PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur la reconnaissance de l'État palestinien
10.12.2014 - (2014/2964(RSP))
conformément à l'article 123, paragraphe 2, du règlement
Tamás Meszerics, Margrete Auken, Bodil Ceballos, Bart Staes, Alyn Smith, Igor Šoltes, Ernest Urtasun, Molly Scott Cato, Davor Škrlec, Karima Delli, Jill Evans, Jordi Sebastià, Josep-Maria Terricabras, Ernest Maragall, Keith Taylor, Pascal Durand, Bronis Ropė, Judith Sargentini, Eva Joly, Yannick Jadot, Klaus Buchner, Philippe Lamberts, Heidi Hautala au nom du groupe Verts/ALE
Voir aussi la proposition de résolution commune RC-B8-0277/2014
B8‑0309/2014
Résolution du Parlement européen sur la reconnaissance de l'État palestinien
Le Parlement européen,
– vu ses résolutions antérieures sur le conflit israélo-palestinien, notamment celles du 29 septembre 2011 sur la situation en Palestine[1] et du 22 novembre 2012 sur la situation à Gaza[2],
– vu les conclusions du Conseil "Affaires étrangères" du 17 novembre 2014 sur le Proche‑Orient,
– vu les déclarations de Federica Mogherini, vice-présidente de la Commission/haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, sur la situation en Israël et en Palestine, notamment celles des 15, 17 et 18 novembre 2014,
– vu le document officieux fondé sur les contributions des États membres sur un éventuel suivi pour Jérusalem-Est, élaboré par le Service européen pour l'action extérieure et dévoilé aux médias en novembre 2014,
– vu la décision du gouvernement suédois de reconnaître l'État palestinien le 30 octobre 2014 et les reconnaissances antérieures par Chypre, la Hongrie, Malte, la Pologne, la République tchèque, la Roumanie et la Slovaquie,
– vu les résolutions non contraignantes récemment adoptées par la Chambre des communes du Royaume-Uni, le Sénat irlandais, le Parlement espagnol et l'Assemblée nationale française sur la reconnaissance de l'État palestinien,
– vu les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies sur le conflit israélo‑palestinien, notamment les résolutions 242, 446 et 1515,
– vu la résolution 67/19 du 29 novembre 2012 de l'Assemblée générale des Nations unies,
– vu les conventions des Nations unies sur les droits de l'homme auxquelles Israël et la Palestine sont parties,
– vu l'initiative de paix arabe adoptée en mars 2002 par le Conseil de la Ligue des États arabes,
– vu l'article 123, paragraphe 2, de son règlement,
A. considérant que 135 des 193 États membres des Nations unies ont reconnu diplomatiquement l'État palestinien;
B. considérant que l'Union n'a eu de cesse de reconnaître le droit des Palestiniens à l'autodétermination, y compris au moyen d'un État, qui "ne saurait faire l'objet d'aucun veto", ainsi que le Conseil l'a affirmé dans ses conclusions du mois de mars 1999;
C. considérant que la Palestine s'est vu accorder le statut d'État non membre observateur par les Nations unies le 29 novembre 2012;
D. considérant que les négociations en vue d'une solution globale au conflit israélo-palestinien ont été suspendues sine die en avril 2014 et qu'elles n'ont que peu de chances de reprendre dans le cadre du processus de paix d'Oslo, conduit par les États‑Unis;
E. considérant que le gouvernement israélien a accéléré l'annexion de terres et l'expansion des colonies dans les territoires palestiniens occupés, notamment en procédant au plus grand accaparement de terres depuis trente ans, qui a été annoncé à la fin du mois d'août 2014;
F. considérant que l'occupation ininterrompue et les humiliations et violations signalées sont source d'un ressentiment profond et de grandes souffrances parmi la population palestinienne sous le joug de cette occupation;
G. considérant que les événements récents à Jérusalem-Est liés à la mosquée Al Aqsa font courir un grave risque d'amplification des violences confessionnelles et de déstabilisation de la région, et mettent en évidence à quel point il importe de maintenir le statu quo concernant la tutelle des lieux saints;
H. considérant que plus de cent généraux et hauts responsables de la sécurité israéliens retraités ou réservistes ont signé une pétition adressée au Premier ministre israélien Nétanyahou, dans laquelle ils appellent de leurs vœux une solution diplomatique régionale fondée sur deux États pour régler le conflit israélo-palestinien;
I. considérant que plus de mille personnalités publiques israéliennes en vue, dont d'anciens ministres, des parlementaires et des artistes, ont récemment interpellé des parlementaires européens pour qu'ils reconnaissent officiellement l'État palestinien;
J. considérant que l'assaut sur la bande de Gaza lancé par l'armée israélienne le 8 juillet 2014 s'est soldé par un niveau sans précédent de dévastation et un nombre inégalé de victimes dans l'enclave; considérant que le cessez-le-feu conclu le 26 août 2014 n'a pas été mis en œuvre, notamment en ce qui concerne la levée du blocus;
K. considérant que le gouvernement d'unité palestinien soutenu par le Hamas et le Fatah a été formé en avril 2014 avec le soutien des États-Unis et de l'Union européenne et qu'il souscrit aux principes prescrits par le Quatuor de non-violence, de respect des accords antérieurs et de reconnaissance d'Israël;
L. considérant que Mahmoud Abbas, président de l'Autorité palestinienne, a déclaré son intention de fixer un calendrier, par l'intermédiaire des Nations unies, pour mettre un terme à l'occupation israélienne des territoires palestiniens en l'espace de trois ans; considérant que la Ligue arabe soutient ce plan d'action et a demandé la convocation d'une conférence internationale pour rechercher une solution définitive sur la base de l'initiative de paix arabe;
M. considérant qu'une analyse de la coopération de l'Union européenne dans les territoires palestiniens occupés et de l'aide européenne au peuple palestinien, menée au nom de la Commission en mai 2014, a montré que le modèle actuel de coopération a atteint ses limites dès lors que l'Union ne suit pas une voie politique parallèle pour surmonter tant les obstacles que constituent l'occupation israélienne et les politiques de colonisation que la séparation politique de la Cisjordanie et de la bande de Gaza;
N. considérant que les expériences passées concluantes des États membres de l'Union européenne en matière de résolution de conflit, notamment dans le cadre du processus de paix en Irlande du Nord, pourraient permettre à l'Union de jouer un rôle prépondérant dans la résolution du conflit israélo-palestinien en utilisant les solutions à la fois institutionnelles et politiques mises au point lors des conflits précédents;
1. invite instamment tous les États membres à reconnaître sans condition l'État de Palestine sur la base des frontières de 1967;
2. est fermement convaincu que la reconnaissance de l'État de Palestine à l'échelle de toute l'Europe renforcera les perspectives de paix et encouragera les efforts, notamment ceux déployés par la société civile israélienne, visant à parvenir à une solution négociée fondée sur deux États au conflit israélo-palestinien;
3. salue la récente reconnaissance de l'État de Palestine par le gouvernement suédois; se félicite de ce qu'elle ait été suivie de l'adoption, à une majorité écrasante, de résolutions par les organes législatifs français, espagnol, irlandais et britannique pressant leur gouvernement respectif d'en faire de même;
4. est extrêmement préoccupé par la récente escalade des violences à Jérusalem et condamne sans équivoque tous les actes de violence commis à l'encontre des civils par l'une ou l'autre des parties; reconnaît le droit tant d'Israël que de la Palestine de vivre en sécurité à l'intérieur de leurs frontières reconnues; appelle à une désescalade de la situation, sans quoi elle risque de se propager à l'ensemble de la région; souligne qu'il convient de garantir que tous les auteurs de crimes contre des civils répondent de leurs actes;
5. souligne que l'occupation israélienne des territoires palestiniens, plutôt que de la préserver, nuit à la sécurité d'Israël et que l'absence d'avancées vers une solution négociée fondée sur deux États ne fait qu'alimenter la poursuite des violences et des effusions de sang;
6. condamne fermement l'expansion ininterrompue des colonies israéliennes, laquelle va à l'encontre du droit international, alimente le ressentiment des Palestiniens et compromet la viabilité et les chances d'une solution fondée sur deux États; demande aux autorités israéliennes de cesser immédiatement leur politique de colonisation et de revenir sur celle-ci, y compris sur leurs plans de déplacement forcé des populations de Bédouins;
7. condamne les attentats perpétrés à l'encontre de citoyens israéliens par le Hamas et d'autres groupes militants et exige qu'il y soit mis fin;
8. souligne que le respect du droit international humanitaire et du droit international des droits de l'homme par toutes les parties en présence et en toutes circonstances demeure un préalable indispensable à l'instauration d'une paix juste et durable; souligne qu'au titre du droit international, il incombe particulièrement à Israël, en tant que puissance occupante, de se conformer au droit humanitaire international et au droit international sur les droits de l'homme;
9. invite l'Union européenne à assumer ses responsabilités en sa qualité d'acteur influent et à prendre une initiative audacieuse et globale pour la paix dans la région, notamment sur la base de l'initiative de paix arabe; demande également à l'Union d'élaborer une nouvelle approche pour sa politique d'engagement vis-à-vis des acteurs clés de la région, afin de se donner les moyens de mettre en œuvre un programme de paix ambitieux;
10. invite les institutions et les États membres de l'Union à prendre des mesures pour préserver la viabilité de la solution fondée sur deux États et pour créer une dynamique positive en vue de véritables négociations de paix; invite à cet égard l'Union à réagir à la poursuite de l'expansion des colonies israéliennes:
a. en renforçant sa diplomatie publique;
b. en réévaluant l'aide à la coopération apportée à Israël conformément à la politique du "moins pour moins";
c. en excluant strictement l'application des accords UE-Israël aux territoires palestiniens occupés;
d. en renforçant les informations fournies aux citoyens et aux entreprises de l'Union sur les colonies et les activités de colonisation et en prenant des mesures à l'encontre des entreprises européennes qui se rendent complices d'infractions dans les colonies;
e. en prenant des mesures concrètes à l'égard des colons, notamment l'adoption d'une politique de refus des contacts et d'interdiction de visa;
f. en excluant les produits issus des colonies du marché intérieur de l'Union;
g. en reconsidérant les relations UE-Israël à la lumière de l'article 2 de l'accord d'association;
11. invite l'Union à poursuivre son soutien à l'État palestinien au moyen de programmes de renforcement des structures étatiques et en soutenant la demande d'adhésion de la Palestine aux organisations internationales, y compris à la Cour pénale internationale, et à intensifier son soutien à la société civile;
12. décide d'engager une initiative intitulée "Parlementaires pour la paix" visant à rapprocher les parlementaires européens, israéliens et palestiniens en vue de contribuer à la mise en œuvre d'un agenda pour la paix et de compléter les efforts diplomatiques de l'Union;
13. invite toutes les parties à mettre en œuvre de manière effective les clauses du cessez-le-feu convenu en août 2014; exhorte plus particulièrement les autorités israéliennes à lever, de manière immédiate, inconditionnelle et complète, le blocus illégal imposé à la bande de Gaza;
14. salue les mesures encourageantes en faveur d'une réconciliation entre Palestiniens et la formation d'un gouvernement de technocrates, survenues avant l'offensive militaire israélienne du mois d'août 2014; demande à toutes les forces palestiniennes de reprendre leurs efforts de réconciliation; dénonce les tentatives visant à compromettre ce processus potentiellement historique et demande aux autorités israéliennes de libérer toutes les personnes qui ont été arrêtées depuis le 12 juin 2014 ou de les accuser d'infractions pénales reconnues;
15. décide d'élaborer un rapport sur le commerce d'armes et d'autres équipements de sécurité entre les États membres et Israël/la Palestine et sur la compatibilité de ce commerce avec la position commune de l'Union européenne; demande l'instauration par les Nations unies d'un embargo total sur les armes pour tous les protagonistes de la région afin d'empêcher toute violation supplémentaire du droit humanitaire international et des droits de l'homme;
16. décide d'envoyer une délégation ad hoc à Gaza/en Palestine et en Israël afin d'évaluer la situation sur le terrain et les perspectives d'une solution durable au conflit;
17. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, à la vice-présidente de la Commission/haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, aux gouvernements et aux parlements des États membres, au Secrétaire général des Nations unies, à l'envoyé du Quatuor au Proche‑Orient, au gouvernement israélien, à la Knesset, au président de l'Autorité palestinienne, au Conseil législatif palestinien et aux organes de l'Assemblée parlementaire euro-méditerranéenne.
- [1] JO C 56E du 26.2.2013, p. 104.
- [2] Textes adoptés de cette date, P7_TA(2012)0454.