Proposition de résolution - B6-0571/2006Proposition de résolution
B6-0571/2006

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

24.10.2006

déposée à la suite de déclarations du Conseil et de la Commission
conformément à l'article 103, paragraphe 2, du règlement
par Kartika Tamara Liotard, Luisa Morgantini, Dimitrios Papadimoulis, Jacky Henin, Gabriele Zimmer, Umberto Guidoni et Adamos Adamou
au nom du groupe GUE/NGL
sur les exportations de déchets toxiques à destination de l'Afrique

Procédure : 2006/2642(RSP)
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B6-0571/2006
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B6-0571/2006
Textes adoptés :

B6‑0571/2006

Résolution du Parlement européen sur les exportations de déchets toxiques à destination de l'Afrique

Le Parlement européen,

–  vu le règlement du Conseil (CEE) n° 259/93, du 1er février 1993, concernant la surveillance et le contrôle des transferts de déchets à l'entrée et à la sortie de la Communauté européenne,

–  vu le règlement (CE) n° 1013/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2006, concernant les transferts de déchets, qui est entré en vigueur le 15 juillet 2006 mais ne s'appliquera qu'à partir du 12 juillet 2007, date à laquelle il remplacera le règlement (CEE) n° 259/93,

–  vu la convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontaliers de déchets dangereux et l'élimination de ces déchets ainsi que l'interdiction de toute exportation de déchets dangereux à partir des pays de l'OCDE et à destination de pays tiers,

–  vu la décision du Conseil 93/98/CEE relative à la conclusion, au nom de la Communauté, de la convention sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimination,

–  vu la convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires telle que modifiée par le protocole de 1978 (Marpol 73/78),

–  vu la convention de Lomé IV et les conventions de Bamako, qui interdisent à l'Union européenne d'exporter des déchets nucléaires ou des déchets dangereux dans les pays ACP, cependant que ces derniers sont convenus d'interdire ces importations à partir de tout pays,

–  vu l'article 103, paragraphe 2, de son règlement,

A.  considérant que, à la mi-août, le cargo Probo Koala, battant pavillon panaméen et affrété par la compagnie néerlandaise Trafigura Beheer, a vidangé au total 528 tonnes de déchets toxiques à Abidjan, capitale de la Côte-d'-Ivoire, ce qui a entraîné la mort de huit personnes et la contamination de plusieurs milliers d'autres,

B.  conscient de la pratique croissante des groupes et entreprises transnationaux des pays industrialisés consistant à rejeter dans des pays d'Afrique et d'autres pays en développement des déchets dangereux et d'autres déchets, qui constituent une menace grave pour la vie et la santé, lesquelles comptent parmi les droits de l'homme,

C.  considérant que des scandales analogues ont frappé le continent africain au cours des dernières années: déchets toxiques à Abidjan, réservoirs radioactifs en Somalie, rejets de 5 600 litres de chlorine au Cameroun ainsi que de pneus, de véhicules et de matériel électronique usagés contenant des matières toxiques dont le recyclage est très coûteux,

D.  considérant que l'exportation de déchets dangereux à des fins de recyclage demeure fréquemment un prétexte pour les éliminer définitivement, d'une manière désastreuse pour l'environnement, dans des pays moins développés,

E.  considérant que de nombreux pays en développement ne disposent pas des techniques nécessaires pour traiter ces déchets de manière à éliminer ou à réduire leurs effets néfastes sur la santé et sur l'environnement,

F.  considérant que des enquêtes parallèles ont été lancées contre l'entreprise Trafigura Beheer, les services du port d'Amsterdam, les fonctionnaires de la ville d'Amsterdam et le ministre néerlandais de l'environnement qui, bien qu'ils aient eu connaissance de la nature de la cargaison, ont autorisé le déchargement de celle-ci,

1.  déplore vivement la perte de vies humaines et la crise sanitaire qui ont touché Abidjan, où près de 44 000 personnes ont dû recevoir des soins médicaux à la suite du rejet illicite de déchets toxiques; condamne l'acte délibéré qui a été à l'origine de cette situation; note avec inquiétude que le nombre croissant de rejets illicites de produits et de déchets toxiques ou dangereux dans les pays en développement continue à avoir des effets néfastes sur la vie et la santé des habitants de ces pays, alors qu'il s'agit là de droits de l'homme fondamentaux;

2.  considère que la législation de l'UE et les conventions internationales ont été, à l'évidence, violées dans le cas du transport et du rejet des déchets toxiques du Probo Koala, et invite la Commission à effectuer une enquête indépendante sur le transport et le rejet de déchets toxiques par ce navire, afin de déterminer comment la défaillance du contrôle du respect des dispositions en vigueur s'est produite;

3.  demande à la Commission et aux États membres concernés d'appliquer des procédures pour retracer le parcours des déchets toxiques en question de la production à l'élimination, en associant à la démarche toutes les parties qui sont intervenues dans le processus; à déterminer clairement lesquelles de ces parties sont responsables de l'élimination des déchets toxiques à Abidjan et de veiller à ce que des voies de recours et des réparations soient offertes aux victimes;

4.  demande instamment à la Commission de prendre des mesures efficaces et concrètes pour mettre fin à l'impunité en cas d'exposition de la population à des déchets toxiques, de prévoir des sanctions pénales pour garantir le respect du droit de l'UE, conformément à l'arrêt rendu le 13 septembre 2005 par la Cour de justice dans l'affaire C-176/03, d'imposer aux États membres l'obligation d'appliquer pleinement la législation communautaire pertinente et d'ouvrir la procédure d'infraction contre les États membres qui feraient preuve de carence à cet égard;

5.  demande à la Commission et aux États membres concernés de rendre publics tous les accords bilatéraux qu'ils ont conclus à ce jour avec des pays non membres de l'OCDE en matière de transport de déchets;

6.  demande instamment aux États membres de prendre des mesures pour contrôler les activités de leurs entreprises et des entreprises transnationales et faire en sorte qu'elles ne violent pas les droits de l'homme par des pratiques néfastes pour l'environnement, par exemple des transferts illicites de produits et de déchets toxiques ou dangereux, en particulier à destination des pays en développement;

7.  demande à la Commission de recueillir des informations sur le trafic et le rejet illicite de tels déchets et produits dans les pays d'Afrique et les autres pays en développement, de présenter des propositions relatives à des mesures tendant à contrôler, à réduire et à éliminer ce trafic illicite ainsi que les transferts et rejets de tels produits dans les pays d'Afrique et les autres pays en développement et, enfin, de publier chaque année la liste des pays et des groupes transnationaux participant aux rejets illicites de déchets et de produits toxiques dans les pays d'Afrique et les autres pays en développement;

8.  charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission ainsi qu'aux États membres, au secrétariat de la Convention de Bâle et au gouvernement de la Côte-d'-Ivoire.