PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur la crise dans le secteur laitier
14.9.2009
conformément à l'article 115, paragraphe 5, du règlement
Ilda Figueiredo, Willy Meyer, Patrick Le Hyaric, Marie-Christine Vergiat, João Ferreira au nom du groupe GUE/NGL
B7‑0057/2009
Résolution du Parlement européen sur la crise dans le secteur laitier
Le Parlement européen,
– vu la question sur la crise du secteur laitier, adressée à la Commission le 2 septembre 2009 (O-0085/2009 - B7-0208/2009),
– vu l'article 115, paragraphe 5, et l'article 110, paragraphe 2, de son règlement,
A. considérant la grave crise que connaissent les producteurs laitiers, en raison des baisses importantes des prix à la production – de l'ordre de 50% (de 0,40 € à 0,20 € par litre de lait),
B. considérant les coûts élevés de production, qui ont subi des augmentations de 50 à 100% du prix des principaux facteurs de production (rations, engrais, combustibles, fertilisants, médicaments), entraînées l'année passée par la hausse des prix du pétrole,
C. considérant que la crise que connaît le secteur laitier trouve son origine dans les choix erronés opérés lors des réformes successives de la politique agricole commune (PAC), qui sacrifient les petits et moyens agriculteurs aux intérêts appartenant à des secteurs comme l'industrie et les services, lors des négociations que mène l'UE au sein de l'Organisation mondiale du commerce et dans le cadre d'autres traités de libre-échange,
D. considérant que les réformes successives de la PAC ont toujours été dans le sens des intérêts de l'agro-industrie, qui, grâce à la libéralisation totale des marchés agricoles, inonde le marché de produits à un prix qui lui convient, entraînant une concentration de la terre, de la production agricole et de la commercialisation, et mettant en péril la survie des petits et moyens agriculteurs dans de nombreux pays de l'UE,
E. considérant que, dans les pays de l'UE, la majeure partie de la production est assurée par des petits producteurs, qui, face à la réforme progressive du secteur, à la baisse de prix constatée et aux difficultés inhérentes à l'activité, seront forcés d'abandonner leur occupation, laissant de vastes régions confrontées au risque de perdre leur activité agricole, ce qui entraîne la dégradation des terres et la désertification rurale,
F. considérant que la crise que connaît le secteur laitier, et qui touche des milliers de producteurs, les a amenés à formuler de justes protestations, et à revendiquer ainsi des prix équitables à la production et une aide pour poursuivre leur activité,
G. considérant que l'annonce de la fin des quotas laitiers en 2015 et l'augmentation annuelle de 1% (2,5 millions de litres) d'ici 2015 ont eu pour effet, dans la pratique, de légaliser les excédents existants dans certains pays, qui produisaient au-delà de leurs quotas, et de permettre leur exportation à bas prix, inondant les marchés et faisant baisser les prix sous le prix de revient réel,
H. considérant que la conjoncture dans le secteur laitier résulte également du pouvoir dominant acquis par les grands groupes de distribution dans l'UE et des processus de libéralisation des marchés agroalimentaires approuvés par l'UE à la suite des négociations successives au sein de l'Organisation mondiale du commerce (OMC),
I. considérant que les conditions et les exigences dictées par la grande distribution dans ses relations avec le secteur réduisent ou même éliminent les marges des petits et moyens producteurs,
J. considérant que le Conseil extraordinaire de l'agriculture du 7 septembre n'a en rien modifié les éléments qui sont à l'origine de la crise du secteur laitier, à savoir la libéralisation du secteur, la fin programmée des quotas laitiers et l'augmentation annuelle de 1% des quotas d'ici 2015, et qu'il s'est limité à prendre des mesures palliatives,
1. estime que les mesures présentées par la Commission et les décisions du Conseil du 7 septembre ne correspondent pas aux besoins des petits et moyens producteurs, car elles s'inscrivent dans la ligne de la libéralisation totale du secteur en 2015 et de l'application des décisions déjà prises qui ont mené à la situation actuelle;
2. exige le réajustement des quotas laitiers, tout en les adaptant aux besoins de chaque pays, et l'annulation de l'augmentation annuelle de 1% d'ici 2015;
3. considère que la crise économique a entraîné une diminution du pouvoir d'achat et une baisse de la demande de produits laitiers, produits de base de l'alimentation humaine; exige que des mesures urgentes soient prises pour augmenter le pouvoir d'achat des classes les plus défavorisées;
4. demande une intervention immédiate de la Commission européenne, en retirant les stocks de lait, de façon à garantir un prix minimum supérieur au coût de production pour les petits et moyens producteurs et pour les exploitations familiales;
5. propose une aide financière de la Commission européenne aux organismes nationaux responsables du contrôle des prix aux consommateurs pratiqués par les chaînes de distribution et de commercialisation agroalimentaires, ainsi que pour la surveillance des prix des facteurs de production, comme les rations, les pesticides et les fertilisants,
6. plaide pour la création, au niveau communautaire, d'un fonds extraordinaire de soutien au secteur laitier, destiné aux producteurs et aux pays les plus touchés, et la création de nouvelles aides pour la production de lait et de viande, liées à l'alimentation animale, sur la base de cultures fourragères et de pâturages permanents locaux; estime que ce fonds doit également soutenir un plan d'intervention pour le retrait des jeunes veaux et des vaches de réforme;
7. recommande l'établissement de mécanismes rapides d'anticipation et de paiement aux producteurs et de soutiens et d'aides au revenu et à l'investissement;
8. demande de mettre un terme à l'obligation d'importer des produits laitiers et à l'accord agricole de l'OMC de 1994; affirme en outre la nécessité d'éliminer les importations à bas prix et de mettre en œuvre une préférence à la production locale dans le secteur laitier;
9. juge nécessaire de procéder d'urgence à une réforme de la PAC, assurant des prix justes, en particulier aux petits et moyens agriculteurs et à l'agriculture familiale, et des aides liées le plus possible à la production et réparties équitablement entre les producteurs, les produits et les pays, dans le contexte du plafonnement et de la modulation, avec pour principal objectif d'augmenter la production alimentaire sur tout le territoire des pays de l'UE, en vue d'assurer la sécurité et la souveraineté alimentaires;
10. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission et aux parlements des États membres.