PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur la stratégie "UE 2020" - suivi du Conseil européen informel du 11 février 2010
4.3.2010
conformément à l'article 115, paragraphe 5, du règlement
Rebecca Harms, Daniel Cohn-Bendit au nom du groupe Verts/ALE
B7‑0159/2010
Résolution du Parlement européen sur la stratégie "UE 2020" - suivi du Conseil européen informel du 11 février 2010
Le Parlement européen,
– vu le Conseil européen informel du 11 février 2008,
– vu les conclusions de la Présidence qui ont suivi les réunions des Conseils européens de mars 2000, 2001, 2005, 2006 et 2007 et de décembre 2009,
– vu la consultation publique lancée par la Commission sur l'Europe 2020 et le document qui en a résulté (SEC(2010)116),
– vu l'évaluation de la stratégie de Lisbonne par la Commission (SEC(2010)114),
– vu l'article 3 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne,
– vu la question du 23 février 2010 à la Commission sur l'Agriculture et la future stratégie "UE 2020" (O-0023/2010 – B7‑0000/2010),
– vu l'article 115, paragraphe 5, et l'article 110, paragraphe 2, de son règlement,
A. considérant que la consultation de la Commission sur la future stratégie "UE 2020" ne prévoit pas de procédure appropriée de consultation des parties intéressées ni de participation du Parlement européen,
B. considérant que les objectifs fixés dans la stratégie de Lisbonne n'ont pas été atteints; que la définition de la future stratégie "UE 2020" doit être fondée sur une évaluation appropriée et approfondie de la stratégie de Lisbonne,
C. considérant que la crise économique et financière a révélé la vulnérabilité structurelle de l'Union européenne et plus spécifiquement celle de la zone euro; que la situation, en Grèce et dans d'autres pays vulnérables de l'Union économique et monétaire (UEM), s'avère très inquiétante et représente une menace imminente pour l'extension de l'intégration économique de l'Union européenne,
D. considérant que la crise a déjà détruit des millions d'emplois et a aggravé les problèmes de précarité de l'emploi et de pauvreté; que 16 % des habitants de l'Union européenne sont exposés au risque de pauvreté; que, au sein de l'Union européenne, 23 millions de personnes sont sans emploi,
E. considérant que le recours au "crédit facile", le manque de vision à long terme, la déréglementation du monde de la finance et une prise de risque inconsidérée sur les marchés financiers ont contribué aux pratiques spéculatives, qui, à leur tour, ont entraîné une bulle de croissance et une augmentation des déséquilibres, tant internes, au niveau de l'Union européenne, que mondiaux,
F. considérant que le changement climatique exige des mesures radicales et urgentes,
G. considérant que la forte dépendance aux carburants classiques et un usage inefficace des matières premières ont mis en péril la marche de l'Union européenne vers une économie durable,
H. considérant qu'il n'y a pas d'autre choix que d'accélérer la transition vers une économie "verte" hautement efficiente, entièrement fondée sur les énergies renouvelables, afin de lutter contre le changement climatique, de veiller à la sécurité d'approvisionnement et d'offrir un niveau élevé d'emploi et de cohésion sociale,
I. considérant que l'efficacité des ressources et une réduction de l'utilisation des ressources en termes absolus sont nécessaires afin de garantir la viabilité environnementale,
J. considérant que le vieillissement de la population s'accélère, alors que la population active, au sein de l'Union européenne, commencera à décroître à partir de 2013-2014,
K. considérant qu'il a y un besoin évident de partager le travail et les tâches ménagères de manière plus équitable entre les femmes et les hommes, d'améliorer la situation des femmes sur le marché de l'emploi et de tendre, de manière plus générale, vers l'égalité des sexes,
L. considérant qu'investir dans l'éducation et la formation, et ce tout au long de la vie, est essentiel à l'amélioration des conditions de vie et à l'avènement d'une économie fondée sur la connaissance et l'innovation,
M. considérant que la vision qu'a la Commission dans l'avenir de la stratégie "UE 2020" néglige le rôle important de la biodiversité et de l'agriculture ainsi que le rôle que jouent, de manière plus large, les économies rurales en garantissant la sécurité de l'approvisionnement alimentaire, la gestion des ressources naturelles et l'emploi et le haut potentiel qu'elles offrent en matière de lutte contre le changement climatique et d'autres problèmes fondamentaux; que le coût environnemental, social et économique de la perte de la biodiversité à l'échelle mondiale atteindrait, selon l'étude consacrée à l'économie des écosystèmes et de la biodiversité ("The economics of ecosystems and biodiversity" - TEEB), 1 350 à 3 100 milliards EUR par an en 2008 et 7 % du PIB mondial d'ici 2050,
N. considérant que cette omission semble traduire une absence flagrante de prise de conscience face à la nécessité de réformer en profondeur la Politique agricole commune ainsi que la politique du développement rural de manière à relever ces défis, à instaurer des pratiques durables de gestion de l'eau et des sols, à réduire la dépendance au pétrole, à préserver la biodiversité et à diversifier l'emploi dans les secteurs de l'agriculture et de l'économie rurale de manière durable,
O. considérant que le budget de l'Union européenne représente seulement 2,5 % du total des dépenses publiques dans l'Union et moins de 1 % du PIB de l'Union,
I. UE 2020: de la vulnérabilité à la durabilité: objectifs de la nouvelle stratégie
1. souligne que la stratégie "UE 2020" doit placer l'Europe à la pointe de la révolution "verte" du XXIe siècle, qui doit concilier le développement humain et les limites physiques de la planète;
2. demande, par conséquent, que l'objectif global de la stratégie "UE 2020" ne se limite plus à la course à la croissance du PIB, mais offre une vision politique plus large de l'avenir de l'Union européenne, envisagée comme une union sociale et durable, qui place les citoyens et la protection de l'environnement au cœur de l'action politique et vise à générer du bien-être et à accorder les meilleurs chances pour tous; souligne, à cet égard, que la compétitivité n'est pas un objectif en soi;
3. estime que la nouvelle stratégie devrait englober, hormis le PIB, un ensemble d'indicateurs du bien-être ainsi que des indicateurs qui tiennent compte des effets économiques externes, de manière plus large, ainsi que de la pression sur l'environnement, et que ces indicateurs devraient être définis, adoptés et évalués au moyen de procédures démocratiques et novatrices;
4. rappelle que, dans le cadre de l'examen à mi-parcours de la stratégie de Lisbonne en mars 2005, le Conseil européen a répété que la stratégie devait être envisagée dans le contexte plus large du développement durable, qui est considéré comme un principe clé régissant toutes les politiques et les activités de l'Union;
5. s'alarme de ce que la préparation de la Commission en vue de la stratégie 2020 ne vise pas à mettre l'Europe à la pointe dans un monde qui est en proie au changement climatique et à l'épuisement des ressources naturelles et dans lequel les écosystèmes mondiaux sont sur le point de s'effondrer;
6. s'inquiète vivement de ce que la stratégie pour 2020 ne mentionne pas d'objectifs concrets ou que l'on n'y trouve même pas une mention des objectifs de biodiversité pour 2020 et préconise, par conséquent, l'adoption d'objectifs mesurables visant à enrayer la perte de biodiversité et de services écosystémiques et à assurer, le cas échéant, leur restauration d'ici 2020;
7. rappelle que tout objectif national de réduction des gaz à effet de serre ne portant pas l'ambition d'une réduction de 30 % par rapport aux niveaux de 1990 s'avère être en décalage complet avec la science et n'empêchera pas les conséquences dramatiques d'un changement climatique devenu incontrôlable; estime qu'une telle position indiquerait par ailleurs que l'Union européenne ne se trouve plus à la pointe en matière de politique climatique à l'échelle mondiale; insiste, par conséquent, pour que cet objectif soit fixé à 40 %; s'oppose à l'octroi de subventions en faveur de technologies douteuses et peu fiables qui, à l'instar du nucléaire et de la technologie de piégeage et de stockage du carbone, n'entraînent des réductions de gaz à effet de serre que trop limitées et trop tardives;
8. souligne que la viabilité environnementale dépend d'une réduction en valeur absolue de l'utilisation des ressources; appelle, dans ce contexte, à l'adoption d'un objectif annuel d'amélioration de l'efficacité des ressources d'au moins 3 % non lié à l'évolution du PIB;
9. invite l'Union européenne à fixer, en tant que première mesure de transition vers une économie "verte" hautement efficiente, entièrement fondée sur les énergies renouvelables, des objectifs contraignants prévoyant, pour 2020, une réduction de sa consommation énergétique d'au moins 20 % par rapport aux niveaux de 1990 et une augmentation de la proportion des énergies renouvelables d'au moins 25 % d'ici 2020, en levant tous les obstacles, techniques ou autres, à la poursuite du développement des énergies renouvelables durables;
10. souligne que l'Union européenne doit intensifier ses efforts en faveur d'une politique affirmée de lutte contre la discrimination fondée sur le respect des droits et d'une véritable politique de cohésion sociale, ces mêmes politiques visant à réduire l'inégalité et à combler le fossé entre les riches et les pauvres, à offrir de meilleurs résultats en termes de santé, à améliorer les performances éducatives, à réduire la criminalité et à renforcer tout un ensemble de droits et de biens sociaux que ne peut garantir, à elle seule, la lutte contre la pauvreté;
11. estime, à cet égard, que la stratégie "UE 2020" devrait inclure, de manière explicite, des objectifs ambitieux pour réduire la pauvreté de moitié tous les cinq ans (soit une réduction du niveau de pauvreté à 8,5 % d'ici 2015 et à 4 % d'ici 2020) et pour réduire les inégalités, en particulier le fossé entre les riches et les pauvres; est donc d'avis que la pauvreté doit être mesurée en termes de "pauvreté relative" pour pouvoir identifier les personnes menacées de marginalisation et que le coefficient de Gini devrait être érigé en instrument de la stratégie "UE 2020";
12. insiste pour que la lutte pour l'égalité entre les femmes et les hommes vise un taux d'emploi féminin de 60 % dans des emplois suffisamment payés pour garantir l'indépendance financière des femmes ainsi qu'une réduction de moitié de l'écart entre les femmes et les hommes tous les 5 ans (soit une réduction de cet écart à 8,5 % d'ici 2015 et à 4 % d'ici 2020), en améliorant l'accès aux services de garde pour au moins la moitié des enfants de moins de 3 ans et pour la totalité des enfants de plus de 3 ans, en créant un observatoire européen de la violence envers les femmes et en fixant à 40 % le quota des femmes au sein des conseils d'administration des entreprises;
13. prie instamment le Conseil européen et la Commission d'établir et d'adopter un programme ambitieux en matière de travail décent qui inclue l'objectif d'un salaire décent, des critères contraignants en matière d'emploi des jeunes, selon lesquels le taux de chômage des jeunes ne peut être supérieur au taux de chômage moyen de la population générale, et une vision de l'emploi à l'échelle de toute la vie, sous-tendue par des régimes publics de pension adéquats;
14. invite le Conseil et la Commission à créer une "garantie européenne pour les jeunes" qui affirme le droit de chaque jeune Européen à se voir offrir un emploi, un stage d'apprentissage, une formation complémentaire ou une formule associant travail et formation, et ce après une période maximale de 6 mois de chômage;
15. estime que la stratégie "UE 2020" devrait inclure un objectif de fréquentation de l'enseignement secondaire de 100 % ainsi que des objectifs et des indicateurs qualitatifs clairs pour les niveaux d'enseignement primaire et secondaire;
16. demande qu'un objectif de 4 % du PIB soit adopté en matière de recherche et de développement ainsi que d'innovation; estime, à cet égard, que des objectifs explicites devraient être fixés pour les instruments de financement applicables aux PME ainsi que pour la promotion de normes ouvertes visant à garantir l'interopérabilité numérique et l'accès aux technologies numériques;
17. attire l'attention sur la nécessité de revoir le régime des droits de propriété intellectuelle, dans la mesure où une délivrance de brevet trop pointilleuse et un régime de droits exclusifs peuvent en fait constituer un frein à l'innovation et restreindre l'accès aux ressources essentielles; fait valoir que les obstacles non nécessaires à la libre circulation de la connaissance devraient être supprimés, étant entendu que le partage de la connaissance est un vecteur essentiel de la prospérité;
18. souligne que les dépenses consacrées à la recherche et au développement dans les domaines militaire et nucléaire devraient être exclues de l'objectif de 4 % du PIB en faveur de la recherche et du développement ainsi que de l'innovation;
19. demande une intégration claire des objectifs de l'Union pour l'éco-innovation dans l'objectif de 4 % du PIB;
20. souligne la nécessité de revoir en profondeur la stratégie commerciale de la Commission pour "Une Europe compétitive dans une économie mondialisée", en visant à promouvoir la coopération sur des normes contraignantes en faveur de relations commerciales durables, tant d'un point de vue social qu'environnemental; appelle, dans ce contexte, à une interruption de la procédure de signature des accords de libre‑échange avec la Colombie, le Pérou et la Corée et à un moratoire sur la poursuite des négociations d'un accord de libre‑échange avec l'Inde, le Canada, les pays du Golfe ainsi qu'une série de pays ACP sous régime d'accords de partenariat économique (APE);
II. Renforcement de la gouvernance pour la stratégie "UE 2020"
21. estime que la stratégie "UE 2020" devrait établir des objectifs contraignants et des mécanismes de mise en conformité qui associent l'harmonisation vers le haut et la flexibilité;
22. invite, dans cette perspective, le Conseil européen et la Commission à octroyer des incitations économiques, telles que des fonds supplémentaires de l'Union européenne, et à imposer des sanctions, telles que des frais supplémentaires, qui appuient de manière efficace les objectifs de la stratégie 2020;
23. est d'avis que chaque État membre devrait soumettre à la Commission un programme national pour 2020 qui se fonde sur sa propre situation de départ et soit conforme aux objectifs de la stratégie "UE 2020";
24. prie instamment le Conseil européen et la Commission d'inclure, dans la stratégie "UE 2020", un ambitieux principe de gouvernance économique à l'échelle européenne qui prévoie le lancement conjoint, dans un cadre commun, des programmes de stabilité et de convergence et des programmes nationaux de réforme;
25. souligne que certaines faiblesses de la construction de l'UEM et, dans une certaine mesure, les politiques économiques menées par les pays partenaires ne facilitent pas la remise en ordre par certains États membres de leurs finances; regrette en particulier que la coordination des politiques fiscales se limite aux règles du pacte de stabilité et de croissance (PSC), lequel ne concerne que les déficits publics et la dette publique;
26. fait observer que l'actuel mécanisme de coordination politique dans la zone euro doit être étendu aux déséquilibres économiques actuels et futurs, ainsi qu'aux divergences à l'intérieur de la zone euro; déplore à cet égard l'absence d'engagements contraignants au niveau des gouvernements pour imposer la coordination au sein de l'UEM et, de manière plus générale, de l'Union européenne;
27. estime que la Commission devrait émettre des recommandations quant à la possibilité de réaliser les objectifs nationaux et évaluer l'opportunité d'allouer des fonds supplémentaires sur une base triennale; invite la Commission à adopter, dans le cadre de l'évaluation des programmes nationaux, des procédures de désignation et de stigmatisation des fautifs ("naming and shaming");
28. fait valoir que le Parlement devrait évaluer la mise en œuvre de la stratégie "UE 2020" sur une base annuelle et devrait, en tant que branche de l'autorité budgétaire, conditionner explicitement ces évaluations à l'octroi de financements supplémentaires de l'Union européenne;
29. estime que l'ancrage démocratique constitue une condition essentielle de succès et que, par conséquent, les parlements nationaux doivent être étroitement associés à l'élaboration et à la mise en œuvre de la stratégie "UE 2020"; considère, dans le même esprit, que les régions, les municipalités, les partenaires sociaux et les ONG devraient également y être étroitement associés;
30. estime que la stratégie "UE 2020" devrait optimiser ses liens stratégiques et opérationnels avec la stratégie d'ensemble pour le développement durable, mais aussi avec le paquet énergie‑climat, l'agenda social européen, la stratégie de l'Union européenne en faveur de la diversité pour 2020 et la politique agricole commune; invite, dans ce contexte, la Commission à présenter une communication annuelle sur les interactions et la cohérence desdites stratégies;
31. invite la Commission à inclure la réforme de la politique agricole commune ainsi que celle de la politique du développement rural dans la stratégie "UE 2020" de manière à ce que les objectifs de cohésion, de compétitivité et de durabilité soient envisagés comme des objectifs indissociables, comme le prévoyaient déjà les agendas de Lisbonne et de Göteborg de l'Union européenne;
III. Moyens et instruments essentiels au succès de la nouvelle stratégie
32. demande aux pays qui affichent actuellement un excédent de la balance des opérations courantes de stimuler l'emploi et la demande intérieure, entre autres en mettant un terme à la politique de modération salariale, en introduisant un salaire minimum là où il n'existe pas et en augmentant les investissements en faveur de la durabilité tout en tenant compte des règles du PSC; demande aux pays qui affichent actuellement un déficit de la balance des opérations courantes de freiner une consommation excessive et d'accroître l'investissement durable;
33. souligne que la modération salariale agit comme un frein sur la croissance du revenu des ménages et, partant, sur la consommation privée; met en garde par conséquent contre le danger qu'il y a à faire de la modération salariale le moyen privilégié de parvenir à la stabilité des prix; rappelle que la concurrence mondiale accrue a déjà pesé sur les salaires cependant que la hausse des prix des produits de base a entamé le pouvoir d'achat des consommateurs de l'Union européenne;
34. considère que le budget européen est insuffisant pour limiter efficacement les déséquilibres entre les États membres et produire un effet anticyclique suffisant; propose, par conséquent, qu'il soit revu à la hausse; estime que le prochain débat sur les perspectives financières offre une occasion de lancer une réflexion qui prévoie une augmentation du montant du budget de l'Union européenne et soit clairement intégrée au processus de révision de l'Union européenne pour 2020;
35. estime qu'il est essentiel de développer et de renforcer les mécanismes de solidarité à l'intérieur de l'Union européenne afin de pallier les chocs asymétriques; invite la Commission à étudier la possibilité de créer un fonds de solidarité auquel contribueraient les pays en temps utile afin de mieux absorber les chocs asymétriques;
36. s'accorde avec la Commission pour considérer que la supervision et la régulation des marchés financiers en vue de garantir la stabilité financière, la limitation des bulles spéculatives ainsi que la limitation des déséquilibres intérieurs et extérieurs sont essentiels au bon développement de l'UEM;
37. estime que toutes les sociétés et agents transfrontaliers et intersectoriels (européens et non européens) doivent pouvoir opérer dans l'Union européenne, à égalité, sur une base transfrontalière;
38. estime que tous les marchés, acteurs et instruments financiers doivent être réglementés, tout comme les infrastructures financières importantes du point de vue systémique, telles que les systèmes, les mécanismes et les plateformes de paiement, d'échange et de liquidation, et la fourniture afférente de services de conservation;
39. estime que l'efficacité et le renforcement de la réglementation financière est essentielle afin d'orienter les dépôts et l'épargne vers des investissements "verts" durables et la création d'emplois; met en lumière la nécessite d'une autorité européenne unique de surveillance pour toutes les institutions transfrontalières et intersectorielles; insiste pour que soient mis en place des instruments appropriés de lutte contre la spéculation sur les actifs et sur les produits de base et de contrôle de l'innovation financière;
40. estime que la réglementation prudentielle devrait être nettement renforcée et devrait englober des exigences de capital plus élevées et plus orientées vers la qualité, telles que des exigences de capital contracyclique ou de liquidité, des ratios de levier financier ainsi que des exigences progressives de capital et de liquidité en fonction de la taille de la société;
41. estime que les activités bancaires devraient à nouveau se concentrer sur les services bancaires commerciaux classiques (dépôts et octroi de prêts), qu'elles devraient être réglementées et surveillées de près et devraient, en contrepartie, bénéficier du soutien accordé au prêteur et au teneur de marché de dernier recours; estime, par ailleurs, que les autres activités bancaires devraient faire l'objet d'une réglementation et d'une surveillance d'un autre ordre, selon les mêmes principes que ceux qui s'appliquent aux autres marchés importants du point de vue systémique ainsi qu'aux institutions non bancaires hautement capitalisées telles que les hedge funds et les capitaux propres privés;
42. se dit profondément préoccupé par le niveau intenable de l'endettement public et par la perspective de son aggravation rapide en 2010 et 2011 du fait de politiques fiscales nécessairement expansionnistes en réponse à la crise, et par son alourdissement, étant donné que les générations futures hériteront de dettes écologique et privée grandissantes; rappelle que, dans de nombreux États membres, la dette privée a connu une augmentation difficilement soutenable au cours de la période précédant la crise;
43. souligne que le crédit excessif accroît les risques de bulles spéculatives; demande, par conséquent, à la BCE et au Système européen de banques centrales d'envisager des mesures appropriées, telles que l'ajustement des exigences en matière de réserves, de manière à garantir la stabilité financière en évitant une explosion de la dette privée;
44. considère qu'il est nécessaire de revoir les règles du PSC, qui n'ont pas été conçues pour faire face aux niveaux de dette cumulée que devraient atteindre de nombreux États membres après la crise ni pour contrôler l'évolution de la dette privée; suggère, dans ce contexte, d'étendre la procédure de déficit excessif prévue dans le PSC aux États membres qui affichent des excédents excessifs de leur balance des opérations courantes et aux dettes privées excessives;
45. rappelle que les déficits publics suscitent une grande inquiétude et que les États membres doivent prendre les mesures nécessaires à leur réduction, compte tenu de la situation conjoncturelle, ainsi qu'à la réduction du niveau de la dette privée et du déficit de la balance courante; met en garde contre les dangers d'une spirale déflationniste si les déficits et les salaires sont réduits sans tenir compte de la situation financière des États membres et plus encore de l'écart de production;
46. estime, dans la même optique, que les salaires devraient évoluer au moins au même rythme que la productivité, en tenant également compte du taux d'inflation;
47. invite la Commission à proposer un ensemble de mesures visant à aider les États membres à restaurer l'équilibre de leurs comptes publics et à financer leurs investissements publics, mesures consistant à:
a) émettre des euro-obligations ou prendre des mesures similaires afin d'abaisser le coût de la charge d'intérêt au titre du service de la dette publique, puisque les écarts de taux d'intérêt entre les États membres ne sont pas descendus au-dessous de leur niveau d'avant la crise;
b) passer de la concurrence fiscale entre États membres à la coopération fiscale, en particulier par l'établissement d'un calendrier pour l'introduction d'une assiette commune consolidée pour l'impôt sur les sociétés et d'un mécanisme visant à garantir un minimum de coordination entre les taux d'imposition sur les sociétés, sur la même base que celle qui prévaut actuellement pour la TVA;
c) introduire des écotaxes de manière coordonnée afin d'alléger les charges sur le travail pour les réorienter vers les activités et les produits non durables;
d) introduire des taxes sur les transactions financières, telles que la taxe Tobin-Spahn, à l'échelle de l'Union européenne;
e) introduire l'élaboration de rapports, pays par pays, sur le revenu des sociétés et les taxes payées sur lesdits revenus, ainsi qu'un échange automatique d'informations;
f) mettre fin aux paradis fiscaux, à commencer par ceux qui se trouvent au sein de l'Union européenne;
48. invite la Commission, Eurostat et les États membres à travailler à la définition d'outils visant à accroître la comparabilité des budgets nationaux eu égard aux différentes catégories de dépenses, en donnant à la Commission le droit de procéder à une vérification publique des statistiques nationales;
49. rappelle par ailleurs que les déséquilibres mondiaux induits par les fluctuations du cours du change, par exemple entre le dollar américain, le renminbi et l'euro, doivent eux aussi être corrigés afin d'éviter les crises financières à l'avenir; invite, par conséquent, l'Eurogroupe, le Conseil et la BCE à intensifier la coordination de leurs actions en matière de politique de change;
50. met l'accent sur la nécessité pour la zone euro en fin de compte d'obtenir un siège unique dans les institutions financières internationales et de parler d'une seule voix sur les politiques de taux de change;
51. invite la Commission à respecter, à l'avenir, les dispositions législatives de portée générale prévues par le traité de Lisbonne, telles que la nouvelle clause sociale horizontale (article 9) et celles relatives à la non-discrimination (article 8 et article 10), au développement durable (article 11) et à la protection des consommateurs (article 12); estime que la procédure d'analyse d'impact devrait être redéfinie à cette aune;
52. estime que, pour que l'objectif d'insertion sociale soit atteint, un salaire de base décent devrait être garanti par une directive-cadre de l'Union européenne, mise en œuvre et gérée par tous les États membres, ainsi que par des finances publiques solides qui reposent sur une imposition progressive et une perception efficace des impôts;
53. prie instamment la Commission de présenter une analyse détaillée des effets de la libéralisation jusqu'à ce jour et de faire le bilan de l'application du protocole sur les services d'intérêt général;
54. rappelle le besoin de garantir à tous un accès à des services de qualité à un prix abordable; souhaite, à cet effet, l'élaboration d'une directive-cadre de l'Union européenne mettant en lumière le rôle particulier des services d'intérêt général ainsi que d'une directive de l'Union européenne sur les services sociaux et de santé;
55. invite les partenaires sociaux à instaurer, en collaboration avec la Commission, des initiatives européennes communes afin de lutter contre le dumping social et de réduire le nombre de salariés vivant dans la pauvreté; prie instamment la Commission de publier, sur une base annuelle, des indicateurs liés à la qualité du travail, comme convenu avec le Conseil;
56. estime qu'afin d'atteindre l'objectif d'une économie plus "intelligente", plus durable et qui n'exclue personne, l'Union européenne a besoin d'une stratégie d'emplois "verts" reposant sur les compétences, l'adaptation à l'environnement de travail et la transformation de la société; estime qu'une stratégie de ce type devrait prévoir des investissements "intelligents" afin de créer de nouveaux emplois "verts", des incitations en vue de transformer les emplois existants en emplois "verts", des investissements dans l'éducation et la formation tout au long de la vie pour contribuer au développement des salariés et leur permettre d'occuper, le cas échéant, de nouveaux emplois, un accord-cadre sur la sécurité de transition, notamment le droit à la formation et des dispositions suffisantes en matière de sécurité sociale en période de transition professionnelle, un accord entre les partenaires sociaux sur le droit à l'éducation et à la formation tout au long de la vie dans le cadre du travail et un soutien général à l'ajustement des compétences et à la réorganisation de l'environnement de travail;
57. souligne que la stratégie "UE 2020" devrait inclure un véritable agenda en matière de politique sociale, en ciblant le champ d'action du fonds social européen et du programme communautaire pour l'emploi et la solidarité sociale, en prévoyant un programme d'inclusion active et les instruments de financement et de gouvernance y afférents, en garantissant aux citoyens la sécurité dans toutes les situations de la vie, notamment en cas de chômage (par un cadre européen pour la sécurité de transition) et en fixant aux États membres des objectifs avec, à la clé, des incitations financières;
58. appelle à une pleine reconnaissance et à une promotion de l'économie sociale comme modèle économique alternatif, liant les activités économiques à la réalisation d'objectifs en matière de politique sociale, de santé, d'emploi ou encore de logement, qui comblent les besoins au niveau local et remplissent un objectif de création d'emplois;
59. invite la Commission à veiller à ce que les fonds structurels de l'Union européenne soient assortis de conditions sociales et environnementales strictes et contribuent de la sorte aux objectifs de l'Union européenne en matière de lutte contre le changement climatique par l'introduction d'un contrôle de l'incidence sur le climat dans le cadre de toute intervention au titre des Fonds structurels, en commençant sans plus attendre par les grands projets;
60. appelle à stimuler l'innovation au moyen du regroupement des brevets, de plateformes de brevets, de prix à l'incitation à l'innovation, de licences ouvrant tous les droits et de pôles de la connaissance, de licences obligatoires ainsi que d'autres outils informatiques destinés à concilier accès aux technologies et innovation;
61. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil européen et à la Commission.