Proposition de résolution - B6-0105/2005Proposition de résolution
B6-0105/2005

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

16.2.2005

déposée à la suite des questions pour réponse orale B6‑0005/2005 et B6‑0006/2005
conformément à l'article 108, paragraphe 5, du règlement
par Frithjof Schmidt, Marie-Hélène Aubert, Margrete Auken, Carl Schlyter et Jean Lambert
au nom du groupe Verts/ALE
sur l'action contre la faim et la pauvreté

Procédure : 2005/2507(RSP)
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B6-0105/2005
Textes déposés :
B6-0105/2005
Textes adoptés :

B6‑0105/2005

Résolution du Parlement européen sur l'action contre la faim et la pauvreté

Le Parlement européen,

–  vu la déclaration de New York sur l'action contre la faim et la pauvreté,

–  vu la campagne internationale connue sous le titre d'appel mondial à l'action contre la pauvreté, qui a été lancée par une large alliance de personnes, d'organisations ainsi que de réseaux nationaux et internationaux résolus à éradiquer la pauvreté, et qui est soutenue par Nelson Mandela,

–  vu le rapport 2002 de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED) sur les pays les moins avancés (PMA), intitulé "Échapper au piège de la pauvreté",

–  vu l'article 108, paragraphe 5, de son règlement,

A.  considérant que, conformément au rapport 2002 de la CNUCED sur les PMA, le nombre de personnes vivant en situation de pauvreté extrême a plus que doublé au cours de ces trente dernières années, passant de 138 millions dans les années 1960 à 307 millions dans les années 1990, et que, si les tendances actuelles persistaient, le nombre de personnes ayant moins d'un dollar par jour pour subsister passerait de 307 millions à 420 millions d'ici à 2015,

B.  considérant que la pauvreté n'est pas une fatalité mais plutôt le résultat de choix politiques et économiques, à l'échelon national, régional et international,

C.  considérant que, presque 10 ans après l'engagement pris lors du Sommet mondial de l'alimentation de 1996 de réduire de moitié, d'ici à 2015, le nombre des personnes souffrant de sous-alimentation, cet objectif est loin d'être réalisé,

D.  considérant que la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement, consistant à réduire de moitié, d'ici à 2015, la pauvreté et la faim dans le monde, à garantir une éducation pour tous, à améliorer les normes sanitaires, à enrayer la propagation des principales maladies et à s'attaquer à la dégradation de l'environnement, est sérieusement compromise par manque d'une volonté réelle des dirigeants du monde de combattre les causes premières de la pauvreté,

E.  considérant que les mesures proposées jusqu'à présent par les pays riches et les institutions financières internationales pour combattre la pauvreté, telles que les programmes d'ajustement structurel, la privatisation d'entreprises publiques et la libéralisation des marchés, ont au contraire encore aggravé les problèmes des pays en développement,

F.  considérant que l'action contre la pauvreté exige avant tout un changement de politique radical, aussi bien dans les pays industrialisés que dans les pays en développement, consistant à s'attaquer aux causes structurelles de la pauvreté, y compris aux règles déloyales du commerce mondial, à l'obligation, irréalisable, imposée aux pays en développement de rembourser leur dette aux institutions financières internationales, et à la distribution injuste des richesses,

G.  préoccupé par les négociations actuellement en cours en matière de libre-échange entre l'UE et les pays ACP, au titre des accords de partenariat économique tels que définis à Cotonou, et signalant que l'UE y inclut les questions dites de Singapour alors même qu'elles ont été rejetées par les États ACP au sein de l'Organisation mondiale du commerce,

1.  considère que la déclaration des Nations unies sur le droit au développement, spécifiant que les États ont le devoir de coopérer les uns avec les autres pour éliminer les obstacles au développement et de s'acquitter de leurs devoirs en promouvant un nouvel ordre économique fondé sur l'égalité souveraine, l'interdépendance et l'intérêt commun de façon à encourager la jouissance des droits de l'homme, devrait être mise en œuvre;

2.  estime que la lutte contre la pauvreté et l'insécurité alimentaire doit viser les causes structurelles de la pauvreté dans les pays en développement et demande par conséquent que des règles commerciales justes et équitables soient établies, que des mesures soient prises pour favoriser l'accès à la terre, à l'eau et aux ressources de la biodiversité ainsi que des mesures visant à encourager une politique de soutien local aux petites exploitations agricoles durables;

3.  estime qu'il est illusoire d'espérer réaliser les objectifs du Millénaire pour le développement consistant à réduire de moitié, d'ici à 2015, la pauvreté et la faim dans le monde, à garantir une éducation pour tous et à améliorer les normes sanitaires, alors que les pays en développement consacrent quatre fois plus de leurs dépenses au remboursement de la dette qu'à des investissements dans des services sociaux de base, et demande l'annulation des dettes bilatérales et multilatérales des pays en développement, dont le remboursement engloutit plus de 40 % des budgets des PMA;

4.  demande aux dirigeants de l'UE et des pays industrialisés de prendre des mesures concrètes contre la pauvreté en éliminant les subventions à l'exportation qui portent atteinte à la production alimentaire et au développement économique locaux;

5.  demande à l'UE de prendre des mesures concrètes contre la pauvreté en veillant à assurer la cohérence de ses politiques dans les domaines du commerce, de la coopération au développement et de l'agriculture, en vue de prévenir toute incidence négative, directe ou indirecte, sur les économies des pays en développement, l'un des exemples négatifs étant que l'exportation par l'UE de poulets surgelés vers l'Afrique occidentale fait disparaître du marché les éleveurs de volaille africains;

6.  demande aux États membres de l'UE de respecter l'engagement qu'ils ont pris d'allouer 0,7 % de leur PIB à l'aide au développement et réitère sa demande relative à la mise en place d'un prélèvement de solidarité sur la richesse générée par les transactions financières internationales afin d'aider les pays en développement et de réduire les préjudices entraînés par la mondialisation;

7.  reconnaît le droit des pays en développement à protéger leur agriculture et d'autres secteurs économiques afin de garantir des revenus décents à leurs populations et de développer leur économie, tout comme l'Europe et d'autres pays industrialisés l'ont fait;

8.  estime que la lutte contre la pauvreté doit inclure la reconnaissance du droit d'un pays ou d'une région à définir démocratiquement ses propres politiques, priorités et stratégies visant à promouvoir la production alimentaire et le développement économique durables en mobilisant ses ressources naturelles et humaines et son savoir-faire local;

9.  estime que les politiques nationales et régionales de développement doivent être démocratiquement déterminées par les peuples eux-mêmes et que leurs gouvernements respectifs devraient en être rendus responsables par des institutions démocratiques et non pas sur la base d'une conditionnalité liée aux intérêts stratégiques des bailleurs de fonds;

10.  considère que des accords de libre-échange conclus entre partenaires inégaux et basés sur l'élimination des tarifs douaniers indépendamment du niveau de développement atteint par un pays donné ont aggravé la faim et la pauvreté dans les pays en développement;

11.  demande une évaluation complète de l'impact des politiques actuelles de libéralisation commerciale sur la faim et la pauvreté dans les pays en développement et demande que les résultats de cette évaluation soient utilisés afin de formuler des orientations claires pour la coopération au développement;

12.  exprime sa préoccupation face aux propositions actuelles de l'UE en matière de libre-échange avec les pays ACP, au titre des accords de partenariat économique (APE) tels que définis à Cotonou, aboutissant à la libéralisation des échanges, y compris pour les produits agricoles, et considère que cette politique met en danger le développement des pays ACP et les empêchera de nourrir leurs propres populations et de développer leurs propres industries;

13.  considère inacceptable d'inclure les questions dites de Singapour dans les négociations sur les APE alors même qu'elles ont été rejetées par les États ACP lors de la Conférence ministérielle de l'Organisation mondiale du commerce à Cancún et estime que ces questions doivent être retirées de l'ordre du jour des négociations sur les APE;

14.  demande à l'UE de soutenir la transformation structurelle des économies des pays pauvres afin que leurs structures de production puissent passer d'une économie dépendante des exportations à une stratégie intra-régionale de développement durable, prenant en compte les besoins réels des citoyens et visant à réduire la dépendance par rapport aux pays industrialisés et à développer des marchés nationaux et régionaux;

15.  charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission et aux États membres.