant que le taux d'activité économique sans précédent du dernier quart de siècle a joué un rôle essentiel dans l'augmentation du taux d'emploi dans la plupart des secteurs économiques de l'Union européenne, et considérant que cette évolution a été bénéfique pour les grandes comme pour les petites entreprises, et qu'elle a également encouragé l'entrepreneuriat,
C. considérant que la mondialisation et son corollaire, à savoir une concurrence de plus en plus forte, entraînent des changement dans l'organisation des entreprises, notamment par l'externalisation des activités non stratégiques, la création de réseaux et le recours accru à la sous-traitance,
D. considérant que la complexité des liens entre les sociétés mères et leurs filiales, et entre les principaux contractants et leurs sous-contractants, rend plus difficile l'identification claire des diverses structures, activités et stratégies, ainsi que de la responsabilité des différents acteurs de la chaîne de production,
E. considérant que ces changements ont eu des conséquences d'une portée considérable sur les relations de travail et qu'il est parfois difficile de déterminer clairement la branche du droit qui s'applique aux relations entre les différents éléments d'une chaîne de production, et qu'en conséquence, le prix et l'attribution de la main d'œuvre ne sont plus régis par le cadre réglementaire du secteur,
F. considérant que dans plusieurs secteurs, le processus de production se caractérise actuellement par une chaîne de production fragmentée qui s'est allongée et élargie, une chaîne constituant une chaîne logistique (tant horizontale que verticale), ainsi qu'une chaîne de valeur de nature économique et productive comportant des spécialités ou des tâches uniques souvent "externalisées" vers de petites entreprises ou des travailleurs indépendants, et que cette situation se répercute sur les comptes des entreprises par la substitution des coûts salariaux directs par les coûts de la sous-traitance, des services ou des fournisseurs, basés sur des factures et des "contrats commerciaux d'entreprise",
G. considérant que les sous-traitants sont souvent en concurrence les uns avec les autres et que les employés du fournisseur comme des sous-traitants sont dès lors soumis à des pressions en termes de conditions de travail,
H. considérant que le Parlement européen a déjà examiné la question des faux indépendants et que cette question se pose également à l'égard des sous-traitants,
I. considérant que la sous-traitance et l'externalisation vers des entreprises juridiquement indépendantes ne mène pas à l'indépendance, et que les entreprises situées à un niveau inférieur dans la chaîne de valeur, à l'exception des sous-traitants spécialisés qui opèrent dans les hautes technologies ou autres domaines de pointe, ne sont souvent pas en mesure d'agir sur un pied d'égalité avec les contractants principaux,
J. considérant que la sous-traitance, même si elle comporte de nombreux aspects positifs et contribue à accroître la capacité de production, cause également des déséquilibres économiques et sociaux parmi les travailleurs et risque de favoriser un nivellement par le bas des conditions de travail, ce qui est préoccupant,
K. considérant que la sous-traitance peut également être réalisée par de simples intermédiaires, par exemple des sociétés de main-d'œuvre ou des agences de travail temporaire, qui opèrent parfois en tant que "sociétés boîtes aux lettres", et que, très souvent, un seul contrat est attribué ou que des travailleurs sont recrutés à cette seule fin; considérant que cette situation met en évidence le caractère très instable du secteur de la construction et d'autres secteurs dans lesquels les relations de travail sont souvent précaires,
L. considérant que dans un contexte transfrontalier, les problèmes liés à ce statut précaire sont aggravés, par exemple lorsqu'un travailleur est détaché dans un troisième État membre,
M. considérant que les relations de travail dans le secteur de la construction ont été redéfinies et que, dans un même temps, la responsabilité sociale directe du "principal contractant" a été réduite dans la mesure où le travail est externalisé par le biais de la sous-traitance et des agences pour l'emploi, et que l'offre d'une main-d'œuvre bon marché et souvent non qualifiée fait ainsi partie intégrante de la sous-traitance de bas niveau,
N. considérant que certains secteurs, notamment la construction, sont particulièrement vulnérables aux abus dans les chaînes de sous-traitance souvent complexes,
O. considérant qu'il convient de garantir que le principe fondamental d'un même salaire pour le même travail sur un même lieu s'applique à tous les travailleurs, indépendamment de leur statut et de la nature de leur contrat, et que ce principe soit mis en œuvre;
1. invite les pouvoirs publics et toutes les parties prenantes à faire leur possible pour que les travailleurs soient davantage conscients de leurs droits garantis par les différents instruments juridiques (droit du travail, conventions collectives, codes de conduite) qui réglementent leurs relations et leurs conditions de travail dans les entreprises qui les emploient, ainsi que les relations contractuelles dans les chaînes de sous-traitance;
2. appelle la Commission à sensibiliser les entreprises, qu'il s'agisse de contractants principaux ou de sous-traitants, sur les bonnes pratiques, les orientations et les normes en vigueur, et la responsabilité sociale;
3. invite à nouveau la Commission à présenter une proposition relative à la mise en œuvre de l'agenda en faveur d'un travail décent pour les travailleurs dans les entreprises de sous-traitance, en mettant l'accent sur la conformité aux normes fondamentales du travail, le respect des droits sociaux, la formation des employés et le traitement équitable de ces derniers;
4. souligne l'importance de l'utilisation des nouvelles technologies par les entreprises de sous-traitance sur les chaînes de production, dans la perspective d'un renforcement de la qualité de la production aussi bien que des emplois;
5. demande aux pouvoirs publics nationaux d'adopter ou de renforcer des dispositions légales permettant d'exclure des marchés publics des entreprises, lorsqu'il s'avère que celles-ci ont enfreint le droit du travail, les conventions collectives ou les codes de conduite;
6. se félicite de l'adoption d'un cadre juridique transnational, convenu entre des entreprises multinationales individuelles et des fédérations syndicales mondiales, qui vise à sauvegarder les normes du travail dans les multinationales et leurs sous-traitants et filiales dans différents pays, qui définit le statut du travailleur salarié et qui prévoit une protection sociale quelle que soit la spécificité des conditions de travail;
7. prend acte de l'arrêt de la Cour de justice dans l'affaire Wolff & Müller, selon lequel la réglementation nationale allemande en matière de responsabilité ne va pas à l'encontre du droit communautaire mais qu'elle vise au contraire à assurer la protection des travailleurs détachés;
8. prend acte de la proposition de directive de la Commission prévoyant des sanctions à l'encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, dans laquelle la Commission propose l'introduction dans la législation communautaire du concept de responsabilité conjointe et solidaire; note avec satisfaction que, par cette initiative, la Commission indique qu'une responsabilité conjointe et solidaire inscrite dans la législation communautaire est un instrument approprié pour garantir que tous les sous-traitants assument la responsabilité sociale de leur entreprise en ce qui concerne les droits des travailleurs;
9. prend acte des conclusions de la consultation publique sur le livre vert de la Commission "Moderniser le droit du travail pour relever les défis du XXIe siècle"; soutient, à cet égard, l'intention de la Commission de prendre les mesures nécessaires pour clarifier les droits et les obligations des parties dans les chaînes de sous-traitance, afin d'éviter que les travailleurs ne soient privés de leur capacité à faire un usage effectif de leurs droits;
10. se félicite du fait que huit États membres (l'Autriche, la Belgique, la Finlande, la France, l'Allemagne, l'Italie, les Pays-Bas et l'Espagne) ont répondu à la question des devoirs des sous-traitants en tant qu'employeurs par la mise en place d'une réglementation nationale relative à la responsabilité; encourage les autres États membres à envisager des réglementations similaires; fait cependant remarquer qu'il est particulièrement difficile d'appliquer les règles dans les processus de sous-traitance transfrontalière lorsque les systèmes en vigueur dans les États membres diffèrent;
11. souligne que l'étude de la Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail invoque le caractère restreint du champ d'application de la responsabilité, par exemple la limitation à un seul élément de la chaîne, comme l'une des raisons de l'inefficacité des dispositifs;
12. insiste sur les difficultés particulières rencontrées par les petites entreprises; invite les décideurs politiques à mettre en place des instruments appropriés pour développer la sensibilisation dans ce secteur;
13. rappelle à toutes les parties prenantes que, dans sa résolution du 26 octobre 2006 sur le détachement des travailleurs, le Parlement a invité la Commission à proposer un cadre législatif régissant la responsabilité conjointe et solidaire pour les entreprises générales ou principales, afin de s'attaquer aux abus en matière de sous-traitance transfrontalière et d'instaurer pour toutes les entreprises un marché intérieur transparent et concurrentiel;
14. demande de nouveau à la Commission de mettre en place, à l'échelle communautaire, un instrument juridique clair qui introduise une responsabilité conjointe et solidaire au niveau européen, tout en respectant les différents systèmes juridiques existant dans les États membres ainsi que les principes de subsidiarité et de proportionnalité;
15. invite la Commission à lancer une évaluation de l'impact sur la valeur ajoutée et la faisabilité d'un instrument communautaire relatif à la responsabilité de la chaîne, afin d'accroître la transparence dans les processus de sous-traitance et de garantir une meilleure application de la législation communautaire et nationale; souligne que cette étude doit être transsectorielle;
16. est convaincu qu'un tel instrument serait profitable non seulement aux employés mais aussi aux autorités, aux employeurs et en particulier aux PME des États membres dans la lutte contre l'économie souterraine, puisque des règles communautaires claires et transparentes contribueraient à éliminer les entrepreneurs douteux du marché et amélioreraient ainsi le fonctionnement du marché unique;
17. estime que le champ d'application de la responsabilité prévue par un tel instrument devrait couvrir au moins les salaires, les contributions sociales, les impôts et les dommages liés aux accidents du travail;
18. note que toutes les mesures visant à informer les travailleurs de leurs droits et à les soutenir dans l'exercice de ceux-ci contribuent de façon essentielle à favoriser la responsabilité sociale de l'entreprise; demande aux États membres de garantir, par principe, que les travailleurs soient informés de leurs droits; reconnaît dans ce domaine une responsabilité particulière aux partenaires sociaux;
19. invite la Commission à intensifier ses efforts afin de promouvoir une coopération et une coordination accrues et améliorées entre les administrations nationales, les inspections du travail, les autorités répressives nationales, les administrations de la sécurité sociale et les autorités fiscales; encourage, en outre, les États membres à introduire des procédures d'inspection plus rigoureuses et à favoriser des relations plus étroites entre inspections nationales du travail, aux fins de renforcer la coopération et la coordination entre ces administrations; demande à la Commission de définir des normes de qualité pour les inspections du travail et de procéder à une étude de faisabilité des modalités de mise en place d'un réseau européen des inspections du travail;
20. souligne qu'il est nécessaire de promouvoir des mesures d'incitation pour que les entreprises œuvrent, autant que possible et en toute bonne foi, à combattre les violations du droit du travail, y compris les systèmes de certification et les codes de conduite, par des sous-traitants, notamment en informant les autorités de ces infractions et en résiliant les contrats avec les sous-traitants qui ont recours à des pratiques illégales, de manière à ce que ces mêmes entreprises ne soient pas éventuellement tenues pour responsables conjointement et solidairement de l'infraction;
21. invite les partenaires sociaux à prendre l'initiative dans la promotion de la sous-traitance coopérative pour des tâches spécifiques exceptionnelles, d'une part, et pour la limitation de la multiplication de la sous-traitance, d'autre part, et se félicite de l'élaboration d'accords-cadres qui définissent la responsabilité sociale dans la chaîne et viennent compléter la règlementation nécessaire;
22. met également en garde contre le risque de conflit, de chevauchement ou de double emploi entre des dispositions figurant dans des codes de conduite et dans le droit du travail, dans des normes et des orientations adoptées par les pouvoirs publics et dans les conventions collectives en vigueur; souligne qu'il est nécessaire, pour cette raison, que les entreprises adhèrent par priorité aux codes de conduites, aux normes et aux orientations énoncés au niveau des organisations supranationales (OCDE, OIT), au niveau national ou au niveau sectoriel;
23. rappelle à toutes les parties prenantes, et en particulier aux employeurs, les obligations qui leur incombent en matière d'information, de consultation et de participation des travailleurs, notamment celles qui sont prévues par les instruments juridiques communautaires et nationaux;
24. propose que la possibilité de concilier vie familiale et professionnelle, pour les travailleurs des entreprises de sous-traitance sur les chaînes de production, soit garantie dans les législations nationales, et que les directives relatives au congé de maternité et au congé parental soient effectivement mises en œuvre;
25. appelle la Commission à garantir un respect effectif de la directive 96/71/CE concernant le détachement de travailleurs, notamment par le recours à des procédures en infraction le cas échéant; invite, en outre, la Commission et les États membres à adopter des mesures visant à améliorer l'accès des travailleurs détachés à l'information, à renforcer la coordination et la coopération administrative entre États membres, notamment en clarifiant le rôle des bureaux de liaison nationaux, et destinées à résoudre les problèmes liés aux contrôles transfrontaliers qui entravent l'application effective de la directive 96/71/CE concernant le détachement de travailleurs;
26. souligne que des mesures plus efficaces peuvent être prises pour répondre aux éventuelles conséquences sociales négatives de la sous-traitance, par l'amélioration du dialogue social renforcé entre les organisations patronales et les syndicats;
- [1] JO L 254, du 30.9.1994, p. 64.
- [2] JO L 80, du 23.3.2002, p. 29.
- [3] JO C 313 E du 20.12.2006, p. 452.
- [4] JO C 175 E, du 10.7.2008, p. 411.
- [5] JO C 280 E, du 18.11.2006, p. 65.
- [6] JO C 301 E, du 13.12.2007, p. 45.
- [7] JO C 102 E, du 24.4.2008, p. 321.
- [8] Textes adoptés, P6_TA(2008)0466.
- [9] JO 175 E, du 10.7.2008, p. 401.
- [10] Affaire C-60/03 Wolff & Müller [2004] ECR I-9553.
27. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission, ainsi qu'aux gouvernements et aux parlements des États membres.EXPOSÉ DES MOTIFS
Au cours des dernières décennies, la sous-traitance a connu une forte expansion dans l'Union européenne, non seulement dans le secteur de la construction mais aussi dans d'autres domaines tels que le nettoyage industriel, les transports, le tourisme et les chantiers navals, pour ne citer que ceux-là. La sous-traitance est souvent le moyen pour une entreprise d'employer une main-d'œuvre spécialisée de façon flexible, et elle contribue à renforcer l'activité économique et à créer des emplois supplémentaires.
L'essor de la sous-traitance a soulevé des questions quant à l'incidence de ce phénomène sur les conditions de travail, plus particulièrement en ce qui concerne les implications juridiques de la sous-traitance pour les employeurs et les travailleurs, ses conséquences sur les droits des employés, le risque accru de "dumping social" et les éventuels cas de contournement des responsabilités en matière fiscale et de sécurité sociale. Dans le secteur de la construction en particulier, de longues chaînes de sous-traitance favorisent les abus. Dans des circonstances transnationales, on trouve même des cas de figure où un employeur établi dans un État membre A détache un travailleur d'un État membre B vers un État membre C.
Dans un contexte transfrontalier, les problèmes liés au statut précaire ne font que s'accentuer lorsque le détachement se situe dans un troisième État membre. On peut citer comme exemple concret récent celui d'une entreprise chypriote qui a détaché des travailleurs polonais en Finlande, sur le chantier de construction d'une centrale nucléaire. L'entreprise en question était irlandaise à l'origine, mais enregistrée à Chypre. Il est clair que face à des situations transfrontalières complexes comme le cas précité, le recouvrement des créances salariales rencontre des difficultés.
Huit États membres (l'Autriche, la Belgique, la Finlande, la France, l'Allemagne, l'Italie, les Pays-Bas et l'Espagne) ont répondu à la question des devoirs des sous-traitants en tant qu'employeurs en mettant en place une réglementation nationale relative à la responsabilité; Selon la récente étude réalisée par la fondation de Dublin, deux principaux types de responsabilité existent dans ces États membres: la responsabilité conjointe et solidaire (en particulier en ce qui concerne les contributions fiscales), et la responsabilité de la chaîne qui peut être limitée à l'entrepreneur ou couvrir l'ensemble de la chaîne des entrepreneurs. Ces régimes de responsabilité couvrent concrètement trois types d'obligations: les salaires, les cotisations de sécurité sociale et l'impôt sur les salaires.
Dans sept des huit États membres en question, différents instruments préventifs s'appliquent, qui visent à réduire la possibilité de responsabilité des parties concernées. Les régimes concernés, bien que spécifiques à chaque pays, sont globalement réputés efficaces. Leur effet préventif, en ce qu'ils contribuent à des relations de travail saines et, plus généralement, à des conditions équitables dans le secteur, ne devrait pas être sous-estimé. Tout en considérant que les régimes nationaux de responsabilité sont globalement efficaces, la Fondation de Dublin constate, en outre, que tous les pays étudiés sont confrontés à de graves difficultés concernant la mise en œuvre et l'application de leurs régimes de responsabilité pour les sous-traitants et agences de travail temporaire étrangers.
Votre rapporteur est convaincu que des problèmes européens nécessitent une réponse européenne. Un régime européen de "responsabilité conjointe" ou de "responsabilité du client" garantirait que le soumissionnaire se préoccupe davantage de la fiabilité de la partie contractante et de son intention d'agir conformément aux exigences de la législation en vigueur, notamment la directive sur le détachement de travailleurs. Il s'attaquerait ainsi à l'économie souterraine et empêcherait que certaines parties n'exercent une concurrence déloyale en payant leurs travailleurs en deçà du salaire minimum. Évidemment, ce régime bénéficierait également aux travailleurs dans le sens où il ajouterait un "débiteur" supplémentaire, conjointement responsable avec l'employeur et généralement plus solvable.
La Commission européenne a traité la question de la responsabilité à plusieurs occasions. Dans sa communication (COM(2007)0304) concernant la directive sur le détachement de travailleurs, elle prévoit différentes mesures dans ce domaine et déclare: "La question de savoir si la responsabilité subsidiaire constitue un moyen efficace et proportionné pour améliorer le suivi et le contrôle du respect du droit communautaire mérite plus ample examen et réflexion". Le livre vert de la Commission relatif au droit du travail (COM(2006)0708) pose une question similaire.
Le régime de responsabilité a été validé sur le principe par la Cour de justice qui a reconnu que la liberté de prestation des services (article 49 du traité CE) ne s'oppose pas à un régime national prévoyant une responsabilité conjointe[1]. Mais les législations varient d'un pays à l'autre, ce qui provoque des lacunes, en particulier dans les États membres qui ne disposent pas encore d'une législation efficace. C'est pourquoi votre rapporteur en arrive à la conclusion que seul un régime européen en matière de responsabilité, qui traiterait toutes les parties sur un pied d'égalité, serait bénéfique au marché européen du travail. Votre rapporteur est convaincu que le marché intérieur européen tirera profit d'un régime de responsabilité transparent qui le rendra plus dynamique.
- [1] Affaire C-60/03 Wolff & Müller
RÉSULTAT DU VOTE FINAL EN COMMISSION
Date de l’adoption |
11.2.2009 |
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Résultat du vote final |
+: –: 0: |
28 14 0 |
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Membres présents au moment du vote final |
Jan Andersson, Edit Bauer, Iles Braghetto, Philip Bushill-Matthews, Milan Cabrnoch, Alejandro Cercas, Ole Christensen, Luigi Cocilovo, Jean Louis Cottigny, Jan Cremers, Harald Ettl, Richard Falbr, Carlo Fatuzzo, Ilda Figueiredo, Joel Hasse Ferreira, Stephen Hughes, Karin Jöns, Ona Juknevičienė, Jean Lambert, Bernard Lehideux, Elizabeth Lynne, Thomas Mann, Jiří Maštálka, Maria Matsouka, Elisabeth Morin, Csaba Őry, Siiri Oviir, Marie Panayotopoulos-Cassiotou, Pier Antonio Panzeri, Rovana Plumb, Elisabeth Schroedter, José Albino Silva Peneda, Jean Spautz, Gabriele Stauner, Ewa Tomaszewska, Anne Van Lancker, Gabriele Zimmer |
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Suppléant(s) présent(s) au moment du vote final |
Françoise Castex, Gabriela Creţu, Lasse Lehtinen, Adrian Manole, Ria Oomen-Ruijten, Csaba Sógor, Patrizia Toia |
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