RAPPORT sur le rôle des lanceurs d’alerte dans la protection des intérêts financiers de l’Union européenne

20.1.2017 - (2016/2055(INI))

Commission du contrôle budgétaire
Rapporteur: Dennis de Jong

Procédure : 2016/2055(INI)
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A8-0004/2017
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PROPOSITION DE RÉSOLUTION DU PARLEMENT EUROPÉEN

sur le rôle des lanceurs d’alerte dans la protection des intérêts financiers de l’Union européenne

(2016/2055(INI))

Le Parlement européen,

–  vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et notamment son article 325,

–  vu les articles 22 bis, 22 ter et 22 quater du statut des fonctionnaires de l’Union européenne,

–  vu sa résolution du 23 octobre 2013 sur la criminalité organisée, la corruption et le blanchiment de capitaux: recommandations sur des actions et des initiatives à entreprendre[1],

–  vu la décision de la Médiatrice européenne clôturant son enquête d’initiative OI/1/2014/PMC concernant l’alerte éthique,

–  vu la directive (UE) 2016/943 du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2016 sur la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulgués (secrets d’affaires) contre l’obtention, l’utilisation et la divulgation illicites[2],

–  vu l’article 9 de la convention civile sur la corruption du Conseil de l’Europe,

–  vu l’article 22, point a), de la convention pénale sur la corruption du Conseil de l’Europe,

–  vu la recommandation CM/Rec(2014)7 du Conseil de l’Europe sur la protection des lanceurs d’alerte,

–  vu les articles 8, 13 et 33 de la convention des Nations unies contre la corruption,

–  vu le principe n° 4 de la recommandation de l’OCDE sur l’amélioration du comportement éthique dans le service public,

–  vu l’enquête du 2 mars 2015 du Médiateur européen et l’invitation faite aux institutions de l’Union européenne d’adopter les règles nécessaires sur les lanceurs d’alerte,

–  vu le rapport de l’OCDE intitulé «Committing to effective whistle-blower protection» [S’engager pour une protection efficace des lanceurs d’alerte],

–  vu l’arrêt du 12 février 2008 de la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Guja contre Moldavie (requête n° 14277/04),

–  vu l’article 6 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne,

–  vu l’article 52 de son règlement,

–  vu le rapport de la commission du contrôle budgétaire et l’avis de la commission des affaires constitutionnelles (A8-0004/2017),

A.  considérant que, dans le cadre de la procédure de décharge, le Parlement doit obtenir autant d’informations que possible concernant d’éventuelles irrégularités; considérant que dans les affaires concernant des irrégularités au sein des institutions, le Parlement doit pouvoir jouir d’un droit d’accès sans restriction aux informations afin de pouvoir mener la procédure de décharge en connaissance de cause;

B.  considérant que la Cour des comptes européenne fournit au Parlement une excellente base pour ses enquêtes, mais ne peut à elle seule examiner toutes les dépenses;

C.  considérant que la Commission et d’autres institutions de l’Union européenne fournissent elles aussi au Parlement des rapports sur leurs dépenses, mais qu’elles s’appuient également sur des mécanismes de signalement officiels;

D.  considérant que les différents fonds de l’Union relèvent d’une gestion partagée entre la Commission et les États membres et qu’il est donc difficile pour la Commission de signaler des irrégularités concernant certains projets spécifiques;

E.  considérant que le Parlement reçoit régulièrement des informations de la part de citoyens ou d’organisations non gouvernementales dénonçant des irrégularités concernant certains projets financés totalement ou en partie par le budget de l’Union;

F.  considérant que les lanceurs d’alerte jouent donc un rôle important dans la prévention, la détection et le signalement d’irrégularités concernant les dépenses liées au budget de l’Union, ainsi que dans l’identification et la divulgation de faits de corruption; qu’il y a lieu de mettre en place et d’encourager une culture de la confiance, propice au bien public européen, qui permette aux fonctionnaires et aux autres agents de l’Union comme aux citoyens en général de se sentir protégés par des pratiques de bonne administration et qui montre que les institutions de l’Union soutiennent, protègent et encouragent les lanceurs d’alerte potentiels;

G.  considérant qu’il est indispensable de mettre en place d’urgence un cadre juridique transversal qui, en précisant les droits et les devoirs, protège les lanceurs d’alerte dans toute l’Union et au sein des institutions de l’Union (protection de l’anonymat, assistance juridique, psychologique et, le cas échéant, financière, accès à diverses formes d’information, mécanismes d’action rapide, etc.);

H.  considérant que la majorité des États membres de l’Union ont ratifié la convention des Nations unies contre la corruption, qui impose de garantir une protection appropriée et effective aux lanceurs d’alerte;

I.  considérant que la dénonciation des dysfonctionnements est une source fondamentale d’informations dans la lutte contre la criminalité organisée et les enquêtes sur la corruption dans le secteur public;

J.  considérant que les lanceurs d’alerte jouent un rôle particulièrement important lorsqu’il s’agit de détecter et de signaler des cas de corruption et de fraude, puisque les parties directement impliquées dans ces activités criminelles chercheront activement à les dissimuler de tout mécanisme de signalement officiel;

K.  considérant que la dénonciation des dysfonctionnements, fondée sur les principes de transparence et d’intégrité, est essentielle; que la protection des lanceurs d’alerte devrait dès lors être garantie par la loi et renforcée dans toute l’Union européenne, mais uniquement s’ils agissent de bonne foi pour protéger l’intérêt public conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme;

L.  considérant que les autorités ne devraient pas limiter ou restreindre la capacité des lanceurs d’alerte et des journalistes à rassembler des preuves et à révéler les pratiques illégales, illicites ou dangereuses, lorsqu’ils le font de bonne foi et en accordant la priorité à l’intérêt public;

M.  considérant que, depuis le 1er janvier 2014, les institutions de l’Union européenne sont toutes censées avoir introduit des règles internes protégeant leurs fonctionnaires lanceurs d’alerte, comme le prévoient les articles 22 bis, 22 ter et 22 quater du statut des fonctionnaires, et que le comité interinstitutionnel du statut n’a pas encore achevé ses travaux en ce qui concerne la protection des lanceurs d’alerte; qu’une partie des travaux effectués par ce comité devrait consister à évaluer la situation des lanceurs d’alerte qui ont été subi des répercussions au sein des institutions, de façon à mettre en place des pratiques fondées sur l’expérience du passé; que ces règles internes doivent tenir compte de la structure administrative et des caractéristiques des diverses catégories de personnel;

N.  considérant que la protection des lanceurs d’alerte au niveau des États membres n’a pas été appliquée dans tous les États membres, ni harmonisée, ce qui signifie que, même si les intérêts financiers de l’Union européenne sont en cause, il peut s’avérer risqué pour les lanceurs d’alerte, sur les plans personnel et professionnel, de livrer au Parlement des informations concernant des irrégularités; que c’est précisément parce qu’ils ont peur des conséquences en raison du manque de protection et parce qu’ils sont convaincus que rien ne sera fait que, souvent, les gens ne signalent pas les irrégularités, ce qui est préjudiciable pour les intérêts financiers de l’Union;

O.  considérant qu’il convient de fournir la garantie que toute forme de représailles à l’égard des lanceurs d’alerte sera sanctionnée de façon appropriée;

P.  considérant que, dans sa résolution du 23 octobre 2013, le Parlement a invité la Commission à présenter avant fin 2013 une proposition législative visant à mettre en place un programme européen efficace et complet pour protéger, dans le secteur privé comme dans le secteur public, ceux qui détectent des erreurs de gestion et des irrégularités et qui dénoncent des cas de corruption nationaux et transfrontaliers liés aux intérêts financiers de l’Union européenne; considérant qu’il invite également les États membres à assurer une protection adéquate et efficace aux lanceurs d’alerte;

Q.  considérant que la protection des lanceurs d’alerte a déjà été prévue par le législateur européen dans certains instruments sectoriels, notamment la directive 2013/30/UE relative à la sécurité des opérations pétrolières et gazières en mer, le règlement (UE) n° 596/2014 sur les abus de marché, la directive (UE) 2015/849 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme et le règlement (UE) n° 376/2014 concernant les comptes rendus, l’analyse et le suivi d’événements dans l’aviation civile;

R.  considérant que la protection des lanceurs d’alerte dans l’Union est une question de plus en plus pressante, dans la mesure où la directive sur le secret des affaires limite les droits des lanceurs d’alerte et peut donc avoir un effet dissuasif non souhaité sur ceux qui veulent signaler des irrégularités liées au financement de l’Union dont certaines entreprises ont pu bénéficier;

S.  considérant qu’un travail considérable a déjà été accompli par des organisations internationales telles que l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et le Conseil de l’Europe, qui ont formulé des recommandations relatives à la protection des lanceurs d’alerte;

T.  considérant que, selon l’OCDE, plus d’un tiers des organisations dans lesquelles un mécanisme de signalement était en place ne disposaient, ou n’avaient connaissance, d’aucune politique écrite visant à protéger de toutes représailles les personnes effectuant un signalement;

U.  considérant que plusieurs organisations non gouvernementales, comme Transparency International ou Whistleblowing International Network, ont elles aussi défini des principes internationaux pour l’adoption d’une législation relative aux lanceurs d’alerte, dont il serait utile que s’inspirent les initiatives de l’Union en la matière;

V.  considérant que le Médiateur européen dispose d’une compétence manifeste pour ce qui est d’enquêter sur les plaintes des citoyens de l’Union concernant des cas de mauvaise administration dans les institutions de l’Union, mais ne joue aucun rôle en tant que tel dans la protection des lanceurs d’alerte dans les États membres;

W.  considérant que plusieurs dispositions relatives à la dénonciation de dysfonctionnements sont intégrées dans la nouvelle version, en vigueur depuis le 1er janvier 2014, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne et du régime applicable aux autres agents de l’Union;

X.  considérant que la protection des lanceurs d’alerte est essentielle à la sauvegarde du bien public et des intérêts financiers de l’Union et à la promotion d’une culture de responsabilité publique et d’intégrité dans les institutions publiques et privées;

Y.  considérant que, dans de nombreux pays, et en particulier dans le secteur privé, les salariés sont soumis à des clauses de confidentialité à propos de certaines informations, ce qui signifie que les lanceurs d’alerte peuvent encourir des sanctions disciplinaires pour avoir divulgué des informations en dehors de leur organisation;

1.  déplore que la Commission se soit pour l’instant montrée incapable de présenter une proposition législative visant à fixer un niveau minimal de protection pour les lanceurs d’alerte européens;

2.  invite instamment la Commission à présenter sans délai une proposition législative visant à mettre en place un programme européen efficace et complet pour protéger les lanceurs d’alerte, assorti de mécanismes pour les entreprises, les instances publiques et les organisations à but non lucratif, et, plus particulièrement, invite la Commission à présenter une proposition législative avant la fin de cette année pour protéger les lanceurs d’alerte dans le cadre des mesures à prendre dans le domaine de la prévention et de la lutte contre la fraude nuisant aux intérêts financiers de l’Union, en vue d’assurer une protection efficace et équivalente dans tous les États membres et dans l’ensemble des institutions, organes, organismes, et agences de l’Union;

3.  insiste sur l’importance capitale du rôle des lanceurs d’alerte dans l’aide apportée aux États membres et aux institutions de l’Union pour prévenir et lutter contre toute tentative de violation du principe d’intégrité et tout abus de pouvoir qui menacent ou constituent une violation de la santé et de la sécurité publiques, de l’intégrité financière, de l’économie, des droits de l’homme, de l’environnement ou de l’état de droit à l’échelle nationale et européenne, ou qui font augmenter le chômage, restreignent ou faussent la concurrence loyale et ébranlent la confiance que les citoyens portent aux institutions et aux processus démocratiques; à ce égard, souligne que les lanceurs d’alerte contribuent dans une large mesure à améliorer la qualité démocratique des institutions publiques et la confiance qui leur est portée en les rendant directement responsables devant les citoyens et davantage transparentes;

4.  fait observer que tant les lanceurs d’alerte que les organes ou institutions publics concernés devraient veiller à la protection juridique des droits garantis par la charte européenne des droits fondamentaux et par les dispositions juridiques nationales;

5.  rappelle que les États membres, en tant que premiers destinataires des fonds de l’Union européenne, ont l’obligation de contrôler la légalité de l’utilisation des fonds;

6.  fait observer que seuls quelques États membres se sont dotés de systèmes suffisamment avancés de protection des lanceurs d’alerte; demande aux États membres qui n’ont pas encore adopté les principes de protection des lanceurs d’alerte dans leur législation nationale de le faire dans les plus brefs délais;

7.  demande aux États membres d’imposer des règles anticorruption efficaces et, en même temps, de mettre correctement en œuvre les normes et les orientations internationales et européennes concernant la protection des lanceurs d’alerte dans leur législation nationale;

8.  regrette que de nombreux États membres doivent encore mettre en place des règles spéciales pour la protection des lanceurs d’alerte, malgré le besoin impérieux de protection des lanceurs d’alerte dans la prévention de la corruption et la lutte contre ce phénomène, et malgré le fait que l’article 33 de la convention des Nations unies contre la corruption recommande de protéger les lanceurs d’alerte;

9.  souligne que la dénonciation de faits nuisant aux intérêts de l’Union consiste à divulguer ou signaler des actes répréhensibles, notamment, mais pas uniquement, des cas de corruption et de fraude, des conflits d’intérêts, la fraude et l’évasion fiscales, le blanchiment d’argent, l’infiltration par la criminalité organisée et toute manœuvre visant à dissimuler ces faits;

10.  considère qu’il est nécessaire de promouvoir une culture éthique dans laquelle les lanceurs d’alerte ne sont pas victimes de représailles ni de conflits internes;

11.  rappelle qu’un lanceur d’alerte doit communiquer toute information sur des irrégularités nuisant aux intérêts financiers de l’Union et que les lanceurs d’alerte devraient coopérer en permanence en partageant des informations avec les autorités compétentes de l’Union;

12.  réaffirme que les lanceurs d’alerte ont souvent un meilleur accès aux informations sensibles que les personnes externes, et sont donc plus susceptibles d’être exposés à des conséquences négatives en lien avec leur carrière professionnelle, ou encore de voir leur sûreté personnelle, protégée en vertu de l’article 6 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, menacée;

13.  souligne que la définition de la dénonciation inclut la protection de ceux qui divulguent des informations en étant convaincus que ces informations sont correctes au moment de leur divulgation, y compris lorsque ces révélations s’avèrent inexactes, mais sont faites en toute bonne foi;

14.  souligne le rôle déterminant du journalisme d’investigation et demande à la Commission de veiller, dans sa proposition, à assurer aux journalistes d’investigation la même protection que celle prévue pour les lanceurs d’alerte;

15.  souligne la nécessité de mettre en place un organe européen indépendant de collecte d’informations, de conseil et de consultation, doté de bureaux dans les États membres aptes à recevoir les signalements d’irrégularités, disposant de ressources budgétaires suffisantes, de compétences adéquates et de spécialistes appropriés, pour aider les lanceurs d’alerte internes et externes à utiliser les bons canaux pour divulguer leurs informations sur d’éventuelles irrégularités nuisant aux intérêts financiers de l’Union, tout en protégeant leur confidentialité et en leur offrant le soutien et les conseils dont ils ont besoin; fait observer que, lors de la première phase, les travaux de cet organe consisteraient principalement à vérifier avec fiabilité les informations reçues;

16.  invite les institutions de l’Union, en coopération avec toutes les autorités nationales pertinentes, à mettre en place et organiser toutes les mesures nécessaires pour protéger la confidentialité des sources d’information afin de prévenir toute action discriminatoire ou menace;

17.  salue la décision de la Médiatrice européenne d’ouvrir en 2014, de sa propre initiative, une enquête sur la protection des lanceurs d’alerte, destinée aux institutions de l’Union, et se félicite des conséquences positives de celle-ci; demande à ces institutions ainsi qu’aux autres organes de l’Union qui ne l’ont pas encore fait d’appliquer sans tarder les lignes directrices préconisées à l’issue de cette enquête;

18.  demande aux institutions de l’Union d’attirer l’attention sur les graves préoccupations liées aux lanceurs d’alerte sans défense; invite dès lors instamment la Commission à élaborer un plan d’action complet sur cette question;

19.  plaide pour la création d’une unité spéciale ainsi que de structures dédiées (comme des hotlines, des sites web, des points de contact) au sein du Parlement, chargées de recueillir les informations fournies par les lanceurs d’alerte portant sur les intérêts financiers de l’Union, mais aussi de conseiller ces lanceurs d’alerte et de les aider à se protéger contre toute mesure de rétorsion éventuelle, tant qu’une institution européenne indépendante n’aura pas été mise en place au sens du paragraphe 4;

20.  demande l’ouverture d’un site web permettant d’introduire des plaintes; souligne que ce site web devrait être accessible au public et garantir l’anonymat des données des personnes y ayant recours;

21.  invite la Commission à fournir un cadre juridique clair garantissant que les personnes révélant des activités illégales ou non éthiques soient protégées contre les représailles ou poursuites;

22.  invite la Commission à présenter des propositions concrètes pour la protection pleine et entière des personnes révélant des actes illicites et des irrégularités, afin de fournir un plan complet visant à décourager les transferts d’actifs vers des pays hors de l’Union qui servent de protecteurs de l’anonymat de personnes corrompues;

23.  souligne la nécessité de veiller à ce que les mécanismes de signalement soient accessibles et sûrs, et à ce que les révélations des lanceurs d’alerte soient étudiées de manière professionnelle;

24.  demande à la Commission, et au Parquet européen, dans la mesure où cela relève de son mandat au moment de sa mise en place, de mettre en place des moyens de communication efficaces entre les parties concernées, de fixer également des procédures lui permettant de recevoir et de protéger les lanceurs d’alerte désirant lui livrer des informations sur des irrégularités concernant les intérêts financiers de l’Union et de prévoir un protocole opérationnel unique pour les lanceurs d’alerte;

25.  demande à l’ensemble des institutions et organes de l’Union de prendre les mesures nécessaires pour garantir la reconnaissance, le respect et la considération des lanceurs d’alerte dans tous les cas qui les concernent ou les ont concernés et qui ont été reconnus comme tels par la Cour de justice de l’Union européenne, y compris de manière rétroactive; leur demande également de notifier publiquement et officiellement les décisions en question à l’ensemble de l’institution;

26.  demande à la Commission et aux États membres de fournir au Parlement toutes les informations transmises par des lanceurs d’alerte concernant des irrégularités qui nuisent aux intérêts financiers de l’Union, et d’inclure dans les rapports annuels d’activité un chapitre consacré aux cas signalés et à leur suivi; propose d’agir au niveau du Parlement pour établir la véracité des informations afin de prendre les mesures appropriées;

27.  demande à la Commission de réaliser une consultation publique pour recueillir l’opinion des parties prenantes sur les mécanismes de signalement et les insuffisances potentielles des procédures au niveau national; estime que les résultats de la consultation publique seront précieux pour aider la Commission à préparer sa future proposition sur le lancement d’alerte;

28.  invite l’organe de l’Union indépendant et, en attendant que ce dernier soit établi, l’Office européen de lutte antifraude (OLAF), à rédiger et publier un rapport annuel sur l’évaluation de la protection des lanceurs d’alerte dans l’Union européenne;

29.  invite en outre la Cour des comptes à inclure, dans ses rapports annuels, une rubrique spécifique consacrée au rôle des lanceurs d’alerte en matière de protection des intérêts financiers de l’Union;

30.  invite les agences de l’Union européenne à présenter une politique écrite sur la protection des personnes effectuant des signalements contre des représailles;

31.  se félicite que le Parlement, la Commission, le Conseil de l’Union européenne, la Cour de justice de l’Union européenne, la Cour des comptes européenne, le Service européen pour l’action extérieure, le Comité économique et social européen, le Comité des régions, le Médiateur européen et le Contrôleur européen de la protection des données aient mis en place des règles internes protégeant les lanceurs d’alerte, conformément aux articles 22 bis, 22 ter et 22 quater du statut des fonctionnaires; invite instamment toutes les institutions à veiller à ce que les règles internes qu’elles ont respectivement adoptées relatives à la protection des lanceurs d’alerte soient robustes et complètes;

32.  encourage les États membres à développer des données, des critères et des indicateurs sur les politiques relatives aux lanceurs d’alerte tant dans le secteur public que privé;

33.  rappelle que la directive d’exécution UE 2015/2392 de la Commission prévoit des procédures de signalement, des exigences en matière de tenue des registres et des mesures de protection pour les lanceurs d’alerte; souligne l’importance de veiller à ce que les lanceurs d’alerte puissent signaler des infractions en toute confidentialité et à ce que leur anonymat soit correctement et pleinement garanti, même dans l’univers numérique mais regrette qu’il s’agit d’un des rares éléments de la législation sectorielle qui comprenne des dispositions pour les lanceurs d’alerte;

34.  encourage la Commission à étudier les bonnes pratiques des programmes existants en faveur des lanceurs d’alerte déjà en place dans d’autres pays du monde; attire l’attention sur le fait que certains projets existants prévoient des avantages financiers pour les lanceurs d’alerte (par exemple un pourcentage des sanctions prononcées); estime que, bien que cela doive faire l’objet d’une gestion prudente afin d’éviter d’éventuels abus, ces avantages pourraient représenter un revenu important pour les personnes qui auraient perdu leur emploi à la suite de leur dénonciation;

35.  demande aux États membres de dépénaliser la démarche des lanceurs d’alerte qui révèlent des informations concernant des activités illicites et illégales qui nuisent aux intérêts financiers de l’Union;

36.  charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission.

  • [1]  JO C 208 du 10.6.2016, p. 89.
  • [2]  JO L 157 du 15.6.2016, p. 1.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Cela fait plusieurs années que le rôle des lanceurs d’alerte occupe les travaux de la commission du contrôle budgétaire. En 2011, la commission a commandé une étude intitulée «Corruption and conflict of interest in the European institutions: the effectiveness of whistle‑blowers» [Corruption et conflit d’intérêts au sein des institutions européennes: l’efficacité des lanceurs d’alerte], qui formule une série de recommandations sur les droits et les devoirs du personnel de l’Union à cet égard.

La commission estime important que le personnel de l’Union signale les irrégularités et tout aussi essentiel de pouvoir recueillir des informations transmises de l’extérieur. Si le statut des fonctionnaires et autres agents tel que révisé contient des dispositions relatives à la protection des lanceurs d’alerte, les autres lanceurs d’alerte restent, quant à eux, tributaires de la protection que daigne leur offrir la législation nationale, lorsqu’elle en offre une. La situation varie en effet d’un État membre à l’autre, d’où la nécessité de disposer d’un instrument législatif et d’une institution européenne indépendante capables de protéger également les lanceurs d’alerte extérieurs, lorsque les intérêts financiers de l’Union sont en jeu.

Il est clair que les lanceurs d’alerte sont importants pour lutter contre les irrégularités au sens large, y compris lorsqu’elles ne nuisent pas directement aux intérêts financiers de l’Union. Votre rapporteur est d’avis que la protection des lanceurs d’alerte doit aussi faire l’objet d’un traitement plus général. Il connaît les initiatives demandant à la Commission de rédiger une proposition sur la base, notamment, des articles 151 et 153, paragraphe 2, point b), du traité FUE, et donc de protéger l’ensemble des lanceurs d’alerte, ou en tout cas les travailleurs.

Le présent rapport ne s’oppose à aucune de ces initiatives plus générales. Sa base juridique est différente, tout comme sa portée, mais la définition de la dénonciation et les principaux instruments de protection peuvent aider à renforcer les bases d’une proposition législative élargie.

AVIS de la commission des affaires constitutionnelles (21.10.2016)

à l’intention de la commission du contrôle budgétaire

sur le rôle des lanceurs d’alerte dans la protection des intérêts financiers de l’Union européenne
(2016/2055(INI))

Rapporteur pour avis: Morten Messerschmidt

SUGGESTIONS

La commission des affaires constitutionnelles invite la commission du contrôle budgétaire, compétente au fond, à incorporer dans la proposition de résolution qu’elle adoptera les suggestions suivantes:

1.  insiste sur l’importance capitale du rôle des lanceurs d’alerte dans l’aide apportée aux États membres et aux institutions de l’Union pour prévenir et lutter contre toute tentative de violation du principe d’intégrité et tout abus de pouvoir qui menacent ou constituent une violation de la santé et de la sécurité publiques, de l’intégrité financière, de l’économie, des droits de l’homme, de l’environnement ou de l’état de droit à l’échelle nationale et européenne, ou qui font augmenter le chômage, restreignent ou faussent la concurrence loyale et ébranlent la confiance que les citoyens portent aux institutions et aux processus démocratiques; à ce égard, souligne que les lanceurs d’alerte contribuent dans une large mesure à améliorer la qualité démocratique des institutions publiques et la confiance qui leur est portée en les rendant directement responsables devant les citoyens et davantage transparentes;

2.  fait observer que tant les lanceurs d’alerte que les organes ou institutions publics concernés devraient jouir de la protection juridique des droits garantis par la charte européenne des droits fondamentaux et par les dispositions juridiques nationales;

3.  rappelle que l’article 22 quater du statut du personnel exige que les institutions européennes mettent en œuvre des règles internes relatives à la dénonciation des dysfonctionnements qui protègeraient les lanceurs d’alerte qui font part de soupçons d’abus, leurs droits et leurs intérêts, ainsi que des mesures de protection et de prévention et des voies de recours adaptées aux actions de représailles éventuellement engagées par les institutions à leur encontre;

4.  regrette que les institutions et les organes de l’Union n’aient pas tous adopté ces règles; demande par conséquent qu’ils adoptent et appliquent ces règles, afin de protéger sans délai les lanceurs d’alerte;

5.  rappelle que les États membres, en tant que premiers destinataires des fonds de l’Union européenne, ont l’obligation de contrôler la légalité de l’utilisation des fonds;

6.  considère qu’il est nécessaire de promouvoir une culture éthique dans laquelle les lanceurs d’alerte ne sont pas victimes de représailles ni de conflits internes;

7.  note que, dans son rapport anticorruption de l’Union, la Commission a déclaré que les États membres disposent de la plupart des institutions et des instruments juridiques de lutte contre la corruption, mais que les résultats qu’ils obtiennent ne sont pas satisfaisants dans l’ensemble de l’Union; demande par conséquent aux États membres d’adopter des mesures concrètes pour garantir des compétences adéquates à ces instruments et à ces institutions et améliorer leur efficacité; note avec préoccupation que les règles anticorruption ne sont pas toujours appliquées avec fermeté, que les problèmes systémiques ne sont pas abordés avec l’efficacité souhaitée et que les institutions concernées ne possèdent pas toujours les compétences suffisantes pour faire respecter ces règles, que les déclarations d’intention sont encore trop éloignées des résultats concrets et qu’une véritable volonté politique de mettre un terme à la corruption semble souvent faire défaut; demande par conséquent aux États membres d’imposer des règles anticorruption efficaces et, en même temps, de mettre correctement en œuvre les normes et les orientations internationales et européennes concernant la protection des lanceurs d’alerte dans leur législation nationale;

8.  demande à la Commission de prendre des mesures législatives afin d’améliorer la transparence, d’assurer un libre accès aux documents et de lutter contre la corruption, notamment contre les activités liées à la mafia; juge essentiel que les dispositions législatives visant à garantir un accroissement de la transparence et de la traçabilité des flux de capitaux, notamment dans le cadre des fonds européens, soient renforcées, y compris en prévoyant des rapports finaux d’audit afin de s’assurer de l’utilisation correcte des fonds;

9.  regrette que de nombreux États membres doivent encore mettre en place des règles spéciales pour la protection des lanceurs d’alerte, malgré le besoin impérieux de protection des lanceurs d’alerte dans la prévention de la corruption et la lutte contre ce phénomène, et malgré le fait que l’article 33 de la Convention des Nations unies contre la corruption recommande de protéger les lanceurs d’alerte;

10.  rappelle que la directive UE 2015/2392 prévoit des procédures de signalement, des exigences en matière de tenue des registres et des mesures de protection pour les lanceurs d’alerte; souligne l’importance de veiller à ce que les lanceurs d’alerte puissent signaler des infractions en toute confidentialité et à ce que leur anonymat soit correctement et pleinement garanti, même dans l’univers numérique mais regrette qu’il s’agit d’un des rares éléments de la législation sectorielle qui comprenne des dispositions pour les lanceurs d’alerte;

11.  demande à la Commission de créer un cadre juridique européen relatif à la protection des lanceurs d’alerte, afin d’améliorer leur protection dans les États membres;

12.  encourage la Commission à étudier les bonnes pratiques des programmes existants en faveur des lanceurs d’alerte déjà en place dans d’autres pays du monde; attire l’attention sur le fait que certains projets existants prévoient des avantages financier pour les lanceurs d’alerte (par exemple un pourcentage des sanctions prononcées); estime que cela doit faire l’objet d’une gestion prudente afin d’éviter d’éventuels abus, ces avantages pourraient représenter un revenu important pour les personnes qui auraient perdu leur emploi à la suite de leur dénonciation;

13.  demande aux États membres de dépénaliser la démarche des lanceurs d’alerte qui révèlent des informations concernant des activités illicites et illégales qui nuisent aux intérêts financiers de l’Union;

14.  regrette la décision de la Commission européenne de retirer un chapitre sur les institutions de l’Union de son rapport sur la corruption dans les États membres et demande à la Commission de réintroduire un chapitre sur cet aspect important;

15.  demande aux institutions européennes de répondre au rapport d’initiative du Médiateur européen du 24 juillet 2014, conformément à l’article 22 ter du nouveau statut des fonctionnaires, invitant tous les organes de l’Union à adopter des mécanismes d’alerte éthiques et des cadres juridiques de la dénonciation directement basés sur les règles internes du bureau du Médiateur européen; réaffirme sa détermination à agir de la sorte;

16.  demande à la Commission et aux États membres d’élaborer et de mettre en place des politiques et des programmes spécifiques de sensibilisation à l’importance sociale des lanceurs d’alerte, qui assurent le respect des principes d’intégrité, détectent les violations des droits fondamentaux et de l’état de droit et permettent d’éviter les abus de pouvoir au sein de nos sociétés;

17.  demande la mise en place de canaux accessibles, sûrs et directs qui permettent le partage d’informations concernant d’éventuelles activités illicites allant à l’encontre des intérêts financiers de l’Union, tout en garantissant la confidentialité lorsque ces informations et des lanceurs d’alerte sont concernés;

18.  estime enfin que pour éviter tout conflit d’intérêts qui serait de nature à compromettre l’idée que le public se fait de l’intégrité des institutions de l’Union, la Commission devrait rapidement revoir le Code de conduite des Commissaires en renforçant sa transparence et en l’alignant sur les règles du traité;

RÉSULTAT DU VOTE FINALEN COMMISSION SAISIE POUR AVIS

Date de l’adoption

20.10.2016

 

 

 

Résultat du vote final

+:

–:

0:

17

1

0

Membres présents au moment du vote final

Mercedes Bresso, Pascal Durand, Danuta Maria Hübner, Diane James, Ramón Jáuregui Atondo, Jo Leinen, György Schöpflin, Pedro Silva Pereira, Barbara Spinelli, Kazimierz Michał Ujazdowski

Suppléants présents au moment du vote final

Isabella Adinolfi, Max Andersson, Gerolf Annemans, Charles Goerens, Sylvia-Yvonne Kaufmann, Jiří Pospíšil

Suppléants (art. 200, par. 2) présents au moment du vote final

Godelieve Quisthoudt-Rowohl, Csaba Sógor

RÉSULTAT DU VOTE FINALEN COMMISSION COMPÉTENTE AU FOND

Date de l’adoption

9.1.2017

 

 

 

Résultat du vote final

+:

–:

0:

21

0

0

Membres présents au moment du vote final

Inés Ayala Sender, Ryszard Czarnecki, Dennis de Jong, Martina Dlabajová, Luke Ming Flanagan, Jens Geier, Ingeborg Gräßle, Verónica Lope Fontagné, Dan Nica, Georgi Pirinski, Petri Sarvamaa, Claudia Schmidt, Bart Staes, Tomáš Zdechovský

Suppléants présents au moment du vote final

Brian Hayes, Cătălin Sorin Ivan, Benedek Jávor, Julia Pitera, Miroslav Poche, Patricija Šulin

Suppléants (art. 200, par. 2) présents au moment du vote final

Clare Moody