PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur la situation en Égypte
12.1.2015 - (2014/3017(RSP))
conformément à l'article 123, paragraphe 2, du règlement
Charles Tannock, Geoffrey Van Orden, Ruža Tomašić, Valdemar Tomaševski, Ryszard Czarnecki au nom du groupe ECR
Voir aussi la proposition de résolution commune RC-B8-0012/2015
Le Parlement européen,
– vu ses précédentes résolutions sur la situation en Égypte, dont celle du 6 février 2014[1],
– vu la politique européenne de voisinage et le dernier rapport de suivi de mars 2014 sur les progrès de sa mise en œuvre concernant l'Égypte,
– vu la déclaration universelle des droits de l'homme,
– vu le pacte international de 1966 relatif aux droits civils et politiques, auquel l'Égypte est partie,
– vu la nouvelle constitution égyptienne, approuvée par un référendum national en janvier 2014,
– vu l'accord d'association entre l'Union européenne et l'Égypte, conclu en 2004,
– vu les conclusions de la troisième réunion des ministres des affaires étrangères des pays de l'Union européenne et de la Ligue arabe, qui s'est tenue à Athènes (Grèce), en juin 2014,
– vu l'article 123, paragraphe 2, de son règlement,
A. considérant que l'Égypte est un partenaire stratégique de longue date de l'Union européenne, avec laquelle elle partage l'objectif d'instaurer la stabilité, la paix et la prospérité en Méditerranée et au Proche-Orient; qu'elle est l'un des principaux bénéficiaires de l'aide de l'Union;
B. considérant que l'Égypte et l'Union sont parties à un accord d'association juridiquement contraignant, en vigueur depuis 2004;
C. considérant qu'à l'optimisme né du printemps arabe et de la chute du régime d'Hosni Moubarak ont succédé une polarisation politique et sociale et un climat de violence;
D. considérant que le 25 janvier 2015 marquera le quatrième anniversaire de la révolution qui a renversé le président Hosni Moubarak;
E. considérant que l'élection d'Abdel Fattah Al-Sissi à la présidence, en mai 2014, a constitué le dernier acte en date du changement politique en Égypte, après le renversement du président Mohammed Morsi en juillet 2013;
F. considérant que le Parlement égyptien a été dissous et qu'un scrutin en deux temps pour élire la Chambre des députés devrait se dérouler à partir des 22 et 23 mars 2015;
G. considérant que le renversement du président Mohammed Morsi a été suivi par une violente répression, qui a coûté la vie à quelque mille personnes, et par l'interdiction du parti des Frères musulmans;
H. considérant que la situation des droits de l'homme en Égypte, notamment en matière de liberté d'expression et de réunion, suscite de plus en plus d'inquiétudes;
I. considérant que la récente reprise de l'activité économique en Égypte doit encore produire ses effets sur les niveaux de chômage et de pauvreté, qui demeurent élevés;
J. considérant que la violence s'est accrue dans le Sinaï depuis 2011 et que plus de 500 membres des forces de sécurité ont été tués après l'éviction du président Mohammed Morsi en 2013; que cette flambée de violence menace de déstabiliser l'ensemble de la région;
K. considérant que des centaines de civils ont été traduits devant des tribunaux militaires en vertu d'un décret du président Abel Fattah Al-Sissi, qui a étendu considérablement la compétence de ces juridictions; qu'il apparaît que le décret autorise les procureurs civils à renvoyer de manière rétroactive devant une juridiction militaire des affaires civiles qui font déjà l'objet d'une enquête ou sont déjà en jugement;
L. considérant que le 2 décembre 2014, un tribunal de Gizeh a rendu un jugement préliminaire condamnant à mort pas moins de 188 personnes accusées d'avoir perpétré une violente attaque contre un poste de police l'année précédente;
M. considérant que le 1er janvier 2015, la plus haute juridiction égyptienne a ordonné que trois journalistes d'Al-Jazeera, qui sont emprisonnés sous l'accusation de diffusion d'informations mensongères et de collaboration avec le parti des Frères musulmans, interdit, après le renversement du président Mohammed Morsi par l'armée en 2013, bénéficient d'un nouveau procès;
N. considérant que, conformément à la politique européenne de voisinage révisée de l'Union européenne, et notamment à l'approche "donner plus pour recevoir plus", le niveau d'engagement de l'Union et la portée de cet engagement en Égypte se fondent sur un système d'incitations et dépendent dès lors des progrès réalisés par le pays pour honorer ses engagements dans des domaines comme la démocratie, l'état de droit, les droits de l'homme et l'égalité entre les hommes et les femmes;
O. considérant que la chute du président Mohammed Morsi a été suivie par une multiplication des attaques et des discriminations à l'encontre des chrétiens coptes d'Égypte, ainsi que par la destruction de nombreuses églises;
1. exprime sa solidarité avec le peuple égyptien et continue d'apporter son soutien aux efforts de celui-ci pour mener à bien une transition pacifique et démocratique, qui suppose des réformes politiques, économiques et sociales;
2. réaffirme son engagement vis-à-vis de l'Égypte, partenaire stratégique essentiel dans la région; exhorte, par ailleurs, le gouvernement égyptien à honorer ses engagements internationaux, en sa qualité de puissance importante dans la région sud-méditerranéenne;
3. estime que les droits de l'homme sont une composante incontournable du processus d'instauration d'une Égypte stable, prospère et démocratique et demande à tous les acteurs d'appliquer les principes qui s'y rattachent;
4. soutient sans réserve un processus politique ouvert à toutes les parties, impliquant la participation de tous les acteurs démocratiques, qui vise à garantir que les réformes politiques, économiques, judiciaires et sociales qui s'imposent soient effectuées, dans l'intérêt de tous les citoyens égyptiens;
5. estime que la transformation de l'Égypte en un État démocratique pourrait servir de modèle à de nombreux autres pays de la région;
6. se déclare de plus en plus préoccupé par la dégradation de la sécurité dans le Sinaï; réitère sa condamnation du recours à la violence et à l'intimidation sous quelque forme que ce soit et demande à tous les protagonistes de faire preuve du maximum de retenue afin d'éviter que des personnes ne soient tuées ou blessées;
7. salue l'engagement du président Abdel Fattah Al-Sissi d'instaurer un État qui respecte les droits et les libertés, notamment l'état de droit et la liberté d'expression de tous; encourage en outre le gouvernement égyptien à mettre intégralement en œuvre ces droits et libertés fondamentaux;
8. condamne le recours accru aux tribunaux militaires pour juger des civils; demande en outre aux autorités judiciaires égyptiennes de garantir le droit de la défense à un procès équitable et engagé dans des délais raisonnables, sur la base d'accusations claires et d'enquêtes indépendantes conduites en bonne et due forme, de même que le droit d'accès à des avocats et aux membres de la famille, et au contact avec eux, ainsi que de respecter les procédures applicables;
9. réclame la libération immédiate de Peter Greste, de Mohamed Fahmy et de Baher Mohamed, journalistes à Al-Jazeera, qui attendent actuellement d'être rejugés pour diffusion d'informations mensongères et collaboration avec le parti, interdit, des Frères musulmans; demande, en outre, l'annulation des jugements prononcés à l'encontre de leurs collègues journalistes à Al-Jazeera Sue Turton et deux autres correspondants à l'étranger, qui ont été condamnés par contumace sous des chefs d'accusation similaires;
10. estime que tous les journalistes doivent pouvoir rendre compte de la situation en Égypte sans craindre d'être poursuivis, emprisonnés, intimidés ou limités dans leur liberté de parole ou d'expression;
11. demande au gouvernement égyptien de veiller à ce que les organisations nationales ou internationales de la société civile et les syndicats indépendants puissent exercer librement leurs activités dans le pays, sans ingérence ni intimidation de la part des autorités;
12. salue les efforts du gouvernement égyptien pour parvenir à une réconciliation israélo-palestinienne;
13. salue également les efforts du gouvernement égyptien en matière d'aide aux réfugiés qui fuient les combats en Syrie et en Iraq;
14. condamne les attaques qui se poursuivent contre des groupes religieux minoritaires en Égypte et demande au gouvernement égyptien de poursuivre leurs auteurs;
15. salue la présence, inédite de la part d'un président égyptien, d'Abdel Fattah Al-Sissi à la messe dans une église du Caire à l'occasion du Noël copte et estime qu'il s'agit d'un geste symbolique important qui s'inscrit dans les efforts entrepris en faveur de l'unité de la société égyptienne;
16. se félicite de l'annonce de l'organisation d'élections législatives en deux temps à partir des 22 et 23 mars 2015;
17. invite le gouvernement égyptien à demander le déploiement d'une mission européenne d'observation des élections chargée de surveiller le déroulement des prochaines élections législatives;
18. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, au SEAE, à la haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité/vice-présidente de la Commission européenne, aux parlements et aux gouvernements des États membres, ainsi qu'au président et au gouvernement de la République arabe d'Égypte.
- [1] Textes adoptés de cette date, P7_TA(2014)0100.