PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur le Rwanda: le cas de Victoire Ingabire
21.5.2013 - (2013/2641(RSP))
conformément à l'article 122 du règlement
Marie-Christine Vergiat, Willy Meyer, Marisa Matias, Alda Sousa, Sabine Wils, Sabine Lösing, Patrick Le Hyaric au nom du groupe GUE/NGL
Voir aussi la proposition de résolution commune RC-B7-0243/2013
B7‑0249/2013
Résolution du Parlement européen sur le Rwanda: le cas de Victoire Ingabire
Le Parlement européen,
– vu le pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) ratifié par le Rwanda en 1975;
– vu la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants;
– vu la charte africaine des droits de l'Homme et des peuples ratifiée par le Rwanda en 1983;
– vu le traité pour l'établissement de la communauté de l'Afrique de l'Est, à laquelle a adhéré le Rwanda et dont l'article 3 stipule que l'adhésion requiert le respect des principes universellement acceptés de la bonne gouvernance, de la démocratie, des règles du droit, du respect des droits de l'homme et de la justice sociale;
– vu l'Accord de Cotonou, et notamment son annexe VII visant la promotion des droits de l'homme, des principes démocratiques basés sur l'État de droit, de la gestion transparente et responsable des affaires publiques;
A. considérant que Victoire Ingabire Umuhoza a été forcée à l’exil à 16 ans d’exil aux Pays-Bas;
B. considérant qu'elle a adhéré au parti d'opposition Forces Démocratiques Unifiées (FDU-Inginki) dont elle est devenue présidente en 2006;
C. considérant qu'elle est rentrée au Rwanda le 16 janvier 2010 pour se présenter aux élections présidentielles du mois d’août, qu'elle fut non seulement interdite de participation à ces élections, mais aussi arrêtée en octobre 2010 et inculpée;
D. considérant que lors de son procès en première instance, qui a débuté en septembre 2011, et pris fin en avril 2012, elle a été accusée de six infractions, dont trois ont été liées à des « actes terroristes » ainsi qu’à la création d’un groupe armé, et que les trois autres chefs d’accusation — « idéologie du génocide », divisionnisme et propagation de rumeurs visant à inciter le public à se soulever contre l’État — étaient liées à ses critiques publiques à l’égard du gouvernement;
E. considérant que son procès a été entaché d’irrégularités : déclarations du président Kagame dans les médias et sur Twitter sur la culpabilité présumée de Victoire Ingabire allant à l'encontre de la présomption d'innocence, aveux de ses coaccusés obtenus après une période de détention sous la responsabilité de l’armée, au camp Kami, où la torture serait employée selon des ONG, éléments de preuve traités différemment selon qu’ils étaient produits par la défense ou le parquet, intimidation des avocats et témoins de la défense;
F. considérant que la Haute Cour de Kigali l'a déclarée coupable de conspiration contre les autorités par le terrorisme et de minimisation du génocide de 1994, puis condamnée à huit ans d’emprisonnement le 30 octobre 2012;
G. considérant qu'elle est aujourd’hui écrouée à la prison centrale de Kigali et qu'avant sa mise en détention, elle a subi les pires humiliations de la part des services de sécurité du régime notamment une agression physique;
J. considérant que le FDU n'a pas été enregistré comme un parti politique et que plusieurs de ses membres ont été menacés, arrêtés et détenus;
K. considérant que le procès en appel de Victoire Ingabire s'est ouvert le 25 mars 2013;
L. considérant que le génocide rwandais et la guerre civile de 1994 continuent à avoir des conséquences négatives sur la stabilité du pays;
M. considérant que l’accroissement du chômage, la dégradation de la situation sociale et la paupérisation de la population sont des facteurs déterminant de l'instabilité dont souffre le pays.
1. demande aux autorités rwandaises de permettre à Madame Ingabire que le procès en appel, qui a débuté le 25 mars, ait lieu selon la procédure conforme aux normes internationales en matière d'équité des procès;
2. demande à l'Union européenne d'envoyer des observateurs du procès en appel;
3. demande au gouvernement du Rwanda de réviser la loi sur l'“idéologie du génocide” afin de la mettre en conformité avec les obligations du Rwanda aux termes du droit international, et de modifier la loi portant répression des crimes de discrimination et pratique du sectarisme en vue de la mettre en conformité avec les obligations du Rwanda découlant du droit international relatif aux droits humains;
4. demande aux autorités de traiter tous les procès politiques de manière indépendante et conformément aux normes internationales;
5. rappelle que les déclarations obtenues sous la torture ou d’autres mauvais traitements
ne soient recevables dans aucune procédure, quelle qu’elle soit, si ce n’est contre la
personne accusée de torture ou d’autres mauvais traitements pour établir qu’une déclaration
a été faite;
6. demande au Rwanda de respecter le pacte international relatif aux droits civils et politiques, de ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées ainsi que le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture;
7. demande au Rwanda d'assurer le pluralisme politique, notamment en revoyant le projet de loi sur les partis politiques;
8. demande au Rwanda de veiller à ce que les organisations internationales et rwandaises de défense des droits humains aient libre accès à tous les lieux de détention du Rwanda et puissent s’entretenir en privé avec les détenus;
9. juge que l'incapacité de la population à avoir accès aux ressources naturelles du pays, l’accroissement du chômage, la dégradation de la situation sociale et la paupérisation sont des obstacles à la stabilité politique et doivent être des priorités absolues dans la prochaine période;
10. charge son président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, au gouvernement du Rwanda, à la Haute représentante de l'Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, au secrétaire des Nations Unies, au conseil des droits de l'Homme des Nations Unies.