PROPOSITION DE RÉSOLUTION
26.3.2009
conformément à l'article 103, paragraphe 2, du règlement
par Konrad Szymański, Adam Bielan, Hanna Foltyn-Kubicka, Mirosław Mariusz Piotrowski, Zdzisław Zbigniew Podkański, Wojciech Roszkowski, Inese Vaidere, Ģirts Valdis Kristovskis, Roberts Zīle et Ewa Tomaszewska
au nom du groupe UEN
sur la conscience européenne et le totalitarisme
Voir aussi la proposition de résolution commune RC-B6-0165/2009
B6‑0170/2009
Résolution du Parlement européen sur la conscience européenne et le totalitarisme
Le Parlement européen,
– vu la déclaration universelle des droits de l'homme des Nations unies,
– vu la résolution 260 (III) A des Nations unies du 9 décembre 1948 sur le génocide,
– vu la Convention (IV) de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre entre les mains d'un ennemi et sous l'occupation militaire d'un pouvoir étranger,
– vu les arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme du 22 mars 2001 dans les affaires Streletz, Kessler et Krenz v. Allemagne,
– vu sa résolution du 12 mai 2005 sur le 60e anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe[1],
– vu la décision-cadre 2008/913/JAI du Conseil du 28 novembre 2008 sur la lutte contre certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal[2];
– vu la résolution 1481 sur la nécessité d'une condamnation internationale des crimes des régimes communistes totalitaires, adoptée par l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe le 26 janvier 2006,
– vu l'audition sur les crimes commis par des régimes totalitaires, organisée par la Commission à Bruxelles le 8 avril 2008,
– vu les résolutions et les déclarations sur les crimes commis par les régimes communistes totalitaires adoptées par un certain nombre de parlements nationaux;
– vu la déclaration sur la conscience européenne et le communisme, adoptée à Prague le 3 juin 2008,
– vu la déclaration du Parlement européen du 22 septembre 2008 sur la proclamation du 23 août comme journée européenne de commémoration des victimes du stalinisme et du nazisme,
– vu la nécessité d'organiser la dénomination des camps de concentration et d'extermination;
– vu la décision N°31COM 8B.8 du Comité du patrimoine mondial de l'UNESCO;
– vu l'article 103, paragraphe 2, de son règlement,
A. considérant que l'UE est fondée sur l'état de droit et le respect des droits de l'homme;
B. considérant que la justice fait partie de ces valeurs fondamentales de l'Europe et que de bonnes connaissances historiques sont nécessaires pour exercer et promouvoir la justice;
C. considérant que les meurtres et l'asservissement commis comme actes d'agression par le fascisme et le stalinisme remplissent les conditions pour être considérés comme des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité;
D. considérant que les formes extrêmes de pouvoir totalitaire, pratiquées par les dictatures nazie, fasciste et soviéto-communistes, sont responsables de crimes massifs et prémédités à une échelle sans précédent commis contre des millions d'êtres humains et leurs droits fondamentaux et inaliénables;
E. considérant le témoignage vivant et l'attitude tenace de nombreuses personnes qui se sont opposées à cette oppression, comme Rotamaster Witold Pilecki - la seule personne à s'être rendue volontairement dans un camp de la mort nazi, à Auschwitz, pour y organiser un mouvement de résistance et collecter des informations sur les massacres;
F. considérant qu'il est aussi important de se souvenir de ceux qui - comme Rotamaster Witold Pilecki - se sont activement opposés au pouvoir totalitaire et qui devraient être inscrits dans la conscience des Européens comme des héros de l'ère totalitaire, en raison de leur dévouement, de leur loyauté à leurs idéaux, de leur honneur et de leur courage;
G. considérant que des crimes de génocide ont également été commis par des groupes militants guidés par l'idéologie totalitaire de régimes totalitaires;
H. considérant que l'ignorance et les clichés erronés dans la mémoire historique des Européens peuvent permettre l'émergence d'atteintes nationalistes ou autres à la mémoire historique,
I. considérant la nécessité d'une opposition effective contre la falsification de l'histoire et les tentatives d'incriminer les victimes de crime de génocide,
J. considérant que seule une Europe forte qui connaît son histoire peut se donner les moyens de surmonter les atrocités du passé;
K. considérant que, compte tenu de la lutte idéologique qui a lieu actuellement au sujet de l'interprétation du passé totalitaire récent de l'Europe, que ce soit dans le but de justifier les crimes soviétiques ou de minimiser les crimes nazis;
L. considérant que le Conseil Justice et Affaires intérieures a obtenu un accord politique sur une décision-cadre sur la lutte contre certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie le 19 avril 2007 et a décidé que la possibilité d'une responsabilité pénale pour tolérance, déni ou banalisation grave des crimes ne sera pas étendue aux cas qui n'ont pas été motivés par le racisme ou la xénophobie et que les crimes commis pour d'autres raisons, par exemple, par le régime totalitaire communiste, ne sont donc pas couverts par ce document;
M. considérant que le 8 avril 2008, l'audition sur les crimes de guerre commis par les régimes totalitaires a été organisée par la Commission européenne avec la participation du Conseil et un groupe de membres du Parlement européen;
1. regrette que la décision du Conseil du 19 avril 2007 sur la décision cadre sur les crimes commis pour des raisons de race, de couleur, de religion, d'ascendance ou d'origine nationale ou ethnique ne couvre pas les crimes commis pour d'autres motifs, c'est-à-dire par les régimes totalitaires communistes;
2. fait remarquer que le génocide tel que l'holocauste, les crimes massifs contre l'humanité et les violations à grande échelle des droits de l'homme comme les déportations de masse des États baltes, de Pologne et d'autres pays, les exécutions massives comme le massacre de la forêt de Katyn d'officiers polonais et d'officiers de l'armée lettone à Litene, la création et l'organisation des camps de concentration et du Goulag, la famine artificielle en Ukraine, le déni des droits fondamentaux de liberté, d'expression, de parole, de mouvement et beaucoup d'autres crimes commis sous le régime communiste totalitaire n'ont été fait l'objet ni d'une enquête digne de ce nom, ni d'une évaluation au niveau international;
3. souligne que bien que les nations d'Europe, qui ont souffert des régimes totalitaires tant communiste que nazi, ont déployé des efforts considérables pour surmonter leurs conséquences, il incombe à l'Union européenne d'enquêter et d'évaluer les crimes des régimes totalitaires communiste, nazi et autres commis sur le territoire européen, afin de faire la lumière sur ce qui a été fait à un quart des citoyens d'Europe et de juger ces régimes;
4. rappelle que les citoyens qui sont encore victimes de régimes totalitaires communistes sont contraints dans les anciens pays du bloc soviétique de se résigner à vivre aux côtés de personnes qu'elles reconnaissent comme les auteurs de crimes et les meurtriers de leurs proches;
5. souligne que les personnes de pays libérés de l'occupation soviétique souffrent encore des conséquences du régime totalitaire telles que la russification, des changements forcés de la situation démographique de l'État et de problèmes psychologiques profonds causés par le régime; demande que ces faits soient considérés pour aboutir à des conclusions sur la situation politique, sociale et interethnique dans ces pays;
6. est préoccupé par le fait que les personnes de la jeune génération dans certains États membres de l'UE sont clairement divisées par des compréhensions et des points de vue polaires et totalement différents de l'histoire de l'Europe venant de leurs familles; craint que cela n'entraîne un risque de heurts possibles entre ces groupes sociétaux à l'avenir; est préoccupé par le fait qu'il y a un sérieux manque de connaissance du régime totalitaire communiste dans un certain nombre de pans de la société occidentale, en particulier chez les jeunes; demande qu'une sensibilisation accrue à l'histoire européenne et des informations sur cette période de l'histoire figurent dans les programmes scolaires;
7. estime que, pour préserver correctement la mémoire historique, une réévaluation complète de l'histoire de l'Europe et une prise de conscience européenne de tous les aspects historiques de l'Europe moderne, renforceront l'intégration européenne, étant donné qu'un avenir meilleur ne peut se fonder que sur une meilleure compréhension du passé commun, et servira aussi à éliminer la possibilité de voir resurgir des régimes totalitaires;
8. Propose que le 25 mai (date anniversaire de l'exécution du héros Rotamaster Witold Pilecki à Auschwitz le 25 mai 1948) soit déclaré Journée internationale des héros de la lutte contre le totalitarisme, qui sera une expression de respect et un hommage à tous ceux qui, en luttant contre la tyrannie, ont fait preuve d'héroïsme et d'amour réel pour l'humanité, et donnera aux générations futures une indication claire de l'attitude correcte à adopter face à la menace d'un asservissement totalitaire;
9. considère que les perceptions actuelles des abus et des atrocités du passé sont une part importante des débats contemporains sur la démocratie;
10. souligne que les crimes commis par le régime totalitaire communiste ne peuvent être excusés ou exonérés par la contribution et le mérite de l'Union soviétique dans la victoire sur le régime nazi; souligne en même temps qu'il est inacceptable que la Fédération russe adopte une législation pénalisant quiconque tenterait d'analyser les événements de la seconde guerre mondiale sous un angle différent de celui qui a prévalu durant les décennies précédentes;
11. demande à la Commission et au Conseil de prendre des mesures concrètes pour s'assurer que les résultats de l'audition du 8 avril 2008, qui sont reflétés dans le document de contribution de l'audition, ont été pris en compte dans les travaux complémentaires vers une approche commune à l'échelle de l'UE à l'égard des crimes commis par les régimes totalitaires;
12. demande à la Commission et aux gouvernements des États membres de soutenir l'exécution des instruments juridiques internationaux existants afin de déclarer illégales, de poursuivre et de punir les violations graves des droits de l'homme telles que le génocide et les crimes contre l'humanité;
13. prie le Conseil et la Commission de trouver les instruments juridiques permettant d'établir un cadre et des procédures optimaux pour les investigations et les évaluations des crimes des régimes totalitaires communiste, nazi et autres à l'échelle de l'UE; fait observer que ces moyens légaux devraient reposer sur le droit international et la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme et du tribunal de Nuremberg;
14. souligne que la communauté internationale est responsable de la surveillance de la poursuite obligatoire des auteurs de génocide, et rappelle que l'établissement d'institutions spéciales de poursuite dans plusieurs États fait partie d'un effort international pour mettre fin à l'impunité des auteurs de massacres organisés;
15. réclame l'établissement d'un institut de recherche européen chargé de traiter les développements les plus importants de l'histoire européenne du 20è siècle, notamment les crimes non reconnus ou oubliés ou d'autres violations des droits de l'homme et des obligations internationales, par une recherche méticuleuse et une étude documentée, évaluant la responsabilité, les aspects légaux et moraux et, si nécessaire, l'adoption de mesures juridiques;
16. propose de déclarer le 23 août journée européenne de commémoration des victimes des régimes totalitaires;
17. invite le Conseil et la Commission à prendre les mesures nécessaires pour introduire une dénomination correcte des camps de concentration et d'extermination allemands et soviétiques afin d'éviter que la faute du génocide ne retombe sur les victimes et non sur les coupables;
18. charge son président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, ainsi qu'aux gouvernements et aux parlements des États membres.
- [1] Textes adoptés, P6_TA(2005)0180.
- [2] JO L n° 328 du 6.12.2008, p.55.