Proposition de résolution - B8-0385/2015Proposition de résolution
B8-0385/2015

PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur la persécution des chrétiens dans le monde, et notamment le meurtre d'étudiants au Kenya par le groupe terroriste islamique Al-Chebab

27.4.2015 - (2015/2661(RSP))

déposée à la suite d'une déclaration de la vice-présidente de la Commission/haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité
conformément à l'article 123, paragraphe 2, du règlement

Lidia Senra Rodríguez, Javier Couso Permuy, Malin Björk, Paloma López Bermejo, Marina Albiol Guzmán, Ángela Vallina, Sabine Lösing, Neoklis Sylikiotis, Takis Hadjigeorgiou, Inês Cristina Zuber au nom du groupe GUE/NGL

Procédure : 2015/2661(RSP)
Cycle de vie en séance
Cycle relatif au document :  
B8-0385/2015
Textes déposés :
B8-0385/2015
Débats :
Textes adoptés :

B8‑-0385/2015

Résolution du Parlement européen sur la persécution des chrétiens dans le monde, et notamment le meurtre d'étudiants au Kenya par le groupe terroriste islamique Al-Chebab
(2015/2661 (INI))

Le Parlement européen,

–       vu la stratégie commune Afrique-UE, adoptée en 2007,

–       vu la feuille de route pour la coopération UE-Afrique (2014-2017), adoptée lors du quatrième sommet UE-Afrique d'avril 2014,

–       vu le premier programme panafricain de l'Union pour la période 2014-2020,

–       vu la septième rencontre annuelle entre la Commission de l'Union africaine et la Commission européenne, qui s'est déroulée le 22 avril à Bruxelles,

–       vu les déclarations de la vice-présidente de la Commission/haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité sur les attaques par Al-Chebab au Kenya, et en particulier sur les attaques du 3 avril 2015 et des 23 novembre et 5 mai 2014,

–       vu les déclarations du secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-Moon, relatives aux attaques d'Al-Chebab, et en particulier celles du 2 avril 2015, des 2 décembre, 22 novembre et 4 juin 2014, et du 21 septembre 2013,

–       vu les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies en la matière, et en particulier la résolution du Conseil de sécurité 733/1992 instaurant un embargo sur la vente d'armes à la Somalie, confirmée par plusieurs autres résolutions du Conseil de sécurité, la dernière en date étant la résolution 2182/2014,

–       vu la déclaration du représentant spécial de l'Union africaine pour la Somalie et chef de la mission AMISOM du 2 avril 2015,

–       vu les conclusions du Conseil "Affaires étrangères" de l'Union européenne du 9 février 2015 sur la lutte contre le terrorisme,

–       vu la déclaration universelle des droits de l'homme,

–       vu le pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966,

–       vu la charte des Nations unies,

–       vu la charte africaine des droits de l'homme et des peuples de 1981,

–       vu la convention des Nations unies de 1951 relative au statut des réfugiés, à laquelle le Kenya est partie,

–       vu la convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

–       vu l'article 123, paragraphe 2, de son règlement,

A.     considérant que le 2 avril, le groupe terroriste Al-Chebab a tué 148 personnes, principalement des étudiants, lors d'une attaque lancée contre un campus universitaire dans la ville kényane de Garissa, à environ 200 km de la frontière somalienne; qu'en juin 2014, Al-Chebab avait lancé une attaque sur la côte kényane et tué 48 personnes; qu'en septembre 2013, il avait lancé une attaque contre le centre commercial Westgate à Nairobi, au cours de laquelle 67 personnes au moins avaient trouvé la mort;

B.     considérant qu'Al-Chebab a délibérément visé les Kényans chrétiens lors de ses attaques contre le Kenya; que la majeure partie de la population somalienne est musulmane et que plus de 80 % de la population kényane est chrétienne, contre 11 % de Kényans musulmans, principalement d'origine somalienne;

C.     considérant que ce groupe a récemment perpétré d'autres attaques mortelles en Somalie, comme l'assassinat de 10 personnes le 14 avril lors d'une attaque à la bombe contre le ministère somalien de l'éducation ou l'assassinat de 9 personnes, parmi lesquelles des agents des Nations unies; que des attaques aux armes à feu ou à la grenade au Kenya sont régulièrement attribuées à Al-Chebab, aussi bien dans la région frontalière – où habitent de nombreux Kényans d'origine somalienne – qu'à Nairobi;

D.     considérant que des troupes kényanes ont passé la frontière pour pénétrer dans le sud de la Somalie en 2011 afin de combattre Al-Chebab; que, par la suite, l'armée kényane a rejoint la force de l'Union africaine composée de 22 000 soldats; que le groupe terroriste Al-Chebab a déclaré que la motivation réelle de ses attaques au Kenya était de faire pression sur le gouvernement kényan pour qu'il retire ses troupes de Somalie;

E.     considérant qu'en février 2012, l'ancien dirigeant d'Al-Chebab, Ahmed Abdi Godane, a "prêté allégeance" à Al-Qaïda; que différents rapports font état de liens entre Al-Chebab et d'autres groupes islamistes d'Afrique, comme Boko Haram au Nigeria et Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI); qu'Al-Chebab a mis en place un réseau de recrutement au Kenya, notamment autour de la ville portuaire de Mombasa; que différents rapports font état de l'arrivée de djihadistes étrangers venant rejoindre Al-Chebab en Somalie, non seulement depuis les pays voisins, mais aussi depuis les États-Unis et l'Union européenne;

F.     considérant que la Somalie est dépourvue de réel gouvernement national depuis plus de 20 ans; que depuis l'intervention américaine de 1992, l'opération dite "Restore Hope", ce pays est une zone de guerre;

G.     considérant qu'Al-Chebab est un groupe islamiste issu de l'Union des tribunaux islamiques, une formation hétéroclite de systèmes judiciaires islamiques qui s'est radicalisée à la suite de l'invasion de la Somalie par l'armée éthiopienne en 2006, avec le soutien des États-Unis;

H.     considérant que le groupe Al-Chebab est parvenu à prendre le contrôle d'une grande partie du pays mais qu'il a pour ainsi dire perdu le soutien de la population somalienne en rejetant l'aide alimentaire proposée par l'Occident en 2011 pour lutter contre la sécheresse et la famine; que cette organisation a été chassée de Mogadiscio en août 2011 et du port de Kismayo en septembre 2012; qu'Al-Chebab a désormais perdu le contrôle de la plupart des villes somaliennes, mais qu'elle garde une position dominante dans de nombreuses zones rurales;

I.      considérant que le conflit entre la Somalie, l'Éthiopie et le Kenya s'explique en grande partie par le tracé des frontières coloniales, la population somalienne ayant été répartie principalement sur ces trois pays, une situation qui a suscité différents conflits, et notamment le massacre de plusieurs milliers de Kényans d'origine somalienne par l'armée kényane dans les années 1980;

J.      considérant que le Kenya est la plus grande économie d'Afrique orientale mais que, malgré ses ressources considérables, il occupe l'une des dernières places du classement de l'indice du développement humain; que la majorité de la population kényane vit sous le seuil de pauvreté; que l'économie kényane connaît des problèmes endémiques en raison de la monopolisation des ressources par une minorité et du pillage des ressources naturelles du pays par les anciennes puissances coloniales;

K.     considérant que le Kenya souffre de sécheresses récurrentes, principalement dans les territoires arides et semi-arides de la partie septentrionale du pays où vivent 5,5 millions de personnes, principalement des petits éleveurs de bétail qui se trouvent dans une situation particulièrement vulnérable et connaissent une pauvreté chronique;

L.     considérant que les petites exploitations agricoles représentent 94,8 % de toutes les exploitations kényanes, mais qu'elles n'ont accès qu'à 11,7 % des terres agricoles du pays; que l'Afrique a connu récemment une vague d'accaparement des terres qui a mis des millions d'hectares de terres agricoles fertiles aux mains de grandes entreprises, privant ainsi des dizaines de milliers de communautés agricoles de leurs moyens de subsistance; que les principales exportations agricoles du Kenya à destination de l'Union sont le thé, le café, les roses et les œillets, les haricots, les petits pois, les avocats, la perche du Nil et le thon; qu'au Kenya, 500 000 hectares sont utilisés pour la production de biocarburants par des entreprises du Canada, du Japon et de Belgique, avec des conséquences considérables pour l'environnement et les communautés locales;

M.    considérant que l'urbanisation, les industries extractives, les barrages hydroélectriques et de nombreux autres mégaprojets industriels empiètent de plus en plus sur les terres agricoles, les forêts, les sources d'eau et les territoires des communautés rurales et des populations indigènes; que, depuis l'annonce de la première découverte de pétrole en mars 2012, d'autres gisements importants de pétrole et de gaz ont été découverts au Kenya; qu'en novembre 2013, la société britannique Tullow Oil et son partenaire d'exploration, l'entreprise canadienne Africa Oil, ont annoncé la découverte de pétrole dans un cinquième puits d'exploration dans le comté de Turkana, dans le bassin Lokichar Sud; que le pays est sur le point de lancer l'extraction de masse de ces ressources naturelles, et que la production de pétrole devrait commencer en 2016;

N.     considérant qu'à l'heure actuelle, au Kenya, les femmes accomplissent la majeure partie du travail agricole, produisant et commercialisant la plupart des denrées alimentaires, mais qu'elles ne gagnent qu'une partie des revenus ainsi générés et ne possèdent qu'une infime partie des actifs; que le taux d'éducation des femmes reste inférieur à celui des hommes, ce qui renforce leur dépendance vis-à-vis des hommes, et qu'elles sont également soumises à des restrictions en matière de possession, d'acquisition et de contrôle de biens dans tout le Kenya, indépendamment de leur classe sociale, de leur religion ou du groupe ethnique auquel elles appartiennent; que la loi kényane interdit la mutilation génitale depuis 2011 et impose aux contrevenants une peine de trois ans de prison et des amendes; que la mutilation génitale reste toutefois une pratique traditionnelle;

O.     considérant que la Corne de l'Afrique est l'une des régions du monde où la sécurité alimentaire est la plus précaire, et que des millions de personnes vivant dans cette région souffrent de malnutrition et sont menacées de famine; que malgré ses vastes ressources naturelles, la Corne de l'Afrique est l'une des régions les plus pauvres du monde et qu'elle inclut des pays dans lesquels les normes de santé sont parmi les plus basses au monde; considérant que la communauté internationale n'a rien fait pour résoudre les problèmes de la sécurité des personnes, de la sécheresse et de la famine dans cette région, et qu'elle a même aggravé la situation;

P.     considérant que la multitude des parties à la guerre civile, l'absence de gouvernance étatique en Somalie, la perte de leurs moyens de subsistance par les pêcheurs somaliens, les actes de piraterie au large de la Somalie, les tensions entre le Soudan et le Soudan du Sud, entre l'Éthiopie, l'Érythrée et la Somalie, ainsi qu'entre l'Érythrée et Djibouti, la participation du Kenya et d'autres pays voisins à la force de l'Union africaine déployée en Somalie, l'ingérence et l'intervention de parties extérieures et les intérêts économiques et géostratégiques de l'Union et d'autres parties occidentales sont autant de facteurs qui contribuent à faire de la Corne de l'Afrique l'une des régions les plus touchées par les conflits dans le monde, avec pour conséquence une immense souffrance humaine, le déplacement de personnes à l'intérieur des pays, l'aggravation des crises humanitaires et le blocage du développement social et économique durable ainsi que de la démocratie et de l'état de droit; que de nombreux acteurs ont violé l'embargo des Nations unies sur les armes;

Q.     considérant que le Kenya abrite près de 600 000 réfugiés provenant de pays voisins en conflit, et notamment de Somalie; qu'en 2011, la recrudescence des conflits et des famines localisées ont poussé des millions de personnes à quitter la Somalie, entraînant l'arrivée en masse de réfugiés à Dadaab, où plus de 350 000 Somaliens vivent actuellement dans un camp de réfugiés;

R.     considérant que l'éducation, l'alphabétisation, les droits des femmes, la justice sociale et la distribution équitable des recettes de l'État au sein de la société, la réduction des inégalités et la lutte contre la corruption sont des éléments essentiels pour combattre l'intégrisme, la violence et l'intolérance;

S.     considérant qu'entre 2014 et 2020, l'Union européenne fournira 435 millions d'euros au Kenya; que l'Union est l'acteur qui apporte le soutien financier le plus important à la mission de l'Union africaine en Somalie (AMISOM) par l'intermédiaire du Fonds d'aide à l'Afrique; que l'Union mène plusieurs opérations civiles et militaires dans la région, comme la mission de l'Union européenne visant au renforcement des capacités maritimes régionales dans la Corne de l'Afrique (EUCAP Nestor), menée dans le cadre de la PSDC (depuis 2012), l'opération militaire de l'Union européenne en vue d'une contribution à la dissuasion, à la prévention et à la répression des actes de piraterie et de vols à main armée au large des côtes de la Somalie (EU NAVFOR) (depuis 2008) ou la mission militaire de l'Union européenne visant à contribuer à la formation des forces de sécurité somaliennes (EUTM Somalia) (depuis 2010); que les États-Unis occupent la base militaire navale de Manda Bay au Kenya;

T.     considérant qu'en réaction aux attaques menées par Al-Chebab, le gouvernement kényan a adopté une loi de lutte contre le terrorisme en décembre 2014; que cette loi comprend des propositions qui prolongent le délai de détention par la police des personnes soupçonnées de terrorisme, le faisant passer de 90 jours à près d'un an, qu'elle augmente les peines et qu'elle confère aux enquêteurs davantage de pouvoirs en matière d'écoutes téléphoniques et leur donne le droit d'obliger les propriétaires à fournir des informations concernant leurs locataires; que les journalistes risquent jusqu'à trois ans de prison si leurs articles "entravent des enquêtes ou des opérations de sécurité liées au terrorisme"; que le gouvernement kényan a également décidé de fermer plus de 500 organisations non gouvernementales, dont 15 organisations accusées de lever des fonds à des fins terroristes; que selon les militants des droits de l'homme, ces mesures constituent une menace pour les libertés civiles et la liberté d'expression;

U.     considérant que le respect des droits fondamentaux et des libertés civiles est un facteur essentiel pour la réussite des stratégies de lutte contre le terrorisme; considérant que la coopération entre les États et les acteurs internationaux sur les questions de sécurité doit se faire dans le respect absolu des droits de l'homme et du droit international;

V.     considérant qu'après l'attaque terroriste contre l'université de Garissa, le vice-président du pays, William Ruto, a lancé un ultimatum aux Nations unies, pressant le Conseil des droits de l'homme de fermer le camp de réfugiés de Dadaab dans les trois mois, faute de quoi le Kenya le fermerait lui-même; que le Conseil des droits de l'homme a prévenu que la fermeture de ce camp aurait "des conséquences humanitaires et pratiques extrêmes"; que la convention des Nations unies relative aux réfugiés interdit de repousser des réfugiés vers des régions où leur vie ou leur liberté est menacée; que la construction d'un mur de séparation entre la Somalie et le Kenya a également été suggérée;

W.    considérant que la CPI a accusé l'actuel président kényan, Uhuru Kenyatta, et son vice-président, William Ruto, d'avoir commis des crimes contre l'humanité lors des violences qui ont suivi les élections de 2007 et ont entraîné la mort de plus de 1 000 Kényans; que le procureur général a retiré ses accusations à l'encontre du président Kenyatta le 5 décembre 2014, mais qu'il a accusé le gouvernement kényan de harcèlement et d'intimidation de témoins potentiels;

1.      condamne vigoureusement les violations systématiques des droits de l'homme découlant des actes terroristes commis par Al-Chebab; exprime sa sympathie et ses condoléances les plus sincères aux familles de toutes les victimes, en particulier aux familles des victimes du massacre de l'université de Garissa; insiste sur la nécessité de faire en sorte que les responsables de ces crimes en rendent compte par l'intermédiaire de mécanismes adéquats;

2.      souligne que la pauvreté croissante des citoyens, la détérioration des perspectives économiques, le creusement des inégalités et les possibilités d'éducation limitées ont gonflé les rangs des chômeurs, créant ainsi un contexte socio-économique propice au développement d'Al-Chebab; observe également avec inquiétude que, dans de nombreuses régions, les États somalien et kényan n'assurent aucun service public essentiel à la population comme la distribution d'eau, l'assainissement des eaux usées, les soins de santé ou l'éducation; presse les autorités kényanes et somaliennes, dans ces circonstances, de s'attaquer à la situation socio-économique qui favorise le développement d'Al-Chebab et de lutter contre la détérioration du niveau de vie afin d'assurer la justice sociale;

3.      met en garde contre le risque d'un glissement vers une guerre de religion; estime que les actions d'Al-Chebab constituent une violation des principes de l'islam; est convaincu que la stratégie de lutte contre le terrorisme ne peut pas être envisagée comme un conflit entre civilisations ou entre religions donnant lieu à des préjugés racistes ou xénophobes;

4.      critique vivement le rôle joué par les différentes interventions occidentales ces dernières années, lesquelles ont favorisé la radicalisation de certains habitants de la Corne de l'Afrique; souligne que les politiques de ce type favorisent le terrorisme au lieu de le combattre, et qu'il convient dès lors d'y renoncer; s'inquiète de l'importance accordée aux "solutions" militaires par les politiques européennes de lutte contre le terrorisme, avec pour résultat de nombreux programmes d'assistance militaire aux pays de la Corne de l'Afrique; affirme qu'il ne peut y avoir de solution militaire aux conflits dans cette région; rejette le recours au concept de "responsabilité de protéger", qui est contraire au droit international et n'offre aucune base juridique adéquate justifiant le recours unilatéral à la force;

5.      insiste en particulier sur la nécessité pour l'Union, ses États membres et ses pays partenaires au sein de l'Union africaine de fonder leur stratégie de lutte contre le terrorisme international sur l'état de droit et le respect des droits fondamentaux, comme c'est le cas pour toutes les autres formes de criminalité; souligne, en outre, que l'objectif premier de l'action extérieure de l'Union en matière de lutte contre le terrorisme international doit être la prévention et l'application d'une politique d'opposition à tout type d'intervention militaire qui redéfinisse en profondeur la position de l'Union européenne dans les négociations internationales, et met l'accent sur la nécessité de promouvoir le dialogue politique, la tolérance et la compréhension entre les différentes cultures et religions;

6.      invite l'Union européenne et la communauté internationale à collaborer avec les pays africains et avec les acteurs régionaux et internationaux en vue de résoudre les conflits par des moyens strictement pacifiques, notamment en s'attaquant à leurs causes profondes; demande à l'Union européenne d'établir un nouveau cadre de relations avec le Kenya et avec tous les pays africains qui soit fondé sur le principe de la non-ingérence dans leurs affaires intérieures et sur le respect de leur souveraineté, et visant à soutenir le développement des régions limitrophes et à favoriser l'emploi et l'éducation, plutôt que sur la conclusion d'"accords d'association" principalement destinés à mettre en place des zones de libre-échange qui servent les intérêts des entreprises occidentales;

7.      désapprouve et rejette l'approche militaire adoptée par l'Union dans le cadre de la réforme du secteur de la sécurité et de la mission de formation EUTM Somalia, et rejette toute nouvelle mission de la politique de sécurité et de défense commune (PSDC) dans la région, comme EUCAP Nestor; demande au Conseil et à la Commission de mettre fin à la mission EUTM Somalia, puisqu'il est apparemment impossible d'empêcher les recrues formées par EUTM de rejoindre différents groupes armés tels qu'Al-Chebab, de sorte que l'Union contribue massivement au conflit et à la militarisation de la région;

8.      insiste sur le fait que les moyens destinés à l'aide au développement, tels que le FED, ne doivent pas être utilisés à des fins militaires; s'oppose fermement à l'utilisation du FED pour la formation de forces armées; s'oppose résolument à l'utilisation de l'aide au développement pour imposer des intérêts stratégiques; estime que le FED doit rester un instrument consacré exclusivement au financement de mesures visant à éradiquer la pauvreté et la faim dans les pays en développement;

9.      estime que la lutte contre le trafic d'armes devrait constituer l'une des priorités de l'Union dans la lutte contre la grande criminalité et la criminalité organisée internationale; est d'avis, notamment, qu'il convient de renforcer davantage la coopération en ce qui concerne les mécanismes d'échange d'informations ainsi que la traçabilité et la destruction des armes prohibées;

10.    demande le lancement d'une enquête internationale sous l'égide des Nations unies pour déterminer les responsabilités des pays tiers dans l'organisation et le financement des groupes terroristes de la région ainsi que la responsabilité des multinationales et des gouvernements qui s'accaparent les richesses et accentuent les inégalités économiques et sociales;

11.    prie instamment l'Union d'adopter une approche purement civile et pacifique à l'égard de la résolution des conflits, et d'assumer son rôle, neutre, de conciliateur/médiateur afin de parvenir à une paix durable en Somalie et dans l'ensemble de la région de la Corne de l'Afrique; demande à l'Union européenne et à ses États membres de continuer de fournir une aide humanitaire neutre, impartiale et indépendante aux populations vulnérables;

12.    répète que l'Union européenne et les pays de la Corne de l'Afrique devraient lutter contre les causes profondes de l'extrémisme violent en le traitant d'une manière compatible avec les droits de l'homme et le droit international, au lieu d'encourager et de soutenir des régimes répressifs ou des groupes qui opèrent dans la Corne de l'Afrique;

13.    exprime sa profonde inquiétude concernant la spéculation sur le prix des denrées alimentaires et l'accaparement des terres en Afrique, notamment pour la production de biocarburants, qui risquent de porter atteinte à la sécurité alimentaire des populations locales et d'aggraver les famines; demande aux gouvernements de la Corne de l'Afrique et de l'Union européenne d'évaluer les conséquences de l'acquisition actuelle de terres agricoles sur la pauvreté rurale et sur la famine; prie instamment la Commission d'intégrer la question de l'accaparement des terres dans son dialogue politique avec les pays en développement, dans le but de cesser de soutenir ces politiques; invite l'Union européenne à augmenter la proportion d'aide publique au développement (APD) dédiée à l'agriculture, ainsi que l'APD destinée aux investissements dans les petites exploitations agricoles durables et le pastoralisme, pour garantir aux petits paysans l'accès à la terre et renforcer ainsi le marché local, garantir la souveraineté alimentaire dans la Corne de l'Afrique, et aider à régénérer les eaux au large de la Corne de l'Afrique pour garantir les moyens de subsistance des pêcheurs et de leurs familles;

14.    invite le gouvernement kényan et les gouvernements des pays d'origine des entreprises extractives à imposer à ces entreprises l'adoption de bonnes pratiques en matière de transparence, de responsabilité et de participation des citoyens, et à lutter contre la corruption dans le secteur des industries extractives;

15.    demande au gouvernement kényan de promouvoir le rôle important des femmes dans la société, l'économie du pays, la production alimentaire et la préservation de l'environnement, notamment en encourageant la participation des femmes à la vie publique et politique; invite également le gouvernement à adopter des mesures efficaces pour mettre un terme aux ablations dans le pays;

16.    exprime sa profonde inquiétude face à la focalisation du gouvernement kényan sur la sécurité intérieure aux dépens des droits de l'homme et des libertés civiles; demande au pays de respecter ses obligations au titre du droit international, et en particulier son obligation d'accueillir et de protéger les réfugiés;

17.    invite les autorités de l'Union européenne et des pays de la Corne de l'Afrique à respecter l'interdiction de la torture, consacrée notamment par la convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants; répète que les aveux obtenus par la torture ne sont pas recevables et condamne cette pratique; s'oppose résolument à l'utilisation de drones pour des exécutions extrajudiciaires et extraterritoriales, et demande l'interdiction de l'utilisation de drones à cette fin;

18.    charge son Président de transmettre la présente résolution au Service européen pour l'action extérieure, à la Commission et au Conseil, aux États membres de l'Union européenne, aux pays de la Corne de l'Afrique, au Parlement panafricain et aux membres de l'Assemblée générale des Nations unies.