Proposition de résolution - B8-1165/2016Proposition de résolution
B8-1165/2016

PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur la situation dans le nord de l’Iraq et à Mossoul

24.10.2016 - (2016/2956(RSP))

déposée à la suite d'une déclaration de la vice-présidente de la Commission / haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité
conformément à l'article 123, paragraphe 2, du règlement

Javier Nart, Petras Auštrevičius, Beatriz Becerra Basterrechea, Dita Charanzová, Marielle de Sarnez, Gérard Deprez, José Inácio Faria, María Teresa Giménez Barbat, Marian Harkin, Ivan Jakovčić, Alexander Graf Lambsdorff, Valentinas Mazuronis, Louis Michel, Urmas Paet, Maite Pagazaurtundúa Ruiz, Carolina Punset, Marietje Schaake, Jasenko Selimovic, Hannu Takkula, Pavel Telička, Ramon Tremosa i Balcells, Ivo Vajgl, Johannes Cornelis van Baalen, Paavo Väyrynen, Ilhan Kyuchyuk au nom du groupe ALDE

Voir aussi la proposition de résolution commune RC-B8-1159/2016

Procédure : 2016/2956(RSP)
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B8-1165/2016
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B8-1165/2016

Résolution du Parlement européen sur la situation dans le nord de l’Iraq et à Mossoul

(2016/2956(RSP))

Le Parlement européen,

–  vu la déclaration universelle des droits de l'homme de 1948,

–  vu la déclaration des Nations unies de 1981 sur l’élimination de toutes formes d’intolérance et de discrimination fondées sur la religion ou la conviction,

–  vu la convention des Nations unies de 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

–  vu les principes directeurs des Nations unies sur le déplacement interne de 1998,

–  vu la déclaration faite le 16 juin 2014 par Navi Pillay, haute-commissaire aux droits de l'homme des Nations unies, qui condamne les exécutions sommaires perpétrées par Daech et qui estime que ces dernières constituent de manière quasiment certaine des crimes de guerre,

–  vu la déclaration de Phumzile Mlambo-Ngcuka, secrétaire générale adjointe des Nations unies et directrice exécutive de l'ONU Femmes, dans laquelle elle fait part de préoccupations concernant plus particulièrement la sécurité des femmes et des filles en Iraq, notamment dans les régions contrôlées par Daech,

–  vu les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies sur l'Iraq, en particulier les résolutions 2299 (2016) et 2249 (2015), qui condamnent les récents attentats terroristes commis par Daech,

–  vu la résolution 2091(2016) sur les combattants étrangers en Syrie et en Iraq, adoptée le 27 janvier 2016 par l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe,

–  vu ses résolutions du 27 février 2014 sur la situation en Iraq[1], du 18 septembre 2014 sur la situation en Iraq et en Syrie[2] et du 12 février 2015 sur la crise humanitaire en Iraq et en Syrie[3],

–  vu les observations formulées par la vice-présidente de la Commission et haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Federica Mogherini, à l’issue de la deuxième réunion du Conseil de coopération UE-Iraq au titre de l'accord de partenariat et de coopération entre l'Union européenne et l’Iraq,

–  vu l'article 123, paragraphe 2, de son règlement,

A. considérant que l'opération visant à libérer la ville de Mossoul du groupe Daech vient de commencer; que l'offensive pourrait déboucher sur une situation humanitaire extrêmement préoccupante; que tous les litiges non résolus concernant les frontières internes dans le nord de l’Iraq, s’ils ne sont pas abordés par les acteurs militaires concernés qui luttent contre Daech et par la communauté internationale dans son ensemble, pourraient empêcher la réhabilitation de la région et le rapatriement des habitants déplacés, et donc menacer la future existence des minorités vulnérables dans la région; que le nord de l'Iraq a longtemps été une terre de minorités ethniques et religieuses, caractérisée par le pluralisme, la stabilité et la coopération intercommunautaire, malgré des périodes de violence et de persécution;

B.  considérant que Mossoul a longtemps été une ville pluriethnique où une majorité arabe sunnite côtoyait des chaldéens, des syriaques et des assyriens, des kurdes, des yézidis et des turkmènes; que les zones situées autour de la ville ont également une histoire marquée par la diversité ethno-religieuse, avec une concentration de chrétiens sur la plaine de Ninive, de yézidis autour du Mont Sinjar et de turkmènes musulmans à Tal Afar;

C.  considérant que le Parlement européen a estimé, le 4 février 2016, que «le soi-disant groupe «EILL/Daech» commet un génocide contre les chrétiens et les yézidis et d’autres minorités religieuses et ethniques qui ne partagent pas son interprétation de l’islam» et que «les persécutions, les atrocités et les crimes internationaux constituent des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité»;

D.  considérant que le Parlement a été rejoint par le Conseil de l'Europe, le Département d'État américain, le Congrès américain, le Parlement britannique, le Parlement australien et d'autres nations et institutions dans la reconnaissance que les atrocités perpétrées par Daech contre les minorités religieuses et ethniques en Iraq comprennent des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité et des crimes de génocide;

E.  considérant que, selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, 3,3 millions d'Iraquiens, environ, ont été déracinés par la guerre depuis 2014 et plus de 1,5 million courent un risque imminent de déplacement à Mossoul en conséquence directe de l'opération visant à reprendre le territoire;

F.  considérant que le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) a ouvert cinq camps et qu'il est prêt à accueillir 45 000 personnes fuyant Mossoul et les régions alentour, l'organisation prévoyant de disposer d'un total de 11 camps ouverts au cours des semaines à venir, avec une capacité de 120 000 personnes, pour autant que des terrains puissent être réservés dans des zones sûres, à l'écart des lignes de front; que, jusqu’à présent, le budget pour la réaction du HCR à l’opération de Mossoul est financé à un peu plus de 38%; que le financement n'est pas seulement nécessaire pour les préparatifs initiaux mais également pour la gestion du déplacement de grande ampleur, qui pourrait durer tout au long de l'hiver;

G.  considérant que les enfants, à Mossoul et aux alentours, sont particulièrement vulnérables et qu'ils risquent d'être tués ou blessés pendant les combats, ainsi que d'être victimes de violence sexuelle, d’être enlevés ou d’être recrutés par des groupes armés;

H.  considérant que l'Union européenne joue un rôle fondamental dans le cadre de la coalition internationale contre Daech en Iraq en apportant une assistance humanitaire et de stabilisation; qu'à ce jour, l'Union européenne a fourni à l'Iraq une aide humanitaire s'élevant à 134 millions d'euros, dont 50 millions d'euros pour Mossoul;

I.  considérant que le Parlement a souligné qu'il importe que la communauté internationale apporte, conformément au droit international, une protection et une assistance, y compris militaires, à tous ceux qui sont ciblés par Daech et d'autres organisations terroristes au Proche-Orient, notamment les minorités ethniques et religieuses, et qu'il importe que ces personnes participent à l'élaboration de solutions politiques durables pour l'avenir;

J.  considérant que l'opération militaire contre Daech dans le nord de l'Iraq a lieu dans le cadre d'une mission commune de sécurité nationale qui rassemble les forces de sécurité iraquiennes, les forces Peshmerga du gouvernement régional kurde et les forces de sécurité locales; que la coalition internationale apporte un soutien consultatif, aérien et de renseignement;

K.  considérant que préserver l'identité et garantir la protection de la sécurité des communautés du nord de l'Iraq dans le cadre de la république fédérale d'Iraq permettrait de restaurer et de préserver les droits humains fondamentaux, y compris les droits de propriété, des peuples autochtones de cette région;

L.  considérant que l'article 2 de la constitution de l'Iraq garantit «les droits religieux complets de tous à la liberté de croyance et de pratique religieuse»;

M.  considérant que l'accord de partenariat et de coopération UE-Iraq, et en particulier sa clause relative aux droits de l'homme, souligne que le dialogue politique UE-Iraq doit être axé sur les droits de l'homme et le renforcement des institutions démocratiques;

1.  condamne vivement les violences en cours et les exécutions de masse commises par Daech en Iraq; exprime sa profonde préoccupation face aux informations qui font continuellement état de l'utilisation d'enfants, de personnes âgées, de femmes et de personnes vulnérables, par Daech, en tant que boucliers contre les opérations de libération militaires en cours dans le nord de l'Irak; condamne vivement le déplacement de milliers d'Iraquiens, y compris de membres des minorités ethniques et religieuses qui habitent le nord de l'Iraq; observe avec une extrême préoccupation que Daech continue à cibler les communautés chrétiennes (chaldéenne/syriaque/assyrienne, melkite, arménienne), yézidies, turkmènes, chiites, chabaks, sabéennes, kaka'e et sunnites dans ses efforts visant à exterminer toutes les minorités religieuses et ethniques dans les régions qu'il contrôle;

2.  souligne l'importance de la protection civile pendant les opérations militaires à Mossoul et alentour;

3.  reconnaît le droit du gouvernement iraquien de défendre son territoire souverain; exhorte les forces de sécurité iraquiennes à agir conformément au droit national et international et dans le respect des engagements pris par l'Iraq dans le cadre d'accords internationaux sur les droits de l'homme et les libertés fondamentales;

4.  invite l’Union européenne, les Nations unies et l’ensemble de la communauté internationale à continuer de soutenir le gouvernement iraquien de manière durable en apportant une aide humanitaire et militaire lors des opérations de libération en cours dans plusieurs régions iraquiennes; salue les 50 millions d’euros d’aide humanitaire fournis par l’Union européenne à la région de Mossoul, qui est confrontée à une catastrophe humanitaire extraordinaire, sans précédent;

5.  souligne l’importance de Mossoul pour l’ensemble de l’Iraq et demande à l’Union européenne et à ses États membres de veiller à ce que les minorités soient représentées au sein d’une nouvelle administration à Mossoul; estime que le retour des réfugiés et des personnes déplacées à l'intérieur du pays dépendra de la stabilité de la nouvelle administration; fait valoir le droit légitime des minorités ethniques et religieuses à la participation politique, ainsi qu’au rétablissement de leurs droits de propriété;

6.  presse le gouvernement d'Iraq et le gouvernement régional kurde, ainsi que l'Union européenne et ses États membres, la communauté internationale et les acteurs internationaux, de garantir l'intégrité territoriale et la sécurité de la plaine de Ninive;

7.  invite l'ensemble des acteurs qui luttent contre Daech en république d'Iraq à développer une coopération et un dialogue politiques durables, inscrits sur le long terme et ouverts à tous afin de jeter les fondements d'un Iraq exempt de mouvements radicaux et extrémistes; demande à l'Union européenne et à ses États membres, à la coalition internationale de lutte contre Daech, à la communauté internationale et aux acteurs internationaux d’œuvrer avec le gouvernement national et les gouvernements régionaux de la république d'Iraq à un arrangement de sécurité viable dans la plaine de Ninive, à Tal Afar et à Sinjar;

8.  demande à l'Union européenne, aux Nations unies et à l'ensemble de la communauté internationale de coopérer avec le gouvernement national et les gouvernements régionaux de la république d'Iraq pour superviser la réinsertion de tous les Iraquiens et de tous les membres de minorités ethniques et religieuses qui ont été déplacés; est d'avis que des refuges sûrs, qui sont protégés par des forces mandatées par les Nations unies, pourraient constituer un élément de la réponse à apporter si l'on veut relever le défi de taille que représente la protection provisoire de millions de réfugiés, victimes du conflit qui sévit en Syrie et en Iraq;

9.  souligne la nécessité de respecter les droits de l'homme et les libertés fondamentales, notamment la liberté d'expression, la liberté de la presse et les libertés numériques; estime que des médias équilibrés en Iraq et dans toutes ses régions sont fondamentaux pour promouvoir la paix et lutter contre tous les types d'idéologies radicalisantes après l'éradication de Daech;

10.  invite tous les acteurs régionaux à tout mettre en œuvre pour faire cesser l'ensemble des activités menées par des organismes officiels ou privés afin de propager et de diffuser des idéologies islamistes extrémistes; invite l'Union européenne à faciliter un dialogue régional sur les problèmes du Moyen-Orient et à y associer tous les acteurs de poids, en particulier l’Iran, l'Arabie saoudite et la Turquie; reconnaît la contribution décisive de l’Iran en Iraq, qui a permis d’enrayer l’avancée de Daech et de récupérer les territoires soumis au terrorisme djihadiste;

11.  charge son Président de transmettre la présente résolution à la vice-présidente de la Commission / haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, au Conseil, à la Commission, au représentant spécial de l'Union pour les droits de l'homme, aux gouvernements et aux parlements des États membres, au gouvernement et au Conseil des représentants de la République d'Iraq, au gouvernement régional du Kurdistan, au gouvernement de la Turquie, au secrétaire général de l'Organisation des Nations unies et au Conseil des droits de l'homme des Nations unies.