PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur la situation en Birmanie / au Myanmar
17.4.2012 - (2012/2604(RSP))
déposée conformément à l'article 110, paragraphe 2, du règlement
Véronique De Keyser, Ana Gomes, Robert Goebbels, Marc Tarabella, Pino Arlacchi au nom du groupe S&D
Voir aussi la proposition de résolution commune RC-B7-0202/2012
B7‑0202/2012
Résolution du Parlement européen sur la situation en Birmanie / au Myanmar
Le Parlement européen,
– vu les mesures restrictives de l'Union européenne énoncées dans la position commune de la PESC (2010/232/PESC) et modifiées en dernier lieu par le règlement (UE) n° 1083/2011 du Conseil du 27 octobre 2011,
– vu les conclusions du Conseil du 12 avril 2011 sur la suspension des visites à haut niveau ainsi que sur l'interdiction de la délivrance de visas aux membres civils du gouvernement (décision du Conseil 2011/239/PESC),
– vu la déclaration du Secrétaire général des Nations unies du 2 avril 2012 sur les élections en Birmanie / au Myanmar,
– vu la déclaration du Président du Conseil européen du 30 janvier 2012 sur la voie des réformes en Birmanie / au Myanmar,
– vu les conclusions du Conseil "Affaires étrangères" de l'Union européenne du 23 janvier 2012 sur la Birmanie / le Myanmar,
– vu les déclarations de la haute représentante, notamment celles du 13 novembre 2010 sur la libération de Aung San Suu Kyi, des 13 janvier et 12 octobre 2011 sur la libération des prisonniers politiques et du 2 avril 2012 sur la conduite d'élections partielles,
– vu la déclaration du sommet de l'ANASE du 3 avril 2012 sur le résultat des élections partielles du 1er avril 2012,
– vu le rapport de Tomás Ojea Quintana, rapporteur spécial des Nations unies sur les droits de l'homme en Birmanie / au Myanmar, présenté au Conseil des droits de l'homme des Nations unies le 12 avril 2012,
– vu la récente visite de la délégation du PE en Birmanie / au Myanmar et les rencontres qui ont eu lieu, en particulier, avec le président Thein Sein et Aung San Suu Kyi,
– vu ses résolutions antérieures sur la Birmanie / le Myanmar, et notamment celles du 25 novembre 2010 et du 20 mai 2010,
– vu l'article 110, paragraphe 2, de son règlement,
A. considérant que des élections partielles ont eu lieu le 1er avril 2012 afin de pourvoir 44 sièges vacants au parlement; considérant que la LND a remporté 43 sièges et que les élections ont eu lieu dans une atmosphère relativement bonne, bien que certaines irrégularités et intimidations aient été signalées; considérant que, pour cette raison, elles ne peuvent être considérées comme réellement libres et équitables;
B. considérant que la Ligue nationale pour la démocratie a boycotté les élections de 2010 au motif qu'elles étaient organisées sur la base de la constitution de 2008 et des lois adoptées par la suite, qui empêchent la mise en place d'une véritable démocratie en Birmanie / au Myanmar;
C. considérant que l'opposition ne détient actuellement que 6,6% des sièges au Parlement (43 sur 659), alors que la grande majorité des sièges est contrôlée par le Parti de la solidarité et du développement de l'Union (USDP) au pouvoir, y compris les 25 % de sièges réservés aux officiers militaires, ce qui ne garantit pas que l'opposition sera autorisée à jouer un rôle actif en proposant les réformes nécessaires pour faire avancer le pays sur la voie de la démocratie;
D. considérant que les prochaines élections législatives, qui doivent avoir lieu en 2015, lorsque 75 % des sièges seront en jeu, seront le véritable test, qui permettra de savoir si les autorités de Birmanie / du Myanmar veulent démocratiser le pays;
E. considérant que le président Thein Sein a adopté une politique plus conciliante vis-à-vis de l'opposition démocratique depuis sa prise de fonction en mars 2011, avec la libération de centaines de prisonniers politiques, l'engagement d'un dialogue avec Aung San Suu Kyi et la mise en chantier du processus de réformes dans le pays;
F. considérant que pendant la période préélectorale, le gouvernement a assoupli sa politique à l'égard des médias, des organisations de la société civile ainsi que de l'opposition politique organisée et des dissidents; considérant que c'était la première fois dans l'histoire de la Birmanie / du Myanmar que des observateurs étrangers étaient invités à une élection;
G. considérant que, selon le rapport du rapporteur spécial des Nations unies sur les droits de l'homme en Birmanie / au Myanmar, de graves préoccupations demeurent en matière de droits de l'homme, notamment la détention de nombreux prisonniers d'opinion dans des conditions épouvantables; considérant que l'indépendance du système judiciaire et les réformes juridiques ne progressent pas et que certaines minorités ethniques restent persécutées;
H. considérant que même si le gouvernement a entamé des négociations de cessez-le-feu avec un certain nombre de groupes ethniques en rébellion armée, les combats se poursuivent dans l'État du Kachin, où de nombreuses sources font état de violations graves des droits de l'homme et du déplacement de plus de 75 000 personnes;
I. considérant que le gouvernement de la Birmanie / du Myanmar continue à bloquer l'accès de l'aide humanitaire à la plupart des personnes déplacées à l'intérieur de son territoire;
J. considérant que la majorité des prisonniers politiques n'ont été libérés que sous conditions;
K. considérant que les Rohingya et d'autres minorités ne peuvent accéder à la citoyenneté sur la base de la loi de 1982 sur la citoyenneté et restent confrontés à de graves persécutions;
L. considérant que les mesures restrictives actuellement en place feront l'objet d'une révision lors de la prochaine réunion du Conseil "Affaires générales" du 23 avril;
M. considérant que de nombreux secteurs d'activité économique en Birmanie / au Myanmar, tels que le secteur minier, le secteur du bois, du pétrole, du gaz et de la construction de barrages ont été directement impliqués dans des violations graves des droits de l'homme et dans des destructions de l'environnement, tout en étant la principale source de revenus de la junte militaire;
N. considérant que Aung San Suu Kyi est favorable à la suspension sous conditions des mesures restrictives de l'Union européenne, de manière à maintenir la pression sur le gouvernement de Birmanie / du Myanmar pour qu'il poursuive sur la voie des réformes tout en lui offrant la perspective d'avantages supplémentaires si le processus de réforme se poursuit;
O. considérant que la haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité devrait se rendre en Birmanie / au Myanmar peu après la décision du Conseil sur les sanctions;
1. se félicite du résultat positif des élections partielles du 1er avril, qui sont une première étape concrète du processus de démocratisation en Birmanie / au Myanmar, lequel, s'il se poursuit d'une manière durable et irréversible, offre une perspective de relations nouvelles, fondées sur la coopération, avec l'Union européenne;
2. presse le gouvernement de Birmanie / du Myanmar de prendre d'autres mesures pour démontrer son véritable engagement envers la démocratisation du pays; demande en particulier la libération rapide et sans condition des prisonniers politiques restants, l'autorisation pour les organisations humanitaires internationales et locales d'accéder sans encombre aux zones de conflit, la réforme des lois qui pénalisent la liberté d'expression et permettent la censure des médias et l'abrogation de la loi de 1982 sur la citoyenneté;
3. demande instamment à l'Union européenne et à sa haute représentante pour les affaires étrangères et la politique de sécurité de souligner, pendant la prochaine visite de la haute représentante, l'urgence de réformes politiques dans quatre domaines clés:
– la pratique actuelle de détention de prisonniers d'opinion et de harcèlement de militants politiques;
– les agressions en cours contre des civils et les crimes graves contre des minorités ethniques;
– les lois répressives et la subordination du système judiciaire aux politiques gouvernementales
– la justice et l'obligation de rendre des comptes pour les violations des droits de l'homme passées et actuelles;
4. demande au gouvernement et au parlement de Birmanie / du Myanmar de modifier les dispositions constitutionnelles qui permettent à l'armée de contrôler un gouvernement civil avant les élections de 2015;
5. se félicite des gestes positifs posés par l'Union européenne pour appuyer le début de transition politique dans le pays, y compris la promesse de 150 000 000 EUR pour une assistance humanitaire destinée, en particulier, à développer les infrastructures sanitaires et éducatives du pays et à aider les personnes déplacées;
6. invite l'Union européenne à s'investir avec la société civile dans la formation et dans le renforcement des capacités institutionnelles en vue de la préparation des élections de 2015; demande que l'aide au développement de l'Union européenne soutienne les progrès vers la satisfaction de critères spécifiques et augmente le nombre de Birmans qui bénéficient des réformes; répète que l'aide au développement devrait être liée aux normes de gouvernance et au dialogue avec la société civile et avec les autorités;
7. demande au Conseil de suspendre les mesures restrictives actuellement en place pour une période initiale d'un an et de surveiller de près la situation dans le pays, notamment en ce qui concerne les réformes politiques, afin de réduire ultérieurement les sanctions, au fur et à mesure de progrès importants sur la voie des réformes de la part du gouvernement de Birmanie / du Myanmar et de l'amélioration de la situation des droits de l'homme dans le pays;
8. invite instamment le président Thein Sein à permettre aux organismes d'aide internationale d'accéder sans restrictions à toutes les zones de conflit dans les États ethniques afin de prodiguer une aide humanitaire aux personnes déplacées à l'intérieur du territoire;
9. se félicite de la décision, prise lors de la 19e session du Conseil des droits de l'homme des Nations unies, de proroger d'une année le mandat du rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en Birmanie / au Myanmar;
10. se félicite de la prochaine visite officielle de la haute représentante de l'Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité ainsi que de la décision d'établir une présence diplomatique dans le pays et d'inaugurer le bureau de l'UE à cette occasion;
11. invite à nouveau Daw Aung San Suu Kyi, lauréate du prix Sakharov, à se rendre au Parlement européen pour y recevoir officiellement le prix Sakharov qui lui a été décerné en 1991;
12. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, à la haute représentante, aux parlements et aux gouvernements des États membres, au Secrétaire général des Nations unies, au Secrétaire général de l'ANASE et au parlement ainsi qu'au gouvernement de la Birmanie / du Myanmar.