Proposition de résolution - B7-0077/2010Proposition de résolution
B7-0077/2010

PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur les résultats du sommet de Copenhague sur le changement climatique

3.2.2010

déposée à la suite de déclarations du Conseil et de la Commission
conformément à l'article 110, paragraphe 2, du règlement

Rebecca Harms, Satu Hassi, Bas Eickhout, Yannick Jadot au nom du groupe Verts/ALE

Voir aussi la proposition de résolution commune RC-B7-0064/2010

Procédure : 2009/2619(RSP)
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B7-0077/2010
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B7‑0077/2010

Résolution du Parlement européen sur les résultats du sommet de Copenhague sur le changement climatique

Le Parlement européen,

–   vu ses résolutions antérieures sur le changement climatique, en particulier celle du 25 novembre 2009 sur la stratégie de l'Union européenne dans la perspective de la Conférence de Copenhague sur le changement climatique (COP 15),

–   vu l'article 110, paragraphe 2, de son règlement,

A.  considérant que le principal résultat de la conférence de Copenhague est l'accord de Copenhague, dont la conférence des parties à la CCNUCC a pris acte,

 

B    considérant que l'accord a été négocié entre 27 chefs d'État et de gouvernement, dont les pays sont responsables de plus de 80 % des émissions mondiales de CO2, qui représentaient tous les principaux groupes régionaux,

 

C.  considérant que l'accord est loin d'atteindre les objectifs fixés par la résolution du Parlement européen adoptée le 25 novembre 2009,

 

D.  considérant que l'accord n'est pas juridiquement contraignant et qu'il ne prévoit pas explicitement la conclusion d'un accord juridiquement contraignant en 2010,

 

E    considérant que l'accord ne fixe pas d'objectifs mondiaux de réduction à moyen terme ou à long terme, de même qu'il ne précise pas le moment où les émissions mondiales devraient atteindre un pic,

 

F.   considérant que les engagements pris volontairement par les parties à l'accord en faveur de la réduction des émissions ne se conforment pas aux critères scientifiques dont dépend la réalisation du 2e objectif; considérant que les engagements pris par l'ensemble des pays industrialisés, à l'exception du Japon et de la Norvège, sont inadéquats et que l'Union européenne est à la traîne; considérant que certains pays en développement, tels que le Brésil ou le Mexique, se sont engagés à prendre des mesures plus ambitieuses,

 

G.  considérant que l'accord reconnaît la nécessité de limiter la hausse des températures mondiales à 2° C, et qu'il fait référence à la recherche de solutions permettant de maintenir l'augmentation mondiale des températures en deçà de 1,5° C,

 

H.  considérant que les parties à l'accord se sont entendues sur l'évaluation, la notification et la vérification des actions d'atténuation prises par les pays en développement, par le biais de communications nationales qui feront l'objet de consultations et d'analyses internationales conformément à des lignes directrices claires qui restent à définir, tout en garantissant le respect de la souveraineté nationale,

 

I.    considérant que l'accord permet le financement substantiel d'une action en matière de changement climatique qui tienne compte de façon équilibrée de l'atténuation comme de l'adaptation, notamment un financement à mise en œuvre rapide (30 milliards de dollars) pour 2010-2012 et un financement à long terme (100 milliards de dollars par an en 2013-2020), et qu'il prévoit l'établissement de structures institutionnelles pour gérer ces fonds, notamment un "Fonds vert" et un groupe de haut niveau,

 

J.    considérant qu'une grande partie des ressources promises jusqu'ici au titre des actions en matière de climat dans les pays en développement sont des fonds réaffectés de l'aide publique au développement (APD), ce qui constitue une grave menace pour la lutte contre la pauvreté et la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement (OMD),

 

K.  considérant que l'accord constitue un point de départ pour la création d'un mécanisme de réduction des émissions provenant du déboisement et de la dégradation des forêts et de renforcement de l'absorption par les forêts des émissions de gaz à effet de serre, ainsi que pour la mise en place d'un mécanisme dans le domaine des technologies afin d'accélérer le développement et le transfert des technologies, et qu'il contient une référence au rôle des marchés pour améliorer la rentabilité des mesures d'atténuation; considérant que la mise en œuvre effective de ces mécanismes nécessite un accord dans le cadre de la CCNUCC,

 

L.   considérant que la conférence des parties a prolongé les mandats du groupe de travail spécial au titre du protocole de Kyoto et du groupe de travail spécial sur la convention-cadre (action concertée à long terme) jusqu'à la COP 16 qui se tiendra en décembre 2010 à Cancún au Mexique; considérant que de nombreux pays, dont le Brésil, l'Afrique du Sud, l'Inde et la Chine ("pays du BASIC"), ont exprimé leur attachement à ces processus,

 

L'après Copenhague

 

1.  se dit profondément déçu par l'échec de la conférence de Copenhague à parvenir à un accord international global sur le climat pour l'après-2012, dans la mesure où cela compromet la réalisation de l'objectif de prévention des risques liés au changement climatique et augmente le coût de l'action dans ce domaine;

 

2.  considère que les atermoiements dans la conclusion d'un accord international ne peuvent justifier un nouveau report de la mise en œuvre des politiques de l'Union européenne visant à réduire les émissions, dont la nécessité est scientifiquement prouvée; appelle donc l'Union européenne à revoir à la hausse son objectif intérieur de réduction, à hauteur de 30 %, et à définir les conditions permettant de parvenir à un objectif de 40 %; invite l'Union européenne à réaliser ces objectifs en se basant sur les économies d'énergie et les sources d'énergie renouvelables, et à refuser les fausses solutions telles que l'énergie nucléaire et le soi-disant "charbon propre"; demande qu'un objectif ambitieux et contraignant en termes d'économies d'énergie soit fixé dès que possible;

 

3.  déplore l'incapacité de l'Union européenne à instaurer un climat de confiance dans les négociations, qui aurait permis de progresser davantage au sein des groupes de travail spéciaux, faute d'avoir pris des engagements spécifiques antérieurs en termes de financement public international des actions liées au climat dans les pays en développement; invite, en outre, l'Union européenne à exprimer clairement sa volonté de poursuivre une deuxième période d'engagement du protocole de Kyoto, à condition que les États-Unis aient pris des engagements juridiquement contraignants au titre d'un autre instrument juridique et que l'intégrité environnementale de l'Union ne soit pas compromise par des règles superflues relatives aux unités de quantité attribuée (UQA) et à l'utilisation des terres, au changement d'affectation des terres et à la foresterie (LULUCF);

 

4.  demande instamment à l'Union européenne de redoubler d'efforts en vue d'élaborer une politique extérieure en matière de changement climatique et de parler d'une seule voix afin de retrouver un rôle de premier plan dans les négociations visant à parvenir à un accord global et contraignant pour l'après-2012, qui aille dans le sens des dernières avancées scientifiques et de l'objectif des 2° C, au cours de la COP 16 qui se tiendra à Mexico en décembre 2010;

 

5.  invite en particulier le Mexique, le Brésil et l'Afrique du Sud à s'engager davantage;

 

6.  rappelle son attachement aux négociations menées dans le cadre des Nations unies et invite les chefs d'État à ne pas compromettre ce processus mais, au contraire, à œuvrer pour son renforcement, en particulier en évitant les approches exclusives; demande cependant que les différentes façons de rendre le processus plus efficace soient examinées de toute urgence et, dans ce contexte, que l'Union européenne fasse des propositions relatives à l'application des règles de vote, basées le cas échéant sur des majorités importantes eu égard à plusieurs critères, afin de faciliter les progrès dans les négociations;

 

7.  reconnaît qu'un processus actif, équitable et transparent est nécessaire pour préserver la légitimité d'un futur accord sur le climat, qui revêt une importance fondamentale pour l'avenir de la planète; est convaincu que cet accord doit être élaboré au sein de plus petits groupes représentatifs, mais qu'il doit se fonder sur des objectifs et des missions convenus par tous;

 

8.  estime que des forums tels que le G20 ou le Forum des grandes économies peuvent contribuer à créer un consensus dans les négociations officielles, mais qu'ils ne peuvent que jouer un rôle secondaire puisqu'ils ne permettent pas de parvenir à des résultats contraignants et qu'ils ne représentent pas les pays les plus pauvres ni ceux qui sont les plus vulnérables face au changement climatique;

 

9.  encourage les parties à réaliser des progrès importants au cours des réunions de Bonn, en mai et juin 2010, et à programmer des rencontres de haut niveau avant la conférence de Mexico, afin de faciliter les avancées dans la perspective de la COP 16;

 

Engagements en matière de réduction des émissions

10. souligne que l'accord international devrait reposer sur le principe d'une "responsabilité commune mais différenciée", les pays développés devant donner l'exemple en réduisant leurs émissions par des objectifs contraignants concernant l'ensemble de l'économie, tandis que les pays émergents adopteraient, conformément au plan d'action de Bali, des mesures d'atténuation appropriées sur le plan national dans le contexte d'un développement durable; estime que le futur accord devrait prévoir des sanctions au niveau international en cas de non-respect de ces obligations;

11. rappelle que l'accord international doit garantir des réductions collectives d'émissions de gaz à effet de serre dans les pays développés dans la partie supérieure d'une fourchette comprise entre 25 et 40 % d'ici 2020 par rapport à 1990, comme le recommande le groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat dans son quatrième rapport d'évaluation (GIEC 4RE), et qu'il ressort de données scientifiques récentes qu'une réduction des émissions de 40 % au moins s'impose; demande que ces réductions soient mises en œuvre au niveau national;

12. rappelle appelle qu'il importe de fixer, à l'intention de l'Union et des autres pays industrialisés, un objectif à long terme de réduction d'au moins 80 à 95 % d'ici à 2050 par rapport aux niveaux de 1990, et que les émissions de gaz à effet de serre au niveau mondial devraient commencer à diminuer en 2015 au plus tard;

13. demande que l'accord fasse l'objet de réexamens, après chaque nouveau rapport du GIEC et, en tout état de cause, tous les cinq ans au minimum, afin de s'assurer que les objectifs en matière de réduction des émissions sont suffisamment ambitieux pour que l'objectif des 2° C soit atteint, et qu'ils continuent à reposer sur les données scientifiques les plus récentes;

14. demande que l'efficacité environnementale des objectifs de réduction des émissions visés à l'annexe I constitue le principe directeur de l'approche adoptée par l'Union à l'égard des normes comptables internationales applicables à la gestion des forêts et, d'une manière générale, à l'affectation des terres, au changement d'affectation des terres et à la foresterie; appelle à la création de mécanismes flexibles ainsi qu'à la prise en compte de tout dépassement des objectifs au cours de la première période d'engagement du protocole de Kyoto par rapport aux objectifs pour l'après-2012; demande une évaluation globale des marchés du carbone en ce qui concerne leur capacité à faire face au changement climatique;

15. souligne que tout futur programme de réduction des émissions découlant de la déforestation et la dégradation des forêts (REDD) doit respecter les droits des populations autochtones et des communautés locales, notamment leur droit à la propriété collective et à des territoires indigènes autonomes, et leur permettre d'exercer pleinement et effectivement leur droit de participation et leur pouvoir de prise de décision, à tous les niveaux, y compris aux stades de l'élaboration et de la mise en œuvre des plans nationaux de REDD et de l'attribution ou de la distribution du financement;

16. déplore l'absence de progrès dans le domaine de la réduction des émissions imputables aux transports aérien et maritime internationaux; appelle l'Union européenne à veiller, dans le futur accord, à ce que les incidences de l'aviation sur le climat soient prises en compte dans leur ensemble et que les objectifs de réduction des émissions fixés pour les secteurs des transports aérien et maritime soient les mêmes que ceux appliqués aux autres branches d'activités;

Financement

17. souligne la responsabilité historique des pays industrialisés dans le changement climatique irréversible, et rappelle que ceux-ci se doivent d'apporter un soutien financier et technique suffisant, durable et prévisible aux pays en développement pour leur permettre de se consacrer à la réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre, à s'adapter aux conséquences des changements climatiques et à réduire les émissions provenant de la déforestation et de la dégradation des forêts, ainsi qu'à renforcer les capacités pour se conformer aux obligations découlant du futur accord international;

18. insiste sur le fait que ces engagements à fournir l'aide financière requise de façon prévisible au titre de l'atténuation et de l'adaptation au changement climatique dans le cadre de la CCNUCC doivent être nouveaux et venir s'ajouter à l'aide publique au développement (APD), indépendamment des procédures budgétaires annuelles des États membres; rappelle les engagements déjà pris, selon lesquels l'APD devra représenter 0,7 % du PIB d'ici 2015;

19. estime, sans préjuger des différents instruments internationaux destinés à créer des ressources pour financer les actions liées au changement climatique dans les pays en développement (taxe sur les transactions financière, taxe internationale sur le combustible de soute, etc.), qu'au moins 120 milliards d'euros annuels seront nécessaires sous forme de financement public international; souligne, afin d'éviter le double comptage, que le marché du carbone ne peut être considéré comme une source d'aide financière pour les pays en développement;

20. souligne que l'aide à mise en œuvre rapide promise par les États membres doit être nouvelle et venir s'ajouter aux budgets de l'APD, qu'elle doit être coordonnée au niveau de l'Union et être rendue disponible dès que possible, en tout état de cause avant la COP 16 de Mexico, afin de financer des actions dans les pays en développement; considère qu'il s'agit d'un facteur clé permettant d'instaurer un climat de confiance en vue de la réussite de la conférence de Mexico, et invite la Commission à faire rapport régulièrement, à partir de juin 2010, non seulement sur l'utilisation des fonds à mise en œuvre rapide promis, mais également sur la façon dont ils viennent compléter l'APD existante;

21. rappelle que la contribution collective de l'Union aux efforts d'atténuation et aux besoins d'adaptation des pays en développement ne devrait pas être inférieure à 30 000 millions d'euros par an d'ici 2020, sachant que ce chiffre peut augmenter en fonction des connaissances nouvelles sur la gravité du changement climatique et l'ampleur de ses coûts;

22. souligne qu'une partie substantielle des recettes générées par la mise aux enchères de certificats dans le cadre du système communautaire d'échange de quotas d'émissions (SCEQE), ainsi que par tout mécanisme international dans les secteurs des transports aérien et maritime, devrait être allouée aux pays en développement pour leur permettre de remédier et s'adapter aux changements climatiques;

23. souligne que la révision prochaine du budget de l'Union doit prendre tout particulièrement en compte l'octroi de ressources suffisantes à des mesures visant à garantir la protection contre le changement climatique et l'adaptation à celui-ci, tant dans l'Union européenne que dans les pays en développement;

 

24. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, aux gouvernements et aux parlements des États membres ainsi qu'au secrétariat de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, en demandant qu'elle soit diffusée auprès de toutes les parties contractantes n'appartenant pas à l'Union européenne.