RAPPORT sur le rapport annuel 2017 de la Banque centrale européenne

4.12.2018 - (2018/2101(INI))

Commission des affaires économiques et monétaires
Rapporteur: Gabriel Mato


Procédure : 2018/2101(INI)
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A8-0424/2018
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A8-0424/2018
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PROPOSITION DE RÉSOLUTION DU PARLEMENT EUROPÉEN

sur le rapport annuel 2017 de la Banque centrale européenne

(2018/2101(INI))

Le Parlement européen,

–  vu sa résolution du 6 février 2018 sur le rapport annuel 2016 de la Banque centrale européenne[1],

–  vu le rapport annuel 2017 de la Banque centrale européenne (BCE),

–  vu les statuts du système européen de banques centrales (SEBC) et de la Banque centrale européenne, et en particulier les articles 2, 3, 7, 10.2, 15, 32.5 et 33.1,

–  vu l’article 129, paragraphe 3, l’article 130, l’article 138, paragraphe 2, l’article 282, paragraphes 2 et 3, l’article 283, paragraphe 2, et l’article 284, paragraphe 3 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (le «traité FUE»),

–  vu le discours prononcé à Sintra par le président de la BCE, Mario Draghi, le 19 juin 2018,

–  vu le numéro 5/2018 du bulletin économique de la BCE,

–  vu l’article 11 du règlement (CE) nº 974/98 du Conseil du 3 mai 1998 concernant l’introduction de l’euro,

–  vu l’article 128, paragraphe 1, du traité FUE relatif au cours légal des billets de banque émis en euros[2],

–  vu le retour d’information de la BCE sur la contribution apportée par le Parlement dans sa résolution sur le rapport annuel de la BCE pour 2016,

–  vu le rapport économique annuel 2017 de la Banque des règlements internationaux,

–  vu le rapport du comité européen du risque systémique (CERS) de novembre 2016 intitulé «Vulnérabilités dans le secteur immobilier résidentiel de l’UE» et les avertissements spécifiques par pays qui l’accompagnent adressés à huit États membres,

–  vu l’article 132, paragraphe 1, de son règlement intérieur,

–  vu le rapport de la commission des affaires économiques et monétaires (A8-0424/2018),

A.  considérant que l’euro reste incontestablement la deuxième monnaie la plus importante du système monétaire international; que l’opinion publique était largement favorable à l’euro en 2017, près des trois quarts des personnes interrogées dans la zone euro (73 %) s’étant exprimés en faveur de l’euro, le score le plus élevé atteint depuis l’automne 2004;

B.  considérant que, selon les prévisions de l’été 2018 de la Commission, le PIB de l’Union et de la zone euro a progressé de 2,4 % en 2017, soit plus que celui des États-Unis; que, selon ces mêmes prévisions, il devrait augmenter de 2,1 % et de 2,0 %, respectivement, en 2018 et 2019;

C.  considérant que les chiffres les plus récents de 2018 indiquent un certain ralentissement de la croissance par rapport aux bons résultats de 2017 du fait d’un commerce extérieur moins dynamique et de l’augmentation des prix du pétrole;

D.  considérant que, selon les chiffres publiés par Eurostat en mai 2018, le taux de chômage a désormais presque retrouvé son niveau d’avant la crise, soit 7,0 % et 8,4 %, respectivement, pour l’Union et pour la zone euro; que le nombre de personnes salariées et la participation au marché du travail dans la zone euro sont à leurs plus hauts niveaux depuis le lancement de l’Union économique et monétaire, en 1999;

E.  considérant qu’en dépit d’une certaine convergence, les taux de croissance et de chômage restent très inégaux sur le plan géographique, ce qui entraîne une fragilité dangereuse de l’économie et compromet un développement solide et équilibré; que le taux de chômage des jeunes dans l’Union et la zone euro, de 16,8 % et 18,8 %, respectivement, à la fin de 2017, était plus de deux fois supérieur au taux de chômage moyen;

F.  considérant que l’actuelle expansion économique généralisée repose principalement sur les exportations et la consommation intérieure dans les États membres; que l’an dernier, l’investissement a progressé à un rythme inégalé depuis 2007, étayé par la reprise générale de l’économie mondiale et par le plan d’investissement pour l’Europe; que l’EFSI a joué un rôle dans la réduction du déficit d’investissement dans l’Union européenne en mobilisant des investissements à hauteur de 256,9 milliards d’euros au total et en apportant des fonds à près de 550 000 PME soutenues par le Fonds d'investissement européen;

G.  considérant que les pays de l’Union européenne qui n’ont pas adopté la monnaie unique et dont la monnaie bénéficie d’un taux de change flottant ont affiché des performances économiques inégales; que les États membres qui ont adopté la monnaie unique au cours des dix dernières années ont enregistré de meilleures performances que celles des pays appliquant un taux de change flottant;

H.  considérant que, selon les projections macroéconomiques établies par les services de l’Eurosystème en juin 2018, l’inflation annuelle de l’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH) pour la zone euro devrait revenir à 1,7 % en 2018, 2019 et 2020 après avoir été au plus bas; ce taux se rapproche de l’objectif d'inflation à moyen terme de la BCE d'une inflation d'un peu moins de 2 %, sans toutefois l’atteindre, et il y a lieu de noter d'importants écarts entre les taux d'inflation dans la zone euro; considérant que cette hausse de l’inflation globale est principalement due à l’appréciation des prix de l’énergie et que l’inflation sous-jacente n’a progressé que de 0,9 % à 1 % en 2016, sans donner de signes de progression tendancielle durable en 2017; qu’une progression des salaires tenant compte de la croissance de la productivité demeure une condition indispensable d’une hausse soutenue de l’inflation sous-jacente;

I.  considérant que, selon les prévisions du printemps 2018 de la Commission, le déficit public cumulé de la zone euro devrait passer de 0,9 % à 0,7 % du PIB en 2018 et continuer de reculer pour atteindre 0,6 % en 2019, tandis que le déficit des États-Unis et du Japon devrait s’élever à 5,9 % et à 2,7 % du PIB, respectivement;

J.  considérant que la BCE prévoit que l’inflation devrait augmenter progressivement à moyen terme, mouvement étayé par l'incidence de l’orientation actuelle de la politique monétaire, que l’économie continue de croître, que les salaires augmentent et que la morosité de l’économie se résorbe;

K.  considérant que les banques de la zone euro ont accéléré la réduction du nombre des prêts improductifs, qui sont passés de 8 % du total des prêts en 2014 à 4,9 % au quatrième trimestre de 2017; que le volume total des prêts improductifs dans l’Union s’élève toujours à 950 milliards d’euros; que ces prêts doivent être cédés, passés par pertes et profits ou dûment provisionnés afin de garantir la stabilité de la finance et d’éviter des répercussions négatives sur les titulaires de comptes courants, les épargnants et les investisseurs; qu’il existe des différences importantes entre les États membres en ce qui concerne le nombre de ces prêts improductifs; que dans huit États membres, la part des prêts improductifs est encore bien supérieure à 10 %, voire à 40 % pour deux d’entre eux;

L.  considérant qu’il est nécessaire de développer le marché secondaire pour les prêts improductifs afin de renforcer le marché des liquidités au niveau européen et d’éviter une éventuelle opacité des marchés;

M.  considérant que lors de sa réunion d’octobre 2017, le Conseil des gouverneurs de la BCE a décidé de poursuivre ses achats nets dans le cadre du programme d’achat d’actifs, au rythme de 30 milliards d’euros par mois jusqu’en septembre 2018; que lors de sa réunion de juin 2018, il a décidé de prolonger les achats mensuels jusqu’à la fin de l’année 2018 à raison d'un montant ramené à 15 milliards d’euros, puis d’y mettre un terme si les données confirment ses prévisions à moyen terme en matière d'inflation, décision confirmée lors de sa réunion de septembre 2018;

N.  considérant que le Conseil des gouverneurs de la BCE a confirmé ses prévisions en laissant inchangés le taux d’intérêt sur les principales opérations de refinancement ainsi que les taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal et de la facilité de dépôt, maintenus, respectivement, à 0,00 %, à 0,25 % et à 0,40 % au moins jusqu’à l’été 2019 et, en tout état de cause, jusqu’à un ajustement durable de l’évolution de l’inflation conforme à l’objectif à moyen terme de la BCE;

O.  considérant que le dernier déploiement d’opérations ciblées de refinancement à long terme (TLTRO), en 2017, a témoigné de la progression de la demande des banques de la zone euro; que l’objectif de ces opérations est de stimuler les prêts bancaires à l’économie réelle;

P.  considérant qu’à la fin de l’année 2017, le bilan de l’Eurosystème a atteint le niveau sans précédent de 4 500 milliards d’euros, soit une augmentation de 800 millions d’euros par rapport à la fin de l’année 2016, ce qui représente 41 % du PIB total de la zone euro; que, par son programme d’achat de titres, la BCE a introduit dans son bilan des risques importants;

Q.  considérant qu’en 2017, le nombre et la valeur des billets en euros en circulation ont augmenté d’environ 5,9 % et 4,0 %, respectivement, tandis que le nombre et la valeur des pièces en euros ont augmenté de 4,2 % et 4,0 %;

R.  considérant qu’en 2017, le bénéfice net de la BCE s’élevait à 1 275 millions d’euros, contre 1 193 millions d’euros en 2016; que cette progression peut principalement être attribuée à l’augmentation des produits d’intérêts nets;

S.  considérant que les membres du directoire de la BCE ont toujours insisté sur l’importance de mettre en œuvre des réformes propres à accroître la productivité dans la zone euro et des politiques budgétaires propices à la croissance dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance;

T.  considérant que l’article 123 du traité FUE et l’article 21 des statuts du SEBC et de la BCE interdisent le financement monétaire des gouvernements;

U.  considérant que, dans le cadre de son activité de surveillance, la Banque centrale européenne n’a pas toujours suffisamment tenu compte du principe de proportionnalité;

Généralités

1.  se félicite que le soutien populaire à l’euro ait augmenté de 8 points de pourcentage en 2017 par rapport à 2016, près des deux tiers des personnes interrogées (64 %) estimant que la monnaie unique est une bonne chose pour leur pays;

2.  souligne que l’euro est un projet politique avant d’être un projet économique; insiste sur le caractère irréversible de la monnaie unique;

3.  attire l’attention sur l’obligation faite à tous les États membres, à l’exception du Royaume-Uni et du Danemark, d’adopter la monnaie unique dès lors que les critères de convergence de Maastricht sont satisfaits; est d’avis que la participation à l’Union bancaire doit être considérée comme un critère déterminant pour les pays qui souhaitent intégrer la zone euro;

4.  souligne que l’indépendance statutaire de la BCE, inscrite dans les traités, est essentielle à la réalisation de la mission qui lui incombe en matière de stabilité des prix et à la protection de l'institution dans sa globalité contre toute ingérence politique;

5.  souligne que la BCE est responsable de la politique monétaire de la zone euro dans son ensemble; rappelle que les règles de la BCE disposent que les membres du directoire ne représentent pas leur État membre, n’ont pas de droit de veto et ne doivent recevoir d’instructions d’aucun gouvernement, institution ni autre organe, afin que celle-ci puisse agir de manière résolue;

6.  relève que la politique monétaire a contribué à préserver la monnaie unique et la stabilité de l’Union économique et monétaire;

7.  réaffirme que l’indépendance de la BCE permet aux membres du directoire de décider, de manière responsable et sous réserve de l’obligation de rendre dûment compte de leur action, de participer à des instances, même fermées au public, s’ils estiment qu’une telle mesure nécessaire pour garantir la bonne marche de la politique monétaire de la BCE; prend acte de l’avis de la Médiatrice du 5 juillet 2018;

8.  invite la BCE à se concentrer sur son objectif premier de stabilité des prix; rappelle que, conformément aux dispositions de l’article 2 de son statut et de l’article 127 du traité FUE ainsi qu’aux précisions complémentaires énoncées par l’article 282 dudit traité, la BCE doit, sans préjudice de son objectif principal de stabilité des prix, apporter «son soutien aux politiques économiques générales dans l'Union, en vue de contribuer à la réalisation des objectifs de l'Union, tels que définis à l'article 3 du traité sur l'Union européenne»;

9.  relève que taux de croissance de l’économie de l’Union a atteint en 2017 son niveau le plus élevé en 10 ans et que tous les États membres ont connu une expansion de leur économie; constate que le taux de chômage dans l’Union européenne se situe à son niveau le plus bas depuis 2008, bien que les jeunes continuent d’être sévèrement touchés par le chômage; salue le rôle joué par la BCE au regard des réformes structurelles menées pour engendrer une croissance durable et inclusive dans certains États membres dans le cadre de la politique de relance mise en œuvre; rappelle qu'il importe d’évaluer les répercussions économiques et sociales de ces réformes;

10.  met toutefois en garde contre les incertitudes suscitées par des facteurs tels que la menace de progression du protectionnisme; les négociations du Brexit; les risques de formation de bulles d’actifs; la crise des marchés émergents; le niveau historiquement élevé de la dette publique et privée; l'instabilité générale des marchés financiers liée en particulier aux risques politiques dans certains États membres, lesquels nuisent aux perspectives de croissance de la zone euro; la montée en puissance du populisme, de l'isolationnisme et de l’ethnocentrisme sur l’ensemble du spectre politique; le rejet de la mondialisation; et les divergences croissantes entre les États membres concernant l’avenir de l’intégration européenne;

11.  souligne que le rapport économique annuel 2018 de la Banque des règlements internationaux (BRI) fait état d'une amplification des déséquilibres financiers, en particulier dans des pays largement épargnés par la crise financière mondiale, car contrairement aux pays touchés de plein fouet par cette crise, le secteur privé n’y a pas pris de mesures de désendettement; note que ces déséquilibres prennent la forme de fortes augmentations des crédits au secteur privé;

12.  insiste sur le fait qu'il est indispensable, dans ces conditions, de maintenir un environnement favorable à l’investissement public et privé, qui reste inférieur aux niveaux d’avant la crise; encourage la BCE à continuer de prendre des mesures dans le droit fil de son mandat afin de contribuer à la réalisation de cet objectif; rappelle toutefois qu’une expansion stimulée par le crédit peut se solder par une mauvaise affectation des ressources

Réformes structurelles

13.  estime qu’à elle seule, la politique monétaire ne permet pas d’engendrer une reprise économique durable; rappelle l’effet contracyclique de la politique monétaire dans le contexte du redressement qui a suivi la crise, mais estime que la contribution structurelle de la politique monétaire à la croissance durable est limitée; presse donc les responsables des politiques de soutenir la reprise économique au-delà du court terme par la mise en œuvre d’un dispositif de réformes structurelles et de politiques budgétaires ambitieux et socialement équilibré, qui favorise la croissance et stimule la productivité, dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance et des dispositions en matière de flexibilité qu'il prévoit; rappelle la déclaration du président du comité budgétaire européen adressée à la commission des affaires économiques et monétaires le 5 novembre 2018, selon laquelle «la souplesse des règles est une pratique qui dépend des circonstances», ainsi que l’avis exprimé dans le rapport de juin 2018, selon lequel «dans l'optique de préserver la crédibilité du pacte de stabilité, il convient d’en appliquer les dispositions en matière de flexibilité de manière symétrique et pas seulement lorsque l’économie se dérègle ou montre des signes de faiblesse»;

14.  souligne que pour garantir l’efficacité de la politique monétaire, les déséquilibres macroéconomiques excessifs doivent être corrigés par des mesures budgétaires et économiques appropriées et des réformes visant à améliorer la productivité; précise que la politique monétaire de la BCE ne peut se substituer à des réformes structurelles durables, lesquelles relèvent de la responsabilité des États membres;

15.  note avec inquiétude que la part d’investissements directs étrangers de l’Union dans le monde a nettement baissé depuis la crise;

16.  prend acte de l’avis de la BCE en faveur de la mise en place d’un système européen d’assurance des dépôts en tant que troisième pilier de l’union bancaire; souligne le rôle déterminant du projet de système européen d’assurance des dépôts (SEAD) pour instaurer la confiance et garantir la sécurité de tous les dépôts au sein de l’union bancaire; souligne que le SEAD pourrait contribuer à renforcer encore et à préserver la stabilité financière; souligne que le partage et la réduction des risques devraient aller de pair;

Programme d’achat d’actifs

17.  souligne que les mesures non conventionnelles de politique monétaire de la BCE ont contribué à prévenir les risques de déflation, qui étaient toujours présents au début de 2016, et à stimuler la relance du crédit au secteur privé, qui affichait une croissance annuelle d’environ 3 % à la mi-2018, contre 0 % en 2015;

18.  partage l’avis de la BCE selon lequel des mesures budgétaires de soutien durables, des réformes visant à renforcer la compétitivité, la productivité et la croissance ainsi que des hausses de salaires conformes à la progression de la productivité sont nécessaires pour atteindre l’objectif en matière d'inflation; demande donc aux États membres de redoubler d’efforts suivant les principes du «triangle vertueux» formé par la stimulation de l’investissement, la mise en œuvre de réformes structurelles favorables à la croissance et socialement équilibrées ainsi que des politiques budgétaires responsables;

19.  est préoccupé par la hausse rapide des prix de l’immobilier dans certains États membres; appelle par conséquent à la vigilance contre le risque de réapparition de bulles immobilières et d’endettement excessif des ménages et du secteur privé dans certains États membres;

20.  prend note des observations du président du CERS, Mario Draghi[3], qui estime que la principale cause de vulnérabilité qui entraîne la surchauffe des marchés immobiliers dans l’UE est la recherche de rendement d’investisseurs internationaux (notamment dans le cadre de financements transfrontières et du fait d’intermédiaires financiers non bancaires) et que les responsables politiques devraient déterminer s'il est opportun d’établir de nouveaux instruments macroprudentiels pour ces intermédiaires, notamment au regard de leur exposition au marché immobilier commercial;

21.  approuve la décision de la BCE, sans préjudice de son indépendance, de mettre fin à son programme d’achat d’actifs dès lors que les données confirmeront ses prévisions à moyen terme en matière d’inflation, et estime que cet instrument ne devrait être utilisé que de manière temporaire, car il engendre de nouveaux risques pour la stabilité financière et limite les incitations à assainir les finances publiques et à mettre en œuvre des réformes structurelles; reconnaît que le recours à la politique monétaire pour soutenir la reprise après la crise a également eu des répercussions involontaires;

22.  souligne en particulier que le recours durable aux mesures non conventionnelles peut avoir des effets distributifs négatifs; invite par conséquent la BCE à inclure dans son prochain rapport annuel une analyse complète et détaillée des effets indirects de ses mesures de politique monétaire, y compris des risques potentiels pour le secteur des assurances et des retraites;

23.  constate qu’avec des avoirs d'une valeur de 1 900 milliards d’euros à la fin de 2017, le programme d’achat de titres du secteur public (PSPP) représentait la part la plus importante du programme d’achat d’actifs; souligne qu’il importe de respecter la limite de 33 % par émetteur pour les achats du secteur public;

24.  constate que parmi tous les programmes d’achat du secteur privé, c’est le programme d’achat de titres du secteur des entreprises (CSPP) qui a le plus contribué au programme d’achat d’actifs en 2017, avec 82 milliards d’euros d’achats nets; salue le fait que, depuis 2017, la BCE publie la liste complète de tous les avoirs au titre du CSPP, y compris les noms des émetteurs, accompagnée de données agrégées sur ces avoirs ventilées par pays, par risque, par notation et par secteur; invite la BCE à appliquer une politique de transparence similaire pour tous les programmes d’achat d’actifs, y compris l’ABSPP et le CBPP3, ainsi que des mesures supplémentaires en vue de la publication des procédures opérationnelles utilisées dans le choix des titres achetés par les banques centrales nationales (BCN); souligne que le CSPP ne doit en aucun cas entraîner de distorsions de concurrence au sein du marché intérieur;

25.  rappelle que la BCE est une institution européenne et est, à ce titre, liée par l’accord de Paris; invite la BCE, dans le plein respect de son mandat, de son indépendance et du cadre de gestion des risques, à intégrer dans ses politiques l’engagement pris au titre de l’accord de Paris ainsi que les principes en matière économique et sociale et en matière de gouvernance;

26.  salue la transparence assurée par la BCE par ses orientations prospectives; prend acte de la décision de la BCE de maintenir des taux d’intérêt bas dans un contexte mondial marqué par l’incertitude;

27.  souligne qu'une bonne synchronisation et une mise en œuvre bien menée de la suppression progressive des mesures exceptionnelles de politique monétaire seront essentielles afin d’éviter des perturbations sur le marché; rappelle qu’il est possible de relever les taux tout en assurant la stabilité de la taille du bilan de l’Eurosystème si la situation économique l’exige;

28.  souligne l’importance de la communication et des orientations prospectives dans l’optique de normaliser la politique monétaire;

29.  est conscient que la normalisation de la politique monétaire aura des répercussions différentes sur les États membres selon le niveau et l’échéance de leur dette;

30.  souligne l’ampleur des changements réglementaires et structurels intervenus depuis la dernière crise économique et leur pertinence pour de nombreux domaines liés à la politique monétaire; insiste sur l’importance de la recherche et des études pour mieux comprendre le nouvel environnement résultant des évolutions intervenues au cours des dernières décennies et leurs conséquences pour la conduite de la politique monétaire;

31.  constate l'incidence du taux négatif pour la facilité de dépôt imposé aux banques depuis juin 2014; estime que cette mesure, si elle devait être maintenue, pourrait affecter la rentabilité du secteur bancaire et devrait être supprimée progressivement dans le cadre de la normalisation de la politique monétaire eu égard à la reprise actuelle;

32.  prend acte de l’éventualité de la poursuite des opérations ciblées de refinancement à long terme (TLTRO), qui permettent aux banques d’accéder à des financements à moyen terme à des conditions intéressantes, pour autant que ceux-ci soient effectivement utilisés pour octroyer de nouveaux crédits à l’économie réelle; constate la progression de la demande de la part des banques de la zone euro dont témoigne la mise en œuvre la plus récente de TLTRO, en 2017, laquelle pourrait s’expliquer par des perspectives de hausse des taux d’intérêt créditeurs et par la possibilité de réaliser des bénéfices à bon compte; invite la BCE à suivre attentivement cette évolution afin que les TLTRO servent effectivement à encourager les prêts bancaires à l’économie réelle;

33.  prend acte de l’augmentation des soldes TARGET2, qui témoigne de sorties de capitaux continues à la périphérie de la zone euro; relève que la BCE estime que l’évolution des soldes TARGET reflète dans une large mesure les flux de liquidités générés dans le cadre du programme d’achat d’actifs et n’est pas le symptôme d'un regain de tension sur les marchés financiers; demande à la BCE de clarifier les facteurs sous-jacents et les risques potentiels liés aux déséquilibres qui pourraient en découler;

Autres aspects

34.  salue l’adoption de l’accord sur la fourniture de liquidité d’urgence (ELA), qui précise la répartition des responsabilités, des coûts et des risques; relève que cet accord doit être révisé au plus tard en 2019; est d’avis qu'il convient de statuer sur le bénéfice de ce dispositif au niveau de l’Union;

35.  invite la BCE à publier l’intégralité des bénéfices réalisés par l’Eurosystème grâce à l'ANFA (accord sur les actifs financiers nets) et au SMP (programme pour les marchés de titres) entre 2010 et leur date d’expiration suivant une ventilation spécifique par pays pour les États membres qui ont fait l’objet d’acquisitions au titre du SMP (la Grèce, l’Irlande, le Portugal, l’Espagne et l’Italie);

36.  se félicite de la modification de l’article 22 des statuts du SEBC et de la BCE destinée à établir une base juridique claire pour permettre à l’Eurosystème de jouer son rôle de banque centrale d’émission au regard des contreparties centrales de compensation (CCC) et donner ainsi compétence à la BCE pour réguler l’activité des systèmes de compensation, dont les CCC, afin de réagir efficacement aux risques que présentent ces systèmes pour le bon fonctionnement des systèmes de paiement et la mise en œuvre de la politique monétaire unique;

37.  invite la BCE à suivre la recommandation de Transparency International, notamment en ce qui concerne son rôle au sein de la troïka;

38.  demande à la BCE de poursuivre ses efforts pour que les banques soient correctement préparées à toutes les éventualités qui peuvent découler du Brexit; invite en outre la BCE à prendre toutes les mesures requises pour garantir la stabilité des marchés financiers de l’Union, y compris en cas de Brexit sans accord;

39.  souligne que les États membres de la zone euro devraient mettre en œuvre une stratégie commune de réglementation du secteur financier à la suite du Brexit plutôt que de céder à la préjudiciable tentation du moins-disant réglementaire;

40.  convient qu’un marché de capitaux efficace, diversifié et intégré favorise la transmission de la politique monétaire unique; demande instamment l’accélération du projet d’union des marchés des capitaux (UMC) pour approfondir l’intégration financière, en vue de renforcer la résilience aux chocs, d’améliorer l’efficacité de la transmission de la politique monétaire dans l’union monétaire et de développer le partage des risques avec le secteur privé au sein de l’union bancaire et de l’Union dans son ensemble; relève que la CSPP aurait pu contribuer à assouplir les conditions de financement des entreprises, en particulier dans le secteur non financier (c’est-à-dire des sociétés non financières);

41.  estime que la mise en place d’une union des marchés de capitaux et l’achèvement progressif de l’union bancaire contribueront à resserrer et à améliorer les liens entre les marchés des capitaux européens et, partant, à la solidité et à la liquidité des marchés financiers de la zone euro et à la consolidation du statut international de l’euro;

42.  invite la BCE à rester attentive à l’accès au crédit des PME, compte tenu notamment de la lente amélioration de leur situation financière, dont témoigne l’enquête de juin 2018 sur l’accès au financement des entreprises (SAFE); souligne qu’une union des marchés de capitaux pleinement opérationnelle peut, à plus long terme, constituer pour les PME une source de financement complémentaire du secteur bancaire;

43.  estime que le moyen le plus rapide pour mettre en place une UMC pleinement opérationnelle consiste à s’attaquer aux réglementations nationales qui empêchent les marchés de capitaux d’avoir une incidence plus large dans l’ensemble de l’Union et à réduire la charge que représentent les nouvelles réglementations;

44.  invite la BCE à suivre de plus près l’évolution de la technologie des registres distribués et l’accroissement des risques liés à la cybersécurité auxquels est exposée la technologie financière ;

45.  prend acte du fait que la BCE convient qu’il est important d’étudier la pertinence et les répercussions de l’émission de monnaie électronique par les banques centrales pour le grand public; encourage la BCE à mener et à publier une telle étude;

46.  souligne l’importance de la sécurité informatique pour le secteur financier et les systèmes de paiement; demande à la BCE de rester attentive à cette question, à la promouvoir dans les enceintes internationales, ainsi qu’à poursuivre sa coopération avec le Contrôleur européen de la protection des données;

47.  partage l’avis de la BCE sur l’importance des espèces comme monnaie légale, l’euro étant la seule monnaie ayant cours légal dans la zone euro, et rappelle à tous les États membres de la zone euro que l’acceptation des pièces et billets en euros doit être la règle dans les transactions de détail, sans préjudice du droit des États membres d’introduire des plafonds pour les paiements en espèces afin de lutter contre le blanchiment de capitaux, la fraude fiscale et le financement du terrorisme et de la criminalité organisée;

48.  adhère aux positions exprimées par les membres du directoire sur l’importance d’élaborer des systèmes de paiement véritablement européens insensibles aux perturbations extérieures, de nature politique par exemple;

49.  attire l’attention sur l’appel lancé par le président Juncker dans son discours sur l’état de l’Union en 2018 concernant le rôle international de l’euro et la nécessité pour celui-ci de jouer pleinement son rôle sur la scène internationale;

50.  souligne qu’il importe que la BCE rende des comptes au Parlement; salue, à cet égard, le dialogue permanent entre la BCE et le Parlement et les interventions régulières du président de la BCE ainsi que, le cas échéant, d’autres membres du directoire devant la commission des affaires économiques et monétaires et l’assemblée plénière; encourage la BCE à poursuivre ce dialogue; souligne que la BCE a amélioré sa communication; estime que la BCE devrait poursuivre ses efforts afin de rendre accessibles et compréhensibles pour tous les citoyens ses décisions ainsi que ses actions visant à maintenir la stabilité des prix dans la zone euro et à préserver ainsi le pouvoir d’achat de la monnaie commune;

51.  félicite la BCE pour les efforts qu’elle a déployés jusqu’à présent afin d’accroître la transparence et rendre compte de son action aux citoyens européens et du Parlement;

52.  invite la commission des affaires économiques et monétaires à prendre des mesures pour améliorer l’organisation du dialogue monétaire avec le président de la BCE;

53.  se félicite que la BCE ait apporté au Parlement une réponse plus détaillée, section par section, sur la contribution de celui-ci au Rapport annuel 2016 de la banque; invite la BCE à poursuivre ses efforts pour rendre compte de son action et à continuer de publier tous les ans une réponse à la résolution du Parlement sur le rapport annuel de celle-ci;

54.  rappelle que d’importants changements surviendront dans les mois à venir au sein du Conseil des gouverneurs de la BCE, car les mandats de plusieurs membres, dont celui du président, arriveront à leur terme; estime que ces changements doivent être préparés avec soin et dans la transparence la plus totale vis-à-vis du Parlement, conformément aux traités; presse le Conseil d’établir une liste équilibrée d’au moins trois candidats pour tous les postes vacants à venir pour permettre au Parlement de jouer un rôle consultatif plus significatif dans le processus de nomination; réaffirme sa position en faveur d’un meilleur équilibre entre hommes et femmes, au sein du directoire et du personnel de la BCE plus généralement; souligne que les membres du directoire doivent être choisis uniquement sur la base de leur autorité reconnue et de leur expérience professionnelle dans le domaine monétaire ou bancaire;

55.  partage l’avis du président Draghi, qui a déclaré dans son discours du 13 septembre que les trop nombreuses annonces divergentes faites ces derniers mois et restées sans effet ont entraîné en Italie une hausse des rendements des obligations d’État et un creusement des écarts de taux qui ont été préjudiciables pour les entreprises et les ménages;

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56.  charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission.

  • [1]  Textes adoptés de cette date, P8_TA(2018)0025.
  • [2]  JO L 139 du 11.5.1998, p. 1.
  • [3]  Audition du CERS organisée par la commission des affaires économiques et monétaires le 9 juillet 2018.

INFORMATIONS SUR L’ADOPTIONPAR LA COMMISSION COMPÉTENTE AU FOND

Date de l’adoption

27.11.2018

 

 

 

Résultat du vote final

+:

–:

0:

39

2

3

Membres présents au moment du vote final

Hugues Bayet, Pervenche Berès, Esther de Lange, Jonás Fernández, Giuseppe Ferrandino, Stefan Gehrold, Sven Giegold, Gunnar Hökmark, Danuta Maria Hübner, Petr Ježek, Georgios Kyrtsos, Philippe Lamberts, Werner Langen, Bernd Lucke, Olle Ludvigsson, Ivana Maletić, Marisa Matias, Gabriel Mato, Alex Mayer, Bernard Monot, Caroline Nagtegaal, Luděk Niedermayer, Stanisław Ożóg, Anne Sander, Alfred Sant, Martin Schirdewan, Molly Scott Cato, Pedro Silva Pereira, Peter Simon, Theodor Dumitru Stolojan, Kay Swinburne, Paul Tang, Ramon Tremosa i Balcells, Marco Valli, Miguel Viegas, Jakob von Weizsäcker

Suppléants présents au moment du vote final

Jeppe Kofod, Thomas Mann, Luigi Morgano, Andreas Schwab, Joachim Starbatty, Lieve Wierinck

Suppléants (art. 200, par. 2) présents au moment du vote final

Luis de Grandes Pascual

VOTE FINAL PAR APPEL NOMINAL EN COMMISSION COMPÉTENTE AU FOND

39

+

ALDE

Thierry Cornillet, Petr Ježek, Caroline Nagtegaal, Ramon Tremosa i Balcells, Lieve Wierinck

ECR

Bernd Lucke, Stanisław Ożóg, Joachim Starbatty, Kay Swinburne

PPE

Stefan Gehrold, Luis de Grandes Pascual, Gunnar Hökmark, Danuta Maria Hübner, Georgios Kyrtsos, Esther de Lange, Werner Langen, Ivana Maletić, Thomas Mann, Gabriel Mato, Luděk Niedermayer, Anne Sander, Andreas Schwab, Theodor Dumitru Stolojan

S&D

Hugues Bayet, Pervenche Berès, Jonás Fernández, Giuseppe Ferrandino, Jeppe Kofod, Olle Ludvigsson, Alex Mayer, Luigi Morgano, Alfred Sant, Pedro Silva Pereira, Peter Simon, Paul Tang, Jakob von Weizsäcker

Verts/ALE

Sven Giegold, Philippe Lamberts, Molly Scott Cato

2

-

EFDD

Bernard Monot, Marco Valli

3

0

GUE/NGL

Marisa Matias, Martin Schirdewan, Miguel Viegas

Légende des signes utilisés:

+  :  pour

-  :  contre

0  :  abstention

Dernière mise à jour: 8 janvier 2019
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