PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur la situation en Guinée
20.10.2009
conformément à l'article 122 du règlement
Véronique De Keyser, Patrice Tirolien, María Paloma Muñiz De Urquiza, Raimon Obiols, Harlem Désir au nom du groupe S&D
Voir aussi la proposition de résolution commune RC-B7-0102/2009
B7‑0102/2009
Résolution du Parlement européen sur la situation en Guinée
Le Parlement européen,
- vu l'article 122, paragraphe 5, de son règlement,
A. Considérant la prise du pouvoir par une junte militaire, conduite par le capitaine Dadis Camara, le 23 décembre 2008, après le décès du Président Lansana Conté;
B. Considérant les articles 8 et 9 de l'Accord de Cotonou, dont la Guinée est signataire, de respect des droits humains et de la démocratie;
C. Considérant la "feuille de route" établie le 27 juillet 2009 conformément à l'article 96 de l'Accord de Cotonou, pour organiser la transition démocratique;
D. Considérant que les membres de la junte issus du parti du Conseil National pour la Démocratie et le Développement s'étaient engagés à organiser des élections libres dans les meilleurs délais, et à ne pas être eux mêmes candidats à ces élections;
E. Considérant que la répression d'une manifestation pacifique de l'opposition, le jour anniversaire du référendum qui a donné l'indépendance au pays, le 28 septembre, a fait, selon les sources, entre 100 et 200 morts (les militaires ayant récupéré de nombreuses dépouilles afin d'empêcher leur dénombrement, ne permettant pas aux familles de faire leur deuil), et plus de 1.000 blessés par balles ou par éventration à la baïonnette, et que de nombreux cas de viols ont été recensés;
F. Considérant que des responsables de l'opposition ont été battus, blessés et arrêtés, que les journalistes critiques à l'égard du pouvoir sont poursuivis, et que la junte fait peser un risque réel de conflit ethnique;
G. Considérant que le procureur de la CPI vient d'engager un examen préliminaire de la situation en Guinée, afin de déterminer si des crimes de la compétence de la CPI ont été perpétrés;
H. Considérant que l'usage irresponsable de la force armée pour réprimer la population disqualifie la junte militaire pour organiser la transition du pays vers la démocratie, à travers des élections libres et justes;
I. Considérant les prises de position de la CEDEAO et de l'Union Africaine, et la nomination du Président Burkinabé Blaise Compaoré comme "facilitateur";
J. Considérant qu'expire l'ultimatum de l'Union africaine au capitaine Dadis Camara, l'enjoignant à renouveler son engagement à ne pas être candidat à la prochaine élection présidentielle;
K. Considérant l'appel lancé par la CEDEAO à la "communauté internationale" pour qu'elle déploie en Guinée une force neutre pour protéger la population et les opposants et l'appel du "Groupe de contact" pour un embargo total sur les armes à destination de la Guinée ;
L. Considérant les potentialités de développement liées aux ressources minières importantes en Guinée ;
1. Condamne la sanglante et meurtrière répression contre des manifestants désarmés et présente ses condoléances aux familles endeuillées;
2. Demande la mise en place d'une commission d'enquête internationale indépendante sur les responsabilités du massacre, avec la collaboration de la CEDEAO, l'Union Africaine et l'ONU, et transmission du dossier à la Cour Pénale Internationale, pour qu'il n'y ait pas d'impunité;
3. Considère que seul un gouvernement issu d'élections libres et justes est légitime et capable d'engager des intérêts du pays à long terme;
4. Souhaite la mise en place d'un gouvernement de transition, intégrant les principaux partis d'opposition, chargé de préparer les élections présidentielles et législatives;
5. Demande au Conseil de prendre les "mesures appropriées" prévues à l'article 96 de l'Accord de Cotonou et d'étudier les possibilités de répondre à la demande de la CEDEAO pour organiser une mission de soutien à une force africaine de protection de la population, dans le cadre de la Politique Européenne de Sécurité et de Défense, afin de mettre à disposition de cette force les moyens nécessaires pour accomplir sa mission, ainsi qu'une mission civile à plus long terme pour contribuer à l'organisation des forces de sécurité, et de contribuer à l'établissement d'un embargo sur les armes, préconisé par le "Groupe de contact" ;
6. Demande au Conseil et a la Commission de suspendre l'application du Protocole de pêche avec la Guinée jusqu'à la concrétisation du processus de démocratisation.
7. Charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission, ainsi qu'aux instances de l'Union Africaine et de la CEDEAO.