Proposition de résolution - B7-0359/2010Proposition de résolution
B7-0359/2010

PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur la situation dans la péninsule coréenne

14.6.2010

déposée à la suite d'une déclaration de la vice-présidente de la Commission/haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité
conformément à l'article 110, paragraphe 2, du règlement

Jelko Kacin, Marietje Schaake, Ramon Tremosa i Balcells, Marielle De Sarnez au nom du groupe ALDE

Voir aussi la proposition de résolution commune RC-B7-0358/2010

Procédure : 2010/2685(RSP)
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B7-0359/2010

B7‑0359/2010

Résolution du Parlement européen sur la situation dans la péninsule coréenne

Le Parlement européen,

–   vu ses résolutions antérieures sur la Corée,

–   vu la déclaration de Catherine Ashton, haute représentante de l'Union, sur la publication du rapport relatif au naufrage du navire sud-coréen Cheonan,

–   vu le rapport relatif aux résultats de l'enquête sur le naufrage du navire sud-coréen Cheonan,

–   vu l'article 110, paragraphe 2, de son règlement,

Naufrage du Cheonan

A. considérant qu'un patrouilleur sud-coréen, le Cheonan, a fait naufrage le 26 mars 2010 après une attaque dans des eaux disputées, provoquant la mort de 46 marins,

B.  considérant que le navire s'est brisé en deux en raison de l'onde de choc et de l'effet bulle produit par l'explosion sous-marine d'une torpille au large de l'île de Baegnyeong, à proximité de la frontière maritime contestée entre les deux Corée,

C. considérant que les dégâts considérables en salle des machines ont provoqué le naufrage du navire; considérant qu'en raison du très fort courant, l'autre partie du navire a été retrouvée à 7 kilomètres du lieu de l'attaque,

D. considérant que les débris de la torpille CHT-02D récupérés sur le fonds marin le 15 mai 2010 portaient des inscriptions en hangeul correspondant à un modèle nord-coréen de ce type de torpille lourde d'un calibre de 21 pouces (533 mm), d'un poids de 1,7 tonne et d'une charge explosive nette pouvant atteindre 250 kg,

E.  considérant que tous les sous-marins des autres pays voisins se trouvaient à leur base ou à proximité de celle-ci au moment de l'incident,

F.  considérant qu'une enquête effectuée par une commission d'enquête internationale civile et militaire comportant une procédure d'enquête et de validation réalisée conformément à une démarche scientifique objective accompagnée d'une évaluation indépendante de la Commission des nations neutres pour la surveillance a conclu à l'existence d'éléments manifestes et irréfutables prouvant que le navire sud-coréen Cheonan a fait naufrage à la suite d'une explosion sous-marine extérieure provoquée par une torpille fabriquée en Corée du Nord et lancée par un petit sous-marin nord-coréen,

G. considérant que le secrétaire général des Nations unies a qualifié les conclusions du rapport de "profondément troublantes",

H. considérant que le gouvernement de la République de Corée a demandé des excuses publiques et la promesse que plus aucune provocation ne viendrait des autorités de la République populaire démocratique de Corée,

I.   considérant que la Corée du Nord nie toute responsabilité dans l'incident, accusant la Corée du Sud de l'avoir monté de toutes pièces,

J.   considérant qu'à la suite de cet incident, la République de Corée a annoncé et procédé à la suspension de toutes ses relations avec la République populaire démocratique de Corée, à l'exception de l'aide humanitaire et du fonctionnement du complexe industriel de Kaesong, et qu'elle a également annoncé la reprise de ses émissions de propagande par radio et par haut-parleurs, bien qu'elles aient été jusqu'à présent reportées,

K. considérant qu'en réaction à la suspension des relations commerciales, la Corée du Nord a coupé tout lien avec la Corée du Sud et menacé de s'en prendre aux haut-parleurs sud-coréens si ceux-ci poursuivent leurs émissions de propagande ainsi que de déclarer les hostilités si de nouvelles sanctions sont adoptées à l'encontre de la République populaire démocratique de Corée,

L.  considérant que l'Union européenne soutient vigoureusement la dénucléarisation de la péninsule coréenne et la reprise des négociations à six, qu'elle considère comme essentielles à la paix et à la stabilité de la région,

M. considérant que par le passé, la Chine s'est toujours montrée réticente à recourir aux pressions car elle craint un afflux de réfugiés à ses frontières,

N. considérant que Séoul a officiellement demandé à ce que la question soit inscrite à l'ordre du jour des débats du Conseil de sécurité des Nations unies alors que dans un courrier adressé au président du Conseil de sécurité, la Corée du Nord a décliné toute responsabilité dans l'attaque et engagé le Conseil à l'aider à réaliser sa propre enquête,

Droits de l'homme

O. considérant que d'après des images prises par satellite et divers témoignages de transfuges nord-coréens, il a été possible d'établir la présence, en Corée du Nord, de six camps de concentration regroupant plus de 150 000 prisonniers politiques,

P.  considérant que les prisonniers politiques détenus dans ces camps sont privés de tout droit fondamental et n'ont aucun contact avec le monde extérieur, que nombre d'entre eux décèdent de malnutrition ou de maladies curables et qu'ils sont privés de tout traitement médical,

Q. considérant qu'il n'existe aucun moyen de communication libre tel que radio, journaux ou accès à l'internet en Corée du Nord, ce qui signifie que seules les informations provenant des autorités ou approuvées par elles parviennent à la population et que pratiquement aucune information sur la situation des droits de l'homme ne peut être transmise par des Coréens du Nord au reste du monde; considérant que les organisations humanitaires internationales et les organisations de défense des droits de l'homme n'ont accès ni à la Corée du Nord, ni à sa population,

R.  considérant que l'Union européenne est très fermement partisane de l'abolition de la peine de mort et souhaite que ce principe soit universellement adopté,

S.  considérant que, le 25 février 2010, la Cour constitutionnelle de Corée du Sud, par 5 voix contre 4, a déclaré que la peine de mort était constitutionnelle; considérant toutefois que les juges ont également souligné que le débat sur la question de savoir s'il faut maintenir ou abolir la peine de mort doit être mené à l'Assemblée nationale et non au cours d'une procédure constitutionnelle; considérant que la Cour constitutionnelle a pris sa décision par 5 voix contre 4, tandis que la décision de 1996 avait été prise par 7 voix contre 2,

T.  considérant qu'en République de Corée, plus de 55 prisonniers sont actuellement en attente d'exécution et que la dernière exécution, en République de Corée, remonte à décembre 1997; considérant que, sous le régime du Président Kim Dae-Jung, entré en fonction peu après et lui-même condamné à mort en 1980 avant d'être gracié, la peine de mort n'était plus appliquée, et considérant que la République de Corée a fait partie, ces 13 dernières années, du groupe de nations "abolitionnistes en pratique",

U. considérant que, le 18 décembre 2007, l'Assemblée générale des Nations unies a adopté à une large majorité une résolution invitant les pays appliquant la peine de mort à "instituer un moratoire sur les exécutions en vue de l'abolition de la peine de mort", résolution dont le contenu a été réaffirmé dans une deuxième résolution adoptée le 18 décembre 2008,

1.  regrette profondément la perte tragique des vies humaines à bord de la corvette sud-coréenne Cheonan et exprime sa sympathie aux autorités de la République de Corée, aux familles des victimes et au peuple coréen, dans un esprit de solidarité et d'amitié;

2.  réitère la condamnation de l'attaque exprimée par la Haute représentante de l'Union/vice-présidente de la Commission et se félicite de la modération dont a fait preuve la République de Corée;

3.  prend acte des conclusions du rapport final de la commission d'enquête et condamne fermement le naufrage, qu'il considère comme un acte de provocation contre la paix et la stabilité de la péninsule coréenne;

4.  regrette que les gouvernements de la République populaire de Chine et de la Fédération de Russie n'aient pas encore pris clairement position sur les conclusions du rapport final de la commission d'enquête;

5.  demande aux deux parties de faire preuve de retenue, de n'épargner aucun moyen pour améliorer les relations intercoréennes et d'intensifier leur action pour promouvoir une paix durable et la sécurité de la péninsule coréenne;

6.  demande à la Chine, en tant que puissance régionale, membre permanent du Conseil de sécurité et principal partenaire commercial de la Corée du Nord, d'user de toute son influence auprès de la Corée du Nord pour veiller à ce que le conflit ne dégénère pas davantage;

7.  se félicite des déclarations de la République populaire de Chine par lesquelles le pays se dit "prêt à travailler avec les États-Unis" et engage les deux pays à œuvrer au maintien de la stabilité de la péninsule coréenne;

8.  se dit favorable à ce que la question soit portée devant le Conseil de sécurité des Nations unies par le gouvernement de la République de Corée;

9.  invite les pays qui participent aux négociations à six sur le désarmement à continuer de travailler ensemble pour garantir la reprise des négociations visant à mettre fin au programme nucléaire nord-coréen;

Droits de l'homme

10. demande à l'Union européenne de charger un représentant spécial de l'Union sur la Corée du Nord de la surveillance permanente et de la coordination afin de contribuer à résoudre les questions relatives aux droits de l'homme en Corée du Nord, aussi bien au sein de l'Union européenne qu'avec les grands partenaires que sont les États-Unis, le Japon, la Suisse, la République populaire de Chine et la République de Corée;

11. demande qu'une commission d'enquête des Nations unies soit chargée d'évaluer les violations passées et présentes des droits de l'homme en Corée du Nord et de déterminer dans quelle mesure ces violations et l'impunité qui en découle peuvent constituer des crimes contre l'humanité et être traduits devant une juridiction internationale;

12. demande aux États membres de l'Union européenne de collaborer avec les États-Unis et d'autres partenaires internationaux afin de veiller à ce que 1) les violations graves et persistantes des droits de l'homme en Corée du Nord soient abordées, 2) de faire pression sur la Chine pour qu'elle reconnaisse et protège les réfugiés nord-coréens, et 3) d'accepter la réinstallation des réfugiés nord-coréens;

13. demande aux États membres de l'Union européenne et aux pays candidats d'assurer la protection et la promotion des droits fondamentaux des travailleurs nord-coréens directement ou indirectement employés par des sociétés européennes en Europe et à l'étranger, y compris en Russie, au Moyen-Orient et en Asie;

14. reconnaît le fait que la République de Corée n'a procédé à aucune exécution depuis 1998, ce qui en fait de facto un pays abolitionniste; se félicite des avancées en matière de protection et de promotion des droits de l'homme dans ce pays; invite la République de Corée à faire savoir aux pays de la région et au monde entier, dans un message très fort, que les droits de l'homme sont universels;

15. réaffirme son opposition globale à la peine de mort, qui est contraire à un système de justice pénale moderne et ne contribue pas, contrairement à ce que pense l'opinion publique, à diminuer le taux de criminalité;

16. encourage la République de Corée à instituer un moratoire légal sur toutes les exécutions jusqu'à ce que le Parlement ait adopté une loi abolissant la peine de mort; estime que la contribution plus que positive de la Corée à la promotion des droits de l'homme dans la péninsule coréenne et dans le monde prouve qu'elle partage les mêmes valeurs que l'Union européenne;

17. souligne qu'il croit que l'Union européenne et la République de Corée doivent renforcer leur coopération politique, économique, scientifique, culturelle et générale en améliorant les conditions d'un échange bien plus large d'étudiants et de jeunes dirigeants politiques;

18. charge son Président de transmettre la présente résolution au Président de la Commission, à la Vice-présidente de la Commission/haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, au Président du Conseil, aux gouvernements et aux parlements des États membres et des pays candidats, au Secrétaire général des Nations unies, au gouvernement de la République de Corée et à la Commission nationale de droits de l'homme de Corée.