PROPOSITION DE RÉSOLUTION
28.6.2006
conformément à l'article 103, paragraphe 2, du règlement
par Luisa Morgantini, Feleknas Uca, Vittorio Agnoletto, Eva-Britt Svensson et Adamos Adamou
au nom du groupe GUE/NGL
sur le VIH/SIDA : "Passons aux actes"
B6‑0375/2006
Résolution du Parlement européen sur le VIH/SIDA : "Passons aux actes"
Le Parlement européen,
– vu la réunion de haut niveau de la session extraordinaire de l'Assemblée générale des Nations unies sur le VIH/SIDA (UNGASS) tenue le 2 juin 2006 et la déclaration politique adoptée lors de cette réunion,
– vu la déclaration d'engagement des Nations unies sur le VIH/SIDA, "A crise mondiale, action mondiale", adoptée par l'Assemblée générale des Nations unies le 27 juin 2001, durant la 26è session extraordinaire de l'Assemblée générale,
– vu la note de synthèse des Nations unies sur la "Prévention de la transmission du VIH chez les toxicomanes",
– vu la prochaine conférence internationale intitulée "VIH/SIDA : Passons aux actes", qui doit se tenir en août 2006,
– vu les objectifs de développement du millénaire,
– vu l'article 103, paragraphe 2, de son règlement,
A. considérant que la réalisation des droits de l'homme et les libertés fondamentales pour tous est essentielle pour réduire la vulnérabilité au VIH/SIDA,
B. considérant que la discrimination et la stigmatisation de personnes vivant avec le HIV/SIDA entrave les soins et services corrects,
C. considérant que plus de 65 millions de personnes dans le monde ont été infectés par le VIH, que plus de 25 millions de personnes en sont mortes, que 15 millions d'enfants sont devenus orphelins à cause du SIDA et que sur les 40 millions de personnes actuellement atteintes du VIH, plus de 95% vivent dans le monde en développement, avec plus de 70% dans la seule Afrique sub-saharienne,
D. considérant que les femmes représentent aujourd'hui la moitié des personnes atteintes du SIDA et que 60% des personnes atteintes du SIDA se trouvent en Afrique, les femmes étant entre deux à quatre fois plus susceptibles d'attraper la maladie que les hommes,
E. considérant que plus de la moitié de toutes les nouvelles infections par le VIH touchent des jeunes de moins de 25 ans,
F. considérant que le terme "populations vulnérables" comprend les femmes et les filles, les jeunes gens, les personnes âgées, la communauté homosexuelle, les toxicomanes, les prostituées, les personnes vivant dans la pauvreté, les prisonniers, les personnes vivant dans des zones en conflit et en situation de post-conflit, les réfugiés et les personnes déplacées, ainsi que les animateurs de planning familial pour le VIH/SIDA et les personnes vivant avec des malades du VIH/SIDA,
G. considérant que plus de deux millions d'enfants sont touchés en Afrique, mais qu'il n'y a pas moyen de diagnostiquer un enfant avant l'âge de 18 mois, et que la moitié d'entre eux meurt,
H. considérant, comme souligné dans le dernier rapport ONUSIDA/OMS : "Le point sur l'épidémie de SIDA - décembre 2005", le développement de nouveaux outils tels que les micro-biocides doit être soutenu afin de prévoir des options supplémentaires de réaction et devrait faire partie de vastes stratégies de prévention,
I. considérant que beaucoup d'organisations proches de l'UNGASS ont rapporté que les intérêts politiques et économiques des pays et blocs parties aux négociations étaient influencés par les intérêts politiques et économiques de certains pays, affaiblissant semble-t-il les engagements financiers pris pour lutter contre la maladie,
J. considérant que la déclaration de Doha a placé la protection de la santé publique au-dessus de la protection des intérêts commerciaux privés et a confirmé le droit des pays en développement d'utiliser les sauvegardes de l'accord ADPIC, telles que les licences obligatoires, pour contourner les brevets si nécessaire, pour protéger la santé publique et promouvoir l'accès aux médicaments pour tous,
K. considérant que le poids de la dette, les programmes d'ajustement structurels et la pression actuelle pour libéraliser les services réduisent la capacité de beaucoup de pays en développement à fournir des services de base (distribution d'eau, santé, éducation) à toute leur population, ce qui est essentiel pour réduire les conséquences des maladies,
L. considérant que le système actuel de fixation des prix fondé sur les firmes qui accordent des réductions volontaires sur les médicaments aux pays en développement ne garantit pas des prix abordables, certains médicaments à source unique demeurant trop chers même avec une réduction; certaines réductions n'étant pas disponibles parce que les fabricants ne se sont pas enregistrés ou ne commercialisent pas leurs médicaments dans certains pays, et certaines firmes n'offrant pas de réduction du tout aux pays à revenus moyens,
1. salue la déclaration de l'UNGASS du 2 juin 2006, en particulier ses références aux groupes vulnérables, l'accent mis sur les femmes, les filles et les jeunes gens, la féminisation croissante du SIDA, le rôle que l'inégalité des genres et la violence contre les femmes jouent dans la vulnérabilité croissante au VIH/SIDA et l'extension de la définition de l'accès universel à de larges programmes de prévention, au traitement, aux soins et au soutien;
2. regrette néanmoins le fait que les objectifs internationaux en matière de VIH/SIDA n'aient pas encore été atteints, et le manque d'engagement ferme sur la question de savoir d'où viendront les 20-23 milliards de dollars supplémentaires qui seront nécessaires d'ici 2010;
3. demande à la communauté internationale de traduire ses promesses en actes durant la Conférence de Toronto en août, et demande à la Commission et aux États membres de veiller à ce que les dépenses de santé dans les pays en développement atteignent des niveaux proportionnels aux engagements politiques qui ont été pris, à la fois en termes d'objectifs de développement du millénaire en général et de lutte contre le VIH/SIDA en particulier;
4. reproche à la Commission de n'avoir pas pris en compte la résolution du Parlement européen sur la journée mondiale du SIDA de décembre 2004;
5. souligne que pour effectivement arrêter et enrayer la propagation du VIH/SIDA, il doit y avoir une reconnaissance universelle des groupes les plus vulnérables, afin de pouvoir prendre les mesures préventives appropriées pour arrêter la propagation de l'infection, notamment la participation de filles et de femmes séropositives dans le développement et la mise en œuvre de programmes et la participation des hommes à la santé sexuelle et aux droits sexuels;
6. souligne que les stratégies de prévention doivent reconnaître la réalité que beaucoup de femmes et de filles n'ont pas le contrôle sur leur propre sexualité et que par une bonne intégration des droits sexuels et de santé génésique ainsi que des services et des initiatives VIH/SIDA, un plus grand nombre de filles et de femmes pourraient recevoir une gamme plus étendue de services et d'informations plus adéquats, et prie instamment la Commission et les pays partenaires d'accorder la priorité à de vastes stratégies de prévention dans les études stratégiques des pays, notamment des programmes de promotion de l'utilisation de préservatifs et d'éducation sur le VIH/SIDA destinés aux jeunes;
7. demande aux gouvernements nationaux et aux pouvoirs locaux de prévoir un environnement favorable pour les orphelins et les filles et les garçons infectés et touchés par le VIH/SIDA, notamment en leur prodiguant des conseils et un soutien psychosocial approprié et en assurant leur inscription à l'école et l'accès à des refuges, à une bonne alimentation, à des services sociaux et sanitaires au même titre que d'autres enfants;
8. critique les contradictions mises en lumière par l'affligeant bilan de la Commission dans les dépenses du fonds de développement dans le secteur des soins de santé; souligne, par exemple, qu'en 2003, seulement 5,2% du FED ont été consacrés aux dépenses de santé et seulement 4% en 2002, et déplore le fait que la Commission vise à proposer que seulement 6% du fonds de développement dans le cadre du nouvel instrument de coopération au développement soient attribués au développement humain et social, couvrant non seulement les soins de santé, le VIH/SIDA, la santé sexuelle et reproductive, mais tous les autres aspects du développement social, y compris les enfants, l'éducation et les programmes consacrés au genre;
9. demande à la Commission d'augmenter sensiblement son budget pour les soins de santé dans les pays en développement, de porter à 1 million d'euros sa contribution au Fonds mondial contre le VIH/SIDA, la malaria et la tuberculose, et de veiller à ce qu'au moins 50% de toutes les APD soient consacrés à la réalisation des objectifs de développement du millénaire;
10. demande à la Commission de permettre de fortes hausses dans le soutien budgétaire sectoriel aux secteurs de santé, en particulier pour retenir les travailleurs de santé essentiels dans les pays en développement;
11. note que le 1er janvier 2005 a vu l'application de l'accord de l'OMC sur les ADPIC en Inde, obligeant l'Inde à reconnaître les brevets de produit sur les médicaments; note que la présence sur le marché de plusieurs producteurs a entraîné une diminution des prix des médicaments de première intention de 10 000 USD à 150 USD par patient par an au cours des cinq dernières années; note avec inquiétude que de nouveaux médicaments, et en particulier les traitements plus coûteux de deuxième intention, ne doivent pas seulement être produits par des titulaires de brevet qui pourraient fixer un prix de monopole inabordable pour les pays en développement;
12. critique les accords commerciaux bilatéraux et régionaux qui comprennent des dispositions qui vont au-delà de l'accord ADPIC de l'OMC ("ADPIC-plus") afin de limiter, voire éliminer, les sauvegardes prévues par la déclaration de Doha pour garantir la primauté de la santé sur les intérêts commerciaux; souligne la responsabilité de ces pays, en particulier les États-Unis, mais font pression sur les pays en développement pour signer de tels accords de libre-échange;
13. critique le fait que la déclaration de Hong Kong de l'OMC n'a pas été bénéfique pour l'offre de médicaments contre le VIH/SIDA aux pays en développement;
14. souligne que la prise de licence obligatoire et les prix différentiels n'ont pas résolu le problème, et demande à la Commission de proposer de nouvelles solutions pour garantir un véritable accès aux traitements contre le VIH/SIDA à des prix abordables;
15. souligne que les combinaisons à dose fixe (pilules contenant deux ou trois médicaments contre le SIDA en un seul comprimé) simplifient le traitement du VIH/SIDA et doivent être prioritaires dans les zones où il y a peu de travailleurs de santé ou d'hôpitaux;
16. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, aux États membres, au Secrétaire général des Nations unies et à l'Organisation mondiale de la santé.