RAPPORT sur l’état des lieux de la concentration agricole dans l’Union européenne: comment faciliter l’accès des agriculteurs aux terres?

30.3.2017 - (2016/2141(INI))

Commission de l'agriculture et du développement rural
Rapporteure: Maria Noichl

Procédure : 2016/2141(INI)
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A8-0119/2017
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A8-0119/2017
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PROPOSITION DE RÉSOLUTION DU PARLEMENT EUROPÉEN

sur l’état des lieux de la concentration agricole dans l’Union européenne: comment faciliter l’accès des agriculteurs aux terres?

(2016/2141(INI))

Le Parlement européen,

–  vu l’avis du Comité économique et social européen du 21 janvier 2015 intitulé «L’accaparement des terres: une sonnette d’alarme pour l’Europe et une menace imminente pour l’agriculture familiale»,

–  vu les directives volontaires pour une gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, aux pêches et aux forêts du Comité de la sécurité alimentaire mondiale du 12 mai 2012,

–  vu la pétition nº 187/2015 présentée au Parlement européen sur la protection et l’administration des terres agricoles européennes en tant que richesse commune,

–  vu l’étude sur l’ampleur de l’accaparement des terres agricoles dans l’Union européenne de la commission de l’agriculture et du développement rural du Parlement européen[1],

–  vu les procédures d’infraction prévues ou déjà engagées par la Commission contre différents États membres, à savoir la Bulgarie, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, la Slovaquie et la Hongrie,

–  vu l’article 52 de son règlement,

–  vu le rapport de la commission de l’agriculture et du développement rural (A8-0119/2017),

A.  considérant qu’en 2013, 3,1 % des exploitations contrôlaient 52,2 % des terres agricoles dans l’Europe des 27 et qu’à l’inverse, en 2013, 76,2 % des exploitations ne détenaient que 11,2 % des terres agricoles; soulignant que cette tendance va à l’encontre du modèle européen d’une agriculture durable, multifonctionnelle et largement caractérisée par des entreprises familiales;

B.  considérant qu’avec un coefficient de Gini de 0,82, l’Union européenne se retrouve ainsi au même niveau que des pays tels que le Brésil, la Colombie et les Philippines en matière d’inégalités dans l’utilisation des sols[2];

C.  considérant que cette répartition inégale des surfaces agricoles induit une répartition inéquitable des subventions de la PAC, étant donné que les paiements directs, qui constituent l’essentiel des dépenses liées à la PAC, sont avant tout versés par hectare;

D.  considérant que la répartition effective des surfaces et des subventions pourrait se révéler encore plus inéquitable étant donné que les statistiques disponibles ne permettent pas de prendre en compte la propriété et le contrôle d’exploitations par des holdings, entre autres;

E.  considérant que l’accès à la terre et à la propriété sont des droits essentiels consacrés par le droit national de chaque état membre ;

F.  considérant que l’accès à la terre est indispensable pour la réalisation de nombreux droits fondamentaux et a une incidence directe sur la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne;

G.  considérant que la terre est à la fois une propriété et un bien public, et qu’elle s’accompagne d’obligations sociales;

H.  considérant que l’Union ne dispose d’aucune compétence exclusive ou partagée en matière foncière et qu’elle déploie son action sur divers aspects politiques, sociaux, culturels et environnementaux de la gestion des terres, ce qui appelle une démarche plus globale dans le domaine de la gouvernance foncière au niveau de l’Union;

I.  considérant que le tribunal constitutionnel allemand, dès le 12 janvier 1967 (arrêt 1 BvR 169/63, BVerfG 21, 73-87), a jugé que les transactions relatives à des terres agricoles ne devaient pas être aussi libres que les opérations s’appliquant à d’autres biens, étant donné que la terre est une ressource non reproductible et indispensable et qu’un système juridique et social équitable exige la prise en compte des intérêts collectifs dans une mesure bien plus importante pour le sol que pour les autres biens[3];

J.  considérant que la terre est une ressource de plus en plus rare et non reproductible, qu’elle constitue le socle du droit des individus à une alimentation saine en quantité suffisante et qu’elle est indispensable à quantité de services écosystémiques dont dépend notre survie, qui ne peut donc pas être considérée comme une banale marchandise; que la terre se retrouve face à une double menace, d’une part du fait du recul des surfaces agricoles à cause de l’imperméabilisation des sols, de l’urbanisation, du tourisme, des projets d’infrastructures, des changements d’affectation, du boisement et de la désertification provoquée par le changement climatique, et d’autre part du fait de la concentration des terres entre les mains de grands exploitants agricoles et d’investisseurs extra-agricoles; et qu’il est du rôle de l’autorité publique de contrôler et limiter le recul des surfaces agricoles en conséquence de telles activités;

K.  considérant que la ressource foncière fait l’objet non seulement de conflits d’usage mais aussi de convoitises entre les investisseurs agriculteurs et non agriculteurs ainsi qu’entre les générations d’agriculteurs, étant donné que les jeunes qui veulent s’installer y ont un accès plus difficile vu son coût, en particulier lorsqu’ils ne sont pas descendants d’agriculteurs;

L.  considérant que les États membres sont responsables des divergences au niveau national entre les différentes réglementations relatives à la politique des marchés fonciers et au marché des terres agricoles, mais que les conséquences de celles-ci influent toutefois sur la compétitivité des exploitations agricoles sur le marché unique dans son ensemble;

M.  considérant que le foncier est un facteur de production lourd à financer; qu’il est lié aux régimes nationaux de succession, qui obligent à un refinancement à chaque changement de génération; que le prix du foncier influe sur la concentration foncière; et qu’il arrive que des agriculteurs en fin de carrière sans descendants souhaitant conforter leur faible niveau de retraite cèdent leur exploitation au plus offrant;

N.  considérant que la Cour des comptes européenne, dans son rapport spécial nº 25/2016, insiste sur la nécessité d’améliorer le système de cartographie des surfaces agricoles utilisé pour le calcul de l’admissibilité des terres;

O.  considérant que les outils statistiques existants au niveau de l’Union, tels que le réseau d’information comptable agricole (RICA), l’enquête Eurostat sur la structure des exploitations agricoles et le système intégré de gestion et de contrôle (SIGC), recueillent des données sur différents aspects du régime foncier; considérant qu’il existe à l’heure actuelle un manque de données exhaustives, actuelles, transparentes et de qualité sur les droits d’usage du sol, les structures de propriété et de location, les évolutions des prix et des volumes sur les marchés fonciers, mais aussi sur des indicateurs sociaux et environnementaux pertinents à l’échelon européen, que de nombreux États membres ne collectent et publient que de manière incomplète;

P.  considérant qu’un degré de transparence suffisant du marché est également indispensable dans l’optique d’une répartition plus raisonnable des surfaces et devrait aussi s’appliquer aux activités des institutions présentes sur le marché foncier;

Q.  considérant que la vente de terres à des investisseurs extra-agricoles et à des holdings constitue un problème sérieux dans toute l’Union; que les nouveaux États membres subissent des pressions particulièrement fortes visant à faire évoluer leur législation depuis la fin des moratoires qui limitaient la vente de surfaces à des ressortissants étrangers, étant donné que les prix relativement bas des terrains accélèrent la vente des terres agricoles à de grands investisseurs;

R.  considérant qu’une large diffusion de la propriété des terres agricoles constitue un principe élémentaire essentiel de l’économie sociale de marché et une importante condition préalable pour la cohésion sociale, la création d’emplois dans les régions agricoles, une valeur ajoutée agricole importante et la paix sociale;

S.  considérant que les surfaces agricoles utilisées pour une agriculture paysanne sont particulièrement importantes pour le bilan hydrologique, le climat, le budget carbone, la production d’aliments sains, la biodiversité, la fertilité des sols et la conservation du paysage; considérant que 20 % environ des terres agricoles européennes souffrent déjà du changement climatique et de l’érosion des sols par l’eau et le vent; et que, du fait du réchauffement de la planète, certaines régions, en particulier du sud de l’Europe, sont déjà exposées à la sécheresse, ce qui entraînera une dégradation des sols et limitera l’accès à des terres de bonne qualité et/ou pouvant être exploitées à des fins agricoles;

T.  considérant que les terres agricoles de qualité sont réparties de manière très déséquilibrée et qu’elles sont un facteur déterminant pour la qualité des denrées alimentaires, la sécurité alimentaire et le bien-être humain;

U.  considérant que la demande de denrée alimentaires, d’aliments pour animaux, d’énergies non fossiles et de matières premières renouvelables pour la production de carburants, les secteurs chimique et textile ainsi que la bioéconomie augmente en permanence, ce qui entraîne le renchérissement des prix des terrains;

V.  considérant que des petites et moyennes exploitations, une large diffusion de la propriété ou un statut du fermage adéquatement encadré et l’accès aux terres communales constituent les conditions idéales pour une gestion responsable et une exploitation durable des sols, et pour encourager l’identification et l’appropriation; que ces régimes fonciers encouragent l’ancrage et l’emploi des populations dans les régions rurales, que les infrastructures socioéconomiques de ces régions bénéficient de ce phénomène , de même que la sécurité et la souveraineté alimentaire ainsi que la préservation du mode de vie rural; que la répartition inégale de la terre et des ressources naturelles, ainsi que leur accès difficile, accentuent le risque de provoquer un clivage de la société, des déséquilibres sociaux, le recul de la qualité du travail et de vie et l’augmentation de la pauvreté; que la concentration élevée des pouvoirs dans les secteurs du marché européen des denrées alimentaires pourrait avoir une incidence négative sur les droits des consommateurs et réduire le revenu des agriculteurs; qu’à défaut de posséder leurs terres, les agriculteurs doivent disposer de contrats de mise à disposition des terres par les propriétaires d’une solidité et d’une durée suffisante pour rentabiliser leurs propres investissements;

W.  considérant que l’objectif de la politique agricole européenne est la préservation du modèle agricole européen fondé sur une agriculture multifonctionnelle, caractérisée par des exploitations familiales et coopératives propriétaires de leur capital; qu’une vaste diffusion de la propriété, la garantie des droits d’utilisation des terres et l’accès aux terres communales, exploitées selon un modèle écologiquement durable, garantissent l’accès aux ressources et une structure agricole diversifiée, dotée de traditions, de la sécurité juridique et d’une responsabilité au bénéfice de la société; que ce modèle préserve les produits traditionnels et la souveraineté alimentaire et qu’il favorise l’innovation tout en protégeant l’environnement et les générations futures;

X.  considérant que l’exploitation agricole de type familial, outre qu’elle produit des aliments, remplit aussi d’autres fonctions sociales et écologiques d’importance, qu’un modèle d’agriculture industrialisée est incapable d’assumer; que des petites et moyennes structures exploitées par des familles paysannes, seules ou avec le soutien des consommateurs, constitue aussi un modèle d’avenir du point de vue économique, étant donné que ces exploitations font souvent preuve d’une grande diversification, et donc d’une résilience élevée, et qu’elles créent une valeur ajoutée importante en milieu rural;

Y.  considérant que la concentration des surfaces agricoles a un effet négatif sur le développement des communautés rurales et la viabilité socioéconomique des régions rurales, qu’elle provoque la disparition d’emplois dans le secteur agricole et, partant, réduit le niveau de vie de la communauté agricole et la disponibilité alimentaire, créant ainsi des déséquilibres sur le plan du développement territorial et dans la sphère sociale;

Z.  considérant que la jeune génération est indispensable pour garantir le futur du secteur agricole, ainsi que sa capacité d’innovation et d’investissement, essentielles pour l’avenir du milieu rural, car elle est la seule à pouvoir enrayer le vieillissement de la population agricole, qui invalide le contrat entre les générations, et assurer la reprise des exploitations; et qu’il est néanmoins très difficile pour les jeunes agriculteurs et les nouveaux agriculteurs d’avoir accès aux surfaces agricoles, ce qui risque de rendre ce secteur moins attractif;

AA.  considérant que l’accès au foncier est la première condition fondamentale pour le lancement d’une exploitation agricole, qui génère emploi et développement social et économique;

AB.  considérant que dans de nombreuses régions, les prix des surfaces agricoles, tant à l’achat qu’à la location, ont atteint un niveau qui encourage la spéculation financière et rend économiquement impossible, pour bon nombre d’exploitants, de louer des terres de manière rentable ou de procéder aux expansions foncières indispensables à la survie de leur petite ou moyenne exploitation, sans parler de la fondation de nouvelles structures, du fait d’une pénurie de surfaces sur le marché;

AC.  considérant que les différences entre les États membres en matière de prix de terres agricoles continuent d’accentuer la concentration et que l’évolution du prix des terrains ne coïncide pas avec les tendances économique dans d’autres secteurs;

AD.  considérant que dans de nombreux États membres, les prix à l’achat, et parfois à la location, des surfaces agricoles ne sont plus alignés sur le rendement agricole réalisable au moyen de la production de denrées alimentaires;

AE.  considérant que les prix à la location ne sont souvent plus alignés sur le rendement agricole réalisable, ce qui rend les exigences de capital trop importantes et trop risquées pour les nouveaux agriculteurs;

AF.  considérant que la demande de denrée alimentaires et d’aliments pour animaux est renforcée par une demande croissant de matières premières pour la «bioéconomie», tels que les biocarburants et les matériaux destinés aux secteurs chimique et textile, ce qui rend l’achat de terres agricoles intéressant aux yeux des nouveaux opérateurs;

AG.  considérant, étant donné que certains États membres n’ont pas encore élaboré de politiques foncières efficaces, que les politiques et les subventions de l’Union peuvent dans certains cas favoriser les processus de concentration, étant donné que les paiements directs liés à la surface profitent bien plus aux grands exploitants et aux agriculteurs déjà solidement établis et que ces paiements participent au renchérissement des sols, contribuant ainsi à exclure du marché du foncier à la fois les jeunes à la recherche de terres pour s’installer ainsi que les petites et moyennes exploitations, qui disposent souvent de moins de moyens financiers; que cela signifie que les aides agricoles européennes, lesquelles sont notamment destinées aux petites et moyennes exploitations agricoles, bénéficient souvent à ceux qui ne devraient pas les recevoir;

AH.  considérant que la concentration des terres entre les mains d’un nombre restreint de producteurs perturbe les processus de production et de commercialisation et risque d’avoir un effet contreproductif sur l’agriculture au sein des États membres et/ou dans l’ensemble de l’Union;

AI.  considérant que la politique agricole commune réformée en 2013 a également permis de limiter ces effets en introduisant un paiement renforcé sur les premiers hectares et une dégressivité de ces soutiens ; que, par ailleurs, ces paiements directs liés à la surface remplissent un rôle essentiel pour assurer la compétitivité et la durabilité des exploitations agricoles européennes qui répondent à des standards de production élevés ;

AJ.  considérant que l’achat de terres agricoles représente un investissement sans risque dans bon nombre d’États membres, en particulier depuis la crise financière et économique de 2007; que ces terres sont achetées, dans des proportions alarmantes, par des investisseurs extra-agricoles et des spéculateurs financiers, tels que des fonds de pension, des assurances et des entreprises commerciales; et que la propriété de ces terres restera un investissement sûr même en cas d’inflation dans l’avenir;

AK.  considérant que plusieurs États membres ont adopté des mesures réglementaires pour empêcher que leurs terres arables soient achetées par des investisseurs; que des cas de fraude ont été enregistrés lors de l’acquisition de terres au moyen de «contrats de poche» dans lesquels la date de conclusion a été falsifiée; que, dans le même temps, d’importantes surfaces ont été acquises par des investisseurs;

AL.  considérant que l’apparition de bulles spéculatives sur les marchés des surfaces agricoles est lourde de conséquences pour l’agriculture et que la spéculation sur les marchés à termes des matières premières contribue à l’augmentation des prix des terres agricoles;

AM.  considérant que le phénomène de l’accaparement des terres est favorisé entre autres par la mondialisation croissante, la croissance démographique, la demande croissante en denrées alimentaires et de matières premières naturelles, ainsi que les effets pervers de la politique agricole;

AN.  considérant que la concentration non contrôlée des terres agricoles a pour effet que de vastes exploitations, qui visent à obtenir le maximum de bénéfices de la production, provoquent des dégâts importants et irréversibles pour l’environnement;

AO.  considérant que la concentration des terres agricoles a pour conséquence, entre autres, le transfert des profits et des cotisations fiscales depuis le milieu rural vers le siège de grands groupes;

AP.  considérant que les dispositions en vigueur concernant le plafonnement des paiements directs supérieurs à 150 000 euros ne s’appliquent pas lorsque des personnes morales possèdent plusieurs succursales agricoles qui perçoivent chacune moins de 150 000 euros en paiements directs;

AQ.  considérant que les sociétés anonymes se multiplient à un rythme inquiétant dans le secteur agricole; qu’elles présentent souvent des activités transfrontalières et que leur modèle d’entreprise relève souvent bien plus de la spéculation foncière que de la production agricole

AR.  considérant que les problèmes évoqués ci-dessus ne concernent pas uniquement les terres agricoles mais s’appliquent aussi, de manière similaire, aux forêts et aux zones de pêche;

1.  rappelle que la question foncière, sa gestion et les règles d’urbanisme relèvent de la compétence des États membres; en conséquence, invite les États membres à mieux prendre en compte la préservation du foncier agricole et sa maîtrise dans leurs politiques publiques, et à en faciliter la transmission;

2.  invite à la Commission à créer un observatoire de la collecte d’informations et de données sur le niveau de concentration des terres agricoles et les droits d’exploitation des terrains dans l’Union, en gardant à l’esprit que ses missions devraient être les suivantes: relever les prix d’achat et de location ainsi que les pratiques commerciales et des propriétaires et des locataires; surveiller la perte de terres agricoles du fait d’un usage différent ainsi que l’évolution de la fertilité et de l’érosion des sols; publier des rapports périodiques;

3.  estime que les États membres devraient se communiquer régulièrement et communiquer régulièrement à la Commission les informations relatives à leur législation nationale relative à l’utilisation des terres, tout particulièrement les affaires relatives à l’acquisition de terres à des fins spéculatives;

4.  invite la Commission à constituer un groupe de travail à haut niveau pour examiner le problème de la concentration foncière, effectuer une étude sur les effets des mesures politiques adoptées par l’Union et les États membres sur la concentration foncière et la production agricole et à analyser les risques d’une telle concentration pour la sécurité de l’approvisionnement en aliments, l’emploi, l’environnement, la qualité des sols et le développement rural;

5.  invite les États membres à orienter l’utilisation des sols de façon à tirer parti des possibilités existantes, notamment la fiscalité, les aides et les financements de la PAC, pour maintenir sur tout le territoire de l’Union le modèle d’agriculture fondé sur des exploitations agricoles familiales;

6.  demande à la Commission et aux États membres de procéder à la collecte régulière de données de qualité comparable sur le montant des loyers et le prix des terres, notamment lors de leur acquisition au moyen de la vente de parts, ainsi que sur les transactions de surfaces importantes, la perte et les violations des droits d’exploitation et les hausses de prix spéculatives dans l’ensemble des États membres; invite la Commission à publier des lignes directrices sur l’harmonisation des pratiques comptables et à promouvoir le partage de pratiques exemplaires en matière de législation nationale afin de recenser les mesures de protection des terres et activités agricoles;

7.  juge nécessaire que les États membres procèdent à un inventaire harmonisé des surfaces agricoles de manière à obtenir une vue d’ensemble actuelle, détaillée et compréhensible - dans le respect des droits des parties concernées en matière de protection des données - des droits de propriété et de l’utilisation des terres agricoles qui serait présentée dans une base de données numérique et anonyme librement accessible;

8.  invite en outre la Commission à adresser régulièrement un rapport au le Conseil et au Parlement sur la situation de l’utilisation des terres et sur la structure, les prix et les politiques nationales en matière de propriété et de location des terres agricoles, et à faire rapport au Comité de la sécurité alimentaire mondiale sur la mise en œuvre dans l’Union des directives volontaires pour une gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, aux pêches et aux forêts du Comité pour la sécurité alimentaire mondiale;

9.  relève que les programmes destinés à réorganiser les propriétés fragmentées à l’aide de différentes méthodes dans le cadre d’une gestion coordonnée des surfaces, dans le respect des spécificités locales ou régionales, constituent des instruments indispensables à l’amélioration de la structure agricole et à l’apaisement des conflits liés à l’exploitation des terres; recommande, à cet égard, lorsque la réorganisation des terres passe par la mise en location, que le prix de location fixé tienne compte de la capacité de production et de la rentabilité, en tant que facteurs les plus appropriés dans l’économie agricole, et invite les États membres à partager leurs expériences en matière de gestion des terres agricoles;

10.  est convaincu qu’une politique des marchés fonciers bien conçue et coordonnée, mise en œuvre de concert avec l’aménagement du territoire aux échelons régional et local, pourrait contribuer à réduire le nombre des acquisitions de terres agricoles par des acteurs extra-agricoles;

11.  prend acte du fait que si la politique foncière est principalement du ressort des États membres, elle peut être influencée par la PAC ou les mesures adoptées dans des domaines d’actions pertinents, avec des conséquences importantes sur la compétitivité des exploitations agricoles sur le marché unique; estime que la politique foncière doit contribuer à la diffusion vaste, juste et équitable des droits d’utilisation et d’accès à la terre, ou d’un statut du fermage adéquatement encadré, du fait de ses conséquences directes sur le mode de vie rural, les conditions de travail et la qualité de vie; rappelle la fonction sociale importante des régimes fonciers et de la gestion du foncier au fil des générations, étant donné que la disparition d’exploitations et de postes de travail provoque le déclin de l’agriculture paysanne en Europe, la dégradation des régions rurales et, par conséquent, des évolutions structurelles indésirables à l’échelle de la société;

12.  recommande aux États membres, afin de réaliser les objectifs de la PAC, de donner la priorité aux producteurs locaux à petite et moyenne échelle, ainsi qu’aux nouveaux et jeunes agriculteurs – dans le respect de l’égalité hommes-femmes – pour l’acquisition et la location de terres agricoles, y compris des droits de préemption le cas échéant, en particulier compte tenu d’un intérêt croissant des acteurs extra-agricoles pour l’achat d’de ces terres, étant donné que la propriété d’une part aussi importante que possible des surfaces de production profite au développement durable et sûr des exploitations agricoles; recommande aux États membres de promouvoir les exploitations agricoles familiales à petite échelle et les modes de production durables;

13.  rappelle que des coûts d’investissement élevés constituent un obstacle supplémentaire pour l’achat et la location de surfaces agricoles pour les exploitations agricoles familiales et coopératives à petite ou moyenne échelle;

14.  prend acte de l’importance des exploitations agricoles familiales pour la vie rurale, étant donné qu’elles jouent un rôle actif dans les structures économiques des zones rurales en préservant le patrimoine culturel et la vie rurale, en accroissant la vie sociale, en usant des ressources naturelles de façon durable, en produisant une quantité suffisante d’aliments sains et de qualité et en assurant une large dissémination de la propriété dans ces zones; souligne les problèmes qui se posent lors de la transmission intergénérationnelle d’exploitations, en particulier lors de transmissions hors de la famille, et invite les États membres à collecter des données sur ces phénomènes et à définir le cadre juridique qui permettra de résoudre ces difficultés;

15.  rappelle l’existence de mesures d’incitation prévues pour les jeunes agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune, dont l’objectif est de favoriser leur accès à l’agriculture ; demande par conséquent l’adoption d’une approche globale qui contribue à permettre la reprise ou la création d’exploitations par des jeunes agriculteurs, des femmes ou des personnes qui souhaitent s’installer dans la profession; constate, toutefois, que les nouveaux agriculteurs sont toujours confrontés à des obstacles structurels tels que le prix élevé des terrains ou la forte fiscalité appliquée aux transmissions d’exploitations hors de la famille;

16.  souligne que les politiques structurelles européennes sont d’une grande pertinence pour la promotion des espaces ruraux, par exemple pour le soutien spécifique apporté aux petites et moyennes exploitations individuelles et coopératives, aux jeunes et en particulier aux femmes en ce qui concerne l’accès aux terres agricoles;

17.  souligne la difficulté de l’accès au crédit en vue d’acheter des terres ou des droits d’utilisation de terres, en particulier pour les nouveaux et jeunes agriculteurs; invite la Commission à élaborer les instruments pertinents dans le cadre de la PAC et des politiques connexes de sorte à faciliter leur lancement dans l’agriculture en leur garantissant un accès équitable à un financement viable;

18.  est d’avis que les communautés locales doivent être associées aux décisions relatives à l’utilisation des terres;

19.  demande aux États membres, compte tenu, d’une part, de l’accès limité aux terres agricoles dans les zones rurales et, d’autre part, de l’intérêt croissant suscité par l’agriculture urbaine et péri-urbaine, d’instaurer des mesures d’incitation pour le développement de fermes urbaines ainsi que d’autres formes d’agriculture participative et de partage des terres;

20.  encourage les États membres, eu égard au fait que les terres agricoles sont le fondement de la production alimentaire, de la pérennité des écosystèmes et du dynamisme des zones rurales, à redoubler d’efforts pour favoriser le transfert de connaissances par l’intermédiaire de projets de recherche et d’innovation visant à améliorer la qualité des sols grâce à l’application de techniques agri-environnementales;

21.  invite les États membres à concevoir leur politique de marché foncier de manière à permettre l’accès à la propriété dans des conditions financières en adéquation avec l’activité agricole et à surveiller les prix et les loyers des terres agricoles; demande en outre que les transactions portant sur des surfaces agricoles soient soumises à une procédure ex-ante de contrôle de la conformité avec la législation foncière nationale, à l’image des fusions, des divisions et de la création de fondations; estime qu’il serait judicieux de renforcer le contrôle des contrats de location et d’introduire une obligation de notification assortie de sanctions, étant donné que la location est souvent une première étape vers l’achat; leur recommande également de garantir que leurs politiques sur les baux à loyer prévoient l’obligation pour les preneurs de préserver la fonction agricole des terrains; est d’avis que la politique des marchés fonciers devrait contribuer à empêcher toute position dominante sur les marchés fonciers;

22.  incite les États membres à faire usage des instruments de régulation du marché foncier déjà appliqués avec succès dans plusieurs États membres, dans le respect des dispositions des traités, comme par exemple l’obligation d’obtenir une autorisation de l’État pour acheter ou louer des terres, le droit de préemption, l’obligation pour les prenants d’exploiter soi-même le terrain, la restriction du droit d’achat des personnes morales, le plafonnement du nombre d’hectares pouvant être achetés, la priorisation des agriculteurs, la constitution de réserves foncières, l’indexation des prix sur le rendement agricole, etc.;

23.  souligne que les systèmes judiciaires nationaux doivent protéger les droits de toutes les parties au regard des irrégularités pouvant entacher les contrats de bail, et que les autorités nationales devraient prendre des mesures pour éliminer toutes les failles juridiques favorisant les contrats abusifs;

24.  rappelle les mesures positives prises par certains États membres dans le contexte de la réglementation de leur marché foncier afin d’éviter les opérations spéculatives lors de la vente de terres; souhaite rappeler aux États membres que la législation fiscale leur fournit un levier efficace de réglementation du marché foncier;

25.  invite les États membres à concevoir des politiques de réglementation du marché foncier de manière à freiner l’augmentation du prix d’achat et de location des surfaces agricoles; demande en outre que ces prix soient soumis au même processus d’approbation que les fusions, les divisions et la création de fondations; estime qu’il serait judicieux de renforcer le contrôle des contrats de location et d’introduire une obligation de notification assortie de sanctions, étant donné que la location est souvent une première étape vers l’achat;

26.  appelle de ses vœux l’établissement ou l’appui par les États membres de structures appropriées de gestion des terres, avec une participation de l’État et une supervision publique;

27.  convie les États membres et la Commission à soutenir toutes les actions innovantes de partage de foncier favorables à l’installation de jeunes agriculteurs et en particulier au travers de fonds d’investissements solidaires qui permettent à des épargnants de placer leurs fonds de manière utile à la société pour venir en aide à des jeunes qui ne disposent pas suffisamment de ressources pour acquérir de la terre et se lancer dans les métiers de l’agriculture;

28.  demande l’application par l’Union et ses États membres des directives volontaires pour une gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, aux pêches et aux forêts du Comité de la sécurité alimentaire mondiale, ratifiées par tous les États membres, dans l’intérêt d’une vision commune et claire de la structure agricole européenne; invite en particulier les États membres à envisager les objectifs sociaux, économiques et environnementaux de manière plus vaste et à lutter contre les effets indésirables de la spéculation et de la concentration foncières pour les communautés locales lorsqu’ils prennent des mesures relatives à l’utilisation et au contrôle des ressources étatiques; demande aux États membres de rapporter à la Commission comment ils ont utilisé et appliqué ces directives dans leurs politiques sur le régime foncier;

29.  propose, à cet égard, que la Commission adopte des recommandations sur la gouvernance foncière dans l’Union s’inscrivant dans le droit fil de l’esprit des directives volontaires et tenant compte des cadres transversaux de l’Union en matière d’agriculture, d’environnement, de marché intérieur et de cohésion territoriale;

30.  estime que les paiements directs seraient économiquement plus efficaces s’ils étaient calculés sur la base des avantages environnementaux et socio-économiques collectifs qu’apportent une exploitation agricole plutôt que sur la seule base de la surface couverte;

31.  relève la possibilité pour les États membres de réduire d’au moins 5 % de la partie du montant des paiements directs qui dépasse 150 000 euros, tel que le prévoit l’article 11 du règlement (UE) nº 1307/2013 relatif aux paiements directs;

32.  estime qu’il est nécessaire, dans le cadre de la PAC réformée, d’introduire des plafonds et de moduler le régime des paiements directs de façon à accroître le poids des premiers hectares et de faciliter les investissements et l’attribution d’aides directes aux petites exploitations agricoles; invite la Commission à introduire un mécanisme plus efficace de redistribution des aides afin d’empêcher la concentration foncière;

33.  incite les États membres à faire un usage renforcé des possibilités de plafonnement et de redistribution des fonds de la PAC dont ils disposent déjà, notamment la possibilité de lier 30 % des paiements directs devant être versés au premier hectare, afin d’appuyer les exploitations familiales et à petite échelle dans la mesure où ils observent dans le même temps les exigences visées aux articles 41 et 42 du règlement relatif aux paiements directs. propose que les avantages réservés aux premiers hectares soient calculés par société mère et non par exploitation; demande donc à la Commission de publier, en plus des données relatives aux propriétaires d’exploitations qui bénéficient des subventions au titre de la PAC, les données relatives aux bénéficiaires, comme par exemple les propriétaires terriens et les sociétés mères;

34.  souligne l’importance d’une définition homogène à l’échelle européenne de l’«agriculteur actif», clairement liée à une notion d’activité professionnelle au sein d’une exploitation agricole et établissant une distinction précise entre les surfaces admissibles et celles qui ne le sont pas (aéroports, zones industrielles ouvertes, parcours de golf, par exemple); demande à la Commission de garantir que seuls les agriculteurs actifs bénéficient d’une aide directe;

35.  invite en outre la Commission à passer en revue l’ensemble des domaines d’action, tels que l’agriculture, l’énergie, l’environnement, le développement régional, la mobilité, la finance et l’investissement, afin de déterminer s’ils favorisent ou entravent la concentration des surfaces agricoles dans l’Union et à lancer un processus participatif et inclusif en tenant compte des agriculteurs, de leurs organisations et d’autres acteurs pertinents de la société civile, afin d’évaluer la situation actuelle de la gestion des terres agricoles à la lumière des directives volontaires pour une gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, aux pêches et aux forêts du Comité pour la sécurité alimentaire mondiale;

36.  recommande aux États membres de procéder à une évaluation ciblée de la mise en œuvre de la PAC actuelle à l’échelle nationale afin de déceler les effets indésirables de la concentration des terres;

37.  réaffirme les conclusions de la Commission selon lesquelles la terre est une ressource limitée, déjà mise à mal par le changement climatique, l’érosion des sols et une utilisation excessive ou le changement d’affectation, et soutient par conséquent les mesures écosociales de protection de la terre tout en soulignant que la politique foncière est une compétence exclusive des États membres;

38.  demande que les surfaces agricoles bénéficient d’une protection particulière afin que les États membres, en coordination avec les autorités locales et les organisations d’agriculteurs, puissent réglementer la vente, l’utilisation et la location des terres agricoles afin de garantir la sécurité alimentaire dans le respect des traités et de la jurisprudence de la Cour de justice en matière de régime foncier et d’accès à la terre ainsi que des quatre libertés fondamentales de l’Union et de l’intérêt public;

39.  encourage la Commission, dans l’intérêt de la transparence interinstitutionnelle, à garantir au Parlement un meilleur accès aux documents concernant les procédures d’infraction et préliminaires relatives à la réglementation du marché foncier par les États membres;

40.  invite la Commission, conjointement avec les États membres et les parties intéressées, à élaborer et à présenter un catalogue de critères clairs et compréhensibles, notamment pour les transactions foncières sur les marchés de capitaux, qui assurerait des conditions équitables et permettrait aux États membres de déterminer clairement quelles sont les mesures de réglementation du marché des sols autorisées, compte tenu de l’intérêt public et des quatre libertés de l’Union, en vue de faciliter l’accès à l’acquisition de terres à usage agricole ou forestier pour les agriculteurs; demande à la Commission d’envisager de mettre fin aux procédures actuelles visant à contrôler si la législation relative au marché foncier en vigueur dans les États membres respecte le droit de l’Union européenne jusqu’à la publication du catalogue de critères susmentionné;

41.  demande à la Commission de sensibiliser les États membres à la lutte contre l’évasion fiscale, la corruption et les pratiques illicites (telles que les «contrats de poche») dans le contexte des transactions foncières et de les soutenir dans la lutte contre ce phénomène; attire l’attention sur les abus actuellement examinés par les autorités judiciaires dans certains États membres concernant les procédures d’acquisition de terres agricoles;

42.  salue la proposition de simplification de la politique agricole commune, et notamment les mesures destinées à réduire les coûts et les démarches administratives pour les exploitations familiales et les micro-, petites et moyennes entreprises des zones rurales;

43.  invite la Commission à préserver, lors de la définition du projet de politique agricole commune après 2020, les mesures de lutte contre la concentration des terres agricoles et à définir des mesures supplémentaires destinées à soutenir les micro-, petites et moyennes entreprises de production;

44.  charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission ainsi qu’aux gouvernements et aux parlements des États membres.

  • [1]  Étude «Extent of Farmland Grabbing in the EU» (Étendue de l’accaparement de terres agricoles dans l’UE) de la commission de l’agriculture et du développement rural du Parlement européen, page 24 (PE540.369).
  • [2]  Idem.
  • [3]  Politique relative au marché foncier agricole: État des lieux et options stratégiques, rapport du groupe de travail du gouvernement fédéral et des Länder sur la politique du marché foncier, conformément à la direction des directeurs des administrations agricoles des Länder du 16 janvier 2014 (mars 2015), p. 37.

EXPOSÉ DES MOTIFS

La concentration des terres, une question européenne

Les phénomènes d’accaparement et de concentration des terres ont longtemps été associés aux pays du Sud du monde. Toutefois, à bien y regarder, force est de constater que la concentration des terres agricoles est aussi à l’œuvre en Europe depuis de nombreuses années.

Il y a concentration des terres lorsque le commerce des terrains à usage agricole est caractérisé par l’achat de surfaces d’une taille inhabituelle en Europe.

Les chiffres de 2010 montrent que dans l’Europe des 27, près de 3 % des exploitations contrôlaient déjà 50 % des surfaces agricoles. À l’inverse, en 2012, 80 % des exploitations ne possédaient que 12 % des terres.

Le degré de concentration des terres agricoles en Europe s’approche de la situation de partage inéquitable des terres que connaissent par exemple le Brésil, la Colombie et les Philippines.

Les terres agricoles n’ont rien d’une marchandise banale car les terrains ne sont pas reproductibles et que l’accès à ces surfaces constitue un droit de l’homme. Leur concentration entre les mains de quelques rares acteurs a des répercussions importantes sur le plan social, culturel, économique et politique dans tous les États membres.

Tout comme la concentration des capitaux, une concentration excessive des terres agricoles divise la société, déstabilise le milieu rural et met en péril la sécurité alimentaire, ce qui nuit aux objectifs écologiques et sociaux européens.

De manière générale, le marché foncier européen manque de données complètes, transparentes, à jour, de qualité et uniformes dans toute l’Union sur les mouvements en valeur et en volume, tant pour l’achat de terres et de parts que pour leur location.

Ses conséquences pour l’agriculture en Europe

Dans de nombreuses régions d’Europe, le prix d’achat et de location des surfaces agricoles est tel que de nombreuses exploitations sont dans l’impossibilité de se protéger contre la perte de surfaces louées ou d’acquérir des terres supplémentaires afin de procéder aux expansions foncières indispensables à la survie de leur exploitation. Outre la pénurie importante de terres à vendre, les prix à la location ne sont plus alignés sur le rendement agricole réalisable, ce qui rend les exigences de fonds propres trop importantes et trop risquées pour les nouveaux agriculteurs.

Son incidence sur la société

La concentration des terres affecte en premier lieu les exploitants et les travailleurs agricoles. Ses implications pour l’ensemble de la société ne se manifestent que dans un second temps.

La propriété est la condition idéale pour une utilisation responsable et une gestion durable des sols. Elle favorise l’attachement et contribue ainsi à l’ancrage des populations dans les régions rurales.

La diffusion importante de la propriété des terres constitue un principe élémentaire essentiel de l’économie sociale de marché et une condition préalable importante pour la cohésion d’une économie nationale. En plus d’être l’élément indispensable à la production d’une alimentation humaine et animale de qualité, les surfaces à usage agricole sont aussi particulièrement importantes pour le bilan hydrologique, la biodiversité et la fertilité des sols, qui souffrent déjà du changement climatique et de l’érosion.

L’origine et les enjeux de la concentration agricole dans l’Union européenne

Même si le prix des terres agricoles diffère entre les États membres, leur concentration est en progression constante dans toute l’Europe et se répercute négativement sur les agriculteurs.

Dans l’Union, la concentration des terres s’explique de plusieurs manières. Ainsi, la demande croissante de denrées alimentaires et d’aliments pour animaux, de matières premières renouvelables pour les secteurs des carburants, de la chimie et du textile ainsi que d’énergie non fossiles font de l’achat de terres agricoles l’un des placements les plus cotés et sûrs pour les investisseurs du monde entier.

La faiblesse persistante des taux d’intérêts depuis la crise financière est l’une des raisons de la «ruée vers les actifs réels», c’est-à-dire vers la propriété foncière. De ce fait, les investisseurs extra-agricoles s’intéressent eux aussi à l’achat de surfaces.

En plus de la concentration, l’utilisation extra-agricole des surfaces, notamment l’imperméabilisation, l’urbanisation, le tourisme et les projets d’infrastructures, menace elle aussi les terres agricoles.

En outre, certains secteurs politiques et subventions de l’Union soutiennent les efforts d’expansion des exploitations agricoles ou attirent les investisseurs extra-agricoles. Les paiements directs liés à la surface, par exemple, avantagent nettement les exploitations les plus importantes.

Il en va de même pour certains programmes de soutien de l’Union ou des États membres, qui favorisent par exemple les énergies non fossiles et renforcent ainsi la concurrence entre les denrées alimentaires, les aliments pour animaux et les biocarburants.

La concentration des terres progresse dans une mesure et à une vitesse alarmantes, notamment en Roumanie, en Hongrie et en Bulgarie, mais des pays comme l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne ne sont pas épargnés.

De nombreux États membres ont détecté ce problème et tentent d’inverser la tendance au moyen de mesures législatives, ce qui entraîne souvent un conflit avec l’une des quatre libertés européennes fondamentales: la libre circulation des capitaux, Cette liberté en vigueur dans toute l’Europe, qui interdit la discrimination des ressortissants de pays tiers, atteint ses limites dans le contexte des transactions foncières.

L’accès aux surfaces agricoles est essentiel

La concentration des terres agricoles dans l’Union se répercute de multiples manières sur la société et sur les agriculteurs en activité. La capacité du secteur agricole à durer dans le temps dépend en grande partie de l’accès des jeunes aux surfaces agricoles, car leur propension à innover et à investir déterminera en grande partie l’avenir du milieu rural. Ils sont les seuls à pouvoir enrayer le vieillissement de la population agricole, assurer la reprise des exploitations et garantir l’achèvement d’un secteur agricole multifonctionnel, composé d’exploitations familiales et coopératives propriétaires de leurs terres.

INFORMATIONS SUR L’ADOPTIONPAR LA COMMISSION COMPÉTENTE AU FOND

Date de l’adoption

21.3.2017

 

 

 

Résultat du vote final

+:

–:

0:

34

2

6

Membres présents au moment du vote final

John Stuart Agnew, Clara Eugenia Aguilera García, Eric Andrieu, José Bové, Daniel Buda, Nicola Caputo, Michel Dantin, Jean-Paul Denanot, Albert Deß, Diane Dodds, Herbert Dorfmann, Norbert Erdős, Luke Ming Flanagan, Martin Häusling, Esther Herranz García, Jan Huitema, Peter Jahr, Ivan Jakovčić, Elisabeth Köstinger, Zbigniew Kuźmiuk, Philippe Loiseau, Mairead McGuinness, Nuno Melo, Ulrike Müller, James Nicholson, Maria Noichl, Marijana Petir, Laurenţiu Rebega, Jens Rohde, Maria Lidia Senra Rodríguez, Ricardo Serrão Santos, Czesław Adam Siekierski, Tibor Szanyi, Marco Zullo

Suppléants présents au moment du vote final

Paul Brannen, Angélique Delahaye, Maria Heubuch, Karin Kadenbach, Anthea McIntyre, Massimo Paolucci, John Procter, Molly Scott Cato, Estefanía Torres Martínez, Vladimir Urutchev

VOTE FINAL PAR APPEL NOMINALEN COMMISSION COMPÉTENTE AU FOND

34

+

ALDE

Jan Huitema, Ivan Jakovčić, Ulrike Müller, Jens Rohde

ECR

Zbigniew Kuźmiuk

EFDD

Marco Zullo

ENF

Laurenţiu Rebega

GUE/NGL

Luke Ming Flanagan, Maria Lidia Senra Rodríguez, Estefanía Torres Martínez

NI

Diane Dodds

PPE

Daniel Buda, Michel Dantin, Herbert Dorfmann, Norbert Erdős, Esther Herranz García, Elisabeth Köstinger, Nuno Melo, Marijana Petir, Czesław Adam Siekierski, Vladimir Urutchev

S&D

Clara Eugenia Aguilera García, Eric Andrieu, Paul Brannen, Nicola Caputo, Jean-Paul Denanot, Karin Kadenbach, Maria Noichl, Massimo Paolucci, Ricardo Serrão Santos, Tibor Szanyi

Verts/ALE

José Bové, Martin Häusling, Molly Scott Cato

2

-

EFDD

John Stuart Agnew

ENF

Philippe Loiseau

6

0

ECR

Anthea McIntyre, James Nicholson, John Procter

PPE

Albert Deß, Peter Jahr, Mairead McGuinness

Légende des signes utilisés:

+  :  pour

-  :  contre

0  :  abstention