PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur les perturbateurs endocriniens: état des lieux à la suite de l'arrêt de la Cour de justice du 16 décembre 2015
1.6.2016 - (2016/2747(RSP))
conformément à l'article 123, paragraphe 2, du règlement
Piernicola Pedicini, Marco Affronte, Eleonora Evi, Marco Zullo, Fabio Massimo Castaldo, Marco Valli, Daniela Aiuto, Laura Agea, Dario Tamburrano, Laura Ferrara, Isabella Adinolfi, Tiziana Beghin, David Borrelli, Rosa D’Amato, Ignazio Corrao, Marco Zanni au nom du groupe EFDD
Voir aussi la proposition de résolution commune RC-B8-0733/2016
B8-0736/2016
Résolution du Parlement européen sur les perturbateurs endocriniens: état des lieux à la suite de l'arrêt de la Cour de justice du 16 décembre 2015
Le Parlement européen,
– vu le règlement (UE) n° 528/2012 du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2012 concernant la mise à disposition sur le marché et l'utilisation des produits biocides[1],
– vu l'arrêt du Tribunal de la Cour de justice de l'Union européenne (troisième chambre) du 16 décembre 2015 dans l'affaire T-521/14 Royaume de Suède / Commission européenne, dans le recours en carence intitulé "Spécification des critères scientifiques pour la détermination des propriétés perturbant le système endocrinien – Défaut de la part de la Commission d'adopter des actes délégués – Obligation d'agir", présenté par le Royaume de Suède, avec l'intervention ad adiuvandum entre autres du Parlement européen, contre la Commission européenne,
– vu les articles 168, 234, 265 et 266 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (traité FUE),
– vu les articles 14 et 17, paragraphe 8, du traité sur l'Union européenne (traité UE),
– vu la lettre du 22 mars 2016 adressée par le Président Jean-Claude Juncker au Président du Parlement européen ((2016)1416502),
– vu les articles 119 et 123 et l'article 169, paragraphe 5, de son règlement,
– vu la motion de censure visant la Commission, déposée conformément à l'article 119 du règlement (2016/1594(MOC),
– vu l'avis juridique D(2016)24155 du 23 mai 2016, rendu par le Service juridique du Parlement européen, en particulier ses paragraphes 17, 19, 20 et 21,
– vu l'article 123, paragraphe 2, de son règlement,
A. considérant que le règlement (UE) nº 528/2012 se fonde sur le principe de précaution afin de garantir que la fabrication et la mise à disposition sur le marché de substances actives et de produits biocides n'ont pas d'effets nocifs sur la santé humaine ou animale ni d'incidences inacceptables sur l'environnement;
B. considérant qu'en vertu du règlement (UE) nº 528/2012, la Commission aurait dû adopter, le 13 décembre 2013 au plus tard, des actes délégués tendant à définir des critères scientifiques pour la détermination des propriétés de perturbation endocrinienne des substances actives et des produits biocides;
C. considérant que la Commission n'a pas adopté les actes délégués précités, ni avant ni après le 13 décembre 2013;
D. considérant que le Tribunal a jugé, dans son arrêt du 16 décembre 2015 dans l'affaire T-521/14, que la Commission était tenue par une obligation claire, précise et inconditionnelle d'adopter les actes délégués établissant lesdits critères scientifiques le 13 décembre 2013 au plus tard;
E. considérant que le Tribunal a rejeté un argument juridique spécifique invoqué par la Commission pour justifier son inaction et qu'il a jugé sans équivoque, au point 74 de son arrêt, qu'aucune disposition du règlement nº 528/2012 n'exigeait de procéder à une analyse d'impact des critères scientifiques fondés sur le danger;
F. considérant que la Commission a, à diverses reprises, confirmé son intention de procéder à une analyse d'impact avant d'adopter l'acte délégué en question;
G. considérant que ces déclarations témoignent d'une violation continue et répétée du règlement (UE) nº 528/2012 et de l'inobservation de l'arrêt du Tribunal du 16 décembre 2015 dans l'affaire T-521/14;
H. considérant que, aux termes du premier alinéa de l'article 266 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, "[l]'institution, l'organe ou l'organisme dont émane l'acte annulé, ou dont l'abstention a été déclarée contraire aux traités, est tenu de prendre les mesures que comporte l'exécution de l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne";
I. considérant que, par conséquent, ces manquements répétés constituent une violation manifeste des traités commise par la gardienne des traités elle-même, la Commission européenne;
J. considérant que, selon un rapport détaillé et incontesté, publié en mai 2015 par l'ONG Corporate Europe Observatory (CEO), la direction générale de l'environnement de la Commission aurait pu fournir à temps l'ensemble des critères scientifiques destinés à la définition des perturbateurs endocriniens;
K. considérant que, toujours d'après ledit rapport, le retard pris dans l'adoption des actes délégués du fait de la demande d'une analyse d'impact illégale participait d'une stratégie ourdie par de hauts fonctionnaires de la Commission qui ont choisi de placer la protection des intérêts privés au-dessus de celle de la santé des êtres humains et de l'environnement;
L. considérant qu'une motion de censure visant la Commission, déposée par M. Pedicini et d'autres députés, a été annoncée pour la première fois le 12 mai 2016 au cours de la séance plénière avant d'être considérée comme caduque par le Président, Martin Schulz, dans une lettre adressée à tous les députés au Parlement européen; considérant que les motifs de cette décision reposaient sur une interprétation erronée in extenso de l'article 169, paragraphe 5, du règlement;
M. considérant que l'avis du Service juridique du Parlement européen, sollicité le 10 mai 2016 par la commission de l'environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire, indique clairement que l'unique voie de recours dont dispose le Parlement européen serait une procédure qui s'étalerait sur deux ans et qui, en cas de succès, aboutirait uniquement à ce que la Cour de justice confirme le caractère illégal de l'inaction de la Commission mais ne pourrait obliger cette dernière à adopter les actes délégués conformément aux dispositions du règlement (CE) nº 528/2012 (règlement sur les biocides);
N. considérant que le Service juridique du Parlement européen ajoute que le Parlement est évidemment en droit de réagir à la position de la Commission dans le cadre du contrôle politique qu'il exerce sur cette dernière conformément à l'article 14 du traité UE;
1. déplore que la Commission ait manqué à l'obligation qui lui incombe d'adopter des actes délégués en application du règlement (UE) nº 528/2012;
2. rappelle que la Commission était tenue de spécifier les critères scientifiques pour la détermination des propriétés de perturbation endocrinienne tandis que, selon les lignes directrices pour une meilleure réglementation adoptées par la Commission, les analyses d'impact doivent permettre de recueillir des données concrètes afin d'apprécier l'opportunité d'une mesure législative ou non législative envisagée par l'Union et de déterminer comment concevoir au mieux la mesure en question pour atteindre les objectifs fixés;
3. estime qu'il est inadmissible que, même après avoir été condamnée par l'arrêt du Tribunal de la Cour de justice de l'Union européenne de décembre 2015, la Commission n'ait pas adopté les actes délégués concernant les critères scientifiques pour la détermination des propriétés perturbant le système endocrinien de substances actives et de produits biocides;
4. est d'avis que les options examinées dans le cadre des analyses d'impact ne sauraient en aucun cas intervenir dans la définition des critères scientifiques relatifs aux propriétés perturbant le système endocrinien ou à l'incidence de certaines substances sur la santé;
5. souligne que la Commission a également enfreint le traité dans la mesure où elle n'a pas pris toutes les mesures nécessaires pour exécuter l'arrêt du Tribunal;
6. regrette que le Président du Parlement européen ait tout d'abord annoncé en plénière la motion de censure déposée conformément à l'article 119 du règlement (2016/1594(MOC)) et l'ait ensuite considérée comme caduque;
7. invite la Commission à adopter des actes délégués en vertu du règlement n° 528/2012 visant à définir des critères scientifiques pour la détermination des propriétés perturbant le système endocrinien de substances actives et de produits biocides; demande à la Commission de prendre sans tarder les mesures nécessaires et, au plus tard, dans un délai de deux mois, la présente résolution étant à considérer comme constituant une invitation formelle à agir, au sens de l'article 265 du traité FUE;
8. charge son Président de transmettre la présente résolution, ainsi que de notifier le résultat du vote en séance plénière sur ce texte, au président du Conseil et au président de la Commission.
- [1] JO L 167 du 27.6.2012, p. 1.