RAPPORT sur des inspections du travail efficaces à titre de stratégie pour l'amélioration des conditions de travail en Europe
12.12.2013 - (2013/2112 (INI))
Commission de l'emploi et des affaires sociales
Rapporteure: Jutta Steinruck
PROPOSITION DE RÉSOLUTION DU PARLEMENT EUROPÉEN
sur des inspections du travail efficaces à titre de stratégie pour l'amélioration des conditions de travail en Europe
(2013/2112 (INI))
Le Parlement européen,
– vu le traité sur l'Union européenne, et en particulier son préambule et ses articles 3 et 6,
– vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, et en particulier ses articles 6, 9, 145, 151, 152, 153, 154, 156, 159 et 168,
– vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, et notamment ses articles 1, 3, 27, 31, 32 et 33,
– vu la Charte sociale européenne du 3 mai 1996, et notamment sa partie I et sa partie II, article 3,
– vu les normes fondamentales du travail de l'Organisation internationale du travail (OIT) et ses conventions et recommandations sur l'administration du travail et l'inspection du travail (conventions nos 81 et 129), qui constituent une référence internationale lorsqu'il s'agit de garantir l'application des dispositions légales relatives aux conditions de travail et à la protection des travailleurs,
– vu la convention n° 143 de l'OIT sur les travailleurs migrants (1975) et les dispositions complémentaires de l'OIT relatives aux travailleurs migrants qui prévoient l'adoption de toutes les mesures nécessaires et appropriées pour éliminer l'immigration clandestine ayant pour objectif la recherche d'un travail ainsi que le travail illégal des migrants, et vu d'autre part les dispositions visant à l'application de sanctions administratives, civiles et pénales en matière de travail illégal des travailleurs migrants,
– vu l'agenda de l'OIT sur le travail décent,
– vu les conventions et recommandations de l'OIT en matière de santé et de sécurité sur le lieu de travail,
– vu le règlement (CE) n° 1338/2008 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relatif aux statistiques communautaires de la santé publique et de la santé et de la sécurité au travail[1],
– vu la directive 89/391/CEE du Conseil du 12 juin 1989 concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail (directive-cadre)[2] et ses directives particulières,
– vu la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail[3],
– vu la résolution du Conseil et des représentants des États membres, adoptée lors de la réunion du Conseil du 22 avril 1999, relative à un code de conduite pour une meilleure coopération entre les autorités des États membres en matière de lutte contre la fraude transnationale aux prestations et aux cotisations de sécurité sociale et le travail non déclaré et concernant la mise à disposition transnationale de travailleurs[4],
– vu la directive 1999/85/CE du Conseil du 22 octobre 1999 modifiant la directive 77/388/CEE en ce qui concerne la possibilité d'appliquer à titre expérimental un taux de TVA réduit sur les services à forte intensité de main-d'œuvre[5],
– vu la directive 2009/52/CE du Parlement européen et du Conseil prévoyant des normes minimales concernant les sanctions et les mesures à l'encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier[6],
– vu la communication de la Commission du 24 octobre 2007 intitulée "Intensifier la lutte contre le travail non déclaré" (COM(2007)0628),
– vu la communication de la Commission du 24 octobre 2007 sur l'issue de la consultation publique sur le Livre vert de la Commission "Moderniser le droit du travail pour relever les défis du XXIe siècle" (COM(2007)0627),
– vu la communication de la Commission du 3 mars 2010 intitulée "Europe 2020: une stratégie pour une croissance intelligente, durable et inclusive" (COM(2010)2020), et vu le principal objectif de cette stratégie, qui consiste à porter le taux d'emploi dans l'Union européenne à 75 % d'ici à la fin de la décennie,
– vu sa résolution du 15 décembre 2011 sur l'examen à mi-parcours de la stratégie européenne 2007-2012 pour la santé et la sécurité au travail[7],
– vu sa résolution du 9 octobre 2008 sur le thème "Intensifier la lutte contre le travail non déclaré"[8],
– vu sa résolution du 23 mai 2007 sur le thème "Promouvoir un travail décent pour tous"[9],
– vu sa résolution du 11 juillet 2007 sur la modernisation du droit du travail nécessaire pour relever les défis du XXIe siècle[10],
– vu sa résolution du 26 octobre 2006 sur l'application de la directive 96/71/CE concernant le détachement de travailleurs[11],
– vu sa résolution du 26 mars 2009 sur la responsabilité sociale des entreprises sous‑traitantes dans les chaînes de production[12],
– vu sa résolution du 23 mai 2013 sur les conditions de travail et les normes de santé et de sécurité à la suite des incendies d'usines et de l'effondrement d'un immeuble survenus récemment au Bangladesh[13],
– vu les lignes directrices intégrées pour la croissance et l'emploi (2008-2010) (COM(2007)0803),
– vu la recommandation du Conseil du 22 décembre 1995 sur l'harmonisation des moyens de lutte contre l'immigration et l'emploi illégaux[14],
– vu la recommandation du Conseil du 27 septembre 1996 sur la lutte contre l'emploi illégal de ressortissants d'États tiers[15],
– vu le rapport publié par la Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail (EUROFOUND) sur la lutte contre le travail non déclaré dans l'Union européenne,
– vu l'Eurobaromètre spécial sur le travail non déclaré,
– vu l'étude intitulée "ICENUW - Implementing Cooperation in a European Network against undeclared work" (2010),
– vu l'étude intitulée "CIBELES: Convergence of Inspectorates building a European Level Enforcement System",
– vu l'étude intitulée "Indirect measurement methods for undeclared work in the EU" (2010),
– vu l'étude intitulée "Feasibility of establishing a European platform for cooperation between labour inspectorates and other relevant monitoring and enforcement bodies with the aim of preventing and fighting undeclared work" (2010, Regioplan),
– vu l'arrêt de la Cour de justice européenne du 19 décembre 2012 dans l'affaire C-577/10, Commission européenne c. Royaume de Belgique,
– vu l'article 48 de son règlement,
– vu le rapport de la commission de l'emploi et des affaires sociales (A7-0458/2013),
A. considérant que les inspections du travail jouent un rôle important pour ce qui est de protéger les droits des travailleurs salariés, de garantir le respect des normes de santé et de sécurité sur le lieu de travail et de lutter contre les environnements de travail dangereux, d'empêcher les pratiques abusives au travail et de promouvoir une croissance économique équitable et sociale, dans la mesure où elles garantissent le paiement effectif des salaires et des cotisations sociales et contribuent ainsi à augmenter les recettes fiscales et les recettes des systèmes de protection sociale et à garantir que les travailleurs sont couverts en cas de maladie, d'accident du travail et pour leurs pensions;
B. considérant que les États membres recourent à divers modèles pour réaliser différentes inspections spécifiques sur le lieu de travail;
C. considérant le besoin croissant d'inspection du travail dans le contexte du détachement des travailleurs à travers l'Europe;
D. considérant que l'inspection du travail joue un rôle fondamental pour garantir que les droits sont mis en pratique en veillant à ce que la loi soit respectée, que les acteurs connaissent leurs droits et leurs obligations et que les accidents et les abus puissent être évités;
E. considérant le besoin de renforcer les inspections du travail dans les PME et sur les petits chantiers;
F. considérant que la responsabilité des entreprises multinationales en matière de conditions de travail et à l'égard des moyens de subsistance et de la santé des travailleurs qui produisent les marchandises et assurent la prestation des services ne s'arrête pas aux portes de l'entreprise ou de l'usine, et qu'elle ne peut être garantie au seul moyen des conventions relatives à la responsabilité sociale des entreprises;
G. considérant que l'externalisation du travail via la sous-traitance et le travail intérimaire implique souvent une main-d'œuvre moins qualifiée et des relations de travail distendues, ce qui rend plus difficile l'identification de la responsabilité concernant les dispositions de santé et de sécurité au travail (SST);
H. considérant que le travail non déclaré a une incidence négative sur l'économie des États membres et sur la viabilité financière du modèle social européen, qu'il nuit au financement et à la fourniture des prestations sociales et des services publics, et qu'il condamne les travailleurs concernés à l'insécurité, à la vulnérabilité et à la pauvreté, aussi bien pendant qu'ils travaillent que lorsqu'ils sont âgés;
I. considérant que les inspecteurs du travail jouent un rôle essentiel pour ce qui est de protéger les droits des travailleurs, d'empêcher les pratiques abusives et de promouvoir le développement économique et social;
J. considérant que la crise économique a eu pour conséquence de faire augmenter la charge de travail et la pression subie par les travailleurs, notamment en raison de modifications de leur temps de travail, et qu'il convient dès lors de renforcer la surveillance des conditions de travail;
K. considérant que de nouvelles formes de relations de travail continuent d'apparaître et qu'elles échappent de plus en plus à la législation existante;
L. considérant que les travailleurs en situation de travail irrégulière souffrent de conséquences négatives indirectes, comme le manque d'accès à l'information, à la médecine du travail et à la formation, et de difficultés psychologiques entraînées par la crainte d'avoir un accident ou d'être pris, ce qui nuit à la productivité des entreprises et de l'économie dans son ensemble, ainsi que de conséquences à long terme comme l'absence de droit aux pensions de vieillesse ou des prestations de retraite très faibles, ce qui entraîne un risque accru de pauvreté;
M. considérant que le travail non déclaré fausse la concurrence au sein du marché intérieur, puisqu'il représente une concurrence déloyale vis-à-vis des autres entreprises;
N. considérant que la consolidation d'un véritable marché commun et l'élimination de toute forme de dumping social sont intrinsèquement liées;
O. considérant que le travail non déclaré représente aujourd'hui 18,8 % du PIB dans l'UE-27, et plus de 30 % du PIB dans certains États membres;
P. considérant que la crise a également provoqué une augmentation du travail non déclaré dans plusieurs États membres;
Q. considérant que des mesures relatives à la dénonciation des dysfonctionnements sont nécessaires pour faciliter la détection des abus et pour garantir la protection du lanceur d'alerte, et considérant que l'Union et les États membres ont le devoir de protéger entièrement les lanceurs d'alerte;
R. considérant que 168 000 citoyens européens meurent chaque année d'accidents ou de maladies liés au travail, et que 7 millions sont blessés dans des accidents[16];
S. considérant que la prévention des risques est indispensable afin de réduire le taux d'accidents et de maladies liés au travail; considérant l'impact positif d'une bonne gestion de la santé et de la sécurité au travail, aussi bien aux niveaux nationaux qu'européen ainsi que pour les entreprises;
T. considérant que, dans une plus ou moins large mesure, les ressources humaines et financières des systèmes d'inspection ne suffisent pas pour une exécution efficace des inspections du travail; considérant que, dès lors, la planification stratégique relative aux effectifs d'inspecteurs du travail dans l'Union s'avère insuffisante, en raison du recul incessant du nombre des effectifs et de la complexité croissante des tâches accomplies par les inspecteurs du travail;
U. considérant que la fragmentation du marché du travail, combinée à l'expansion anarchique et sans règles de certaines modalités d'emploi dans certains États membres, fait considérablement baisser les rémunérations et crée une situation susceptible d'aggraver encore le phénomène du travail non déclaré;
V. considérant qu'il existe une forte intensité de travail dans les secteurs les plus touchés par le travail non déclaré, notamment les secteurs de la construction, de la sécurité, du nettoyage, des services à domicile, ainsi que des services d'hébergement médicalisé et de soins infirmiers, qui sont habituellement caractérisés par des conditions de travail et de rémunération précaires;
W. considérant qu'il existe un lien étroit entre l'immigration irrégulière et le travail non déclaré, dans la mesure où les personnes qui sont en situation de séjour irrégulier en Europe ne peuvent pas s'engager dans des relations de travail ordinaires et qu'elles ne sont donc pas couvertes par les systèmes de protection;
X. considérant que les travailleurs qui exercent des activités non déclarées ne disposent ni d'une assurance sociale, ni d'une assurance maladie ou contre les accidents, et qu'ils s'exposent dès lors à un risque plus élevé de subir des pertes financières personnelles;
Y. considérant que les inspections du travail revêtent un caractère transfrontalier lorsqu'elles s'appliquent aux relations de travail et aux services de nature transfrontalière, et que l'accès transfrontalier aux données est insuffisant;
Z. considérant que, souvent, les travailleurs ne s'engagent pas volontairement dans des relations de travail non déclaré, mais qu'ils y sont contraints;
I. Mesures d'inspection au niveau national
Principes pour des inspections du travail efficaces
1. souligne que les inspections du travail constituent une mission de service public qui ne peut être accomplie que par des organismes indépendants du secteur public; cet élément ne devrait toutefois pas empêcher que les inspecteurs du travail soient épaulés par des représentants des partenaires sociaux; estime que l'indépendance vis-à-vis de l'employeur des services de SST doit être garantie; considère que pour la santé au travail, la veille, les alertes, l'expertise santé et les conseils avisés qui en découlent ne peuvent être assurés que par des professionnels indépendants du secteur de la santé et de la sécurité; regrette que la gestion des services de SST reste, dans certains États membres, toujours confiée à des associations d'employeurs; souligne que les inspections et la surveillance de la santé au travail doivent être assurées par des inspecteurs indépendants formés aux questions de santé et de sécurité;
2. souligne l'importance que revêt l'élaboration de plans d'action nationaux pour le renforcement des dispositifs d'inspection du travail et leur financement par les Fonds structurels européens, compte tenu de la valeur ajoutée des inspections du travail efficaces pour ce qui est du resserrement de la cohésion sociale ainsi que du renforcement, dans son ensemble, de la justice au travail;
3. affirme le rôle crucial des inspections du travail dans la prévention et le contrôle, et leur rôle positif pour améliorer l'information et l'expertise au sein de l'entreprise; invite instamment les États Membres à renforcer les effectifs et les ressources de leur inspection du travail et à atteindre l'objectif d'un inspecteur pour 10 000 travailleurs, conformément aux recommandations de l'OIT, et à renforcer les sanctions à l'égard des entreprises qui ne respectent pas leurs obligations en matière de droits fondamentaux (salaires, durée du travail et SST); estime que ces sanctions doivent être effectives, proportionnées et dissuasives;
4. attire l'attention sur le fait que toutes les catégories de travailleurs, salariés ou indépendants, quels que soient leur statut, leur relation de travail ou leur origine, relèvent de la compétence des autorités nationales de contrôle et doivent bénéficier de la même protection; souligne que toute tentative visant à restreindre le champ d'application des inspections du travail a un effet négatif sur la santé et la sécurité ainsi que sur les droits des travailleurs;
5. souligne la nécessité d'élargir le rôle des inspections du travail nationales, de former leurs cadres et de coordonner leurs responsabilités afin qu'elles puissent répondre de manière satisfaisante aux nouveaux défis;
6. est d'avis que les inspections du travail ne peuvent être effectuées de manière efficace que si les autorités compétentes disposent de moyens financiers et humains suffisants; exprime sa préoccupation face au manque de personnel des autorités de contrôle dans les États membres et au manque de formation continue, notamment aux problématiques européennes; invite les États membres à renforcer leurs systèmes d'inspection, car ceux-ci devraient représenter un élément important des plans nationaux de lutte contre la crise économique; rappelle que les inspections du travail jouent un rôle essentiel en vérifiant que la législation en vigueur est complètement mise en œuvre, ainsi qu'en veillant à ce que les travailleurs particulièrement vulnérables soient couverts et protégés;
7. rappelle le besoin d'une formation uniforme des inspecteurs du travail et des agents impliqués dans ce domaine, afin de renforcer l'effectivité du droit communautaire relatif à la protection des travailleurs;
8. souligne que l'assainissement budgétaire opéré dans certains États membres ne doit en aucun cas conduire à des réductions d'effectifs, de financement et d'infrastructure technique et matérielle des mécanismes de contrôle que sont les inspections du travail;
9. rappelle que la contrainte juridique et les revendications des employés apparaissent comme les deux principaux facteurs de motivation des employeurs pour mettre en place des politiques de prévention[17];
10. est convaincu que, sans évaluation appropriée des risques, il est impossible de protéger correctement les travailleurs; considère important d'aider les PME à mettre en place leurs politiques de prévention des risques; souligne le rôle positif joué par des initiatives simples, libres et ciblées, telles que l'évaluation interactive des risques en ligne (EREL), mise au point par l'Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail (EU-OSHA);
11. rappelle que tous les États membres ont signé et ratifié la convention nº 81 de l'OIT sur l'inspection du travail; invite par conséquent les États membres à transposer les principes énoncés par cette convention;
12. souligne que les inspections du travail sont également efficaces lorsqu'elles sont effectuées à l'improviste, de manière répétée et au hasard; signale que, pour être efficaces, les sanctions appliquées aux infractions doivent être conçues de telle manière que le contournement des dispositions tarifaires, des législations et réglementations existantes ne puisse apporter aucun avantage aux employeurs;
13. souligne que les éléments qui ressortent des inspections du travail doivent être traités dans des délais clairement définis, afin d'empêcher rapidement les abus et d'accorder une protection aussi précoce que possible aux victimes;
14. insiste sur le fait que les inspecteurs du travail des États membres doivent avoir le droit de procéder à des contrôles sur place, d'utiliser des instruments de contrôle intelligents, de collaborer avec toutes les autorités concernées, d'être dotés de compétences appropriées et de travailler de manière indépendante;
15. invite les États membres, en cas d'abus révélés par les inspecteurs du travail ou lorsque des lanceurs d'alerte signalent des cas d'abus aux inspecteurs, à protéger les travailleurs concernés ainsi que tout lanceur d'alerte impliqué et à les aider à faire valoir leurs droits sans frais pour eux; attire l'attention sur le fait que des dispositions en ce sens, par exemple un droit de recours individuel ou collectif, sont des moyens efficaces de protéger les travailleurs concernés et les lanceurs d'alerte; invite les États membres à adopter des mesures de protection des lanceurs d'alerte et de leurs familles afin de faciliter la détection des abus; souligne qu'il est important de protéger les droits des travailleurs migrants en situation irrégulière et que ce domaine devrait être abordé; rappelle à cet égard aux États membres la convention de l'OIT nº 143 sur les travailleurs migrants (dispositions complémentaires) de 1975;
16. invite les États membres à faire respecter les dispositions légales au moyen de sanctions proportionnelles à la gravité de l'infraction et à sanctionner de façon dissuasive le non‑respect des conditions de travail; souligne que la recherche indique clairement que les meilleurs résultats dans le domaine de l'amélioration des conditions de travail sont obtenus en coordonnant efficacement la prévention et les inspections à un stade précoce, notamment en fournissant des informations et des conseils aux employeurs ou en déclarant de manière rétroactive les travailleurs non déclarés;
17. fait observer qu'un système de mise en réseau électronique de tous les services sociaux concernés, par exemple sur le modèle de la "Banque-carrefour de la sécurité sociale"[18] créée en Belgique, faciliterait l'échange de données entre eux et serait un outil utile permettant aux inspections du travail au niveau national d'obtenir les données nécessaires aux contrôles;
18. souligne que les inspections du travail sont confrontées à des difficultés lorsque les contrôles portent sur des travailleurs migrants ou détachés originaires de l'Union ou de pays tiers; souligne que, pour qu'elles soient efficaces, il importe que les inspections du travail tiennent suffisamment compte des situations présentant un risque élevé de non‑conformité; fait observer que la mise en place de systèmes électroniques pour le préenregistrement obligatoire des travailleurs étrangers par les employeurs pourrait nettement faciliter les inspections du travail;
19. attire l'attention sur le rôle important que doivent jouer les partenaires sociaux, conformément aux lois et pratiques nationales, pour veiller à ce que les réglementations existantes soient respectées; invite les États membres à associer formellement les partenaires sociaux à l'élaboration et à la formulation des plans nationaux d'inspection du travail ainsi qu'à la réalisation des contrôles;
20. préconise la création de structures de contrôle supplémentaires à aspect sectoriel et à composition tripartite, représentant le gouvernement, les travailleurs et les employeurs, ainsi que leur mise en œuvre pilote dans les États membres qui présentent les taux les plus élevés de travail non déclaré;
21. constate que, dans les zones rurales, le nombre d'inspections du travail effectuées est plus faible que dans les autres zones; invite les États membres à veiller à ce que les régions rurales soient couvertes de façon appropriée;
22. fait observer que les conditions de travail des travailleurs sous contrat à durée déterminée sont souvent moins appropriées que celles des travailleurs salariés employés à titre permanent; remarque qu'un contrôle efficace des conditions de travail intérimaire nécessite d'étendre la compétence des inspecteurs au contrôle des agences de travail intérimaire et au contrôle du respect des normes salariales et professionnelles ainsi que de l'application du salaire minimal, lorsque la législation de l'État membre ou les conventions collectives nationales l'exigent; insiste pour qu'une attention identique soit prêtée à la prévention des problèmes de santé et de sécurité au travail dans le secteur privé et le secteur public; rappelle le caractère contraignant du principe de non-discrimination; estime que les intérimaires doivent avoir la possibilité de prendre connaissance de leurs droits, y compris quant au niveau de rémunération, via un guichet en ligne ou un site internet;
23. fait part de son inquiétude concernant la situation des travailleurs saisonniers dans le secteur agricole, dont la plupart sont issus de pays tiers; estime que les inspections du travail devraient être renforcées dans ce secteur; fait observer que dans ce secteur, l'emploi est largement caractérisé par un mélange de travail déclaré et de travail non déclaré;
24. fait observer que les travailleurs assurant des services à domicile ne sont souvent pas déclarés ou bénéficient de moins de droits que les autres travailleurs, mais que cette situation échappe bien souvent aux compétences des inspections nationales du travail; invite les États membres à ratifier la convention nº 189 de l'OIT et, conformément à cette convention, à élaborer et mettre en œuvre des mesures relatives à l'inspection du travail, à l'application et aux pénalités, tout en respectant les caractéristiques particulières du travail à domicile, conformément aux législations et réglementations nationales; souligne qu'en harmonie avec les législations et réglementations nationales, de telles mesures devraient préciser les conditions dans lesquelles l'accès au domicile est accordé, afin de garantir le respect de la vie privée;
25. attire l'attention sur la situation particulière des personnes qui travaillent à domicile ou effectuent un télétravail, qui, travaillant chez elles ou en dehors de leur entreprise, peuvent également faire l'objet d'abus, les employeurs pouvant ne pas respecter leurs obligations légales envers ces travailleurs;
26. souligne qu'il convient d'accorder une attention particulière au secteur des transports qui, en raison de son caractère mobile, peut poser des difficultés supplémentaires pour les inspections du travail; demande d'équiper correctement les inspections du travail afin qu'elles puissent réaliser des contrôles efficaces dans ce secteur;
27. déplore le taux d'incidence problématique du travail indépendant factice, en particulier dans le secteur de la construction et celui de la transformation de la viande, y compris dans le cadre du détachement de travailleurs; invite les États membres à prendre des mesures de contrôle adéquates pour lutter contre le travail indépendant factice, par exemple en définissant des critères afin que les inspecteurs du travail puissent distinguer les vrais travailleurs indépendants des travailleurs indépendants factices; souligne que, afin de prévenir le travail indépendant factice, des mesures devraient être prises pour autoriser les États membres à mettre en place des critères ou des mesures de contrôle supplémentaires et renforcés;
28. estime que le secteur en progression des emplois verts requiert une attention spécifique; demande de mener des évaluations et études d'impact sur la toxicité des écomatériaux et les conditions de travail des personnes utilisant dans leur travail des équipements de production d'énergie renouvelable (fabrication, exploitation, maintenance et recyclage);
Travail non déclaré
29. invite les autorités nationales d'inspection du travail et les autres autorités compétentes à élaborer des plans d'action pour la lutte contre le travail non déclaré, couvrant toutes les formes d'abus dans le cadre du travail salarié et indépendant; souligne que, s'il n'est pas combattu correctement, le travail non déclaré risque de nuire à la capacité de l'Union d'atteindre ses objectifs en matière d'emplois plus nombreux et de meilleure qualité et de croissance plus forte;
30. exprime les graves inquiétudes que lui inspire l'extrême vulnérabilité des travailleurs migrants en situation irrégulière ou non autorisée, qui risquent d'être exploités dans un emploi non déclaré caractérisé par des normes peu élevées, des salaires bas et de longues heures de travail dans des environnements de travail dangereux; insiste sur le fait que toute coopération entre les inspecteurs du travail et les autorités compétentes en matière d'immigration doit se limiter à identifier les employeurs pratiquant des abus et ne devrait pas donner lieu à des sanctions contre les travailleurs migrants concernés ou à leur expulsion, ce qui porterait atteinte aux efforts menés pour lutter contre le travail non déclaré;
31. estime que lorsque les inspections du travail nationales sont compétentes pour traiter des questions liées aux travailleurs migrants et détachés, des programmes de formation des inspecteurs du travail devraient inclure des modules spécifiques sur ces questions, ainsi que sur le travail non déclaré et le trafic d'êtres humains, étant donné que ces questions sont étroitement liées, et devraient également comporter, le cas échéant, des modules linguistiques;
32. considère que les sanctions ne peuvent être efficaces que si les employeurs ne peuvent retirer aucun bénéfice de l'emploi de travailleurs non déclarés, le montant des sanctions à leur encontre dans un tel cas devant nettement dépasser celui des charges salariales d'un travailleur déclaré;
33. reconnaît qu'il existe une tendance accrue à recourir au travail indépendant factice, à l'externalisation et à la sous-traitance, qui peut mener à une augmentation des emplois précaires et à une nouvelle détérioration des niveaux de protection déjà faibles des travailleurs non déclarés; est d'avis que les systèmes de responsabilité générale de l'entrepreneur pourraient servir d'outils efficaces pour améliorer la conformité avec les normes de travail dans l'ensemble du processus de production et qu'il convient d'envisager d'instaurer de tels systèmes dans tous les États membres, tout en reconnaissant que les contrôles effectués par les inspecteurs du travail restent indispensables;
Protection du travail – santé et sécurité sur le lieu de travail
34. attire l'attention sur les problèmes liés au respect des dispositions en matière de santé et de sécurité sur le lieu de travail dans les cas où des travailleurs effectuent un travail non déclaré; souligne que le droit à la protection de la santé et de la sécurité sur le lieu de travail est un droit qui s'applique à tout travailleur, salarié ou indépendant, et dont la jouissance effective nécessite une meilleure application des prescriptions actuellement en vigueur; suggère que les États membres étudient la possibilité d'offrir un examen médical obligatoire gratuit une fois par an, ou au moins une fois par contrat, à tous les travailleurs, afin de leur assurer un minimum de protection;
35. recommande un renforcement des sanctions prévues pour les entreprises qui ne respectent pas leurs obligations concernant les droits fondamentaux des travailleurs; est d'avis que ces sanctions doivent être suffisamment dissuasives pour que les employeurs ne puissent tirer aucun bénéfice du contournement des règles existantes en matière de sécurité et de santé des travailleurs; invite les États membres à envisager de proportionner le niveau des pénalités de leurs systèmes de sanctions aux dommages et de veiller à ce qu'il soit supérieur aux bénéfices tirés du contournement;
36. rappelle que la stratégie "Europe 2020" souligne que l'Union européenne a besoin de davantage de femmes sur son marché du travail et estime que les inspecteurs du travail devraient avoir connaissance des conditions de travail aussi bien des femmes que des hommes;
37. demande que ces pénalités s'appliquent également aux entreprises qui mettent leurs travailleurs sur liste noire pour leurs activités au sein des syndicats ou pour leur représentation dans le domaine de la santé et de la sécurité;
38. demande que les autorités nationales de contrôle soient soutenues dans la mise en œuvre d'un système de protection du travail efficace au niveau des entreprises, en particulier dans les petites et moyennes entreprises; invite instamment les États membres à veiller à ce que les inspections soient davantage axées sur la recherche de solutions concrètes et réalisables pour pallier les insuffisances constatées dans le domaine de la sécurité et de la santé au travail;
39. soutient l'action positive jouée par le Comité des Hauts Représentants de l'Inspection du Travail (CHRIT) dans le rapprochement des cultures nationales; demande le renforcement de ses ressources et de ses compétences; souhaite que sa coopération avec le Comité Consultatif de Luxembourg soit renforcée; est d'avis que le comité consultatif de la Commission pour la sécurité et la santé sur le lieu de travail devrait être régulièrement tenu au courant de l'évolution de la situation dans les États membres en ce qui concerne les inspections du travail, ainsi que la santé et la sécurité sur le lieu de travail;
40. est d'avis que ces aspects de la santé et de la sécurité au travail devraient également figurer dans la future stratégie en la matière au niveau de l'Union; demande que les inspections du travail intensifient les mesures ciblées de prévention et d'éducation du public afin d'améliorer la prise de conscience autour de l'importance des règles et procédures de santé et de sécurité parmi les citoyens; demande à la Commission et aux États Membres d'accélérer la mise en œuvre de REACH, en particulier la substitution des substances chimiques les plus préoccupantes; considère que les maladies professionnelles devraient être considérées dans la priorisation de ces substances;
II. Recommandations de politique au niveau de l'Union européenne
Échange d'informations plus rapide et efficace d'un pays à l'autre
41. est d'avis qu'une bonne coopération entre les autorités nationales et les partenaires sociaux est essentielle pour mettre un terme au dumping social et pour assurer une concurrence équitable au sein du marché intérieur; salue l'initiative de la Commission visant à créer une plate-forme européenne pour les inspecteurs du travail; invite, à cet égard, la Commission à établir une plateforme européenne sur le travail non déclaré à l'intention des inspecteurs du travail au sein de la Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail (Eurofound), et à en faire une mission supplémentaire de l'Agence, qui pourrait être chargée d'organiser le travail de la plateforme et de faciliter l'échange d'expériences et de bonnes pratiques en fournissant des informations actualisées, objectives, fiables et comparatives ainsi qu'en améliorant la coopération transfrontalière, et de recenser et d'identifier les sociétés "boîtes aux lettres" et d'autres activités similaires;
42. invite la Commission, en coopération avec les partenaires sociaux et les autorités nationales compétentes, sans préjudice du principe de subsidiarité, à affecter les ressources humaines nécessaires pour suivre les dossiers transfrontaliers de non-respect des règles de protection au travail et de travail non déclaré, qui pourraient être chargées notamment d'identifier les sociétés "boîtes aux lettres", de contrôler les prestataires transnationaux de services et d'élaborer des programmes de formation continue à l'échelle de l'Union pour les inspecteurs qui se penchent sur des problématiques telles que le travail indépendant factice et le détachement, de déterminer les nouvelles techniques de contournement des règles et d'organiser des contrôles transfrontaliers; recommande, par ailleurs, que les inspections nationales effectuent des inspections transfrontalières ponctuelles conjointes, en particulier dans les régions proches des zones frontalières;
43. invite la Commission à examiner l'opportunité de lancer et, le cas échéant, de mettre à disposition une carte européenne de sécurité sociale infalsifiable ou un autre document d'identité valable dans l'ensemble de l'Union, sur lequel pourraient être sauvegardées toutes les données nécessaires au contrôle de la relation de travail du porteur, par exemple en matière d'assurance sociale et de temps de travail, respectant strictement les règles de protection des données, en particulier dans la mesure où les données sensibles à caractère personnel sont traitées; souligne dès lors qu'il importe que les conséquences pour la vie privée soient analysées avec soin avant et pendant tout le processus d'élaboration d'une telle carte;
44. invite la Commission à mettre en place un projet pilote européen d'alerte précoce en cas de non-respect des règles de santé et de sécurité au travail et en cas de travail non déclaré, qui faciliterait l'échange rapide d'informations entre les États membres, et qui serait assorti d'une liste noire permettant d'empêcher plus efficacement qu'à l'heure actuelle le contournement de la protection au travail; fait observer que ce mécanisme d'alerte précoce pourrait s'inspirer du système européen actuel d'alerte précoce pour la protection des consommateurs (RAPEX); souligne la nécessité de documenter les infractions de façon plus précise en consignant systématiquement les résultats des inspections, de sorte à agir de manière ciblée contre les abus;
45. estime qu'une coopération accrue et un échange d'informations entre les États membres dans leur lutte contre le travail non‑déclaré peut apporter une valeur ajoutée européenne considérable; souligne que cela permettrait de soutenir utilement les initiatives législatives européennes sur le travail non déclaré, de promouvoir l'échange de bonnes pratiques et d'améliorer la coordination entre les inspections du travail de différents pays;
46. fait observer que dans certaines situations transfrontalières, le droit des autorités nationales de contrôle d'effectuer des inspections dans des entreprises étrangères a été fortement limité et que cela a nui à la protection des travailleurs et aux conditions de concurrence équitables sur le marché intérieur; demande par conséquent que les informations sur le détachement de travailleurs, comme les attestations de détachement A1, ne soient pas rétroactives et qu'elles soient intégrées dans un registre électronique à l'échelle européenne qui devrait compléter les registres nationaux existants et être accessible pour les autorités de l'ensemble de l'Union européenne, afin de faciliter le contrôle, à l'échelon national, des contrats de travail de détachement dans les différents États, dans plusieurs langues; estime qu'un échange d'informations transfrontalier plus efficace entre les différentes instances compétentes est crucial sur ce plan; invite la Commission et les États membres à garantir que les inspections du travail sont en mesure de faire valoir pleinement leur droit à des contrôles indépendants non discriminatoires dans des situations transfrontalières, quel que soit le lieu d'établissement de l'entreprise;
47. rappelle que, dans le cadre de la directive d'exécution sur le détachement des travailleurs, la longueur du document ne doit pas être un obstacle à sa traduction lorsqu'elle est demandée dans le cadre d'une inspection;
Nouvelles initiatives législatives à l'échelle de l'Union européenne
48. fait remarquer que les directives actuelles en matière de travail et de protection sociale n'insistent pas suffisamment sur la nécessité d'une meilleure application et sur le rôle joué par les inspections du travail; estime nécessaire de réexaminer les directives existantes dans ce sens et de les réviser, le cas échéant, mais aussi de mieux aborder la question de l'application dans le cadre du droit du travail européen; se réjouit, à cet égard, que la Commission ait proposé des normes minimales d'inspection dans les directives relatives à certains groupes de travailleurs; souligne qu'il convient de tenir compte du rôle des inspections du travail dans le domaine social et de l'emploi, de façon à garantir une protection efficace;
49. invite les États membres et la Commission à promouvoir la mise en place volontaire de normes de travail plus élevées par les entreprises, grâce à l'instauration d'un système de labels sociaux gratuits et reconnus au niveau national ou européen;
50. fait remarquer que, dans quelques États membres, les enfants âgés de moins de 14 ans travaillent déjà; estime qu'il est nécessaire de renforcer le rôle des inspecteurs du travail dans la lutte contre le travail des enfants et d'intensifier les campagnes en la matière; demande à la Commission de mettre en œuvre, au niveau de l'Union, des campagnes spécifiques de contrôle et de surveillance relatives aux conditions de travail des jeunes, en particulier des jeunes travailleurs migrants;
51. invite la Commission et les États membres à faire en sorte que les droits procéduraux et d'exécution, tels que ceux énoncés dans la proposition de directive relative à des mesures facilitant l'exercice des droits conférés aux travailleurs dans le contexte de la libre circulation des travailleurs, soient disponibles pour tous les travailleurs;
52. juge essentiel, à l'égard des travailleurs mobiles, que les autorités nationales d'inspection du travail et, le cas échéant, les organisations de travailleurs salariés puissent contrôler tout ce qui leur paraît important; estime que les États membres sont responsables de la mise en place, sur leur territoire, de contrôles et mécanismes de supervision efficaces, afin de s'assurer de l'observation des dispositions et des règles des directives pertinentes;
53. demande à la Commission d'élaborer et de fournir aux États membres des guides de bonnes pratiques et de faciliter la coopération et l'échange d'informations entre eux, de façon à ce qu'ils puissent examiner et contrôler plus efficacement les activités des agences de travail intérimaire; souligne que les États membres devraient renforcer leurs contrôles approfondis des agences de travail intérimaire et devraient envisager la mise en place de mesures visant à les soumettre à des obligations de certification et de signalement de leurs activités de recrutement;
54. invite la Commission, dans le respect du principe de subsidiarité, à proposer un livre vert renforçant le rôle des inspecteurs du travail et fixant des normes européennes en matière d'inspection du travail et de formation uniforme des inspecteurs du travail, tout en tenant compte des différences entre les marchés du travail nationaux;
55. demande à la Commission de recenser les meilleurs moyens de lutter contre le dumping social dans l'Union européenne et de proposer des instruments appropriés à cet égard; rappelle que la politique de la concurrence est appliquée au niveau européen; estime, de la même manière, que des mesures visant à lutter contre le dumping social devraient être intégrées dans le droit de la concurrence de l'Union européenne et que la mise en place de ces mesures devrait être accompagnée d'une disposition autorisant la Commission à les mettre en œuvre;
56. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission ainsi qu'aux parlements nationaux des États membres.
- [1] JO L 354 du 31.12.2008, p. 70.
- [2] JO L 183 du 29.6.1989, p. 1.
- [3] JO L 299 du 18.11.2003, p. 9.
- [4] JO C 125 du 6.5.1999, p. 1.
- [5] JO L 277 du 28.10.1999, p. 34.
- [6] JO L 168 du 30.6.2009, p. 24.
- [7] JO C 168 E du 14.6.2013, p. 102.
- [8] JO C 9 E du 15.1.2010, p. 1.
- [9] JO C 102 E du 24.4.2008, p. 321.
- [10] JO C 175 E du 10.7.2008, p. 401.
- [11] JO C 313 E du 20.12.2006, p. 452.
- [12] JO C 117 E du 6.5.2010, p. 176.
- [13] Textes adoptés, P7_TA(2013)0230.
- [14] JO C 5 du 10.1.1996, p. 1.
- [15] JO C 304 du 14.10.1996, p. 1.
- [16] EU‑OSHA.
- [17] EU-OSHA, étude Esener, 2009.
- [18] http://www.ksz.fgov.be/en/international/page/content/websites/international/aboutcbss.html.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Les changements économiques et sociaux survenus au cours des dernières décennies ont une incidence considérable sur le monde du travail. La mondialisation de l'économie a fragilisé des relations de travail traditionnellement sûres et équitables. La sous-traitance, l'externalisation, la précarité, l'intensification du travail et le manque de sécurité de l'emploi nuisent à la qualité des emplois en Europe.
Cette érosion des relations de travail s'accompagne d'un manque de respect du droit du travail et des droits des travailleurs. Le travail non déclaré et l'économie parallèle sont des problèmes de plus en plus présents dans l'Union européenne.
L'économie parallèle limite les possibilités de développement de la société, et le travail non déclaré donne naissance à une catégorie de travailleurs marginalisés et financièrement et socialement très vulnérables. En l'absence de revenus garantis et de protection sociale, les travailleurs non déclarés rencontrent des difficultés à satisfaire leurs besoins fondamentaux, par exemple à trouver un logement, et peuvent difficilement faire des projets pour leur famille et leur avenir. Ils ne contribuent pas aux systèmes de sécurité sociale, et ne peuvent donc pas en tirer pleinement profit, et sont généralement moins bien payés que les autres travailleurs du secteur. Cette situation nuit aux personnes concernées, mais elle entraîne aussi une pression à la baisse des salaires des travailleurs déclarés qui se trouvent en concurrence avec ces salaires plus faibles.
Le travail non déclaré et l'économie parallèle ont des conséquences néfastes pour l'ensemble de l'économie; en effet, ils nuisent à la qualité des produits et des services et à la productivité des entreprises, et ils encouragent une concurrence déloyale au sein du marché intérieur de par le manque à gagner fiscal provoqué par l'évasion fiscale et le non-paiement des cotisations sociales. Mais le travail non déclaré a également une incidence sur la société au niveau des conditions de travail, de la sécurité au travail, de l'exploitation de catégories vulnérables comme les immigrés, les jeunes, les femmes, les travailleurs faiblement qualifiés et du non‑paiement des cotisations sociales nationales avec les conséquences qui en découlent pour les retraites et la protection sociale.
Le travail non déclaré représente aussi une menace pour les entreprises. Des salariés plus motivés sont plus productifs et fournissent un travail de meilleure qualité. La motivation nécessite de se sentir apprécié et traité de manière équitable, mais aussi de se sentir en sécurité. Les travailleurs non déclarés n'éprouvent pas le même sentiment d'appréciation, de traitement équitable et de sécurité que les travailleurs déclarés. La plupart du temps, ils sont moins bien payés et faciles à remplacer.
Surtout en période de crise, à un moment où les gouvernements nationaux et la Commission européenne aspirent à un assainissement budgétaire, il convient de tenir compte du fait que le travail non déclaré représente 18,8 % du PIB total de l'UE-27, et même plus de 30 % du PIB de certains pays. Pour que l'assainissement budgétaire puisse réussir, il faut que les finances publiques ne subissent pas les effets négatifs d'une concurrence déloyale.
Le présent rapport vise à mettre en évidence le rôle joué par les systèmes d'inspection du travail dans la lutte contre le travail non déclaré. À l'heure actuelle, toutes les actions de lutte contre le travail non déclaré auxquelles les inspections du travail participent se heurtent à des difficultés dans de nombreux États membres en raison de la réduction, par souci d'économie, du budget alloué aux inspections du travail.
C'est pourquoi le présent rapport met en exergue les difficultés rencontrées par les inspections du travail dans l'Union européenne et formule des recommandations de politique afin de combattre le travail non déclaré et d'aider les inspections à travailler plus efficacement.
L'inspection du travail est un élément fondamental de l'administration du travail. Une inspection du travail efficace, capable de faire face aux défis d'un marché du travail en mutation, est une composante essentielle de la bonne gouvernance. Les inspecteurs du travail sont indispensables au respect des droits des travailleurs, à la prévention des abus par des employeurs peu scrupuleux et à la promotion du développement économique et social. Ils contribuent à faire du travail décent une réalité et donnent une indication des tendances socioéconomiques au sein de la société. La crise économique ne doit pas être un obstacle; elle doit au contraire encourager les États à renforcer les inspections du travail afin d'assurer la protection des travailleurs.
Ce rapport est divisé en deux parties. L'accent est mis tout d'abord sur le niveau national, puisque les inspections du travail sont encore assurées par les autorités nationales.
La rapporteure énonce des principes en vue d'inspections efficaces du travail dans les États membres. Le rapport définit le rôle et le champ d'action des inspections du travail. Il insiste sur le fait que toutes les catégories de travailleurs doivent être couvertes par les inspections du travail. Il s'agit là de l'une des principales demandes du rapport.
Il insiste également sur la protection des travailleurs victimes d'abus. Dans de nombreux pays, les travailleurs non déclarés éprouvent des difficultés à faire valoir leurs droits. Il doit être clair que le paiement des travailleurs doit avoir priorité sur les recettes publiques issues d'amendes infligées aux employeurs en infraction.
Le rapport décrit également quelques exemples de bonnes pratiques dans les États membres susceptibles d'apporter une valeur ajoutée aux inspections du travail dans d'autres pays. Dans le cadre de leurs efforts pour lutter plus efficacement contre le travail non déclaré, certains États membres ont mis en place des systèmes novateurs de coopération avec d'autres autorités ainsi que des systèmes d'enregistrement des travailleurs mobiles.
Le rapport insiste également sur les groupes vulnérables comme les travailleurs indépendants, intérimaires ou domestiques. On sait que le travail non déclaré est fréquent parmi ces catégories et qu'elles posent des difficultés aux inspections nationales du travail en raison de situations d'emploi complexes.
Deuxièmement, le rapport compte mettre l'accent sur le niveau européen. Il avance des recommandations de politique visant à promouvoir la coopération transfrontalière entre les autorités nationales et propose de nouvelles initiatives juridiques visant à renforcer le rôle des inspections du travail.
Pour se doter d'une inspection efficace du travail capable de contrôler le respect du droit du travail, l'Europe ne peut pas se contenter de règles non contraignantes pour garantir des emplois décents, stables, sains et sûrs dans les États membres. Ce rapport s'efforce d'attirer l'attention sur la nécessité urgente d'adopter des mesures légalement contraignantes afin d'assurer la protection des travailleurs et le respect des droits fondamentaux en matière de travail et de protection sociale. Pour ce faire, il faut tout d'abord renforcer les droit sociaux et du travail fondamentaux au sein du marché intérieur et s'efforcer de promouvoir les droits des travailleurs et une concurrence loyale. Ce principe doit être inscrit dans le droit primaire européen par l'adoption d'un protocole sur le progrès social afin de protéger les droits sociaux fondamentaux contre toute conséquence négative des réformes et des mesures d'austérité au niveau national.
Un droit effectif du travail au niveau de l'Union permettra la mise en place d'inspections du travail efficaces capables de faire respecter les principes clairs et contraignants définis par la législation du travail. Dans le contexte du marché unique, où le dumping social et l'exploitation au travail sont des problèmes graves qui touchent des milliers de travailleurs et nuisent à la compétitivité des entreprises, et notamment des PME, il convient d'adopter une législation européenne afin de protéger les travailleurs et de mettre en place une inspection du travail au niveau européen chargée de contrôler la mise en œuvre de cette législation et de la faire respecter.
L'un des principaux problèmes concerne les inspections du travail en cas de relations de travail transfrontalières. Les autorités nationales éprouvent des difficultés à obtenir des informations importantes auprès des autorités du pays d'origine et à comprendre la nature des relations de travail, souvent enfouies dans une longue chaîne de sous-traitance.
La rapporteure se félicite de l'initiative de la Commission de créer une plate-forme européenne pour les inspecteurs du travail. Elle considère en outre qu'il conviendrait de prendre des mesures supplémentaires pour lutter contre le travail non déclaré dans un contexte transnational.
Une recommandation consiste à créer une agence européenne chargée de tous les aspects transfrontaliers de l'inspection du travail. Cette agence pourrait par exemple contrôler les prestataires transnationaux de services et les sociétés "boîte aux lettres", lancer des programmes de formation spécialisés au niveau européen et organiser des contrôles transfrontaliers.
Une autre proposition consiste à instaurer une carte européenne de sécurité sociale contenant toutes les données nécessaires, par exemple en matière de temps de travail et de sécurité sociale. Cette carte permettrait à l'inspecteur du travail d'examiner sur place toutes les données nécessaires. Elle a fait l'objet d'un projet pilote dans le secteur de la construction, et a donc déjà été testée. La Suède a instauré une carte de ce type dans le secteur de la construction, se dotant ainsi d'un moyen plus simple et très efficace de contrôler les lieux et installations de travail. Les inspecteurs sont équipés de détecteurs permettant de lire rapidement et facilement les informations contenues sur les cartes. Le Luxembourg a adopté un système similaire en janvier 2013.
La rapporteure recommande également de lancer un système d'alerte précoce permettant l'échange d'informations entre les autorités nationales en cas de fraude ou d'exploitation illégale par certaines entreprises. Un système de ce type a déjà été mis en place dans le domaine de la protection des consommateurs (RAPEX), où il permet d'empêcher les abus.
Le rapport décrit également de nouvelles initiatives législatives possibles. Le droit européen et les institutions européennes permettent des inspections du travail plus efficaces et mieux coordonnées au niveau européen en matière de santé et de sécurité au travail, mais ce n'est pas le cas en matière de conditions de travail et de protection des droits des travailleurs.
Il serait possible d'envisager l'adoption de nouvelles directives pour renforcer le rôle des inspecteurs du travail et pour permettre un meilleur contrôle des agences de recrutement.
La rapporteure souligne également que, alors qu'il existe une politique de la concurrence au niveau européen dont la Commission assure le respect avec succès en cas de pratiques déloyales par des entreprises, aucune mesure n'est prise pour assurer le respect des règles contre le dumping social au niveau de l'Union. Le rapport fait remarquer que le travail non déclaré est aussi une façon de fausser la concurrence sur le marché unique et qu'il doit être criminalisé. Il demande par conséquent d'inscrire dans le traité des dispositions contre le dumping social et de permettre à la Commission d'infliger des sanctions pour faire respecter des dispositions.
Un autre domaine dans lequel une action législative est nécessaire au niveau de l'Union est la réglementation des nouvelles formes de travail et du travail atypique. Il convient de fixer une définition claire et contraignante du salarié au niveau de l'Union afin de lutter contre l'une des méthodes les plus répandues pour contourner le droit du travail: le travail indépendant factice. Cette définition sera un outil très utile pour permettre aux inspecteurs du travail de déterminer si les entreprises ont recours à cette pratique de manière illégale.
RÉSULTAT DU VOTE FINAL EN COMMISSION
Date de l’adoption |
26.11.2013 |
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Résultat du vote final |
+: –: 0: |
22 13 0 |
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Membres présents au moment du vote final |
Heinz K. Becker, Phil Bennion, Pervenche Berès, Vilija Blinkevičiūtė, Alejandro Cercas, Derek Roland Clark, Minodora Cliveti, Emer Costello, Frédéric Daerden, Sari Essayah, Richard Falbr, Nadja Hirsch, Stephen Hughes, Ádám Kósa, Jean Lambert, Patrick Le Hyaric, Verónica Lope Fontagné, Olle Ludvigsson, Csaba Őry, Konstantinos Poupakis, Sylvana Rapti, Elisabeth Schroedter, Nicole Sinclaire, Jutta Steinruck, Ruža Tomašić, Traian Ungureanu |
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Suppléant(s) présent(s) au moment du vote final |
Georges Bach, Jürgen Creutzmann, Jelko Kacin, Martin Kastler, Anthea McIntyre, Birgit Sippel, Csaba Sógor |
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Suppléant(s) (art. 187, par. 2) présent(s) au moment du vote final |
Jolanta Emilia Hibner, Sławomir Nitras |
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