RECOMMANDATION sur la proposition de décision du Conseil et des représentants des gouvernements des États membres de l'Union européenne, réunis au sein du Conseil, concernant la conclusion du protocole modifiant l'accord de transport aérien entre la Communauté européenne et ses États membres, d'une part, et les États-Unis d'Amérique, d'autre part

2.3.2011 - (15381/2010 – C7‑0385/2010 – 2010/0112(NLE)) - ***

Commission des transports et du tourisme
Rapporteur: Artur Zasada

Procédure : 2010/0112(NLE)
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A7-0046/2011

PROJET DE RÉSOLUTION LÉGISLATIVE DU PARLEMENT EUROPÉEN

sur la proposition de décision du Conseil et des représentants des gouvernements des États membres de l'Union européenne, réunis au sein du Conseil, concernant la conclusion du protocole modifiant l'accord de transport aérien entre la Communauté européenne et ses États membres, d'une part, et les États-Unis d'Amérique, d'autre part

(15381/2010 – C7‑0385/2010 – 2010/0112(NLE))

(Approbation)

Le Parlement européen,

–   vu la proposition de décision du Conseil et des représentants des gouvernements des États membres de l'Union européenne, réunis au sein du Conseil (15381/2010),

–   vu le projet de protocole modifiant l'accord sur le transport aérien conclu en 2007 entre la Communauté européenne et les États-Unis d'Amérique (09913/2010),

–   vu la demande d'approbation présentée par le Conseil conformément à l'article 100, paragraphe 2, et à l'article 218, paragraphe 6, deuxième alinéa, point a) v), et paragraphe 8, premier alinéa, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (C7-0385/2010),

–   vu sa résolution du 17 juin 2010 sur l'accord aérien UE-USA[1]

–   vu l'article 81 et l'article 90, paragraphe 8, de son règlement,

–   vu la recommandation de la commission des transports et du tourisme (A7-0046/2011),

1.  approuve la conclusion de l'accord;

2.  charge son Président de transmettre la position du Parlement au Conseil et à la Commission, ainsi qu'aux gouvernements et aux parlements des États membres et au Congrès américain.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Introduction

Le traité de Lisbonne, qui est entré en vigueur le 1er décembre 2009, élargit les circonstances dans lesquelles l'approbation du Parlement est requise avant de conclure un accord international. Les accords sur le transport aérien font désormais partie de cette catégorie, car ils relèvent d'un domaine pour lequel la procédure législative ordinaire s'applique[1]. Auparavant, le Parlement était uniquement consulté pour de tels accords. En conséquence, le protocole visant à modifier l'accord sur le transport aérien doit être approuvé par le Parlement, alors que l'accord initial avait été conclu après consultation du Parlement.

Ensemble, les marchés européen et américain de l'aviation représentent près de 60 % du trafic aérien mondial. L'ouverture du marché aux compagnies aériennes européennes et américaines sur une base non discriminatoire permettrait d'offrir de meilleurs services aux passagers et aux opérateurs de fret, tant en termes de variété que de coût. Elle engendrerait des avantages économiques substantiels et créerait des emplois. En outre, la convergence réglementaire pourrait contribuer dans une grande mesure à la promotion de la concurrence loyale, notamment en ce qui concerne les subventions de l'État et les normes sociales et environnementales.

Historique des négociations

Jusqu'en mars 2008, date de l'entrée en vigueur provisoire de l'accord de première phase, les services aériens entre l'Union européenne et les États-Unis fonctionnaient sur la base d'accords bilatéraux entre les États-Unis et les États membres à titre individuel. En novembre 2002, la Cour de justice européenne a déclaré que certaines dispositions de ces accords bilatéraux n'étaient pas conformes à la législation européenne.

En juin 2003, le Conseil a dès lors confié un mandat à la Commission, avec pour objectif l'établissement d'un espace aérien ouvert entre l'Union européenne et les États-Unis, qui donnerait ainsi naissance à un marché unique du transport aérien, à l'intérieur duquel les investissements pourraient circuler librement et où les compagnies aériennes européennes et américaines seraient en mesure de fournir des services aériens sans aucune restriction, y compris sur le marché intérieur des deux parties. Il a toutefois été reconnu que cela exigerait des évolutions considérables de la législation des États-Unis, notamment la suppression des restrictions juridiques existantes concernant la propriété et le contrôle des compagnies aériennes des États-Unis par des intérêts étrangers et concernant le cabotage. Une approche graduelle a dès lors été considérée acceptable, pour autant que des garanties soient obtenues pour pouvoir passer à la phase suivante.

L'accord de première phase permettait aux compagnies aériennes européennes de voler d'un point de l'Union vers un autre des États-Unis. Cette situation a engendré une augmentation des services. Cet accord établissait également une coopération plus étroite entre l'Union européenne et les États-Unis leur permettant de relever de nouveaux défis, tels que la sécurité et l'environnement. Les deux parties contractantes devaient également s'engager dans d'autres négociations dans le but d'ouvrir l'accès aux marchés, de maximiser les bénéfices pour les consommateurs, les compagnies aériennes, l'emploi et la collectivité et de régler certaines questions comme la facilitation des investissements. Il est important de noter que cet accord de première phase comprenait une clause de suspension qui pouvait être déclenchée en l'absence d'accord de deuxième phase pour novembre 2010.

À la suite de huit cycles de pourparlers, les négociateurs ont lancé l'accord de deuxième phase le 25 mars 2010. Cet accord a ouvert d'autres portes pour l'avenir en termes d'investissements supplémentaires, d'accès au marché ainsi que de coopération renforcée dans les domaines de réglementation tels que la sûreté et la sécurité, mais aussi l'environnement. Les deux parties ont d'ailleurs approuvé une déclaration commune relative à l'environnement.

Contenu de l'accord de deuxième phase

Même s'il ne permet pas de réaliser l'objectif ultime, à savoir l'ouverture complète du marché sans aucune restriction des deux parties, l'accord de deuxième phase comprend un certain nombre de mesures en faveur d'une réforme. Concrètement, lorsque les États-Unis auront modifié leur législation en vue de permettre aux investisseurs européens de devenir propriétaires majoritaires de compagnies aériennes américaines, l'Union européenne permettra alors que les investisseurs américains détiennent des compagnies aériennes européennes en part majoritaire. Les compagnies aériennes américaines bénéficieront en outre de droits supplémentaires d'accès au marché vers et à partir de l'Union.

L'accord renforcera également la coopération en matière d'environnement. Il sera en effet obligatoire que les mesures commerciales (les systèmes d'échange de droits d'émissions par exemple) soient compatibles et interagissent afin d'évitent les doublons. Les technologies et combustibles verts ainsi qu'une bonne gestion du trafic aérien seront encouragés. Pour la première fois, un article est consacré à la dimension sociale des relations entre l'Union européenne et les États-Unis dans le domaine du trafic aérien. Les droits légaux actuels des employés de compagnies aériennes seront ainsi préservés. Cet accord augmentera en outre le niveau de coopération en matière de sécurité. Les ressources seront notamment mieux allouées grâce à la promotion de la confiance mutuelle dans les mesures de sécurité de chacune des parties ainsi qu'à des réponses rapides et coordonnées aux nouvelles menaces.

L'accord étend encore le rôle du comité mixte Union européenne – États-Unis, qui est l'organe chargé de contrôler la mise en œuvre de l'accord et de coordonner les différents axes d'intervention pour la coopération en matière de réglementation. Ce comité mixte sera dès lors capable de renforcer la coopération en promouvant de nouvelles initiatives. Les nouvelles règles permettront de réduire la bureaucratie, notamment grâce à la reconnaissance mutuelle des décisions prises en matière de réglementations. Elles permettront aussi d'éviter les doublons inutiles en matière de ressources (par exemple grâce à des initiatives communes de sécurité, au contrôle unique de sureté et à des mesures facilitant le voyage des passagers).

L'accès au marché sera encore davantage ouvert, les transporteurs européens bénéficieront en effet d'un meilleur accès au trafic financé par le gouvernement américain. Après certaines modifications, le cadre juridique en matière de limitations liées aux nuisances sonores offrira aux compagnies aériennes européennes de nouvelles possibilités commerciales pour les vols entre les États-Unis et les pays non européens.

Évaluation

Alors que les mesures incitant encore l'ouverture du marché sont saluées, l'absence de progrès notable sur la voie de la suppression des contraintes réglementaires obsolètes dans le domaine des investissements étrangers est décevante, puisque de ce fait, le déséquilibre actuel des restrictions à la propriété et à la prise de participations majoritaires par des étrangers aux États-Unis perdurera. En outre, les transporteurs de l'Union européenne ne gagneront qu'un accès limité au trafic financé par le gouvernement américain. Cela signifie à nouveau que la situation actuelle de déséquilibre ne s'améliorera pas, dans la mesure où, en Europe, les gouvernements nationaux n'imposent pas ce type de restrictions.

La volonté commune de coopérer dans le cadre de l'Organisation de l'aviation civile internationale et d'échanger les meilleures pratiques en matière de limitations des nuisances sonores est signe d'une avancée importante. Il ne faut toutefois pas oublier que divers éléments de la réglementation sur le trafic aérien, comme les limitations des nuisances sonores et des vols de nuit, doivent être définis au niveau local, dans le respect du principe de subsidiarité. Il importe donc que la Commission tienne pleinement compte des législations nationales des différents États membres lorsqu'elle coordonne ces questions à l'échelle européenne.

L'accord de deuxième phase comprend une nouveauté de taille. L'importance de la dimension sociale est à présent reconnue et il est désormais considéré nécessaire de confier au comité mixte la responsabilité de contrôler les effets sociaux de l'accord et de mettre en place des réponses appropriées. Dans ce contexte, la Commission devrait utiliser l'accord pour encourager le respect des législations internationales en matière de droits sociaux, en particulier les normes de travail consacrées par les conventions fondamentales de l'Organisation internationale du travail (OIT 1930-1999), les principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales (1976, révision 2000) et la Convention de Rome de 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles.

Il convient de renforcer la consultation et la coopération en matière de sécurité, notamment à la lumière de la situation internationale actuelle. Cette démarche ne devrait toutefois pas engendrer des mesures excessives et incohérentes, pour lesquelles une évaluation des risques appropriée ferait défaut. Ces mesures doivent indiquer des avantages évidents, susceptibles de contrebalancer les charges conséquentes pesant sur les voyageurs et les transporteurs. Il serait dès lors souhaitable que la Commission et les États-Unis examinent l'efficacité des mesures de sécurité supplémentaires adoptées depuis 2001 afin de remédier aux doublons et aux lacunes constatés dans la chaîne de sécurité. Dans ce contexte, l'objectif devrait être le "contrôle de sûreté unique", en vertu duquel les passagers et les bagages ne subissent pas un contrôle à chaque transit.

Il est essentiel que la vie privée des citoyens européens et américains soit respectée lors de l'échange, entre l'Union européenne et les États-Unis, de données à caractère personnel concernant des passagers, conformément aux critères formulés par le Parlement européen dans sa résolution du 5 mai 2010. En particulier, tous les transferts de données à caractère personnel à des fins de sécurité doivent être accompagnés de sauvegardes pour les citoyens européens, respecter les garanties de procédure et les droits de la défense, et être conformes à la législation relative à la protection des données au niveau national et européen. En outre, il est urgent de mettre en place des normes internationales relatives à la protection des données et au respect de la vie privée.

Une coopération accrue entre les autorités européennes et américaines en charge de la sécurité aérienne à tous les niveaux est également très souhaitable. Dans ce contexte, il convient de souligner l'importance de la liste noire européenne des transporteurs ne répondant pas aux normes et du système utilisé par les États-Unis pour contrôler le respect des normes par les transporteurs. Les deux parties sont invitées à partager leurs informations sur le sujet afin de garantir des normes plus strictes à l'échelle internationale.

Prochaines étapes

L'accord de deuxième phase constitue certes une avancée significative, mais il est important de noter qu'il ne s'agit que d'une étape, et non de la fin du processus visant à établir un marché aérien transatlantique. Le rôle du comité mixte ayant été renforcé, la coopération et l'harmonisation pourront continuer à progresser en matière de législation. Ce comité mixte devrait notamment être encouragé à faire des propositions supplémentaires en vue de la reconnaissance mutuelle des décisions réglementaires, conformément au principe "Mieux légiférer". Il pourrait également contribuer à renforcer la coopération dans le domaine du développement des systèmes européen et américain de gestion du trafic aérien ("SESAR" et "Next Gen") en vue d'assurer l'interopérabilité et la compatibilité et de participer à la réduction des incidences sur l'environnement.

La Commission doit également veiller à ce que le Parlement soit pleinement informé et consulté au sujet des activités du comité mixte, vu l'importance de son travail pour les citoyens et les entreprises de l'Union européenne.

Parallèlement, il faut reconnaître qu'un certain nombre de questions ne relèvent pas de l'accord tel que modifié par le nouveau protocole. C'est la raison pour laquelle la Commission doit négocier une nouvelle phase de cet accord couvrant des questions telles que:

· la libéralisation accrue des droits de trafic;

· le renforcement des possibilités d'investissements étrangers;

· l'incidence des mesures de protection de l'environnement et des contraintes en matière d'infrastructures sur l'exercice des droits de trafic;

· l'amélioration de la coordination des politiques concernant les droits des passagers afin d'assurer le niveau de protection des passagers le plus élevé possible.

Il est extrêmement important de disposer de normes cohérentes en matière de droits des passagers, notamment les personnes à mobilité réduites, pour éviter que les voyageurs ne fassent l'objet de différences de traitement lors de ce qu'ils ne considèrent que comme un voyage unique, même s'il implique des segments actuellement soumis à des réglementations différentes. Cela permettrait également de résoudre la question de savoir qui est responsable en cas de problème durant le voyage comprenant un changement d'avion à un ou plusieurs grands aéroports.

Les prochaines négociations pourraient être grandement facilitées si le Parlement européen et le Congrès américain dialoguaient et échangeaient des informations de manière plus systématique sur toutes les questions importantes relatives à la politique aérienne entre l'Union et les États-Unis.

Conclusion

Votre rapporteur ne considère certes pas cet accord de deuxième phase comme parfait, mais il estime qu'il a le mérite de contenir d'importants éléments permettant d'avancer. Cet accord évite notamment le risque de voir la clause de suspension déclenchée en l'absence d'un tel accord. Cette suspension pourrait faire perdre aux passagers et aux compagnies aériennes de l'Union les avantages de taille dont ils bénéficient depuis mars 2008. En conséquence, votre rapporteur recommande que le Parlement approuve le protocole modifiant l'accord sur le transport aérien entre l'Union européenne et les États-Unis.

  • [1]  Article 218, paragraphe 6, point a) v), du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

RÉSULTAT DU VOTE FINAL EN COMMISSION

Date de l’adoption

28.2.2011

 

 

 

Résultat du vote final

+:

–:

0:

23

3

0

Membres présents au moment du vote final

Georges Bach, Antonio Cancian, Saïd El Khadraoui, Carlo Fidanza, Knut Fleckenstein, Jacqueline Foster, Mathieu Grosch, Dieter-Lebrecht Koch, Georgios Koumoutsakos, Eva Lichtenberger, Hella Ranner, Olga Sehnalová, Brian Simpson, Dirk Sterckx, Keith Taylor, Giommaria Uggias, Thomas Ulmer, Peter van Dalen, Artur Zasada, Roberts Zīle

Suppléants présents au moment du vote final

Philip Bradbourn, Frieda Brepoels, Spyros Danellis, Ádám Kósa, Janusz Władysław Zemke

Suppléant (art. 187, par. 2) présent au moment du vote final

Karin Kadenbach