RAPPORT Vers une stratégie extérieure de l’Union de lutte contre les mariages précoces et forcés - prochaines étapes
24.5.2018 - (2017/2275(INI))
Commission des affaires étrangères
Rapporteur: Charles Goerens
PROPOSITION DE RÉSOLUTION DU PARLEMENT EUROPÉEN
vers une stratégie extérieure de l’Union de lutte contre les mariages précoces et forcés - prochaines étapes
Le Parlement européen,
– vu sa résolution du 4 octobre 2017 sur la nécessité de mettre fin aux mariages d’enfants[1],
– vu la Déclaration universelle des droits de l’homme, et en particulier son article 16, ainsi que tous les autres traités et instruments des Nations unies relatifs aux droits de l’homme,
– vu l’article 23 du pacte international relatif aux droits civils et politiques,
– vu l’article 10, paragraphe 1, du pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels,
– vu la convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 20 novembre 1989, et ses quatre principes fondamentaux de non-discrimination (article 2), d’intérêt supérieur de l’enfant (article 3), de survie, de développement et de protection (article 6) et de participation (article 12), ainsi que sa résolution du 27 novembre 2014 sur le 25e anniversaire de la convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant[2],
– vu l’article 16 de la convention des Nations unies sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes,
– vu la convention des Nations unies sur le consentement au mariage, l’âge minimum du mariage et l’enregistrement des mariages,
– vu les résolutions de l’Assemblée générale des Nations unies du 18 décembre 2014 et du 19 décembre 2016 sur les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés,
– vu la résolution 29/8 du Conseil des droits de l’homme des Nations unies du 2 juillet 2015 sur le renforcement des mesures visant à prévenir et éliminer les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés, sa résolution 24/23 du 9 octobre 2013 sur le renforcement des mesures visant à prévenir et éliminer les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés: défis, réalisations, bonnes pratiques et problèmes de mise en œuvre et sa résolution 35/16 du 22 juin 2017 sur les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés dans les situations de crise humanitaire,
– vu la position adoptée par la Conférence des chefs d’État et de gouvernement de l’Union africaine concernant le mariage d’enfants, qui s’est tenue en juin 2015 à Johannesbourg (Afrique du Sud),
– vu l’Observation générale conjointe sur le mariage précoce par la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) et le comité de l’Union africaine sur les droits et le bien-être de l’enfant,
– vu les articles 32 et 37 et l’article 59, paragraphe 4, de la convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (convention d’Istanbul),
– vu le rapport de 2012 du Fonds des Nations unies pour la population (FNUAP) intitulé «Marrying Too Young – End Child Marriage» (Se marier trop jeune – Mettre un terme aux mariages d’enfants),
– vu l’article 3 du traité sur l’Union européenne (traité UE),
– vu la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, et notamment son article 9,
– vu les conclusions du Conseil du 26 octobre 2015 sur le plan d’action 2016-2020 pour l’égalité des sexes,
– vu les conclusions du Conseil du 3 avril 2017 sur la promotion et protection des droits de l’enfant,
– vu les principes fondamentaux consacrés dans la communication du Service européen pour l’action extérieure (SEAE) de 2016 sur une stratégie globale pour la politique étrangère et de sécurité de l’Union européenne,
– vu le cadre stratégique de l’Union en matière de droits de l’homme et de démocratie et le plan d’action de l’Union en faveur des droits de l’homme et de la démocratie, adoptés par le Conseil le 25 juin 2012[3]; vu le plan d’action en faveur des droits de l’homme et de la démocratie pour la période 2015-2019, adopté par le Conseil le 20 juillet 2015[4]; vu le document de travail conjoint des services de la Commission et de la haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité intitulé «EU Action Plan on Human Rights and Democracy (2015-2019): Mid-Term Review June 2017» (Plan d’action de l’Union en faveur des droits de l’homme et de la démocratie (2015-2019): examen à mi-parcours en juin 2017) (SWD(2017)0254),
– vu les lignes directrices révisées de l’Union européenne du 6 mars 2017 pour la promotion et la protection des droits de l’enfant intitulées «Ne laisser aucun enfant derrière soi»,
– vu le consensus européen sur le développement du 7 juin 2017, qui souligne l’engagement de l’Union européenne à intégrer les droits de l’homme et l’égalité des genres dans le droit fil du programme de développement durable à l’horizon 2030,
– vu l’article 52 de son règlement intérieur,
– vu le rapport de la commission des affaires étrangères et l’avis de la commission des droits de la femme et de l’égalité des genres (A8-0187/2018),
A. considérant que les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés constituent une grave violation des droits de l’homme, et en particulier des droits des femmes, y compris du point de vue de l’égalité, de l’autonomie et de l’intégrité corporelle, de l’accès à l’éducation, ainsi que de la suppression de l’exploitation et de la discrimination, et sont un problème qui non seulement existe dans les pays tiers, mais est aussi susceptible d’exister dans certains États membres; considérant que l’éradication de ces pratiques figure parmi les priorités de l’action extérieure de l’Union européenne dans le domaine de la promotion des droits des femmes et des droits de l’homme; considérant que différentes chartes et lois internationales interdisent le mariage d’enfants mineurs, telles que la convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant et ses protocoles facultatifs; considérant que les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés ont des effets très négatifs sur la santé physique et mentale et le développement personnel des personnes concernées, sur les enfants issus de ces mariages et, par conséquent, sur la société dans son ensemble; considérant que les mariages d’enfants sont une forme de mariages forcés, puisque les enfants n’ont pas la capacité de donner leur consentement éclairé, libre et entier pour leur mariage ou le moment de procéder à celui-ci; considérant que les enfants font partie d’un groupe très vulnérable;
B. considérant que l’Union européenne s’attache à promouvoir les droits de l’enfant, et que les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés constituent une violation de ces droits; considérant que l’Union européenne s’est engagée à protéger et à promouvoir globalement les droits de l’enfant dans sa politique extérieure;
C. considérant qu’aucun mariage ne peut être légalement contracté sans le consentement libre et entier des deux parties et par toute personne n’ayant pas atteint l’âge minimum du mariage;
D. considérant que les mariages d’enfants sont un problème d’ordre mondial qui va au-delà des frontières, des cultures et des religions; considérant qu’il n’est pas rare de rencontrer des jeunes filles mariées dans toutes les régions du monde, du Moyen-Orient à l’Amérique latine, de l’Asie à l’Europe, et de l’Afrique à l’Amérique du Nord; considérant que les mariages d’enfants touchent aussi les garçons, mais dans une moindre mesure que les filles;
E. considérant qu’à ce jour, plus de 750 millions de femmes ont été mariées avant l’âge de 18 ans, dont 250 millions avant l’âge de 15 ans; considérant que, de nos jours, environ 40 millions de filles âgées de 15 à 19 ans sont mariées ou vivent en concubinage; considérant que, chaque année, environ 15 millions de filles supplémentaires se marient avant l’âge de 18 ans, dont 4 millions avant l’âge de 15 ans; considérant qu’environ 156 millions de garçons ont été mariés avant l’âge de 18 ans, dont 25 millions avant l’âge de 15 ans; considérant que les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés sont plus fréquents dans les régions pauvres sous-développées; considérant que le nombre de mariages d’enfants, de mariages précoces et de mariages forcés tend à augmenter avec la croissance de la population mondiale; considérant qu’un rapport récent de l’UNICEF estime qu’en 2050, environ 1,2 milliard de jeunes filles pourraient avoir été mariées avant l’âge de 18 ans; considérant que parmi les dix pays ayant les taux les plus élevés de mariages d’enfants, neuf sont considérés comme des États fragiles;
F. considérant que les causes profondes du mariage d’enfants sont en général la pauvreté, le manque d’éducation, des stéréotypes sexuels et des inégalités entre les hommes et les femmes très fortement ancrés, le sentiment que le mariage apporte une «protection», l’honneur de la famille et le manque de protection efficace des droits de l’enfant, ainsi que des pratiques, perceptions et coutumes préjudiciables et des normes discriminatoires; considérant que ces facteurs sont souvent aggravés par un accès limité à une éducation de qualité et à des perspectives d’emploi, et consolidés par certaines normes sociales enracinées de mariages d’enfants, précoces et forcés;
G. considérant que les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés donnent lieu à des taux de mortalité maternelle et infantile élevés, à un faible recours à la planification familiale et à un risque élevé de grossesses précoces et non désirées avec des risques accrus pour la santé et un accès inadéquat ou inexistant aux informations sur les services de santé sexuelle et génésique, et sonnent en général la fin des études pour les filles; considérant que certains pays interdisent aux filles enceintes et aux jeunes mères de retourner en classe; considérant que le mariage d’enfants peut également aboutir au travail forcé, à l’esclavage et à la prostitution;
H. considérant que, si la convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant insiste sur l’importance de mettre en place des mesures encourageant une fréquentation régulière de l’école, de nombreuses filles ne sont pas scolarisées pour plusieurs raisons, par exemple en raison de l’inaccessibilité ou du coût élevé de l’école; considérant que les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés ont des effets dévastateurs disproportionnés pour leurs victimes qui se feront ressentir durant toute leur vie et privent très souvent les personnes concernées de la possibilité de poursuivre leurs études, les filles ayant tendance à abandonner l’école peu avant le mariage ou peu après; considérant que l’éducation, dont l’éducation sexuelle, est un moyen efficace pour prévenir les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés, étant donné que l’accès à l’éducation et à la formation contribue à l’émancipation et aux perspectives d’emploi tout en promouvant la liberté de choix, le droit à l’autodétermination et la participation active à la société, ce qui permet aux personnes concernées de s’émanciper d’une quelconque tutelle portant atteinte à leurs droits, sans quoi la situation économique, légale, sanitaire et sociale des femmes et des filles ainsi que le développement de la société dans son ensemble restent compromis;
I. considérant que chaque année, 17 millions de filles mineures mettent un enfant au monde, ce qui les force à assumer des responsabilités d’adultes et met en péril leur santé, leur éducation et leurs perspectives économiques; considérant que les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés exposent les jeunes filles à des grossesses précoces comportant des risques et difficultés considérables pendant la grossesse ainsi qu’au moment de l’accouchement, notamment du fait d’un accès à l’encadrement médical, dont des centres médicaux de qualité, sinon inexistant, du moins très insuffisant, entraînant fréquemment la mortalité et la morbidité maternelle; considérant qu’il y a un risque plus élevé de contracter des infections transmissibles, y compris le VIH; considérant que, dans les pays à revenu faible et intermédiaire, les complications lors des grossesses et des accouchements sont la principale cause de décès des jeunes filles entre 15 et 19 ans; considérant que le taux de mortalité néonatale est supérieur d’environ 50 % chez les nourrissons nés de mères adolescentes et que ces nourrissons ont un risque plus important de problèmes de développement physique et cognitif; considérant que le fait d’être souvent enceinte à un âge précoce peut également entraîner toute une série de complications à long terme, voire la mort;
J. considérant que les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés sont une violation des droits de l’enfant et une forme de violence à l’encontre des enfants et que, dès lors, les États ont l’obligation d’enquêter sur les allégations, de poursuivre les auteurs et d’accorder réparation aux victimes, qui sont principalement des femmes et des filles; considérant que ces mariages doivent être condamnés et ne peuvent être justifiés par aucune raison culturelle ou religieuse; considérant que les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés augmentent le risque de violences sexistes et sont souvent à l’origine de violences conjugales et domestiques ainsi que d’abus sexuels, physiques, psychologiques, émotionnels et financiers et d’autres pratiques préjudiciables aux filles et aux femmes, telles que les mutilations génitales féminines et les crimes dits d’honneur, et qu’en raison de cette situation, les femmes et les filles risquent davantage d’être exposées à la discrimination et aux violences sexistes au cours de leur vie;
K. considérant que le nombre de mariages d’enfants, de mariages précoces et de mariages forcés augmente sensiblement dans les situations d’instabilité, de conflits armés et de catastrophes naturelles et humanitaires, où les traitements médicaux et psychologiques, l’accès à l’éducation et les moyens de subsistance font souvent défaut et où les réseaux sociaux et les routines sont perturbés; considérant que lors des dernières crises migratoires, certains parents, soucieux de protéger leurs enfants, en particulier leurs filles, contre toute agression sexuelle ou parce qu’ils sont considérés comme un fardeau financier pour la famille, estiment qu’ils n’ont pas d’autre choix que de les marier avant l’âge de 18 ans, dans l’espoir que cela leur permettra de sortir de la pauvreté;
L. considérant que le mariage forcé est l’une des causes de persécution fondée sur le sexe les plus fréquemment rapportées par de nombreuses femmes lorsqu’elles demandent l’asile; considérant qu’une série d’obstacles continuent d’empêcher la reconnaissance du mariage forcé en tant que motif pour accorder une protection internationale, bien qu’il constitue une forme de persécution fondée sur le sexe ainsi qu’une violation grave et systématique des droits fondamentaux entraînant des traitements inhumains et dégradants pouvant relever de la torture;
M. considérant que la convention d’Istanbul qualifie les mariages forcés de forme de violence à l’égard des femmes et demande la criminalisation des mariages forcés d’enfants et de la pratique qui consiste à faire miroiter aux enfants l’appât d’un voyage vers un autre pays pour les contraindre aux mariages forcés; considérant que le manque d’accès des victimes à un soutien juridique, médical et social peut exacerber le problème; considérant qu’onze États membres de l’Union n’ont pas encore ratifié la convention;
N. considérant que, de par leur nature, les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés sont rarement signalés, et que certains cas d’abus franchissent les frontières internationales et les frontières culturelles, pouvant donc constituer une forme de traite des êtres humains et conduire à l’esclavage, à l’exploitation et/ou au contrôle;
O. considérant qu’en juillet 2014 s’est tenu à Londres le premier «Girl Summit»(Sommet des filles), dont l’objectif était de mobiliser les efforts nationaux et internationaux afin de mettre fin aux mutilations génitales féminines et aux mariages d’enfants, aux mariages précoces et aux mariages forcés en l’espace d’une génération;
P. considérant que la prévention et la lutte contre toutes les formes de violence à l’encontre des filles et des femmes, y compris le mariage d’enfant, le mariage précoce et le mariage forcé, est l’un des objectifs du plan d’action sur l’égalité des sexes 2016-2020 de l’Union européenne;
Q. considérant que les mariages d’enfants coûteront aux pays en développement plusieurs milliards de dollars d’ici 2030[5];
R. considérant que le mariage d’enfants et le mariage précoce restent des sujets tabous et qu’ils doivent être publiquement traités en vue de mettre fin à la souffrance quotidienne des filles et adolescentes et à la violation continue de leurs droits fondamentaux; considérant que pour ce faire, il convient d’appuyer et de partager les travaux des journalistes, des artistes, des photographes et des militants qui travaillent sur le sujet des mariages précoces;
1. relèvent que certains États membres de l’Union autorisent le mariage à 16 ans avec l’accord parental; en appelle aux législateurs, tant dans les États membres de l’Union européenne que dans des pays tiers, de fixer partout l’âge minimum pour le mariage à 18 ans et d’adopter les mesures administratives, juridiques et financières nécessaires pour garantir la mise en œuvre effective de cette exigence, par exemple en encourageant l’enregistrement des mariages et des naissances et en veillant à ce que les filles aient accès à des mécanismes de soutien institutionnel, y compris des conseils psychosociaux, des mécanismes de protection et des possibilités d’autonomisation économique; réaffirme que les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés doivent être considérés comme une grave violation des droits de l’homme et une atteinte aux droits fondamentaux des mineurs concernés, en particulier à la liberté d’exprimer sa propre opinion et au droit à l’intégrité physique et à la santé mentale, mais aussi, indirectement, au droit à l’éducation et à la pleine jouissance des droits civils et politiques; condamne les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés et estime que toute infraction à cette législation doit être traitée de manière proportionnée et efficace;
2. est d’avis qu’il importe de s’attaquer aux multiples causes du mariage d’enfant, du mariage précoce et du mariage forcé, dont notamment les traditions préjudiciables, la pauvreté endémique, les conflits, les coutumes, les conséquences des catastrophes naturelles, les stéréotypes, un manque d’égard pour l’égalité des sexes et les droits, la santé et le bien-être des femmes et des filles, le manque d’offre scolaire appropriée et la faiblesse des réponses juridiques et politiques, notamment pour les enfants issus de communautés défavorisées; demande à cet égard que l’Union européenne et ses États membres collaborent avec les organes compétents des Nations unies et d’autres partenaires pour attirer l’attention sur la question du mariage d’enfant, du mariage précoce et du mariage forcé; demande à l’Union et aux États membres d’atteindre les objectifs du programme de développement durable à l’horizon 2030 pour lutter plus efficacement contre les pratiques néfastes, comme les mutilations génitales féminines, et obliger les auteurs de tels actes à rendre des comptes; est favorable à une augmentation du financement de l’Union et de ses États membres dans le cadre de dispositifs d’aide au développement qui promeuvent l’égalité entre les sexes et l’éducation, pour améliorer l’accès des filles et des femmes à l’éducation et renforcer leurs possibilités de participer au développement communautaire et au leadership économique et politique, afin de s’attaquer aux problèmes liés aux mariages d’enfants, aux mariages précoces et aux mariages forcés;
3. reconnaît que l’interdiction légale du mariage d’enfant, du mariage précoce et du mariage forcé à elle seule ne garantit pas la fin de ces pratiques; invite l’Union européenne et ses États membres à mieux coordonner et à renforcer l’application des lois, traités et programmes internationaux, ainsi que les relations diplomatiques avec les gouvernements et les organisations des pays tiers, afin d’aborder les questions relatives aux mariages d’enfants, aux mariages précoces et aux mariages forcés; demande que tout soit mis en œuvre pour faire respecter cette interdiction et la compléter par un ensemble plus vaste de lois et de politiques; reconnaît que cela exige l’adoption et l’application de politiques, de stratégies et de programmes globaux et exhaustifs, y compris l’abrogation des dispositions juridiques discriminatoires concernant le mariage et l’adoption de mesures positives pour autonomiser les filles;
4. constate que l’inégalité entre les sexes, le manque de respect à l’égard des filles et des femmes en général et le maintien des traditions culturelles et sociales qui perpétuent la discrimination envers les filles et les femmes comptent parmi les plus grands obstacles dans la lutte contre le mariage d’enfant, le mariage précoce et la mariage forcé; souligne en outre le lien entre la violence fondée sur l’honneur et le mariage d’enfant, le mariage précoce et le mariage forcé; demande que ces crimes fassent l’objet d’une enquête approfondie et que les accusés soient poursuivis en justice; observe par ailleurs que les garçons et les jeunes hommes peuvent également être victimes de telles violences; demande que ces pratiques soient abordées dans tous les programmes pertinents de l’Union européenne et dans les dialogues politiques de l’Union européenne avec les pays partenaires afin de créer des dispositifs pour les combattre, ainsi que par des efforts éducatifs et de sensibilisation dans les pays partenaires;
5. souligne que pour lutter contre les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés de manière globale, il revient à l’Union européenne, en tant que principal acteur dans le domaine des droits de l’homme et en matière de développement dans le monde, de jouer un rôle de tout premier plan en coopération avec les organisations régionales et les communautés locales; invite l’Union européenne et les États membres à coopérer avec les autorités répressives et les systèmes judiciaires des pays tiers, et à fournir une formation et une assistance technique favorisant l’adoption et l’application de la législation interdisant les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés et abrogeant les lois, les normes sociales et les traditions culturelles qui entravent la pleine jouissance des droits et la liberté des filles et des femmes; invite les États membres à contribuer aux initiatives telles que l’initiative Spotlight lancée par l’Union européenne et les Nations unies, axée sur l’élimination de toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles;
6. invite, de ce fait, les États membres qui ne l’ont pas encore fait à inscrire dans leurs législations nationales respectives l’interdiction intégrale du mariage d’enfant, du mariage précoce et du mariage forcé, d’appliquer le droit pénal et de ratifier la convention d’Istanbul; invite les États membres à coopérer avec la société civile afin de coordonner leurs actions dans ce domaine; souligne l’importance d’un soutien adéquat et durable aux foyers pour femmes et pour réfugiés ainsi que pour les enfants non accompagnés et déplacés, de sorte que nul ne se voie refuser une protection en raison d’un manque de ressources; exhorte tous les États membres à faire appliquer l’âge minimal pour le mariage fixé dans la législation et d’effectuer des contrôles, en recueillant des données ventilées par sexe et des données sur les facteurs liés, afin d’être en mesure de mieux évaluer l’ampleur du problème; demande à la Commission de créer une base de données européenne, comprenant également des informations provenant de pays tiers, afin de contrôler le phénomène des mariages forcés;
7. recommande aux États membres de faire converger leur législation à propos du traitement à réserver à tous les ressortissants de pays tiers présents sur le territoire de l’Union, y compris les immigrés mariés avant l’âge de dix-huit ans, et d’introduire un système de gestion des cas centré sur l’enfant afin de déterminer l’intérêt supérieur de ce dernier, sur la base duquel la décision de reconnaissance légale du mariage peut être prise, tout en réservant un traitement humanitaire aux personnes mariées avant l’âge de dix-huit ans ou par force et en offrant une protection dans les cas où les femmes ou les filles concernées demandent la dissolution de leur mariage forcé; demande la mise en place de procédures spéciales dans les centres d’accueil pour réfugiés et demandeurs d’asile;
8. encourage l’Union européenne, dans le cadre de sa politique étrangère et de sa politique de coopération au développement, à offrir un pacte stratégique à ses partenaires et d’exiger à cette fin que:
a. tous ses pays partenaires interdisent le mariage d’enfant, le mariage précoce et le mariage forcé, suppriment tous les vides juridiques et appliquent une législation conforme aux normes internationales en matière de droits de l’homme, en ce compris la suppression de toutes les dispositions susceptibles d’autoriser, de justifier ou d’entraîner, notamment en dérogeant aux lois ou en les modifiant, des mariages d’enfants, des mariages précoces ou des mariage forcés, y compris les dispositions qui permettent aux auteurs de viol, d’abus sexuels, d’exploitation sexuelle, d’enlèvement, de traite des êtres humains ou d’esclavage moderne d’échapper aux poursuites et aux sanctions en épousant leur victime;
b. cette interdiction soit respectée et appliquée en pratique à tous les niveaux une fois la loi entrée en vigueur, et des stratégies et programmes globaux et complets, comprenant des objectifs progressifs mesurables, soient mis en place afin d’empêcher et d’éradiquer les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés, ainsi qu’un financement et une évaluation appropriés de ceux-ci, notamment en garantissant l’accès à la justice et à des mécanismes et des recours en matière de responsabilité;
c. les gouvernements partenaires fassent montre d’un leadership et d’une volonté politique soutenus en vue de mettre fin au mariage d’enfant et élaborent des cadres juridiques et des plans d’action complets, assortis de jalons et d’échéanciers clairs intégrant des mesures de prévention du mariage d’enfants dans différents secteurs, et mettent en place des environnements politique, économique, social, culturel et civil protégeant les femmes et les filles et leur donnant les moyens d’agir et favorisant l’égalité entre les sexes;
d. les ressources nécessaires à la réalisation de cet objectif soient mobilisées, en prenant soin d’ouvrir cette coopération à tous les acteurs institutionnels, tels que le pouvoir judiciaire, les professionnels de l’éducation et de la santé, les forces de l’ordre, les responsables communautaires et religieux, ainsi que les organisations de la société civile opérant dans le domaine de la lutte contre le mariage d’enfant, le mariage précoce et le mariage forcé;
e. le niveau d’aide publique au développement allouée aux autorités gouvernementales soit rattaché à l’engagement du pays récipiendaire de se conformer, notamment, aux impératifs de respect des droits de l’homme, dont la lutte contre le mariage d’enfant, le mariage précoce et le mariage forcé;
f. le Programme des Nations unies pour les populations (UNFPA) ainsi que celui du Fonds des Nations unies pour l’enfance (UNICEF) soient mis en œuvre dans le cadre d’une coopération triangulaire associant lesdites organisations, l’Union européenne, ses États membres et leurs organisations de la société civile travaillant dans ce domaine ainsi que les pays partenaires dans la lutte contre le mariage d’enfant, le mariage précoce et le mariage forcé, par la mise en œuvre de plans d’action nationaux budgétisés, en privilégiant les programmes et méthodes susceptibles de transcender des pratiques dites culturelles, religieuses ou tribales et qui, dans la réalité, constituent avant tout les pires atteintes aux droits et à la dignité des enfants; préconise que cette coopération aborde également les questions connexes de violence fondée sur l’honneur;
g. la mise en œuvre desdits programmes s’appuie sur les conventions et textes afférents, ainsi que les buts et objectifs directs adoptés par la résolution de l’Assemblée générale des Nations unies du 25 septembre 2015 dans le cadre du programme de développement durable à l’horizon 2030 et des objectifs de développement durable (ODD), notamment l’objectif nº 3 («Permettre à tous de vivre en bonne santé et promouvoir le bien-être de tous à tout âge»), l’objectif nº 4 («Assurer l’accès de tous à une éducation de qualité, sur un pied d’égalité, et promouvoir les possibilités d’apprentissage tout au long de la vie»), l’objectif nº 16 («Promouvoir l’avènement de sociétés pacifiques et ouvertes aux fins du développement durable, assurer l’accès de tous à la justice et mettre en place, à tous les niveaux, des institutions efficaces, responsables et ouvertes à tous»), et plus particulièrement le point «Mettre un terme à la maltraitance, à l’exploitation et à la traite, et à toutes les formes de violence et de torture dont sont victimes les enfants»;
h. la mise en œuvre desdits programmes s’appuie également sur l’objectif nº 5 des ODD («Parvenir à l’égalité des sexes et autonomiser toutes les femmes et les filles»), comprenant l’accès à la planification familiale et à l’ensemble des droits publics et universels de santé sexuelle et génésique, en particulier à la contraception moderne et à l’avortement sûr et légal pour les filles; demande à la Commission européenne et aux États membres, à cet égard, de soutenir le mouvement SheDecides et de s’engager à fournir des fonds supplémentaires à l’aide internationale en faveur des services de santé sexuelle et génésique, y compris les avortements sans risque et la diffusion d’informations sur les avortements, contrecarrant ainsi la règle du bâillon mondial qui a été rétablie par le gouvernement des États-Unis au début de l’année 2017;
i. les questions relatives aux mariages d’enfants, aux mariages précoces et aux mariages forcés soient abordées dans le dialogue constant entre le représentant spécial de l’Union européenne pour les droits de l’homme, Stavros Lambrinidis, et les pays tiers; encourage la Commission et les États membres à intégrer une perspective d’égalité des sexes dans les programmes de consolidation de la paix et de reconstruction post-conflit, à développer les moyens de subsistance économiques et les programmes éducatifs destinés aux filles et aux femmes victimes de mariages d’enfants, de mariages précoces et de mariages forcés, et à faciliter leur accès aux services de santé et aux soins de santé génésique dans les zones de conflit;
9. est d’avis qu’il est crucial de créer un espace de dialogue respectueux avec les dirigeants communautaires et de sensibiliser l’opinion publique en général et les personnes à risque en particulier en s’appuyant sur l’éducation, des campagnes de sensibilisation de proximité et les réseaux sociaux et les nouveaux médias dans le cadre de la lutte contre les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés; plaide donc en faveur de la mise en place d’actions transversales gouvernementales, juridiques, sociétales et diplomatiques visant à prévenir de telles pratiques; estime qu’il est essentiel de nouer le dialogue au sein des communautés locales avec les principales parties prenantes, telles que les élèves adolescentes et adolescents, les enseignants, les parents et les dirigeants communautaires et religieux, par l’intermédiaire de programmes communautaires ou de programmes de sensibilisation spécifiques visant à attirer l’attention sur les effets négatifs du mariage d’enfant sur les enfants, les familles et les communautés, ainsi que sur la législation existante sur le mariage des enfants, à l’inégalité entre les sexes et aux moyens d’y remédier;
10. considère que l’autonomisation des femmes et des filles au moyen de l’éducation, de l’assistance sociale et de perspectives économiques constitue un outil crucial pour lutter contre ces pratiques; recommande que l’Union européenne promeuve et protège l’égalité des droits pour les femmes et les filles dans le domaine de l’accès à l’éducation, en mettant tout particulièrement l’accent sur une éducation primaire et secondaire gratuite et de qualité, en intégrant l’éducation à la santé sexuelle et génésique dans les programmes scolaires et en offrant aux familles de filles des incitations financières et/ou une assistance en faveur de la scolarisation et de l’achèvement des études; insiste sur la nécessité de garantir aux enfants réfugiés un accès sans restriction à l’éducation et de favoriser leur intégration et leur insertion dans l’éducation nationale; reconnaît qu’il est nécessaire d’apporter un soutien et une protection aux personnes qui risquent d’être concernées par un mariage d’enfant, un mariage précoce ou un mariage forcé ou qui ont déjà contracté un tel mariage, sous la forme d’un soutien éducatif, psychologique et social, d’une aide au logement et d’un accès à d’autres services sociaux de qualité ainsi qu’à des services de santé, de santé mentale et de santé sexuelle et génésique;
11. invite l’Union européenne à faire en sorte que des formations soient dispensées aux fonctionnaires d’État, dont le personnel diplomatique, aux assistants sociaux, aux dirigeants religieux et communautaires, à tous les services répressifs, aux systèmes judiciaires des pays tiers, et aux enseignants, aux éducateurs et à toute personne qui travaille avec des victimes potentielles, afin que ceux-ci soient sensibilisés aux cas de mariages d’enfants et de violence sexiste, et mieux à même de repérer les filles et les garçons exposés aux mariages d’enfants, aux mariages forcés et aux mariages précoces, à la violence conjugale, au risque de viol ainsi qu’à toute autre pratique ou atteinte aux droits de l’homme et à la dignité humaine et d’intervenir de façon efficace pour faire respecter les droits et la dignité de ces personnes;
12. invite l’Union européenne à faire en sorte que des formations soient dispensées aux forces de l’ordre afin que celles-ci soient mieux à même de faire respecter les droits des filles exposées aux mariages forcés et précoces, à la violence conjugale, au risque de viol ainsi qu’à toute autre pratique ou atteinte à la dignité humaine;
13. invite la Commission à garantir aux femmes et aux filles immigrées un titre de séjour indépendant du statut de leur conjoint ou partenaire, notamment pour les victimes de violence physique et psychologique, qui comprend les mariages forcés ou arrangés, et à veiller à ce que toutes les mesures administratives nécessaires soient prises pour les protéger, y compris l’accès effectif aux mécanismes d’assistance et de protection;
14. invite l’Union européenne et ses États membres à envisager de soutenir et de renforcer les mesures de protection dans les pays tiers, telles que la création d’abris sûrs et l’accès à un soutien juridique, médical et, le cas échéant, consulaire pour les victimes de mariages d’enfants, de mariages précoces et de mariages forcés;
15. est conscient que l’Union européenne, attachée au respect des droits de l’homme et des valeurs fondamentales, dont le respect de la dignité de la personne humaine, doit être absolument irréprochable au niveau de ses États membres, et invite la Commission à initier une large compagne de sensibilisation et à consacrer une année européenne à la lutte contre le mariage d’enfant, le mariage précoce et le mariage forcé;
16. soutient vigoureusement le travail du partenariat mondial «Filles, pas épouses» en vue de mettre fin au mariage des enfants et de permettre aux filles de réaliser leur potentiel;
17. se félicite de l’actuelle campagne de l’Union africaine visant à mettre fin au mariage des enfants, ainsi que du travail d’organisations telles que la Royal Commonwealth Society plaidant en faveur d’une action accrue pour mettre fin au mariage des enfants et lutter contre l’inégalité des sexes;
18. souligne qu’il est urgent d’informer et d’éduquer les hommes et les garçons et de les mobiliser pour défendre les droits de l’homme, notamment les droits des enfants et des femmes;
19. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, aux gouvernements et parlements des États membres, et aux Nations unies.
- [1] Textes adoptés de cette date, P8_TA(2017)0379.
- [2] JO C 289 du 9.8.2016, p. 57.
- [3] http://data.consilium.europa.eu/doc/document/ST-11855-2012-INIT/fr/pdf
- [4] http://www.consilium.europa.eu/media/30002/web_fr_actionplanhumanrights.pdf
- [5] Wodon, Quentin T.; Male, Chata; Nayihouba, Kolobadia Ada; Onagoruwa, Adenike Opeoluwa; Savadogo, Aboudrahyme; Yedan, Ali; Edmeades, Jeff; Kes, Aslihan; John, Neetu; Murithi, Lydia; Steinhaus, Mara; Petroni, Suzanne, Economic Impacts of Child Marriage: Global Synthesis Report, Economic Impacts of Child Marriage, Washington, D.C., Groupe de la Banque mondiale, 2017.
AVIS de la commission des droits de la femme et de l’égalité des genres (18.4.2018)
à l’intention de la commission des affaires étrangères
sur une stratégie extérieure de l’Union de lutte contre les mariages précoces et forcés – prochaines étapes
(2017/2275(INI))
Rapporteure pour avis: Daniela Aiuto
SUGGESTIONS
La commission des droits de la femme et de l’égalité des genres invite la commission des affaires étrangères, compétente au fond, à incorporer dans la proposition de résolution qu’elle adoptera les suggestions suivantes:
A. considérant que le mariage d’enfants et le mariage précoce ou forcé[1] constituent une violation des droits de l’homme fixés par diverses normes internationales, telles que la déclaration et le programme d’action de Beijing, le programme d’action de la conférence internationale sur la population et le développement ainsi que la convention des Nations unies sur le consentement au mariage, l’âge minimum du mariage et l’enregistrement des mariages et que ces droits figurent parmi les principes de base de l’Union en tant qu’espace de sécurité, de liberté et de justice et de droits de l’homme, qui comprennent les droits des femmes et des filles; que le mariage d’enfants et le mariage précoce ou forcé perpétuent d’autres violations des droits de l’homme qui touchent de manière disproportionnée les femmes et les filles et empêchent le développement socioéconomique;
B. considérant que, malgré les engagements pris aux niveaux international, national et régional, le mariage d’enfants et le mariage précoce ou forcé restent largement répandus partout dans le monde, selon les estimations de l’ONU, touchant près de 700 millions de femmes et 150 millions d’hommes mariés de force avant leur majorité; que le mariage précoce continue d’être un problème qui touche de manière disproportionnée les mineurs et les jeunes filles; que l’éradication du mariage d’enfants est une manière stratégique de promouvoir les droits et l’émancipation des femmes;
C. considérant qu’il a été démontré à maintes reprises que le mariage d’enfants ou le mariage précoce ont des conséquences négatives et préjudiciables pour les femmes, les jeunes filles, leurs enfants et leurs communautés; considérant que le mariage d’enfants et le mariage précoce ou forcé entraînent souvent le décrochage scolaire, privant ainsi les femmes et les filles de leurs droits fondamentaux, ce qui accroît le risque de violence sexiste et de pauvreté persistante; et considérant le fait que les jeunes épouses, privées d’éducation et de perspectives d’emploi rémunéré, sont davantage susceptibles d’être pauvres et de le rester;
D. considérant que 16 millions de filles âgées de 15 à 19 ans accouchent d’un enfant chaque année dans le monde, et qu’au moins un million de jeunes filles sont primipares avant l’âge de 15 ans; considérant qu’au niveau mondial, 95 % des naissances chez des adolescentes se produisent dans des pays en développement, neuf de ces naissances sur dix ayant lieu au sein d’un mariage ou d’une union et que chaque année, dans les pays en développement, environ 70 000 adolescentes meurent des suites de la grossesse et de l’accouchement[2];
E. considérant que les études montrent une étroite association entre le mariage d’enfants et l’accouchement prématuré; considérant que les mariages précoces et les mariages forcés ont de graves conséquences sur la santé et les droits sexuels et génésiques des femmes et des jeunes filles, y compris des grossesses non désirées, en raison des faibles taux de planification familiale et d’éducation sexuelle, et font peser une lourde menace sur la santé physique et mentale des femmes et des filles en augmentant sensiblement le risque de grossesses précoces, fréquentes et non désirées, de mortalité et de morbidité maternelles et néonatales, de fistule obstétrique et d’infections transmises sexuellement, y compris le VIH, tandis que les complications lors des grossesses et des accouchements sont la principale cause de décès des jeunes filles entre 15 et 19 ans et que les enfants de mères adolescentes ont 50 % de probabilités en plus de mourir dans les premiers jours suivant l’accouchement;
F. considérant que, dans le monde, toutes les sept secondes, une fille âgée de moins de 15 ans est mariée, souvent à un homme plus âgé qu’elle; et que, si le nombre de petites filles mariées continue à augmenter au rythme actuel, on estime qu’en 2030, il y aura 950 millions de femmes mariées à un très jeune âge, et qu’en 2050[3], elles seront 1,2 milliards;
G. considérant qu’un mariage avant l’âge de 18 ans augmente la probabilité de souffrir de violence domestique; et que les enfants mariées sont souvent victimes de violence étant donné que les différences d’âge importantes renforcent le déséquilibre de pouvoir existant entre les filles et leur mari;
H. considérant que les inégalités et les stéréotypes relatifs au sexe, les pratiques néfastes, les perceptions, les coutumes et les normes discriminatoires, éléments profondément ancrés dans la société, sont les causes principales des mariages précoces et forcés; et qu’en raison de cette situation, les femmes et les filles risquent davantage d’être exposées à la discrimination et à la violence sexiste au cours de leur vie;
I. considérant que l’éducation est l’un des meilleurs moyens de prévenir les mariages précoces et les mariages forcés et d’aider les femmes et les filles à faire des choix en connaissance de cause concernant leur vie; que l’éducation prépare les filles à obtenir un emploi et à gagner leur vie, accroît leur estime d’elles-mêmes ainsi que leur statut au sein de leurs foyers et de leurs communautés, et leur donne un poids plus important dans les décisions qui les concernent[4], ce qui permet de réduire la probabilité d’un mariage précoce et de repousser le moment de la grossesse;
J. considérant que le mariage précoce ou forcé dans les zones de conflit suscite des préoccupations grandissantes; que cette pratique tend à être justifiée par certains groupes belligérants et extrémistes, ce qui engendre de lourdes conséquences sur la santé et sur le bien-être des femmes et des filles;
K. considérant que le mariage d’enfants est enraciné dans certaines traditions et cultures, mais qu’aucune culture ou tradition ne peut justifier une telle pratique, notamment lorsque les droits de l’homme et les droits des enfants sont remis en cause; que, dans de nombreuses communautés où le mariage précoce est majoritaire, les jeunes garçons possèdent plus de privilèges et les filles sont souvent considérées comme des charges économiques pour leur famille, et qu’elles acquièrent donc généralement une faible estime d’elles-mêmes;
L. considérant que toutes les petites filles ont le droit de vivre pleinement leur enfance en jouant, en jouissant du droit à l’éducation, et en étant protégées de la violence, des préjudices physiques et moraux, ainsi que des abus et des exploitations en tout genre;
M. considérant que les petites filles et les filles ont le droit de développer tout leur potentiel de citoyennes, conformément à la convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant;
N. considérant que les mariages précoces et les mariages forcés constituent en eux-mêmes un obstacle au développement et que la persistance de ces mariages a eu des incidences négatives sur la réalisation des objectifs 1 à 6 des objectifs du Millénaire pour le développement, notamment dans les domaines de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes et des filles, de la réduction de la pauvreté, de l’éducation, de la mortalité maternelle et postinfantile, et de la santé, y compris la santé sexuelle et génésique[5];
O. considérant que la prévention et la lutte contre toutes les formes de violence à l’encontre des filles et des femmes, y compris le mariage précoce et le mariage forcé, est l’un des objectifs du plan d’action sur l’égalité des sexes 2016-2020 de l’Union européenne;
P. considérant que, bien que le mariage forcé soit illégal dans toute l’Union européenne, sa définition précise varie; que cette absence de définition généralement acceptée entrave les efforts déployés pour établir des statistiques sur les mariages forcés dans l’Union;
Q. considérant que le mariage forcé reste préoccupant au sein de l’Union; qu’il ne constitue pas un crime en lui-même dans la plupart des États membres, qui offrent à la place une protection consistant en une combinaison de dispositions pénales plus générales, par exemple concernant le viol ou l’enlèvement;
R. considérant que dans la mesure où une mineure de moins de 18 ans n’a pas la capacité de consentir valablement à son mariage, les mariages d’enfants sont considérés comme des mariages forcés, regrette que 144 pays sur 193 n’ont aucune loi qui interdit le mariage des enfants;
S. considérant que de nombreux cas de mariage forcé ne sont pas signalés ou sont signalés auprès d’organisations privées et d’organisations non gouvernementales plutôt qu’auprès des autorités publiques; que, lorsque ces cas sont signalés aux autorités nationales, ils ne sont enregistrés dans aucun système cohérent de collecte des données au niveau de l’État membre, de tels systèmes étant inexistants malgré leur nécessité urgente;
T. considérant que les mariages d’enfants coûteront aux pays en développement plusieurs milliards de dollars d’ici 2030[6];
U. considérant que les gouvernements doivent reconnaître l’importance de la lutte contre le mariage d’enfants et le mariage précoce dans la poursuite des objectifs du programme de développement durable à l’horizon 2030; qu’aider les filles à éviter un mariage d’enfants, retarder la grossesse et permettre l’accès à l’école, leur donne l’occasion d’améliorer leurs compétences et leurs revenus futurs, contribuant ainsi à éradiquer la pauvreté pour les générations à venir; que promouvoir l’égalité des genres et l’émancipation des femmes garantit aux filles un pouvoir de décision sur leur vie familiale, sexuelle et reproductive; qu’éradiquer le mariage d’enfants et le mariage précoce réduira la mortalité infantile et les divers problèmes de santé liés à une grossesse ou à un accouchement précoce;
V. considérant que, dans la majorité des communautés qui pratiquent le mariage d’enfants et le mariage précoce, les femmes sont souvent maintenues hors des processus décisionnels, et que la participation et l’éducation des dirigeants et des femmes de ces communautés sont essentielles pour que les conduites et les comportements changent en ce qui concerne le mariage d’enfants; qu’il est nécessaire également d’élaborer une législation qui interdit le mariage précoce et le mariage forcé;
W. considérant que la pauvreté intergénérationnelle est une des raisons les plus souvent invoquées pour contraindre les jeunes filles à un mariage d’enfants; que le manque de connaissance sur la santé et les droits en matière de sexualité et de reproduction fait que les parents ne sont pas avertis des dangers liés à une grossesse précoce;
X. considérant que, dans le cas du mariage d’enfants, comme dans tous les domaines d'action contre la violence envers les femmes, la mobilisation des hommes et des garçons revêt une importance essentielle pour combattre la discrimination de genre et pour changer les pratiques traditionnelles préjudiciables profondément enracinées dans la culture d’une communauté donnée;
Y. considérant que le mariage d’enfants et le mariage précoce restent des sujets tabous et qu’ils doivent être publiquement traités en vue de mettre fin à la souffrance quotidienne des jeunes adolescentes et à la violation continue de leurs droits humains; que pour ce faire, il convient d’appuyer et de partager les travaux des journalistes, des artistes, des photographes et des militants qui travaillent sur le sujet des épouses précoces;
Z. considérant que les campagnes visant à mettre fin au mariage précoce des filles et des jeunes filles ne remporteront aucun succès sans l’acceptation de la sexualité des adolescentes et de leur droit à prendre leurs propres décisions sur leur corps, leurs relations et leur activité sexuelle; qu’afin que ces décisions soient prises en connaissance de cause, il convient que des informations sur la sexualité et sur les méthodes contraceptives soient mises à la disposition des adolescentes et de leurs parents;
1. condamne toute forme de mariage d’enfants et de mariage précoce ou forcé, ainsi que les autres pratiques coercitives auxquelles sont soumises les femmes et les filles, y compris des adolescentes et des petites filles en Europe et dans le reste du monde, vu que ces pratiques constituent une violation grave des droits de l’homme, notamment, l'abus sur mineur lorsque la victime a moins de 18 ans;
2. souligne que les mariages précoces et forcés sont une atteinte grave à la liberté d’exprimer sa propre opinion;
3. reconnaît que les mariages précoces et forcés sont également devenus un véritable problème au sein de l’Union, ce problème devant être résolu au moyen d’une action commune, ferme et coordonnée de tous les États membres;
4. invite les États membres à affirmer la non-reconnaissance des mariages forcés et à soutenir sans réserve les victimes, indépendamment de leur famille;
5. constate que de nombreux parents vivant dans la détresse et la pauvreté extrême dans les camps de réfugiés ressentent le besoin de protéger leurs filles du danger de la violence sexuelle en les mariant à des hommes plus âgés; souligne cependant que l’Union et ses États membres doivent être unis et cohérents dans leur refus des demandes présentées par des réfugiés concernant la reconnaissance juridique de mariages dans lesquels l’un des époux présumés est une enfant ou une adolescente; souligne que le statut de réfugié ne peut être utilisé comme un moyen de contourner la législation pour faire reconnaître les mariages d’enfants en Europe;
6. recommande d'adopter une approche globale et complète du mariage d’enfants et du mariage précoce ou forcé, qui suppose de s’attaquer aux causes profondes du mariage d’enfants, y compris l’inégalité entre les hommes et les femmes, la pauvreté et le manque de perspectives sociales et économiques; souligne l’importance de l’éducation qui constitue un outil puissant pour prévenir le mariage d’enfants et le mariage précoce ou forcé, mais attire également l’attention sur la nécessité d’étendre l’égalité entre hommes et femmes au-delà des secteurs traditionnels, tels que l’éducation et la santé, et de couvrir tous les autres domaines d’action;
7. demande à l’Union européenne de jouer un rôle de premier plan dans la lutte contre cette violation des droits de l’homme au niveau national, européen et international et invite le service européen pour l’action extérieure (SEAE) et la Commission à faire usage de tous les instruments à disposition et de proposer une stratégie spécifique afin d’identifier les étapes nécessaires dans la lutte contre le mariage précoces ou forcés et le mariage d’enfants, ainsi que les autres pratiques portant atteinte aux filles et aux femmes, telles que les mutilations génitales féminines, les «crimes d’honneur», le trafic et l’esclavage sexuels, et d’identifier les objectifs à établir et les financements à affecter à cette fin, avec comme objectif général d’éradiquer ce phénomène d’ici à 2030 et ce en conformité avec les objectifs de développement durable des Nations unies (objectif 5.3); invite par conséquent la Commission et le SEAE à intégrer dans cette stratégie la nécessité de remédier aux stéréotypes sexistes ainsi qu’aux normes sociales discriminatoires qui contribuent à l’acceptation et à la poursuite des pratiques préjudiciables mentionnées ci-dessus;
8. rappelle que l’élimination de la pratique des mariages d’enfants et des mariages précoces ou forcés figure parmi les priorités de l’action extérieure de l’Union européenne dans le domaine de la promotion des droits des femmes et des droits de l’homme;
9. demande à la Commission et au SEAE de définir un plan d’action afin d’aider à lutter contre le mariage d’enfants et le mariage précoce ou forcé dans le cadre des relations entre l’Union et les pays tiers, en particulier dans le domaine du développement, et d'accorder une attention particulière au respect des droits des femmes et des jeunes filles dans tous les accords commerciaux et de partenariat, notamment en utilisant les «clauses relatives aux droits de l'homme»; invite la Commission et le SEAE à traiter ces questions en priorité dans le dialogue politique avec les pays partenaires et à concevoir des mesures concrètes en collaboration avec tous les acteurs clés en vue de mettre fin aux pratiques préjudiciables; demande également aux États membres d’encourager la lutte contre les d’enfants, les mariages précoces ou forcés, dans leurs relations avec des pays tiers;
10. accueille favorablement le lancement de l’initiative «Spotlight» de l’Union européenne et des Nations unies visant à lutter contre la violence sexuelle et sexiste et contre les pratiques néfastes, telles que le mariage précoce forcé, la mutilation sexuelle féminine (MSF) ou la traite des êtres humains; fait cependant remarquer que l’initiative Spotlight porte essentiellement sur des priorités qui constituent déjà une préoccupation partagée au niveau mondial; souligne dès lors la nécessité de progresser vers l’égalité des sexes d’une manière plus globale, par l’intermédiaire d’une combinaison appropriée de programmes et de modalités; invite la Commission à utiliser l’examen à mi-parcours de ses programmes de coopération internationale pour augmenter le financement des ressources sur l’égalité des sexes afin de rationaliser cette dimension dans la coopération bilatérale et grâce à des programmes thématiques;
11. invite l’Union et les États membres à collaborer avec l’ONU Femmes, le Fonds des Nations unies pour l’enfance, le Fonds des Nations unies pour la population et d’autres partenaires, y compris les organisations de la société civile, les associations de diaspora et de migrants, pour attirer l’attention sur la question des mariages d’enfants, des mariages précoces et des mariages forcés en mettant l’accent sur l’émancipation des femmes, y compris au moyen de l’éducation, l’autonomisation économique des femmes et leur participation accrue à la prise de décisions, ainsi que sur la protection et la promotion des droits de l’homme de toutes les femmes et filles, y compris le droit à la santé sexuelle et génésique;
12. suggère de subordonner les fonds européens pour l’action extérieure à la mise en œuvre efficace de mesures visant à éradiquer le mariage précoce et le mariage forcé;
13. encourage la Commission et les États membres à intégrer une perspective d’égalité des sexes dans les programmes de consolidation de la paix et de reconstruction post-conflit, à développer les moyens de subsistance économiques et les programmes éducatifs destinés aux filles et aux femmes victimes de mariages précoces et forcés, et à faciliter leur accès aux services de santé et aux soins de santé génésique dans les zones de conflit;
14. insiste sur le besoin d’allouer des fonds aux programmes de prévention des mariages d’enfants visant à créer un environnement social dans lequel les filles peuvent développer leur plein potentiel, y compris grâce à l’éducation, à des programmes sociaux et économiques pour les filles non scolarisées, à des régimes de protection de l’enfance, à des foyers, à des conseils juridiques et à un soutien psychologique; invite la Commission et les États membres à garantir que des ressources suffisantes sont allouées à ces types de programmes et d’activités dans leurs actions extérieures; invite, en outre, la Commission à réaliser une évaluation systématique de ses programmes existants consacrés à la prévention du mariage précoce, en évaluant leur efficacité, leur utilisation des financements disponibles afin de garantir que les programmes sont mis en œuvre dans les régions et les pays où le mariage d’enfants est très répandu; encourage les délégations de l’Union européenne à respecter l’engagement de l’Union envers le plan d’action sur l’égalité des sexes 2016-2020, à surveiller attentivement la situation et à élaborer des programmes pertinents pour soutenir les actions législatives locales;
15. souligne la nécessité d’élaborer des programmes d’émancipation des filles et des jeunes filles à titre d’outils principaux pour empêcher et combattre les mariages précoces, en améliorant aussi bien leur estime de soi que la connaissance de leurs droits, y compris le droit légal de refuser le mariage;
16. souligne que mettre fin aux mariages précoces et forcés aurait à son tour une incidence positive considérable sur le niveau d’instruction des filles et de leurs enfants et aiderait les femmes à avoir moins d’enfants et à accroître leurs perspectives de revenus ainsi que le bien-être au sein de leur foyer;
17. rappelle qu’il est indispensable d’œuvrer au niveau local, en collaboration avec les communautés, pour les aider à lutter contre les visions traditionnelles et discriminatoires sur l’accès des filles à l’éducation, et ainsi accroître les possibilités d’emploi des femmes et contribuer à leur subsistance ainsi qu’à celle de leurs familles;
18. encourage l’élaboration de programmes de sensibilisation impliquant les dirigeants communautaires, en les éduquant sur les effets néfastes de traditions telles que le mariage précoce, afin que, par la suite, ils deviennent des agents actifs de la sensibilisation de la communauté;
19. souligne qu’il est urgent d’informer et d’éduquer les hommes et les garçons et de les mobiliser pour défendre les droits de l’homme, notamment les droits des enfants et des femmes;
20. invite la Commission et les États membres à prendre des mesures intégrées, globales et coordonnées pour prévenir et combattre toute forme de violence à l’égard des femmes et des filles, y compris les mariages d’enfants et les mariages précoces ou forcés, en facilitant notamment l’accès des victimes à la justice et en renforçant les mécanismes de protection de l’enfance, tout en renforçant le soutien aux organisations non gouvernementales qui œuvrent pour éliminer ces pratiques, et en leur assurant un accès accru au financement;
21. invite tous les États membres à mettre pleinement en œuvre la législation interdisant les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés, en leur garantissant l’accès à la justice, y compris aux voies de recours, et en mettant en place des structures et des programmes visant à soutenir, à aider et à protéger les victimes de mariages d’enfants et de mariages précoces ou forcés, y compris des centres d’accueil sûrs et l’aide de professionnelles qualifiées telles des sages-femmes, des gynécologues, psychologues et assistantes sociales; invite à cet égard la Commission et les États membres à garantir l’application concrète de la directive de l’Union européenne sur la protection des victimes, notamment en améliorant l’accès, pour les victimes de violence à l’encontre des femmes, à un soutien général et spécialisé et en instaurant des mécanismes de signalement efficaces respectant l’anonymat et la confidentialité des victimes afin d’encourager les victimes de mariage forcé sans à déposer plainte sans craindre d’être stigmatisées par la suite;
22. invite l’Union et les États membres à garantir l’existence de structures et de formations à l’intention des professionnels de la santé, afin qu’ils puissent fournir des services confidentiels, dépourvus de tout jugement et adaptés aux jeunes, des informations et des ressources qui respectent les normes de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en matière d’équité, d’accessibilité, d’acceptabilité, d’adéquation et d’efficacité;
23. encourage la Commission et les États membres à lancer des campagnes de sensibilisation à ce phénomène, à ses conséquences et aux possibilités de recours judiciaire dans l’Union européenne, y compris au sein des camps de réfugiés et dans les pays candidats à l’adhésion;
24. se réjouit de la création d’une nouvelle alerte dans le système d’information Schengen permettant l’introduction d’un signalement afin de protéger les enfants à risque de mariage forcé;
25. rappelle que l’article 37 de la convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (convention d’Istanbul), dispose que les États parties ont le devoir d’ériger en infraction pénale «le fait, lorsqu’il est commis intentionnellement, de forcer un adulte ou un enfant à contracter un mariage»; regrette dès lors que seuls 12 États membres de l’UE ont fait du mariage forcé une infraction pénale et rappelle que, conformément aux exigences de cette convention, lorsque les victimes sont emmenées dans un autre pays où elles perdent leur droit de résider dans l’Union en raison de leur mariage forcé, elles devraient pouvoir bénéficier de solutions concrètes pour recouvrer leur droit de séjour; demande aux États membres qui n’ont pas encore ratifié la convention d’Istanbul de le faire sans délai[7];
26. invite la Commission à garantir l’octroi aux femmes et aux filles immigrées d’un titre de séjour autonome, indépendant du statut de leur conjoint ou partenaire, notamment pour les victimes de violence physique et psychologique, qui comprend les mariages forcés ou arrangés, et à veiller à ce que toutes les mesures administratives nécessaires soient prises pour les protéger, y compris l’accès effectif aux mécanismes d’assistance et de protection;
27. demande à la Commission et aux États membres d’adopter des mesures visant à décourager et, si nécessaire, à sanctionner les parents, citoyens de l’Union ou non, qui donnent en mariage leurs filles mineures, que ce soit en les envoyant dans leur pays d’origine ou, à plus forte raison, au sein même de l’Union;
28. reconnaît que la plupart des pays dans le monde ont instauré des lois fixant un âge minimum pour le mariage, mais souligne que de nombreux pays prévoient des exceptions à l’âge minimum requis, principalement sur consentement parental ou autorisation du tribunal, et qu’elles devraient être abordées par la haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et vice-présidente de la Commission; appelle ces États membres, et invite les pays non membres de l’UE qui ne l’ont pas encore fait, à ériger en infraction le mariage forcé et le mariage précoce, notamment en réexaminant l’âge légal minimum pour le mariage, indépendamment de l’autorisation des parents, en exigeant le consentement plein et entier des deux époux et en établissant des sanctions destinées à ceux qui contraindraient quelqu’un à se marier;
29. propose d’intégrer expressément le mariage forcé parmi les formes de traite des êtres humains visées à l’article 2 de la directive 2011/36/UE concernant la prévention de la traite des êtres humains et la lutte contre ce phénomène ainsi que la protection des victimes, et d’élaborer une politique et une définition communes pour appréhender le mariage forcé, qui devraient être utilisées systématiquement aux niveaux national et européen dans les politiques et dans les dispositions en matière civile et en matière pénale sur le mariage forcé;
30. invite la Commission et les États membres à contrôler les cas de mariages précoces et forcés au sein de l’Union et d’envisager l’introduction de normes juridiques unifiées concernant la procédure de traitement des affaires impliquant des mariages précoces;
31. recommande d’envisager l’enregistrement obligatoire des naissances dans les pays où le mariage d’enfants et le mariage précoce ou forcé, étant donné que l’absence d’enregistrement peut accroître les risques de mariage d’enfants et de mariage précoce;
32. demande à la Commission de créer des bases de données européennes afin de contrôler et de dénoncer le phénomène des mariages forcés et d’autres formes de violations des droits de l’homme fondées sur le sexe, y compris l’exploitation sexuelle;
33. invite la Commission et les États membres à élaborer un système cohérent de collecte de données sur les mariages précoces et forcés, y compris de données ventilées par sexe, des données solides et fiables étant indispensables à l’élaboration de politiques fondées sur des éléments concrets et d’interventions mieux ciblées;
34. demande à la Commission et aux États membres d’élaborer des études spécialisées à partir des données recueillies afin de disposer d’un cadre clair sur ce phénomène à l’échelle européenne, et d’informations spécifiques concernant chaque État membre;
35. attire l’attention sur l’influence négative des crises humanitaires, des conflits et des catastrophes naturelles sur la prolifération des mariages d’enfants et des mariages précoces ou forcés; souligne dès lors qu’il est nécessaire de combiner actions humanitaires et efforts en faveur du développement;
36. réaffirme la nécessité de promouvoir et de protéger les droits fondamentaux de toutes les femmes et de toutes les filles, notamment le droit de disposer de leur sexualité et de décider librement et de manière responsable de ce qui s’y rapporte, en particulier leur santé sexuelle et procréative, sans subir de contrainte, de discrimination ou de violence;
37. souligne que le respect universel de la santé et des droits génésiques et sexuels ainsi que l’accès à ces droits contribuent à la réalisation de tous les objectifs de développement durable liés à la santé, tels que les soins prénataux et les mesures visant à éviter les naissances à haut risque et à réduire la mortalité infantile et juvénile; fait remarquer que l’accès à la planification familiale, aux services de santé maternelle et à des services d’avortement sûrs et légaux sont des éléments importants qui peuvent sauver la vie de femmes et de filles; s’inquiète du fait qu’aucune délégation de l’Union dans les régions du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord, de l’Europe et de l’Asie centrale n’a choisi d’indicateur relatif à la santé et aux droits génésiques et sexuels, malgré les besoins importants y afférents dans ces régions; invite les délégations de l’Union dans ces régions à réévaluer les chiffres préoccupants dans ce domaine afin de déterminer s’ils peuvent être liés au manque de signalements ou s’il est nécessaire de mener des actions ciblant la santé et les droits génésiques et sexuels en complément des programmes actuels;
38. souligne que, tout en mettant l’accent sur la prévention du mariage précoce, l’Union européenne, les États membres et les pays tiers doivent également soutenir les jeunes filles déjà mariées, afin de les aider à prendre conscience de leurs droits, y compris leurs droits en matière de sexualité, de reproduction et de contraception;
39. condamne le rétablissement et l’expansion de la règle du bâillon mondial ainsi que son incidence sur la santé des femmes et des filles; rappelle que les populations vivant dans des situations vulnérables, y compris les personnes qui n’ont normalement pas accès aux services pour cause de stigmatisation, de pauvreté, de situation géographique, de violence ou de séropositivité, sont les plus touchées;
40. invite une nouvelle fois l’Union et ses États membres à soutenir activement les droits des femmes et des filles dans le monde entier et à augmenter considérablement les fonds de développement nationaux et européens destinés à la protection de la santé et des droits génésiques et sexuels, plus particulièrement à l’accès à la contraception et à l’avortement sûr et légal, en vue de réduire le déficit de financement provoqué par les États-Unis dans ce domaine;
41. soutient résolument l’initiative «She Decides» (elle décide) et invite l’Union européenne et les États membres à renforcer leur appui à cette initiative ainsi qu’aux autres efforts en faveur de la santé et des droits génésiques et sexuels.
42. estime que l’augmentation du nombre de femmes occupant des postes de prise de décisions politiques et économiques peut favoriser la mise en place d’une législation ad hoc et un renforcement de l’appui aux institutions et aux organisations de la société civile œuvrant à la prévention des mariages précoces et forcés;
INFORMATIONS SUR L’ADOPTIONPAR LA COMMISSION SAISIE POUR AVIS
Date de l’adoption |
12.4.2018 |
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Résultat du vote final |
+: –: 0: |
19 1 3 |
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Membres présents au moment du vote final |
Daniela Aiuto, Beatriz Becerra Basterrechea, Malin Björk, Vilija Blinkevičiūtė, Anna Maria Corazza Bildt, Iratxe García Pérez, Anna Hedh, Teresa Jiménez-Becerril Barrio, Florent Marcellesi, Angelika Mlinar, Marijana Petir, João Pimenta Lopes, Elissavet Vozemberg-Vrionidi, Jadwiga Wiśniewska |
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Suppléants présents au moment du vote final |
Lívia Járóka, Urszula Krupa, Kostadinka Kuneva, Nosheena Mobarik, Jordi Solé, Marc Tarabella, Mylène Troszczynski, Julie Ward |
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Suppléants (art. 200, par. 2) présents au moment du vote final |
Margrete Auken |
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VOTE FINAL PAR APPEL NOMINAL EN COMMISSION SAISIE POUR AVIS
19 |
+ |
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ALDE |
Beatriz Becerra Basterrechea, Angelika Mlinar |
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ECR |
Nosheena Mobarik |
|
EFDD |
Daniela Aiuto |
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GUE/NGL |
Malin Björk, Kostadinka Kuneva, João Pimenta Lopes |
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PPE |
Anna Maria Corazza Bildt, Teresa Jiménez-Becerril Barrio, Lívia Járóka, Elissavet Vozemberg-Vrionidi |
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S&D |
Vilija Blinkevičiūtė, Iratxe García Pérez, Anna Hedh, Marc Tarabella, Julie Ward |
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Verts/ALE |
Margrete Auken, Florent Marcellesi, Jordi Solé |
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1 |
- |
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PPE |
Marijana Petir |
|
3 |
0 |
|
ECR |
Urszula Krupa, Jadwiga Wiśniewska |
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ENF |
Mylène Troszczynski |
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Légende des signes utilisés:
+ : pour
- : contre
0 : abstention
- [1] Défini comme «le mariage contracté sans le consentement libre et valable d’un ou des deux conjoints, ou avant l’âge de 18 ans», conformément à la convention des Nations unies sur le consentement au mariage, l'âge minimum du mariage et l'enregistrement des mariages du 7 novembre 1962, et à la résolution 1468 (2005) de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe «Mariages forcés et mariages d’enfants».
- [2] «La mère-enfant. Face aux défis de la grossesse chez l’adolescente», FNUAP (2013).
- [3] Rapport intitulé «Every Last Girl: Free to live, free to learn, free form harm» publié le 11 octobre 2016 par l’organisation Save the Children.
- [4] «La mère-enfant. Face aux défis de la grossesse chez l’adolescente», FNUAP (2013).
- [5] Résolutions 69/156 de l’Assemblée générale des Nations unies du 18 décembre 2014 sur les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés.
- [6] Economic Impacts of Child Marriage: Global Synthesis Report 2017.
- [7] «Forced marriage from a gender perspective», Parlement européen, direction générale des politiques internes, Parlement européen (2016).
2 Liste des ratifications de la convention: https://www.coe.int/fr/web/conventions/full-list/-/conventions/treaty/210/signatures?desktop=true
INFORMATIONS SUR L’ADOPTIONPAR LA COMMISSION COMPÉTENTE AU FOND
Date de l’adoption |
16.5.2018 |
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Résultat du vote final |
+: –: 0: |
45 2 2 |
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Membres présents au moment du vote final |
Lars Adaktusson, Michèle Alliot-Marie, Francisco Assis, Petras Auštrevičius, Goffredo Maria Bettini, Elmar Brok, Klaus Buchner, Fabio Massimo Castaldo, Aymeric Chauprade, Javier Couso Permuy, Arnaud Danjean, Eugen Freund, Sandra Kalniete, Tunne Kelam, Wajid Khan, Eduard Kukan, Arne Lietz, Barbara Lochbihler, Sabine Lösing, Tamás Meszerics, Francisco José Millán Mon, Clare Moody, Javier Nart, Pier Antonio Panzeri, Ioan Mircea Paşcu, Tonino Picula, Julia Pitera, Cristian Dan Preda, Jozo Radoš, Michel Reimon, Sofia Sakorafa, Alyn Smith, Dubravka Šuica, Charles Tannock, László Tőkés, Ivo Vajgl |
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Suppléants présents au moment du vote final |
David Coburn, Marek Jurek, Norica Nicolai, Urmas Paet, Soraya Post, Marie-Christine Vergiat, Željana Zovko |
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Suppléants (art. 200, par. 2) présents au moment du vote final |
Charles Goerens, Heidi Hautala, Renate Weber, Francis Zammit Dimech, Joachim Zeller, Jaromír Štětina |
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VOTE FINAL PAR APPEL NOMINALEN COMMISSION COMPÉTENTE AU FOND
45 |
+ |
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ALDE |
Petras Auštrevičius, Charles Goerens, Javier Nart, Norica Nicolai, Urmas Paet, Jozo Radoš, Ivo Vajgl, Renate Weber |
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EFDD |
Fabio Massimo Castaldo, Aymeric Chauprade |
|
GUE/NGL |
Javier Couso Permuy, Sabine Lösing, Sofia Sakorafa, Marie-Christine Vergiat |
|
PPE |
Lars Adaktusson, Michèle Alliot-Marie, Elmar Brok, Arnaud Danjean, Sandra Kalniete, Tunne Kelam, Eduard Kukan, Francisco José Millán Mon, Julia Pitera, Cristian Dan Preda, László Tőkés, Joachim Zeller, Željana Zovko, Jaromír Štětina, Dubravka Šuica |
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S&D |
Francisco Assis, Goffredo Maria Bettini, Eugen Freund, Wajid Khan, Arne Lietz, Clare Moody, Pier Antonio Panzeri, Ioan Mircea Paşcu, Tonino Picula, Soraya Post |
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Verts/ALE |
Klaus Buchner, Heidi Hautala, Barbara Lochbihler, Tamás Meszerics, Michel Reimon, Alyn Smith |
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2 |
– |
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EFDD |
David Coburn |
|
PPE |
Francis Zammit Dimech |
|
2 |
0 |
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ECR |
Marek Jurek, Charles Tannock |
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Légende des signes utilisés:
+ : pour
- : contre
0 : abstention