PROPOSITION DE RÉSOLUTION
15.10.2008
conformément à l'article 108, paragraphe 5, du règlement
par Adam Bielan, Ryszard Czarnecki et Inese Vaidere
au nom du groupe UEN
sur le nouvel accord de partenariat et de coopération entre l'Union européenne et le Viêt Nam et les droits de l'homme
Voir aussi la proposition de résolution commune RC-B6-0538/2008
B6‑0542/2008
Résolution du Parlement européen sur le nouvel accord de partenariat et de coopération entre l'Union européenne et le Viêt Nam et les droits de l'homme
Le Parlement européen,
– vu ses résolutions antérieures sur le Viêt Nam,
– vu l'accord de coopération entre l'Union européenne et la République socialiste du Viêt Nam de 1995,
– vu le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ratifié par le Viêt Nam en 1982,
– vu l'adhésion du Viêt Nam à l'Organisation mondiale du commerce, le 11 janvier 2007,
– vu l'article 108, paragraphe 5, de son règlement,
A. considérant que la deuxième série des négociations entre l'Union européenne et le Viêt Nam se déroule à Hanoï les 20 et 21 octobre 2008,
B. considérant qu'une audition sur le Viêt Nam, le Laos et le Cambodge a été organisée par la sous-commission des droits de l'homme du Parlement européen le 25 août 2008,
C. considérant que la prochaine réunion entre la troïka de l'Union européenne et le Viêt Nam dans le cadre du dialogue sur les droits de l'homme est prévue pour décembre 2008,
D. considérant que l'article premier de l'accord de coopération entre l'Union européenne et la République socialiste du Viêt Nam dispose que "[le] respect des droits de l'homme et des principes démocratiques constitue le fondement de la coopération entre les parties et des dispositions du présent accord, et est un élément essentiel de l'accord",
E. considérant que la liberté de réunion est fortement restreinte: en septembre 2008, le gouvernement vietnamien a lancé l'action répressive la plus dure de ces dernières décennies contre des manifestants catholiques pacifiques qui participaient à des veillées de prières à Hanoï pour réclamer la restitution des biens de l'Église confisqués par le gouvernement vietnamien,
F. considérant que la liberté de la presse est fortement limitée: en 2008, plusieurs journalistes vietnamiens ont été arrêtés ou sanctionnés pour avoir enquêté sur la corruption de responsables du régime, et, le 19 septembre 2008, Ben Stocking, chef du bureau de l'Associated Press à Hanoï, a été arrêté et frappé par la police pour avoir couvert une manifestation pacifique de catholiques vietnamiens à Hanoï,
G. considérant que les minorités ethniques des hauts plateaux du nord et du centre du pays doivent toujours faire face à des discriminations, à la confiscation de leurs terres et à la violation de leurs libertés religieuses et culturelles; considérant que ni les ONG indépendantes ni les journalistes étrangers ne peuvent accéder sans restriction aux hauts plateaux pour évaluer la situation réelle des Montagnards, et particulièrement de ceux qui ont été rapatriés de force du Cambodge; considérant que plus de 300 Montagnards ont été condamnés à des peines de prison depuis 2001 pour avoir mené des activités religieuses ou politiques pacifiques,
H. considérant qu'en dépit d'appels constants et répétés de la communauté internationale, Thich Quang Do, âgé de 79 ans, chef de l'Église bouddhique unifiée du Viêt Nam et lauréat 2006 du prix Rafto des défenseurs des droits de l’homme, a été emprisonné à de multiples reprises depuis 1982 et est maintenu en résidence surveillée,
I. considérant que les autorités vietnamiennes n'ont toujours pas reconnu l'Église bouddhique unifiée du Viêt Nam, qui fut pourtant la plus grande organisation de bouddhistes du sud et du centre du Viêt Nam,
J. considérant que le Viêt Nam a mis en place une législation visant à limiter la liberté d'accès à internet, en instaurant un filtrage et des contrôles sur les contenus, et a procédé à l'arrestation de nombreux "cyberdissidents" qui avaient utilisé internet pour diffuser leurs opinions sur les droits de l'homme et la démocratie et avaient participé à des discussions en ligne sur la démocratie; considérant que, le 10 septembre 2008, Nguyen Hoang Hai, journaliste-blogueur et défenseur des droits de l'homme, connu sous le pseudonyme de Dieu Cay, a été condamné à la prison,
K. considérant que les membres de la minorité ethnique khmère (khmers kroms), dans le sud du Viêt Nam, ont subi des persécutions religieuses et des confiscations de terres, que les autorités ont défroqué une vingtaine de moines bouddhistes khmers kroms pour leur participation à une manifestation pacifique en février 2007 appelant à une plus grande liberté religieuse et en a condamné cinq à la prison, que les autorités vietnamiennes ont placé Tim Sakhorn, moine khmer krom, en résidence surveillée après sa sortie de prison en mai 2008 et qu'elles sont intervenues avec brutalité contre des agriculteurs khmers kroms qui réclamaient la résolution de la question foncière,
1. souligne que le dialogue sur les droits de l'homme entre l'Union européenne et le Viêt Nam doit déboucher sur des améliorations tangibles dans le pays; invite le Conseil et la Commission à réévaluer la politique de coopération avec le Viêt Nam, compte tenu de l'article premier de l'accord de coopération de 1995, qui fonde cette coopération sur le respect des principes démocratiques et des droits fondamentaux;
2. demande à la Commission de fixer des repères clairs pour l'évaluation des projets de développement actuels au Viêt Nam, afin de garantir leur conformité à la "clause démocratique";
3. demande à la Commission et au Conseil, dans le cadre des négociations en cours sur un nouvel accord de partenariat et de coopération, qui comportera une clause démocratique claire, d'insister auprès du Viêt Nam sur la nécessité de mettre fin à la situation actuelle de violation systématique de la démocratie et des droits de l'homme avant la mise au point définitive de l'accord, et, notamment, d'inviter le gouvernement vietnamien:
- –en tant que membre du Conseil de sécurité des Nations unies, à coopérer avec les organismes des Nations unies spécialisés dans les droits de l'homme, en invitant à se rendre dans le pays le rapporteur spécial sur l'intolérance religieuse, dont la dernière visite au Viêt Nam remonte à 1998, ainsi que le groupe de travail sur la détention arbitraire, dont la dernière visite au Viêt Nam remonte à 1994; à accorder aux fonctionnaires et aux rapporteurs spéciaux des Nations unies le libre accès à toutes les régions, y compris aux hauts plateaux du centre et du nord, où ils doivent être autorisés à mener des entretiens confidentiels avec des prisonniers politiques et religieux, ainsi qu'avec les demandeurs d'asile montagnards ayant quitté le Cambodge pour revenir au Viêt Nam;
- –à relâcher immédiatement tous les personnes emprisonnées ou détenues pour avoir exprimé pacifiquement des convictions politiques ou religieuses, notamment le groupe de plus de 300 chrétiens montagnards, ainsi que les moines bouddhistes khmers kroms, les militants en faveur de la démocratie, les protestataires réclamant le respect du droit à la terre, les cyberdissidents, les leaders syndicalistes, les membres de paroisses catholiques, et les adeptes du bouddhisme Hoa Hao et de la religion Cao Dai;
- –à lever immédiatement l'assignation à résidence de Thich Quang Do, patriarche suprême de l'Église bouddhique unifiée du Viêt Nam, et de Tim Sakhorn, moine khmer krom, libéré de prison en mai 2008, mais toujours en résidence surveillée;
- –à autoriser les organisations religieuses indépendantes à mener librement leurs activités religieuses sans intervention des autorités et à autoriser celles-ci à s'immatriculer, en toute indépendance, auprès des pouvoirs publics, si elles le souhaitent; à restituer les biens de l'Église et les pagodes confisquées par le gouvernement vietnamien et à rétablir le statut juridique de l'Église bouddhique unifiée du Viêt Nam;
- –à abroger les dispositions du droit vietnamien faisant de la dissidence et de certaines activités religieuses des crimes en invoquant la notion floue d'atteintes à la "sécurité nationale", afin que ces dispositions ne puissent être appliquées aux personnes ayant exercé leur droit fondamental à la liberté d'expression, de réunion, d'association et de conviction religieuse;
- –à mettre fin à la censure et au contrôle exercés par le gouvernement vietnamien sur les médias nationaux, y compris les communications internet et électroniques, et à autoriser la publication de journaux et de magazines privés indépendants;
4. charge son Président de traduire la présente résolution dans les langues des minorités ethniques autochtones du Viêt Nam, notamment les Jaraïs, les Edes, les Bunongs, les Bahnars, les Hmongs et les Khmers, et de la transmettre au Conseil, à la Commission, aux gouvernements des pays membres de l'ANASE, au Secrétaire général des Nations unies, au Haut Commissaire des Nations unies pour les droits de l'homme, et au gouvernement et au parlement du Viêt Nam.