PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur la crise migratoire et la situation humanitaire au Venezuela et à ses frontières
2.7.2018 - (2018/2770(RSP))
conformément à l’article 123, paragraphe 2, du règlement intérieur
Ignazio Corrao, Fabio Massimo Castaldo au nom du groupe EFDD
Voir aussi la proposition de résolution commune RC-B8-0315/2018
B8-0320/2018
Résolution du Parlement européen sur la crise migratoire et la situation humanitaire au Venezuela et à ses frontières
Le Parlement européen,
– vu la déclaration universelle des droits de l’homme de 1948,
– vu le pacte international relatif aux droits civils et politiques,
– vu le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels,
– vu le statut de Rome de la Cour pénale internationale et la déclaration du Procureur de la Cour pénale internationale, Mme Fatou Bensouda, du 8 février 2018,
– vu la déclaration du 31 mars 2017 du Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme sur le Venezuela,
– vu le rapport publié le 22 juin 2018 par le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, intitulé «Human rights violations in the Bolivarian Republic of Venezuela» (violations des droits de l’homme commises en République bolivarienne du Venezuela),
– vu la déclaration du 20 avril 2018 de l’Organisation des États américains (OEA) sur la détérioration de la situation humanitaire au Venezuela,
– vu le rapport publié le 12 février 2018 par la Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH), intitulé «Democratic institutions, the rule of law and human rights in Venezuela» (institutions démocratiques, état de droit et droits de l’homme au Venezuela) et vu la résolution du 14 mars 2018 de la CIDH,
– vu les déclarations des 26 janvier 2018, 19 avril 2018 et 22 mai 2018 de la vice‑présidente de la Commission et haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité (VP/HR) sur l’évolution récente de la situation au Venezuela,
– vu les conclusions du Conseil du 13 novembre 2017, du 22 janvier 2018, du 28 mai 2018 et du 25 juin 2018,
– vu la mission officielle en Colombie de Christos Stylianides, commissaire chargé de l’aide humanitaire et de la gestion des crises, en mars 2018,
– vu l’article 123, paragraphe 2, de son règlement intérieur,
A. considérant que plus de 2 millions de personnes font fui le Venezuela ces dernières années;
B. considérant que, selon le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés et l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), le nombre total de Vénézuéliens ayant quitté le pays a connu une très forte hausse, passant de 437 000 en 2005 à plus de 1,6 million en 2017; que la tendance observée porte par ailleurs à croire que le nombre de personnes fuyant le pays devrait exploser dans les prochaines semaines et dans les mois à venir;
C. considérant que cet exode trouve son origine dans la crise politique, sociale, économique et humanitaire sans précédent que traverse le Venezuela; que le gouvernement du pays ne permet pas à la population d’exercer ses droits fondamentaux que son notamment le droit de se nourrir ou l’accès aux médicaments, aux soins de santé et à un travail décent; que la situation des droits de l'homme ne cesse de se dégrader au Venezuela;
D. considérant qu’un nombre croissant de personnes au Venezuela, dont les enfants, souffrent dès lors de malnutrition du fait d’un accès limité à des services de santé de qualité, aux médicaments et aux denrées alimentaires;
E. considérant que le gouvernement vénézuélien s’entête à ne pas reconnaître le problème; qu’il évite de parler de «crise humanitaire» et interdit toute référence à cette expression; qu'il refuse toute forme d’aide humanitaire internationale malgré les bonnes dispositions de la communauté internationale;
F. considérant que le rapport publié le 22 juin 2018 par le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme met en exergue le fait que les autorités vénézuéliennes n’entendent pas demander aux auteurs de graves violations des droits de l'homme de répondre de leurs actes qui vont du recours excessif à la force contre les manifestant aux assassinats en passant par les détentions arbitraires, les mauvais traitements et les actes de torture; que les agents de sécurité soupçonnés d’avoir participé à l’exécution extrajudiciaire de manifestants semblent jouir d'une véritable impunité; que ces constatations traduisent une aggravation de la situation tendue que connaît le pays;
G. que les multiples aspects de la crise actuelle que connaît le Venezuela ont entraîné l'un des plus importants déplacements de population qu’ait connu la région;
H. considérant que, selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA), la Colombie accueille sur son territoire 820 000 Vénézuéliens, soit la plus grande partie des personnes déplacées;
I. considérant que les autorités nationales et locales colombiennes travaillent de manière exemplaire pour permettre aux personnes qui ont fui le Venezuela d’exercer, indépendamment de leur statut, leurs droits fondamentaux que sont notamment le droit à l’éducation primaire et aux services élémentaires de santé; que ces mêmes autorités essaient également de mettre en évidence le rôle joué par les migrants illégaux et d’œuvrer pour leur intégration dans le monde du travail colombien en accordant pour ce faire des permis spéciaux aux personnes qui vivent dans les régions frontalières et qui sont disposées à faire la navette entre le Venezuela et le pays où elles travaillent, la Colombie;
J. considérant que, dans un élan de fraternité, tant les collectivités locales et les institutions religieuses que l'homme de la rue accueillent les migrants vénézuéliens et font preuve de solidarité et d’une grande résilience; que ces collectivités doivent néanmoins gérer une énorme pression et relever des défis toujours plus importants en raison du nombre particulièrement élevé de personnes contraintes de fuir leur pays;
K. qu’un nombre important de personnes, souvent en mauvais état de santé et sous‑alimentées, affluent à Cucuta, ville située à la frontière avec le Venezuela; que cette crise humanitaire touche également, à différents degrés, l’ensemble des autres régions de Colombie et notamment sa capitale;
L. considérant que la Colombie, même si elle est sur la voie de la stabilisation et de la pacification, demeure confrontée à des problèmes internes imputables notamment à la présence de groupes armés, aux divers trafics illicites, aux activités minières illicites et à la contrebande; que ces problèmes visent pour l’essentiel les régions frontalières; que la crise humanitaire dont sont victimes les migrants vénézuéliens risque d’accentuer et d’aggraver ces problèmes tout en dégradant davantage la situation des droits de l’homme dans ces régions;
M. considérant que le Brésil, le Chili, le Pérou, l’Équateur, l’Argentine et le Panama sont également confrontés à un important afflux de réfugiés; que les pays d’accueil éprouvent toujours plus de difficultés à fournir de l’aide aux nouveaux arrivants;
N. considérant que le 17 mars 2018, l’Union européenne a réservé une enveloppe de 31 millions d’euros pour le financement de l’aide humanitaire en Amérique latine et aux Caraïbes, attribuant 6 millions d’euros à la Colombie et 2 millions d’euros supplémentaires aux personnes touchées par la crise au Venezuela; que le 7 juin 2018, la Commission a annoncé une enveloppe de 35,1 millions d’euros pour l’aide d’urgence et l’aide au développement en vue de soutenir la population vénézuélienne et les pays voisins touchés par la crise; qu’en 2018, un montant de 5 millions d’euros a été alloué aux activités de prévention des conflits aux frontières du Brésil et de la Colombie, au moyen de l’instrument contribuant à la stabilité et à la paix (IcSP);
1. est profondément choqué et préoccupé par la situation humanitaire dramatique au Venezuela, qui a fait de nombreux morts et provoqué un afflux sans précédent de personnes dans les pays voisins et plus lointains; exprime sa solidarité avec tous les Vénézuéliens contraints de fuir leur pays en l’absence de conditions de vie les plus élémentaires, comme l’accès aux denrées alimentaires, aux services primaires de santé et aux médicaments;
2. félicite le gouvernement colombien, les autorités locales, la société civile, les autorités religieuses et l’ensemble du peuple colombien pour sa réactivité et sa solidarité ainsi que pour l’aide et le soutien apportés, selon les besoins, par ces différents acteurs à l’ensemble des réfugiés vénézuéliens; salue l’action des gouvernements des pays voisins ainsi que celle des organisations régionales et internationales;
3. se félicite de l’enveloppe de 31 millions d’euros débloquée par l’Union pour financer l’aide humanitaire en Amérique latine et aux Caraïbes, notamment des 6 millions d’euros alloués à la Colombie et des 2 millions d’euros supplémentaires destinés aux personnes touchées par la crise au Venezuela, sans oublier les 5 millions d’euros alloués aux activités de prévention des conflits aux frontières du Brésil et de la Colombie, au moyen de l’instrument contribuant à la stabilité et à la paix (IcSP); se félicite par ailleurs de l’annonce, par la Commission, d’une enveloppe de 35,1 millions d’euros pour l’aide d’urgence et l’aide au développement en vue de soutenir la population vénézuélienne et les pays voisins touchés par la crise;
4. invite les autorités nationales et locales des pays voisins à rester constamment attentives à l’évolution de la situation afin de prévenir toute tension entre les populations locales et les réfugiés vénézuéliens qui affluent; demande en particulier qu’elles surveillent activement la situation afin de prévenir toute regain de xénophobie;
5. est particulièrement préoccupé par le nombre important d’enfants non accompagnés qui traversent les frontières et salue les efforts déployés par les autorités colombiennes, les organisations internationales et les communautés religieuses pour les nourrir, pour prendre soin de leur santé et pour les intégrer dans le système éducatif; invite les autorités nationales et locales à intensifier leurs efforts dans ce domaine;
6. s’inquiète de la généralisation du travail forcé et du développement de la prostitution forcée dans certaines régions frontalières et demande aux autorités colombiennes de mettre en œuvre des actions visant à mettre progressivement fin à ces pratiques et à accorder aux migrants vénézuéliens des emplois décents et une intégration complète sur le marché du travail;
7. demande aux autorités nationales et locales des pays voisins de mettre en place des mesures spéciales permettant de répondre à la situation particulière des peuples autochtones binationaux vivant dans les régions frontalières;
8. dénonce l'aggravation de la crise humanitaire au Venezuela, la réapparition de maladies telles que la rougeole, le paludisme et la diphtérie, la privation des droits fondamentaux que sont le droit à l'alimentation et à l’éducation ou l'accès aux médicaments et aux services élémentaires de santé, ainsi que le manque de travail décent pour la population vénézuélienne;
9. invite instamment les autorités vénézuéliennes à reconnaître la crise humanitaire en cours, à empêcher que la situation ne se détériore ultérieurement et à encourager les solutions politiques et économiques pour garantir la sécurité de toute la population civile ainsi que la stabilité du pays et de la région;
10. demande avec force aux autorités vénézuéliennes de mettre immédiatement en place des mesures visant à garantir les droits de l’homme du peuple vénézuélien, en particulier le droit à l'alimentation, le droit à la santé et le droit à des conditions de vie dignes;
11. presse les autorités vénézuéliennes d’autoriser de toute urgence l’acheminement sans entrave de l’aide humanitaire dans le pays et de permettre l’accès des organisations internationales qui souhaitent venir en aide à tous les pans affectés de la société afin d’éviter ainsi l’aggravation de la crise humanitaire et de santé publique; demande d’apporter rapidement une réponse à court terme permettant de faire face à la malnutrition des groupes les plus vulnérables que sont notamment les enfants;
12. rappelle que toute sanction adoptée par la communauté internationale se doit d’être ciblée et réversible et ne pas nuire de quelque manière que ce soit à la population vénézuélienne;
13. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, à la vice-présidente de la Commission et haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, au gouvernement et à l’Assemblée nationale de la République bolivarienne du Venezuela, au gouvernement et au Congrès de la République de Colombie, à l’Assemblée parlementaire euro-latino-américaine et au secrétaire général de l’Organisation des États américains.