PROPOSITION DE RÉSOLUTION
13.2.2006
conformément à l'article 115 du règlement
par Pasqualina Napoletano, María Elena Valenciano Martínez-Orozco, Martine Roure and Panagiotis Beglitis,
au nom du groupe PSE
sur Guantanamo
B6‑0112/06
Résolution du Parlement européen sur Guantanamo
Le Parlement européen,
- vu ses résolutions antérieures sur les droits des détenus de Guantanamo à un procès équitable et en particulier sa résolution du 7 février 2002 sur les conditions de détention des prisonniers à Guantanamo et sa recommandation au Conseil du 10 mars 2004,
- vu sa résolution du 28 avril 2005 sur la situation des droits de l'homme dans le monde en 2004,
- vu le Pacte international sur les droits civils et politiques de 1966,
- vu la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants adoptée par l'Assemblée générale des Nations unies le 10 décembre 1984,
- vu les lignes directrices de l'Union européenne concernant la lutte contre la torture et la peine de mort, et sur le dialogue avec des pays tiers en matière des droits de l'homme, adoptées en 2001,
- vu la nouvelle législation des États Unis, Army Regulation 190–55 en vigueur à partir le 17 février 2006, qui étend la possibilité d'exécuter des prisonniers condamnés à mort par des Cours militaires à tous les centres de détention, y inclus celui de Guantanamo,
- vu projet de loi concernant les dépenses militaires pour l'année 2006 approuvé par le Congrès et le Sénat des États Unis,
- vu l'article 115, paragraphe 5, de son règlement,
A. Réaffirmant que l'abolition de la peine de mort - peine inique, dégradante et contraire aux principes universels de justice - est essentielle pour permettre l'affirmation de la dignité de la personne humaine et le développement progressif des droits de l'homme, dont le premier est le droit à la vie,
B. considérant que les États-Unis sont signataires de la troisième Convention de Genève relative au traitement des prisonniers de guerre et de la quatrième Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre, que le premier Protocole additionnel aux Conventions de Genève relatif à la protection des victimes des conflits armés internationaux fait partie du droit international coutumier, et que les États-Unis sont signataires du Pacte international sur les droits civils et politiques, qui constitue le cadre juridique pertinent pour déterminer si la détention des prisonniers à Guantanamo peut ou non être considérée comme arbitraire,
C. | considérant que ni le décret militaire du Président Bush du 13 novembre 2001 sur la détention, le traitement et le jugement de certains non-citoyens dans la lutte contre le terrorisme, ni les décrets ultérieurs du secrétariat d'État américain à la défense sur les | tribunaux militaires ne doivent être considérés comme un cadre adéquat pour la mise en œuvre des dispositions du droit international dans le cadre de la procédure et du jugement équitable prévus, |
D. considérant que chaque prisonnier doit être jugé sans retard excessif et entendu publiquement et équitablement par un tribunal compétent, indépendant et impartial,
E. considérant que près de 500 hommes de quelque 35 nationalités sont détenus illégalement depuis quatre ans sur la base navale de Guantanamo, que des accusations de crimes de guerre ne pèsent que contre 10 d'entre eux,
F. préoccupé par l'état de santé des prisonniers qui observent la grève de faim à Guantanamo, plusieurs d'entre eux depuis le 8 août, et qui sont nourris de force, d'après leur propre témoignage,
G. considérant que le rapporteur spécial de l'ONU sur la torture, Manfred Nowak, a déclaré en référence aux témoignages sur l'alimentation forcée, que s'ils étaient vrais, il s'agirait de traitements cruels, inhumains ou dégradants;
H. déplorant le fait que les Etats- Unis n'ont pas, jusqu'à présent, reconnu les compétences de la Cour Pénal Internationale et au contraire ils ont signé des accords bilatéraux avec certains pays européens pour que les citoyens américains soient exclus des compétences de la Cour;
1. demande la fermeture du centre de détention et la remise en liberté de tous les détenus, à moins qu’ils ne soient jugés sur le territoire américain dans le plein respect des normes internationales d’équité et sans encourir la peine de mort;
2. demande aux autorités américaines de mettre immédiatement un terme au vide juridique actuel dans lequel sont plongés les détenus depuis leur arrivée à Guantanamo et de garantir sans délai un accès à la justice afin de déterminer le statut de chaque détenu au cas par cas;
3. demande instamment aux États-Unis de satisfaire pleinement aux obligations prévues au titre des lois humanitaires internationales et des droits de l'homme, en respectant la véritable définition du statut des combattants, ainsi qu'en préservant le traitement des prisonniers de guerre; exhorte à nouveau les États-Unis à abolir la peine de mort, à décréter une moratoire immédiat sur les exécutions et à adhérer au statut de Rome sur la Cour pénale internationale;
4. salue l'approbation par le Congrès, et par le Sénat des États Unis, de l'amendement dit McCain au projet de loi concernant les dépenses militaires pour l'année 2006, établissant qu'"aucun individu détenu ou sous le contrôle physique du gouvernement des États-Unis, quelle que soit sa nationalité ou l’endroit où il se trouve, doit être soumis à des traitements ou à des punitions cruels, inhumains ou dégradants;
5. Exhorte les États-Unis à respecter leurs obligations au titre de la Convention sur la lutte contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et notamment son article 3, qui interdit à tout État partie d'expulser, de refouler ou d'extrader une personne vers un autre État où il y a des motifs sérieux de croire qu'elle risque d'être soumise à la torture;
6. Rappelle que le Comité des droits de l’homme des Nations unies a conclu que la souffrance des familles des «disparus» liée au fait que les autorités les privent de leur droit de savoir ce qu’il est advenu de leurs proches peut constituer un acte de torture ou des mauvais traitements, et demande aux autorités américaines de publier une liste exhaustive de toutes les personnes détenues à Guantánamo dans le cadre de la «guerre contre le terrorisme» afin que leurs familles puissent connaître leur sort;
7. Invite les autorités des Etats Unis à permettre une enquête impartiale et indépendante sur les allégations de torture et de mauvais traitements concernant toutes les personnes détenues par les Etats Unis dans le cadre de la "guerre contre le terrorisme",
8. Rappelle que la sécurité est un concept collectif global qui nécessite une approche multilatérale et que les traités internationaux sont les éléments fondamentaux sur lesquels doivent reposer ce cadre multilatéral pour la sécurité de l'humanité et un partenariat transatlantique renouvelé;
9. Demande à la Présidence du Conseil et à la Commission Européenne de soulever auprès des autorités des États Unis la situation des prisonniers détenus à Guantanamo et leur droit à un jugement juste, ainsi que d'inclure cette question dans l'Agenda du prochain sommet UE-États Unis;
10. Demande à son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, au gouvernement des États Unies, au Congrès et au Sénat des États Unis, au Secrétaire Général des Nations Unies et à la Haute Commissaire des Nations unies pour les Droits de l'homme.