Proposition de résolution - B7-0583/2011Proposition de résolution
B7-0583/2011

PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur le prochain sommet UE-États-Unis et la réunion du Conseil économique transatlantique

9.11.2011

déposée à la suite d'une déclaration de la vice-présidente de la Commission / haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité
conformément à l'article 110, paragraphe 2, du règlement

Helmut Scholz, Marie-Christine Vergiat, Willy Meyer au nom du groupe GUE/NGL

Procédure : 2011/2870(RSP)
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B7-0583/2011
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B7-0583/2011
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B7‑0583/2011

Résolution du Parlement européen sur le prochain sommet UE-États-Unis et la réunion du Conseil économique transatlantique

Le Parlement européen,

–   vu l'article 110, paragraphe 2, de son règlement,

A. considérant que le début du XXIe siècle a été le témoin d'une évolution vers un monde multipolaire nécessitant une gestion collective des problèmes communs au niveau international, et que l'Union européenne et les États-Unis doivent s'adapter à cette situation en adoptant une approche coopérative dans leurs relations internationales;

B.  considérant que l'Union européenne et les États-Unis représentent ensemble près de la moitié de l'économie mondiale et qu'il incombe dès lors particulièrement à ces deux économies de résoudre la crise économique et financière actuelle, qui ne se limite pas à l'Europe et aux États-Unis mais a également des répercussions sur l'économie mondiale et les évolutions politiques à travers le monde;

C. considérant que le taux de chômage a atteint, en raison de la crise, 9,1 % aux États‑Unis et 9,5 % dans l'Union européenne; considérant que le chômage des jeunes a atteint 24,6 % aux États‑Unis (taux concernant les moins de 20 ans), qu'il vient de dépasser les 20 % dans l'Union européenne (pour les moins de 26 ans) et qu'il connaît un niveau record de plus de 40 % en Espagne et en Grèce;

D. considérant que, selon le bureau du budget du Congrès américain (Congressional Budget Office – CBO), entre 1979 et 2007, le revenu réel moyen des ménages après impôt, corrigé de l'inflation, a augmenté de 275 % aux États-Unis pour la tranche des 1 % disposant des revenus les plus élevés, tandis qu'il n'a augmenté que de 18 %, au cours des mêmes 28 années, pour les 20 % de la population aux revenus les plus faibles; considérant qu'une tendance similaire de répartition de plus en plus inégalitaire des richesses est également observée dans l'Union européenne, bien qu'elle ne soit pas aussi prononcée;

E.  considérant que, tant aux États-Unis qu'en Europe, les gens manifestent devant les sièges des grandes banques et des bourses, lieux symboliques, pour protester contre l'accroissement des inégalités sociales et économiques et contre le pouvoir et l'influence des entreprises sur les gouvernements, notamment du secteur des marchés financiers; considérant que la population estime que ce n'est pas à elle de payer pour les erreurs du secteur bancaire;

F.  considérant que les États-Unis, tout comme l'Union européenne et ses États membres, ne respectent pas leurs engagements en ce qui concerne la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement, alors qu'il ne reste que trois ans pour éviter un échec retentissant;

G. considérant que la guerre en Afghanistan se poursuit, qu'elle a déjà fait des dizaines de milliers de victimes civiles et qu'elle provoque une déstabilisation désastreuse du pays et de l'ensemble de la région; considérant qu'en réalité, la politique essentiellement militaire menée par l'OTAN n'a permis de résoudre aucun des problèmes de ce pays;

H. considérant que les États-Unis et l'OTAN sapent progressivement le droit international, en violant le principe de l'intégrité territoriale d'États tiers et le principe de non-ingérence dans les affaires intérieures d'autres pays, ainsi que l'ont montré les frappes de drones au Pakistan et les récentes interventions de l'OTAN;

I.   considérant que les États-Unis et certains États membres de l'Union européenne – en dépit de l'engagement qu'ils ont pris d'œuvrer à une solution fondée sur la coexistence de deux États – empêchent encore la Palestine de devenir membre de l'Organisation des Nations unies; considérant que le Quatuor n'est jamais parvenu, depuis toutes ces années, à apporter une solution au conflit au Proche-Orient;

J.   considérant que, en dépit de nombreuses déclarations d'intention, peu de progrès ont été accomplis dans le domaine du désarmement nucléaire; considérant que, au lieu de rechercher une coopération avec la Russie sur les questions de sécurité, les États-Unis sont sur le point d'installer de manière unilatérale des éléments d'un système de défense antimissile dans plusieurs régions d'Europe;

K. considérant que l'administration Obama n'a pas levé les sanctions contre Cuba;

L.  considérant que la peine de mort est toujours en vigueur dans 38 États des États-Unis ainsi qu'au niveau fédéral;

M. considérant que, dans le cadre de ce qu'il est convenu d'appeler la lutte contre le terrorisme, la CIA a utilisé des prisons secrètes dans certains États membres actuels de l'Union pour y mener des interrogatoires illégaux en ayant recours à la torture, puis a déplacé les suspects aux États-Unis, ainsi que l'illustre le cas d'Abd al-Raim al-Nashiri, qui risque d'être condamné à la peine capitale;

1.  se déclare solidaire des mouvements de protestation et de l'appel des manifestants à mettre fin au capitalisme des marchés financiers et à redistribuer les richesses de manière radicale; engage les dirigeants politiques de l'Union et des États-Unis à cesser d'ignorer ces manifestations et à apporter à la crise économique, financière et sociale actuelle des solutions qui respectent l'intérêt des peuples, brisent le diktat des marchés financiers et encouragent au contraire une politique différente visant à la restructuration sociale et écologiquement durable nécessaire du développement économique mondial, ainsi que le propose le rapport de la commission Stieglitz;

2.  invite le gouvernement américain à ne plus s'opposer à une taxe mondiale sur les transactions financières;

3.  engage les partenaires transatlantiques à s'attaquer aux causes systémiques de la crise économique et financière et à prendre immédiatement des mesures énergiques visant à mettre en place les règles d'un "nouvel ordre économique"; exige que les politiques cessent de se concentrer sur le renflouement des spéculateurs pour se consacrer à la création d'emplois et à la lutte contre la pauvreté à l'échelle mondiale; demande donc la modification en conséquence des travaux futurs du Conseil économique transatlantique et la mise en place de liens étroits et transparents avec le dialogue transatlantique des législateurs;

4.  reconnaît que le projet de loi américain sur l'emploi (American Jobs Act) représente une première étape pour orienter les politiques vers la création de demande et engage la Commission européenne à élaborer en ce sens ses propres propositions de politiques de création d'emplois dans les États membres de l'Union touchés par la crise;

5.  se dit profondément préoccupé par la violation continuelle de la charte des Nations unies; exige un changement d'orientation pour remplacer les stratégies de puissance militaire de l'OTAN; invite les partenaires transatlantiques à mettre en pratique leur engagement en faveur du multilatéralisme, et notamment la coopération internationale au sein des Nations unies;

6.  se félicite de l'adhésion de la Palestine à l'Unesco et déplore que les États-Unis aient suspendu le versement de leurs cotisations à la suite de cette décision;

7.  demande la reconnaissance immédiate d'un État palestinien et l'acceptation de sa demande d'adhésion aux Nations unies; réaffirme son appui sans réserve à une solution prévoyant deux États sur la base des frontières de 1967, avec Jérusalem pour capitale des deux États, l'État d'Israël et un État de Palestine indépendant, démocratique, d'un seul tenant et viable, coexistant dans la paix et la sécurité; engage les partenaires transatlantiques à œuvrer en ce sens;

8.  réaffirme que ce qu'il est convenu d'appeler la lutte contre le terrorisme ne peut pas être menée en violation du droit international et au mépris de valeurs fondamentales, reconnues et partagées telles que le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la primauté du droit et l'application des conventions de Genève correspondantes;

9.  se montre critique à l'égard des politiques étrangère et de sécurité mises en œuvre à ce jour au Proche-Orient et en Afrique du Nord – notamment en Syrie, en Iran et en Libye – par l'Union européenne et les États-Unis, ainsi qu'à l'égard de leur coopération diplomatique et de cette coopération entre les États membres; demande une réorientation des politiques, y compris commerciale et culturelle, qui devrait se fonder uniquement sur les principes de non-ingérence et d'intégrité territoriale; engage les partenaires transatlantiques à œuvrer à l'établissement durable et viable de la paix et de la sécurité dans la région;

10. invite les États-Unis ainsi que l'Union européenne et ses États membres à retirer toutes leurs forces armées du continent africain; recommande d'unir les efforts pour soutenir les gouvernements africains et l'Union africaine dans leur lutte pour mettre fin à la pauvreté et mener à bien le développement économique et social; plaide en faveur d'une compensation financière au budget de l'Union africaine après l'interruption des paiements de la part de la Libye, principal contributeur financier de l'Union africaine, due à l'intervention de l'OTAN;

11. rappelle les promesses du président Obama en ce qui concerne le désarmement nucléaire; prie instamment l'Union européenne et les États-Unis de s'employer à relancer le contrôle négocié des armements ainsi que le désarmement sur le plan multilatéral dans le système des Nations unies; réitère son appel pour que les États-Unis:

Ø  ne lient pas le désarmement nucléaire au projet superflu des États-Unis et de l'OTAN de défense antimissile pour l'Europe;

Ø  ne compensent pas les mesures de désarmement nucléaire par un armement conventionnel;

Ø  renoncent à la mise au point de nouvelles générations d'armes nucléaires tactiques;

Ø  ratifient le traité sur l'interdiction des essais nucléaires;

Ø  ratifient la convention d'Ottawa sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction;

Ø  ratifient la convention sur les armes à sous-munitions;

Ø  acceptent de ratifier le protocole de vérification annexé à la convention des Nations unies sur l'interdiction des armes biologiques et à toxines;

Ø  contribuent au renforcement du régime du traité de non-prolifération en se conformant strictement à toutes les obligations de ce traité, en particulier à son article 2;

Ø  relancent la mise en œuvre de la convention sur les armes chimiques et le renforcement de son organisation;

12. invite les États-Unis à lever le blocus contre Cuba, à libérer les quatre citoyens cubains détenus dans des prisons américaines et à les autoriser à retourner à Cuba, notamment René González, libéré mais contraint à rester en Floride, ainsi qu'à fermer la base militaire de Guantanamo;

13. invite les États-Unis et l'Union européenne à modifier leurs relations politiques et commerciales, notamment avec l'Amérique latine, et à mettre fin à leur pratique de conclure uniquement des accords de libre échange bilatéraux et non réciproques; les encourage à entamer plutôt une nouvelle ère de relations commerciales et politiques, fondée sur le partenariat, le respect mutuel et la coopération intrarégionale constructive et renforcée, en vue de soutenir les gouvernements latinoaméricains dans leur action de développement social, écologique et économique et de progrès des droits sociaux et des droits de l'homme, ainsi qu'à unir leurs efforts pour vaincre la criminalité liée à la drogue, étant donné que les États-Unis et l'Union européenne constituent les principaux débouchés de la drogue et comptent parmi les premiers fournisseurs d'armements;

14. rejette le programme offensif des États-Unis et de l'Union européenne en matière d'accès au marché et invite notamment les États-Unis à accepter la conclusion d'un accord sur l'ensemble des propositions en faveur des pays les moins avancés lors de la prochaine conférence ministérielle de l'Organisation mondiale du commerce (OMC);

15. demande aux États-Unis de ratifier le statut de Rome de la Cour pénale internationale;

16. demande instamment, une nouvelle fois, que les États-Unis abolissent la peine de mort au niveau fédéral et dans les États fédérés;

17. prend acte de l'ouverture, en mars 2011, de négociations sur l'accord UE-États-Unis sur la protection des données à caractère personnel; rappelle la position qu'il a adoptée dans sa résolution du 11 novembre 2010 sur le sommet UE-États-Unis concernant cet accord et souligne qu'un tel accord-cadre doit assurer un niveau élevé de protection des droits fondamentaux, en fixant des normes juridiquement contraignantes et applicables de protection des données et en mettant en place des mécanismes pour veiller à la bonne application de ces normes dans la pratique;

18. réitère son refus des transferts massifs d'informations et des échanges de données passagers avec les États-Unis ainsi qu'avec tout pays tiers en général, au nom de la soi-disant lutte contre le terrorisme; souligne la nécessité de se tenir mutuellement pleinement informés, avec les autorités américaines, de toutes les évolutions internationales en matière d'échange de données;

19. estime que le changement climatique, la production d'énergie de substitution et l'efficacité énergétique doivent devenir des priorités des travaux du Conseil économique transatlantique; encourage le Conseil économique transatlantique, dans ce contexte, à coopérer en matière de mesures d'économie d'énergie visant à lutter contre le changement climatique; demande une coopération réglementaire plus étroite dans le domaine des normes d'efficacité énergétique pour les produits;

20. invite le Conseil économique transatlantique à étendre à d'autres producteurs la coopération visant à fixer des normes communes dans l'électromobilité et à saisir cette occasion historique d'offrir enfin des conditions commerciales équitables aux différents fournisseurs de matières premières, tels la Bolivie notamment, au lieu de s'évertuer à maintenir une âpre concurrence pour les matières premières au détriment des plus démunis;

21. souligne que la conférence de Rio+20 est une occasion unique de renforcer l'engagement politique de l'ensemble de la communauté internationale en faveur du développement durable, ainsi que les partenariats entre les pays industrialisés et les pays en développement; souligne que la conclusion d'un accord international juridiquement contraignant compatible avec le principe de "responsabilité commune mais différenciée" doit rester l'objectif général de la conférence de Durban; invite les partenaires transatlantiques à travailler ensemble pour parvenir à un accord international juridiquement contraignant pour l'après-2012, permettant d'atteindre l'objectif de 2º C; demande, eu égard à l'augmentation sans précédent de plus de 6 % des émissions de CO2 en 2010, une accélération du transfert de technologies propres à partir de l'Union européenne et des États-Unis en direction de la Chine et de l'Inde;

22. estime qu'une intensification du dialogue politique parlementaire entre l'Union européenne et les États-Unis est nécessaire et essentielle; insiste pour que ce dialogue s'amplifie de manière ouverte et transparente; invite les gouvernements et les parlements de l'Union européenne et des États-Unis à accorder davantage d'attention aux relations avec la société civile, en consultant régulièrement les représentants de la société civile;

23. se déclare profondément préoccupé par les déséquilibres affectant le dialogue législatif avec les États-Unis et par leurs conséquences sur la législation européenne; estime que les travaux effectués dans le cadre du Conseil économique transatlantique ainsi que du dialogue transatlantique des législateurs devraient être transparents et soumis à examen;

24. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, aux parlements des États membres, ainsi qu'au Président et au Congrès des États-Unis d'Amérique.