Proposition de résolution - B8-0474/2018/REV1Proposition de résolution
B8-0474/2018/REV1

PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur la contribution de l’Union européenne à l’élaboration d’un instrument contraignant des Nations unies pour réglementer les activités des sociétés transnationales et autres entreprises à caractéristiques transnationales au regard des droits de l’homme

2.10.2018 - (2018/2763(RSP))

déposée à la suite des questions avec demande de réponse orale B8‑0402/2018, B8‑0403/2018 et B8-0404/2018
conformément à l’article 128, paragraphe 5, du règlement intérieur

Linda McAvan, Elena Valenciano, Bernd Lange, Arne Lietz au nom du groupe S&D
Louis Michel, Marietje Schaake au nom du groupe ALDE
Lola Sánchez Caldentey, Helmut Scholz, Anne‑Marie Mineur, Miguel Urbán Crespo, Tania González Peñas, Estefanía Torres Martínez, Xabier Benito Ziluaga, Marie‑Pierre Vieu, Patrick Le Hyaric, Martina Anderson, Lynn Boylan, Matt Carthy, Liadh Ní Riada, Paloma López Bermejo, Luke Ming Flanagan, Dimitrios Papadimoulis, Kostadinka Kuneva, Stelios Kouloglou, Rina Ronja Kari, Younous Omarjee, Barbara Spinelli, Merja Kyllönen, Marie‑Christine Vergiat au nom du groupe GUE/NGL
Judith Sargentini, Heidi Hautala au nom du groupe Verts/ALE
Ignazio Corrao, Fabio Massimo Castaldo, Isabella Adinolfi au nom du groupe EFDD

Procédure : 2018/2763(RSP)
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B8-0474/2018
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B8-0474/2018
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B8‑0474/2018/REV.

Résolution du Parlement européen sur la contribution de l’Union européenne à l’élaboration d’un instrument contraignant des Nations unies pour réglementer les activités des sociétés transnationales et autres entreprises à caractéristiques transnationales au regard des droits de l’homme

(2018/2763(RSP))

Le Parlement européen,

–  vu les articles 2, 3, 21 et 23 du traité sur l’Union européenne (traité UE),

–  vu sa résolution du 5 juillet 2016 sur la mise en œuvre des recommandations du Parlement de 2010 sur les normes sociales et environnementales, les droits de l’homme et la responsabilité des entreprises[1],

–  vu sa résolution du 30 mai 2018 sur le rapport annuel sur la mise en œuvre de la politique commerciale commune[2],

–  vu les articles 207 et 208 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (traité FUE),

–  vu le cadre stratégique de l’Union européenne en matière de droits de l’homme et de démocratie, tel qu’adopté par le Conseil des affaires étrangères le 25 juin 2012, et le plan d’action de l’Union européenne en faveur des droits de l’homme et de la démocratie pour la période 2015-2019, adopté par le Conseil le 20 juillet 2015,

–  vu les principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme (PDNU), approuvés par le Conseil des droits de l’homme des Nations unies dans sa résolution 17/4 du 16 juin 2011,

–  vu la stratégie de la Commission intitulée «Le commerce pour tous»,

–  vu les guides sectoriels de la Commission sur la mise en œuvre des PDNU[3],

–  vu le document de travail des services de la Commission du 14 juillet 2015 sur l’état d’avancement de la mise en œuvre des principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme (SWD(2015)0144),

–  vu l’avis de l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA) sur l’amélioration de l’accès aux voies de recours dans les domaines des droits de l’homme et des entreprises au niveau de l’Union[4],

  vu le document informel des services de la Commission intitulé «Analyse et perspectives d’amélioration de la mise en œuvre et de l’application des chapitres relatifs au commerce et au développement durable dans les accords de libre-échange de l’Union européenne»,

–  vu l’Alliance pour un commerce sans torture, lancée le 18 septembre 2017 lors de l’Assemblée générale des Nations unies,

–  vu la résolution 26/9 du Conseil des droits de l’homme des Nations unies du 26 juin 2014 par laquelle ce dernier «décide de créer un groupe de travail intergouvernemental à composition non limitée sur les sociétés transnationales et autres entreprises et les droits de l’homme, qui sera chargé d’élaborer un instrument international juridiquement contraignant pour réglementer, dans le cadre du droit international des droits de l’homme, les activités des sociétés transnationales et autres entreprises»,

–  vu l’observation générale no 24 (2017) du Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations unies sur les obligations des États en vertu du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels dans le contexte des activités des entreprises (E/C.12/GC/24),

–  vu les principes de Maastricht relatifs aux obligations extraterritoriales des États dans le domaine des droits économiques, sociaux et culturels[5],

–  vu le pacte mondial des Nations unies[6],

–  vu les principes directeurs de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) à l’intention des entreprises multinationales,

–  vu la déclaration de principes tripartite sur les entreprises multinationales et la politique sociale de l’Organisation internationale du travail, révisée en 2017,

–  vu le guide de l’OCDE sur le devoir de diligence dans le secteur de l’habillement et de la chaussure,

–  vu les principes régissant les entreprises dans le domaine des droits de l’enfant, établis par l’Unicef,

–  vu les conclusions du Conseil du 20 juin 2016 sur les entreprises et les droits de l’homme,

–  vu les lignes directrices relatives à la responsabilité sociétale (ISO 26000),

–  vu le guide de l’OCDE intitulé «Due Diligence Guidance for Responsible Business Conduct» (guide sur le devoir de vigilance pour la conduite responsable des entreprises),

–  vu le règlement (UE) no 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale[7],

–  vu la directive 2014/95/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2014 modifiant la directive 2013/34/UE en ce qui concerne la publication d’informations non financières et d’informations relatives à la diversité par certaines grandes sociétés et certains groupes[8],

–  vu le règlement (UE) 2017/821 du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2017 fixant des obligations liées au devoir de diligence à l’égard de la chaîne d’approvisionnement pour les importateurs de l’Union qui importent de l’étain, du tantale et du tungstène, leurs minerais et de l’or provenant de zones de conflit ou à haut risque[9],

–  vu la recommandation du Conseil de l’Europe à ses États membres sur les droits de l’homme et les entreprises, adoptée le 2 mars 2016,

–  vu sa résolution du 13 mars 2018 sur l’égalité des genres dans les accords commerciaux de l’Union[10],

–  vu sa résolution du 13 décembre 2017 sur le rapport annuel de 2016 sur les droits de l’homme et la démocratie dans le monde et sur la politique de l’Union européenne en la matière[11],

–  vu sa résolution du 16 novembre 2017 sur la stratégie UE-Afrique: un coup d’accélérateur au développement[12],

–  vu sa résolution du 27 avril 2017 sur l’initiative phare de l’Union pour le secteur de la confection[13],

–  vu sa résolution du 14 février 2017 sur la révision du consensus européen pour le développement[14],

–  vu le rapport sur les répercussions du commerce international et des politiques commerciales de l’UE sur les chaines de valeurs mondiales,

–  vu le règlement (UE) n° 995/2010 du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2010 établissant les obligations des opérateurs qui mettent du bois et des produits dérivés sur le marché[15],

–  vu sa résolution du 25 novembre 2010 sur la responsabilité sociale des entreprises dans les accords commerciaux internationaux[16],

–  vu sa résolution du 14 décembre 2016 concernant le rapport annuel sur les droits de l’homme et la démocratie dans le monde, et la politique de l’Union européenne pour 2015[17],

–  vu sa résolution du 22 novembre 2016 sur le renforcement de l’efficacité de la coopération au développement[18],

–  vu sa résolution du 25 octobre 2016 sur la responsabilité des entreprises dans les violations graves des droits de l’homme dans les pays tiers[19],

–  vu sa résolution du 5 juillet 2016 sur la lutte contre la traite des êtres humains dans les relations extérieures de l’Union[20],

–  vu sa résolution du 14 avril 2016 sur le secteur privé et le développement[21],

–  vu sa résolution du 17 décembre 2015 sur le rapport annuel 2014 sur les droits de l’homme et la démocratie dans le monde et la politique de l’Union européenne en la matière[22],

–  vu l’étude intitulée «Mise en œuvre des principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme» demandée par sa sous-commission «Droits de l’homme»[23],

–  vu les questions à la vice-présidente de la Commission et haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, à la Commission et au Conseil sur la contribution de l’Union à la mise en place d’un instrument contraignant des Nations unies pour réglementer les activités des sociétés transnationales et autres entreprises à caractéristiques transnationales au regard des droits de l’homme (O-000074/2018 – B8‑0402/2018, O-000075/2018 – B8-0403/2018 et O-000078/2018 – B8‑0404/2018),

–  vu la proposition de résolution de la commission du développement,

–  vu l’article 128, paragraphe 5, et l’article 123, paragraphe 2, de son règlement,

A.  considérant que l’Union est fondée sur les valeurs de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d’égalité, de l’état de droit ainsi que de respect des droits de l’homme; que son action sur la scène internationale (y compris sa politique de développement et sa politique commerciale) doit être guidée par ces principes et doit être cohérente avec le principe de cohérence des politiques au service du développement (CPD), tel que consacré par l’article 208 du traité de Lisbonne; que, conformément à l’article 208 du traité FUE, le principe de CPD doit être respecté dans toutes les actions extérieures de l’Union;

B.  considérant que l’Union européenne est à la fois une puissance normative et une puissance économique; qu’à ce titre, elle doit se positionner en tant que chef de file dans la diffusion des bonnes pratiques et dans l’élaboration des normes mondiales;

C.  considérant que la mise en œuvre de l’Agenda 2030 implique que le développement économique aille de pair avec la justice sociale, la bonne gouvernance, le respect des droits de l’homme, y compris les droits sociaux et le droit à la dignité humaine et à la liberté pour tous, ainsi qu’avec normes rigoureuses en matière de travail et d’environnement; que le développement durable, le commerce et les droits de l’homme peuvent avoir une incidence les uns sur les autres et se renforcer mutuellement;

D.  considérant que les États ont l’obligation internationale de prévenir les violations des droits de l’homme commises sur leur territoire ou sous leur juridiction, qu’elles soient le fait d’individus, de groupes ou d’organisations privées telles que des entreprises, et de prévoir les moyens juridiques appropriés pour y remédier;

E.  considérant que le devoir de diligence est une notion reprise dans les principes directeurs de l’OCDE à l'intention des entreprises multinationales[24];

F.  considérant que les États devraient honorer leurs obligations en matière de droits de l’homme sur leur territoire et/ou dans leur juridiction; que les États devraient énoncer clairement que l’obligation de protéger implique de réglementer de sorte que toutes les entreprises établies sur leur territoire et/ou placées sous leur juridiction, respectent les droits de l’homme dans toutes leurs activités, y compris dans celles de leurs filiales, de leurs sociétés dépendantes et des entités intégrées à leur chaîne d’approvisionnement dans le monde entier;

G.  considérant que les principes directeurs des Nations unies sur les entreprises et les droits de l’homme (PDNU), approuvés par consensus par le Conseil des droits de l’homme, restent le cadre faisant autorité pour prévenir et résorber le risque d’effets négatifs sur les droits de l’homme dans les activités des entreprises, et que l’étude de 2017 commandée par la sous-commission des droits de l’homme du Parlement et intitulée «Application des principes directeurs des Nations unies sur les droits de l’homme et les entreprises» démontre clairement que les États membres de l’Union sont, dans le contexte mondial, les plus avancés dans l’application des PDNU, dans la mesure où ils ont adopté le plus grand nombre de programmes d’action nationaux ou sont en voie de le faire;

H.  considérant que les PDNU s’appliquent à tous les États membres et à toutes les entreprises, transnationales ou non, indépendamment de leur taille, de leur secteur, de leur situation géographique, de leur actionnariat et de leur structure, et reposent sur les trois piliers du cadre de référence «protéger, respecter et réparer» des Nations unies, à savoir: 1) l’obligation des États de protéger lorsque des tiers, y compris des entreprises, portent atteinte aux droits de l’homme, 2) la responsabilité des entreprises de respecter les droits de l’homme; 3) un meilleur accès des victimes à un recours effectif, judiciaire ou non; que, bien que les PDNU ne soient pas juridiquement contraignants, ils sont largement reconnus et soutenus, et servent de base à des stratégies à l’égard des entreprises et des droits de l’homme au niveau international, ainsi qu’à la reconnaissance des éléments suivants: les obligations actuelles des États de respecter, protéger et faire appliquer les droits de l’homme et les libertés fondamentales; le rôle des entreprises en tant qu’organes spécialisés de la société remplissant des fonctions particulières, tenus de se conformer à toutes les lois applicables et de respecter les droits de l’homme; la nécessité d’associer les droits et devoirs à des mécanismes de recours adaptés et effectifs en cas de violation; qu’il est avéré que l’application des PDNU s’accompagne d’une diminution des atteintes aux droits de l’homme liées aux activités des entreprises;

I.  considérant que le pacte mondial des Nations unies demande aux entreprises de prendre en compte, de soutenir et de mettre en œuvre, dans leur sphère d’influence, un ensemble de valeurs fondamentales en matière de droits de l’homme, de normes du travail, d’environnement et de lutte contre la corruption, ainsi que de s’engager volontairement à respecter ces valeurs et à les intégrer dans leurs opérations commerciales;

J.  considérant que les entreprises comptent parmi les acteurs les plus importants de la mondialisation économique, des services financiers et du commerce international et qu’elles sont tenues de respecter l’ensemble de la législation applicable et des traités internationaux en vigueur ainsi que les droits de l’homme; que ces entreprises et les sociétés nationales peuvent parfois commettre des violations des droits de l’homme ou y contribuer, portant ainsi atteinte aux droits de groupes vulnérables tels que les minorités, les peuples autochtones, les femmes et les enfants, ou participant à l’apparition de problèmes environnementaux; qu’elles peuvent également avoir un rôle important à jouer en encourageant la promotion des droits de l’homme, de la démocratie, des normes environnementales et de la responsabilité sociale des entreprises;

K.  considérant qu’il existe un déséquilibre entre les droits et les obligations des sociétés transnationales, en particulier dans les traités de protection des investissements, au titre desquels les investisseurs se voient conférer des droits très larges, comme le «traitement juste et équitable», qui ne sont pas nécessairement compensés par des obligations contraignantes et exécutoires relatives au respect des droits de l’homme ou du droit du travail et de l’environnement sur l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement;

L.  qu’il est avéré qu’à long terme, le fait que des entreprises européennes opèrent au niveau mondial et montrent l’exemple en adoptant une culture d’entreprise non discriminatoire se répercute de manière positive sur les droits de l’homme;

M.  considérant que l’Union, au regard de la cohérence interne et externe de ses politiques, a joué un rôle de premier plan dans la négociation et la mise en œuvre de plusieurs initiatives en faveur d’une responsabilité mondiale qui vont de pair avec la promotion et le respect de normes internationales relatives au commerce et aux droits de l’homme; que l’Union et ses États membres se sont également engagés à mettre en œuvre plusieurs instruments, en particulier les PDNU de 2011 et la recommandation du Conseil de l’Europe de 2016 sur les droits de l’homme et les entreprises;

N.  considérant que ces dernières années, l’Union et ses États membres ont entamé l’adoption d’une législation visant à renforcer la responsabilité des entreprises et à intégrer des éléments relatifs au devoir de diligence en matière de droits de l’homme dans la législation; que ces mesures contribuent aujourd’hui à fixer des normes mondiales, mais qu’elles peuvent encore être améliorées, par exemple le règlement de l’Union sur les minéraux de guerre et la directive de l’Union sur les rapports non financiers ainsi que le règlement sur le bois; que le Parlement a demandé que cette législation soit encore améliorée dans d’autres secteurs, notamment celui de l’habillement; que les initiatives internationales dans ce domaine pourraient consolider les initiatives nationales et régionales et créer des conditions de concurrence équitables;

O.  considérant que les victimes de violations des droits de l’homme impliquant des entreprises européennes peuvent demander à obtenir réparation auprès des juridictions nationales de l’Union, conformément au règlement (UE) no 1215/2012; que les dispositions de ce règlement requièrent un cadre international renforcé afin d’améliorer leur efficacité à l’égard des parties concernées, tout en garantissant des conditions de concurrence équitables entre les entreprises domiciliées dans l’Union et celles qui ne le sont pas;

P.  considérant qu’une vision globale au niveau mondial de la responsabilité des entreprises en matière de violations des droits de l’homme fait toujours défaut; que de nombreux obstacles empêchent les victimes de violations des droits de l’homme impliquant des entreprises transnationales de bénéficier de voies de recours, y compris juridiques, ou de garanties les assurant que ces actes ne se reproduiront pas; que ces obstacles à l’accès aux voies de recours constituent une autre violation grave des droits de l’homme; qu’une démarche globale apporterait une sécurité juridique aux entreprises et aux citoyens, dans le contexte de la prolifération des initiatives nationales relatives au devoir de diligence;

Q.  considérant que l’inégalité entre les sexes expose souvent les femmes, en particulier, à des violations des droits de l’homme et à des difficultés particulières lorsqu’elles tentent d’accéder à des voies de recours;

R.  considérant que l’Agence des droits fondamentaux (FRA) a indiqué dans son avis de 2017 que l’on pourrait faire davantage pour garantir un recours effectif contre les violations des droits de l’homme dans le domaine commercial dans l’Union et à l’extérieur, notamment en offrant aux victimes davantage d’aide pour accéder aux tribunaux et la possibilité d’intenter des actions collectives, en facilitant la charge de la preuve et en incitant les entreprises, y compris les sociétés mères, à respecter le devoir de diligence en matière de droits de l’homme dans leurs filiales ou chaînes d’approvisionnement;

S.  considérant que la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne impose des obligations à la fois nationales et extraterritoriales aux États pour ce qui est de l’accès à des voies de recours judiciaires qu’ils sont tenus de donner aux victimes de violations des droits de l’homme;

T.  considérant que des négociations sont actuellement en cours à l’ONU sur la mise en place d’un système de responsabilité des entreprises pour les violations des droits de l’homme qu’elles commettent, au sein du groupe de travail intergouvernemental (GTI) à composition non limitée sur les sociétés transnationales et autres entreprises commerciales en matière de droits de l’homme, créé par une résolution du Conseil des droits de l’homme à l’Assemblée générale des Nations unies adoptée en 2014; que tant l’Union européenne que ses États membres jouent un rôle au sein du GTI; que la Commission n’est pas mandatée par le Conseil pour mener des négociations au nom de l’Union européenne concernant sa participation audit groupe;

1.  relève que la mondialisation et l’internationalisation croissante des activités commerciales et des chaînes d’approvisionnement renforcent l’importance du rôle des entreprises pour garantir le respect des droits de l’homme et ont d’ores et déjà créé une situation dans laquelle les normes, les règles et la coopération internationales sont essentielles pour éviter toute violation des droits de l’homme dans des pays tiers;

2.  est d’avis que les sociétés transnationales devraient s’abstenir de financer ou d’entreprendre des activités, commerciales ou non, susceptibles d’alimenter le radicalisme ou l’extrémisme, en particulier lorsqu’elles impliquent la manipulation d’une croyance religieuse, ainsi que de tout soutien direct ou indirect à tout groupe encourageant, préconisant ou justifiant la violence;

3.  est fermement convaincu que le secteur privé devrait être étroitement associé à la réalisation des objectifs de développement durable et pour la mobilisation de ressources supplémentaires en faveur du développement; souligne que son rôle englobe le respect des principes d’efficacité du développement et des principes de la responsabilité des entreprises du début à la fin des projets;

4.  rappelle que le devoir de diligence est un élément essentiel du deuxième volet des principes directeurs des Nations unies relatif à la responsabilité des entreprises et au respect des droits de l’homme; souligne que des pratiques efficaces répondant au devoir de diligence peuvent également contribuer à l’amélioration de l’accès à des voies de recours; encourage l’Union et ses États membres à continuer à travailler en étroite collaboration avec les entreprises et les sociétés ainsi que les autres parties prenantes, à savoir les organisations de la société civile et les syndicats, afin de tendre à l’adoption d’un cadre cohérent établissant un devoir de diligence en matière de droits de l’homme pour les entreprises;

5.  rappelle que, s’il est bien conçu et adapté au contexte local, le processus d’élaboration des plans d’action nationaux peut contribuer à garantir non seulement une mise en œuvre efficace des PDNU, mais aussi le renforcement des mécanismes nationaux de protection des droits de l’homme;

6.  réaffirme son souhait de voir les représentants de l’Union défendre sans relâche la mise en œuvre des PDNU et d’autres normes internationales sur la responsabilité sociale des entreprises au cours des dialogues sur les droits de l’homme menés avec des pays tiers;

7.  soutient fermement la mise en œuvre intégrale, à l’intérieur et à l’extérieur de l’Union, des PDNU approuvés à l’unanimité par le Conseil en juin 2011, et invite l’Union et les États membres à prendre des mesures à cet égard, notamment en définissant clairement les attentes des gouvernements et des entreprises de tous types pour l’application rapide, effective et totale desdits principes; rappelle que les PDNU peuvent être complétés par des initiatives parallèles contraignantes afin de combler leurs lacunes;

8.  réaffirme que les sociétés transnationales devraient être tenues responsables des violations directes et indirectes des droits de l’homme, y compris des violations des sanctions; considère que les PDNU peuvent contribuer à mettre fin à l’impunité; rappelle que la mauvaise application des PDNU, comme dans le cas d’autres normes reconnues au niveau international, est en partie attribuée à leur caractère non contraignant;

9.  note avec préoccupation que de nombreux obstacles subsistent en ce qui concerne l’accès aux recours judiciaires, en particulier dans le cas des sociétés transnationales, en raison, par exemple, des difficultés rencontrées par les victimes pour déterminer le tribunal compétent, de l’absence de codification de certaines violations des droits de l’homme dans le code pénal ou de la corruption, ce qui peut compromettre les procédures judiciaires dans les pays en développement; rappelle que l’accès à des voies appropriées de recours non judiciaires revêt également une importance capitale, mais qu’il fait souvent défaut; invite les gouvernements nationaux à redoubler d’efforts pour garantir par des moyens appropriés, notamment judiciaires, administratifs ou législatifs, l’accès à une voie de recours effectif pour les victimes d’atteintes aux droits de l’homme perpétrées sur leur territoire et/ou relevant de leur juridiction;

10.  réaffirme qu’il est urgent d’agir de manière efficace et cohérente à tous les niveaux, notamment aux niveaux national, européen et international, afin de lutter efficacement contre les violations des droits de l’homme commises par les sociétés transnationales, de permettre l’accès à des recours, de résoudre les problèmes juridiques résultant du caractère transnational des activités des entreprises et des sociétés transnationales et de la complexité croissante des chaînes de valeur mondiales, ainsi que de la dimension extraterritoriale des sociétés multinationales, et de déterminer avec certitude les responsabilités en la matière; réaffirme la nécessité de mettre pleinement en œuvre les obligations extraterritoriales des États, conformément aux principes de Maastricht, en s’appuyant sur les différents instruments du Conseil de l’Europe, en particulier sur la Convention européenne des droits de l’homme; exhorte l’Union, de manière plus générale, à prendre des initiatives afin d’améliorer l’accès aux voies de recours dans les affaires extraterritoriales, conformément aux recommandations de la FRA dans son avis de 2017;

11.  réaffirme la primauté des droits de l’homme dans le droit international, conformément à l’article 103 de la charte des Nations unies, et la nécessité de la consolider grâce à un système clair dans lequel les obligations en matière de droits de l’homme priment effectivement sur les autres types d’obligations contradictoires, et qu'il convient de prévoir des mécanismes appropriés de respect des droits de l’homme, de surveillance et de recours, associés à des peines et à des indemnités appropriées en cas de violations; souligne combien il importe de satisfaire à cette nécessité pour venir à bout des déséquilibres liés à la mondialisation et pour placer les droits des personnes et la planète en tête des priorités; souligne que la coordination, l’échange d’informations et de bonnes pratiques permettent de contribuer positivement aux initiatives prises par des entreprises qui ont décidé de respecter les droits de l’homme, les normes sociales et environnementales;

12.  réaffirme que les entreprises qui s’engagent sur le voie de la responsabilité sociale des entreprises le font selon leur propre initiative, en tenant compte à la fois des coûts économiques et des effets positifs sur la perception de leurs activités par le public, et que si la participation présente un caractère volontaire, elle risque de créer une concurrence déloyale pour ceux qui choisissent de respecter les normes internationales; qu’elle est insuffisante pour garantir, dans le cadre de la mise en œuvre du devoir de vigilance, une pleine conformité avec les normes et obligations internationales;

13.  salue à cet égard les travaux engagés aux Nations unies par le GTI afin de créer un instrument contraignant des Nations unies pour réglementer les activités des sociétés transnationales et autres entreprises à caractéristiques transnationales au regard des droits de l’homme, et estime qu’il s’agit d’un progrès nécessaire dans la promotion et la protection des droits de l’homme;

14.  souligne que les négociations d’un traité contraignant doivent s’appuyer sur le cadre des PDNU et comprendre, si possible, les éléments suivants: la définition des obligations imposées en matière de devoir de diligence aux sociétés transnationales et autres entreprises à caractéristiques transnationales, y compris à leurs filiales, la reconnaissance des obligations extraterritoriales des États en matière de droits de l’homme, la reconnaissance de la responsabilité pénale des entreprises, des mécanismes de coordination et de coopération entre États en matière d’enquêtes, de poursuites et de mesures d’exécution dans les affaires transfrontalières, et la création de mécanismes judiciaires et non judiciaires internationaux pour la surveillance et les mesures d’exécution; est d’avis que le nouvel instrument devrait imposer aux États l’obligation d’adopter des mesures réglementaires pour que les entreprises appliquent des politiques et des procédures relatives au devoir de diligence en matière de droits de l’homme, et propose de faire appliquer cette obligation en contraignant les entreprises à rendre des comptes soit dans la juridiction au sein de laquelle les dommages ont été commis, soit dans celle dont la société mère fait partie ou est principalement présente;

15.  invite les États membres des Nations unies à protéger les négociations contre les intérêts commerciaux et autres, suivant l’exemple de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et de l’article 5, paragraphe 3, de la Convention-cadre pour la lutte antitabac de l’OMS, qui comporte de solides règles éthiques pour prévenir les conflits d’intérêts et le lobbying contraire à l’éthique, et prévoit la transparence totale des interactions du secteur avec les parties aux négociations;

16.  rappelle la nécessité d’adopter une démarche soucieuse d’équité entre les sexes tout au long du processus et de prêter une attention particulière aux groupes vulnérables, tels que les peuples autochtones et les enfants;

17.  rappelle que le Parlement a exprimé son soutien sans équivoque au processus multilatéral du GTI dans huit résolutions;

18.  souligne qu’il importe que l’Union et ses États membres participent activement à ce processus intergouvernemental par la création d’un groupe de travail comprenant tous les services compétents de la Commission, le SEAE, le groupe de travail du Conseil sur les droits de l’homme (COHOM) et les commissions compétentes du Parlement, conformément au principe de CPD;

19.  réitère une fois de plus son appel à l’Union et à ses États membres pour qu’ils s’engagent véritablement et de manière constructive dans ces négociations et dans le processus intergouvernemental aux fins du mandat du GTI; souligne qu’il est absolument essentiel que l’Union participe de manière constructive à l’élaboration d’un traité contraignant efficace qui engage véritablement la responsabilité des entreprises pour les violations des droits de l’homme qu’elles commettent et les problèmes qui s’y rattachent;

20.  demande aux États membres des Nations unies de veiller à ce que les négociations conduisant au traité se déroulent de manière transparente avec la consultation d’un grand nombre de titulaires de droits que ce traité pourrait concerner, y compris des organisations de la société civile et des représentants de victimes; invite l’Union et ses États membres à intégrer, dans la position qu’ils adopteront dans le cadre des négociations, une vision tenant véritablement compte de la dimension de genre;

21.  demande à l’Union de s’assurer que toute révision ou document de stratégie futur lié au cadre stratégique de l’Union et au plan d’action en faveur des droits de l’homme et de la démocratie comporte des références à des objectifs clairs pour la participation de l’Union aux négociations du traité aux Nations unies;

22.  décide de continuer à suivre de près le processus de négociation du GTI à composition non limitée sur les sociétés transnationales et autres entreprises commerciales en matière de droits de l’homme;

23.  charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission et au Service européen pour l’action extérieure.

 

 

Dernière mise à jour: 3 octobre 2018
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